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EUCHER — EUCIIITES


du v<e siècle, était issu d’une famille lyonnaise considérable. La forte éducation littéraire qu’il reçut, selon l’usage du temps, se i-econnaîtra dans ses écrits, qui refléteront sa familiarité avec les prosateurs et les poètes, Aulu-Gelle, Pline le Jeune, Symmaque, Prudence, Claudien. Mais d’abord, ses rares talents, fécondés par l'étude, lui avaient valu dans la société civile un rang éminent ; il était devenu sénateur. De son mariage avec la noble et pieuse Galla, saint Eucher eut deux fils, Uranius ou Veranius et Salonius, qu’il conduisit de bonne heure à Lérins, pour y être élevés dans le monastère, sous les yeux de l’abbé saint Honorât, par le moine saint Hilaire, le futur archevêque d’Arles, et qui, du vivant de leur père, seront promus à l'épiscopat, en Provence probablement. Eucher lui-même ira retrouver ses deux fds à Lérins, vers 422, et y embrassera la vie religieuse, du consentement de sa femme, qui entrera, de son côté, dans le cloître et s’y vouera sans retour au service de Dieu. Épris ensuite de l’amour d’une entière solitude, Eucher passera de l'île de Lérins dans celle de Léro, île Sainte-Marguerite, et s’v fera de cénobite anachorète. La renommée de ses vertus l'élèvera, malgré lui, en 434, sur le siège de Lyon. En 441, il prendra part au pr concile d’Orange, Jiisiinianensis ou Arausicana ! >, Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, Paris, 1908, t. ii, p. 431, et y signera, comme métropolitain, au nom de tous ses suffragants. Des autres détails de sa vie épiscopale on ne sait rien de précis ; on lui attribue l’honneur d’avoir fondé à Lyon mainte église et maint pieux institut. La date de sa mort n’est pas certaine ; les uns le font mourir en 449, les autres en 454 ; Tillemont et dom Rivet inclinent plutôt vers 450. La fête de saint Eucher se célèbre le 16 novembre.

IL Œuvres. — Les ouvrages et opuscules qui portent le nom de saint Eucher se partagent en trois classes. Il y en a d’authentiques, il y en a de suspects et discutables ; il y en a de sûrement apocryphes.

1° Œuvres aulhenliqæs. — 1. Les deux premiers opuscules de saint Eucher, deux lettres adressées par lui, l’une en 427 à son parent Valérien, i ?p/sfo/a parœnetica de conlemplu miindi et seecidaris philosopliiæ, P. L., t. L, col. 711-726, l’autre en 428 à saint Hilaire d’Arles, Epislola de lande eremi seu vitæ soliiariie, ibid., col. 701-712, expriment avec grâce et non sans enthousiasme l’amour de la retraite et de l’isolement avec Dieu.

2. Deux manuels d’herméneutique sacrée, étroitement rattachés entre eux et dédiés par l’auteur, celui-là, le Liber fornndarum spiritulis intelligenliæ, P. L., t. L, col. 727-772, à son fils Uranius ou Veranius, celui-ci, les Inslructiomim libri duo, ibid., col. 773-882, à son second fils Salonius, ont pris place dans la longue série des glossaires plus ou moins allégoriques du moyen âge. La vogue extrême que ces deux ouvrages, mais surtout les Formulée, ont eue dans les cloîtres de cette époque, a provoqué successivement des interpolations énormes. Les éditeurs modernes, J.-B. Pitra, Analecia sacra, 1884, t. ii, p. 511-569, et Fr, Pauly, Grazcr.-Progr., 1884, ont essayé de nous rendre le texte primitif des Formulée spirilalis intelligenliæ. Mais, en le publiant d’après le codex Sessorianus, qui paraît être du vie siècle, le cardinal Pitra s’est malheureusement avisé de publier à la fois une compilation sans valeur, où il croyait retrouver la fameuse Clef de Méliton et qu’il tenait pour la source d’où Eucher avait tiré son livre. Les citations scripturaires de saint Eucher sont empruntées pour la plupart à la Vulgate, sans exclusion cependant des versions antéhiéronymiennes. S. Berger, Bulkiin crilique, 1885, p. 243, paraît disposé à croire que l’archevêque de Lyon « a compilé ses Formules dans plusieurs auteurs.

et que les passages où la Vulgate est suivie sont de lui. » Cf. dom J. Chapmann, Notes on the early history of the Vulgate Gospels, Oxford, 1908, p. 173-177.

3. On a fortement contesté l’authenticité du récit du martyre de la légion thébéenne, Passio agaunensium martyrum, P. L., t. l, col. 827-832. Mais aujourd’hui, après l'étude de M. Stolle, Das Martyrium der thebàischen Legio, Brestau, 1891, la conviction de l’authenticité prévaut. Des dernières recherches d’ailleurs ressort l’historicité du fait en question. P. AUard, La persécution de Dioclétien et le triomphe de l'Église, Paris, 1890, t. i, p. 17-34 ; t. ii, p. 355-364 ; Funk, dans Theol. Quartalschrift, 1895, p. 171-172. Peut-être que l’archevêque de Lyon s’est contenté de retoucher un opuscule de date antérieure ; M. Wotke le tient pour probable, y ayant remarqué des locutions et des tournures de phrases qui lui semblent, sinon étrangères, du moins peu habituelles à la manière de saint Eucher. Corpus script, eccl. lat. de Vienne, t. xxxi, Prsef., p. XXII.

2° Œuvres suspectes. — 1. Dans le petit recueil des homélies attribuées à notre saint, P. L., t. L, col. 833868, l’apocryphe se mêle largement à l’authentique, sans qu’on puisse d’une main sûre démêler l’un d’avec l’autre. 2. Il s’est élevé des doutes sérieux sur la lettre Ad Faustum seu Faustinum de situ Judée urbisque hierosolymitanæ, laquelle manque dans Migne, comme aussi sur VExhortatio ad monachos duplex, P. L., t. L, col. 865-868.

3° Œuvres certainement apocryphes. — 1. Une lettre Ad Philonem, P. L., t. l, col. 1213-1214. 2. Deux abrégés des Institutions et des Conférences de Cassien, ibid., col. 867-894. 3. D’amples et savants commentaires sur la Genèse, col. 894-1048, et sur les livres des Rois, col. 1047-1208. "S

Le style de saint Eucher est, pour son temps, d’une pureté rare, qui rappelle l'âge d’or des lettres latines ; si le Liber formularum spirilalis intelltgentise fait exception, la faute en est sans doute au sujet. Mais enfin, piété et culture de l’esprit, saint Eucher figure avec éclat parmi les meilleurs écrivains de l'Église latine au ve siècle.

I. Éditions.

Les œuvres complètes d’Eucher.tant apocryphes qu’authentiques, ont été publiées ù Bâle, en 1531, par J.-Al. Brassicanus, et ont trouvé place dans la Magna bibliotheca Palriim, Cologne, t. v ci, p. 741-918 ; t. xv, p. 982-987 ; dans la Bibliotheca Pairum maxinui, Lyon, t. VI, p. 822-1011 ; t. XXVII, p. 180 sq. ; dans la Pairologie latine de Mignc, t. l, col. 701 sq. Voir Scliœnemaiin, Biblioth. Instar, lillerar. Pairum latin., dans P. L., t. L, col. 687-698. L'édition princeps de Paris, supérieure à celle de Brassicanus, est néanmoins tombée dans un oubli complet. M. Wotke a entrepris dans le Corpus de Vienne, 1894, t. xxxi, une édition vraiment scientifique des œuvres desaint Eucher. Oh retrouve la lettre Ad Faustum seu Faustinum, dans Geyer, Ilinera liierosolymilana. Vienne, 1898, p. 123-134. II. Travaux.

A. Mellier, De vita et scriplis S. Euclierii Lugdun. episcopi, Lyon, 1878 ; A. Guilloud, S. Eucher, Lérins et l'Église de Lyon au i » siècle, Lyon, 1881 ; FessleiJungmann, Inslitaliones palrologiiv, Inspruck, 1896, t. ii l>, p. 340 sq. ; Bardentiewer, Les Pères de l'Église, nouv. édit. franc., Paris, 1905, t. il, p. 464 sq.

P. Godet. EUCHITES, massahens ou messaliens. — I. Sources. II. Histoire. III. Erreurs de doctrine et de pratique.

I. Sources.

La meilleure source de renseignements sur la secte des cuchites serait vraisemblablement les deux seuls livres dont il est fait mention dans l’histoire, comme contenant leurs doctrines, l’un V Ascétique, 'Atrv.oTi/.ôç, d’un auteur inconnu, mais qui pourrait bien être Adelphius, l’autre le Testament, AtaOrixr), de Lampétius. Mais nous ne les possédons pas ; nous ignorons donc ce qu’ils contenaient intégralement et nous n’avons pas davantage