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EUCHITES

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les troubles qu ils suscitèrent parmi les fidèles, ne tardèrcnt-.pas à provoquer des mesures disciplinaires de la part des évêques.

3° Fin du ie siècle. — Leur première condamnation fut prononcée à Sidc, en Pamphylie, vers 390. Saint Amphilochius d’Iconium, en Lycaonie, l’ami de saint Basile et de saint Grégoire de Nazianze, y présidait un synode de vingt-cinq évêques contre l’hérésie dite des massaliens, euchites ou adelplaiens. Photius, Bibliolheca, cod. 52, P. G., t. ciii, col. 88. Ce nouveau nom d’adelphiens vient de celui de l’un de leurs principaux chefs, le vieil Adelphius ; celui-ci, en effet, avec d’autres personnages de marque, moins élevés en dignité sans doute, mais déjà connus à cette époque, tels que Sabas, Dadoès, Hermas et Siméon, marchait à leur tête. Théodoret, H. E., iv, 10, P. G., t. Lxxxii, col. 1144 ; Hæret. fab., iv, 11, P. G., t. Lxxxiii, col. 432. Il n'était pourtant ni moine ni clerc, tandis que Sabas, surnommé l’Eunuque parce qu’il s'était mutilé lui-même, se donnait le titre et portait l’habit de moine. Le synode de Sidé envoya à Flavien d’Antioche une lettre synodale contenant le récit des décisions prises contre ces sectaires. Flavien, qui avait aussi à se plaindre de leur présence turbulente dans son diocèse, ainsi prévenu, voulut prendre également des mesures disciplinaires, mais après s'être rendu compte par lui-même des mœurs de la secte. Dans ce but, il envoya à Édesse un groupe de moines, qui ramena quelques massaliens, entre autres le célèbre Adelphius. Interrogés par l'évêque pour savoir à quoi s’en tenir sur les bruits fâcheux qui couraient sur leur compte, ceux-ci nièrent tout et protestèrent que les erreurs et les crimes cju’on leur reprochait étaient de pures calomnies. Flavien eut alors recours à la ruse et fit semblant de vouloir s’instruire comme un futur adepte. Blâmant donc la conduite de ses émissaires, trop jeunes encore, il dit à Adelphius : « Nous qui avons longtemps vécu, nous connaissons mieux la nature de l’homme et tous les artifices du démon, et nous savons par expérience la conduite de la grâce. Ces jeunes gens qui n’ont pas examiné tout cela ne peuvent supporter les discours spirituels. Dites-moi donc comment vous expliquez que l’esprit malin se reth’e et que le Saint-Esprit se communique. » Adelphius, flatté par des procédés aussi engageants et croyant avoir affaire à un futur prosélyte, s’expliqua clairement et révéla le fond secret de sa doctrine. Dès qu’il eut fini, Flavien répliqua : « Homme vieilli dans le crime, tu es condamné par ta propre bouche ; tes lèvres ont porté témoignage contre toi-même. » Rassemblant aussitôt en synode trente de ses prêtres et diacres, et assisté de trois évêques de passage, Bize de Séleucie, Samos, dont l'évêché n’est pas marqué, et Maruthas de Sopharène, le patriarche jugea Adelphius et ses compagnons. Ceux-ci eurent beau demander à être admis à la pénitence, Flavien passa outre et les condamna ; il savait le peu de fond qu’on pouvait faire sur eux, la facilité qu’ils avaient à mentir effrontément et les relations secrètes qu’ils entretenaient par lettres avec ceux de leur secte qu’ils avaient préalablement anathématiscs ; en conséquence, il les fit expulser de la Syrie et fit part de ses décisions aux évêques de l’Osrhoène, qui l’en remercièrent par une lettre d’approbation. Théodoret, loc. cil. ; Pliotius, loc. cil.

Or, la Lycaonie, la Pamphylie et la Syrie n’avaient pas été les seules provinces contaminées par la secte massalienne, plusieurs couvents de l’Arménie Mineure avaient été également envahis. Un évêque même s'était laissé plus ou moins circonvenir par elle. Flavien s’en émut et écrivit deux fois à cet évêque, lui reprochant notamment dans sa seconde lettre la faveur qu’il avait accordée à de pareils hérétiques.

Tel ne fut pas le cas de l'évêque de Mélitène, le zélé Letoius, qui s’informa d’abord auprès du patriarche d’Antioche de ce que c'était que cette hérésie et qui, une fois renseigné par les actes du synode d’Antioche, n’hésita pas à mettre le feu aux monastères ou plutôt « aux tanières » de ces sectaires et chassa ainsi les loups de sa bergerie ; puis il écrivit contre la secte. Théodoret, Hæret. fab., iv, 11, P. G., t. lxxxiii, col. 432 ; Photius, loc. cil., col. 89.

4° Première moilié du re siècle. — Ni les lettres épiscopales, ni les sentences synodales n’arrêtèrent la ditfusion et la propagande toujours plus grandes des massaliens. En Syrie, après la mort de Flavien († 404), ils étaient plus nombreux que jamais ; en Pamphylie, en Lycie et en Lycaonie, de même ; ils avaient déjà envahi la Cappadoce, et telle était la préoccupation qu’ils donnaient aux chefs des Églises qu’Atticus, patriarche de Constantinople, dut écrire contre eux et adressa une lettre au métropolitain de la Pamphyhe, Amphilochius de Sidé. A la mort d’Atticus, en 425, lors de la consécration de son successeur, Sisinnius († 427), celui-ci, de concert avec Théodote, patriarche d’Antioche, et les autres évêques présents à son sacre, écrivirent une lettre collective à Bérinien ou Béronicien de Pergé, à Amphilochius de Sidé et à tous les évêques de la Pamphylie. Dans cette lettre, l'évêque Néon proposait comme mesure disciplinaire de ne point faire grâce à quiconque, une fois anathématisé, se trouverait surpris de nouveau dans les liens de la secte, quand même il demanderait à faire rigoureusement pénitence, et de traiter aussi rigoureusement celui qui se permettrait dorénavant, fût-il évêque, de témoigner la moindre faveur aux euchites ou massaliens. Photius, loc. cil., col. 89. Une telle rigueur s’exphque quand on songe à l’extrême facilité avec laquelle ces sectaires s’entendaient à tout accepter, même la participation aux sacrements et les épreuves de la pénitence sans renoncer pour autant à leurs sentiments intimes, à leurs erreurs de doctrine et de morale. Il importait donc qu’ils ne rencontrassent pas le moindre témoignage de sjTnpathie de la part du clergé, car c’eût été les favoriser au lieu de travailler à leur suppression. Sisinnius mourut trop tôt pour mener à bien la campagne énergique qui s’annonçait ainsi. Il est vrai que son successeur, le fameux Nestorius, montra encore plus d'énergie. Dès le début de son épiscopat, il avait dit à Théodose le Jeune : « Avec moi, prince, terrassez les hérétiques, avec vous je terrasserai les Perses. » Socrate, H. E., VII, 29, P. G., t. Lxvii, col. 804. Il était donc tout disposé à faire place nette et à réduire à l’impuissance tous les hérétiques. Aussi obtint-il de l’empereur une loi sévère, celle du 30 mai 428, Cod. Iheod., 1. XVI, tit. V, leg. 65, où interdiction était faite aux euchites, massaliens ou enthousiastes de tenir aucune réunion, de faire aucune prière pubhque, soit dans les villes, soit à la campagne.

Survint bientôt après le 1II « concile œcuménique, tenu à Éphèse en 431. A la session VII « , Valérius d’Iconium et Amphilochius de Sidé prièrent les Pères de trancher la question des massaliens. Ils présentèrent la lettre synodale du synode de Constantinople, tenu six ans avant lors du sacre de Sisinnius, et un livre de cette secte, Y Ascétique, le premier dont l’existence nous est connue. La lettre fut approuvée et l’on décida que ceux qui feraient partie de cette secte ou seraient simplement soupçonnés d’en faire partie seraient sommés d’anathématiser par écrit les articles qu’on leur indiquerait ; que ceux qui souscriraient seraient maintenus dans leur état ; que ceux qui refuseraient seraient dégradés et même privés de la communion, s’ils étaient clercs, et anathématisés, s’ils étaient laïques ; et que les moines qui auraient été convaincus