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FIN DU MONDE


vers. Mais le P. Stentrup n’ose pas, malgré l’opinion presque unanime des théologiens, adopter l’idée du repos absolu du ciel sidéral ; il en ignore les raisons. Il discute et rejette les arguments par lesquels saint Tliomas a essayé de prouver que sur la terre nouvelle il ne pourrait plus y avoir d’animaux, de plantes ni de corps mixtes ; l’opinion contraire ne lui paraît pas manquer de quelque probabilité et elle peut être soutenue par un théologien catholique. On ne pourrait plus enseigner l’opinion des scolastiques sur la persistance et la glorification des corps simples ou des quatre éléments. Du reste, les sources de la révélation ne nous apprennent rien sur la nature du monde renouvelé à la fm des siècles, et le théologien n’a rien à dire qu’il ne puisse confirmer par l’Écriture, la tradition ou la raison théologique.

Dans ses Queestiones de novissimis, Rome, 1902, p. 163, le P. Billot a dit quelques mots seulement de la fin du monde. Le jour du jugement est appelé regeneralio, Matth., xix, 28, parce qu’auront lieu alors la restauration de toutes choses et la nouvelle naissance de toutes les créatures, lorsque l’ordre qui régnait antérieiuement sera changé de fond en comble.

M. A. Tanquerey, Synopsis Iheologia ; dogmaticse specialis. De Deo remiineralore, § 2, n. 87, 8e édit., 1905, t. II, p. 744, est aussi bref : E variis Scripluræ locis colligunt Paires et theologi post conflagrationem mundi et judicium terrain innovandam esse. Il Pet., III, 13. In quo autem illa innovatio consistai incertum est, et hac de re theologi scicnliœqiie cultores libère disputare possunt. Si cette dernière affirmation est juste, la première me paraît incomplète, car le texte de saint Pierre ne parle pas seulement de la rénovation de la terre ; U parle aussi de celle du ciel, et j’ai montré précédemment, voir col. 25Il sq., qu’il ne s’agit pas seulement du ciel aérien, mais des cieux en général, et donc de la création entière.

Il demeure prouvé, en effet, que, d’après la révélation divine, interprétée par les Pères de l’Église et les théologiens catholiques, le monde actuel tout entier doit être, à la fin des temps, purifié, transformé et renouvelé par le feu. Sa rénovation ne sera pas une destruction ni une annihilation, mais une améhoration et une adaptation aux conditions des élus, béatifiés au ciel. La révélation ne nous apprend rien de certain sur la nature de la restauration finale du monde actuel, et par suite il est plus prudent de ne faire à ce sujet aucune conjecture, qui courrait risque de n’être pas vérifiée par l’événement.

IV.e :  ! seig.i ; me.t scientifique. — Il a peu de portée en une matière qui dépend exclusivement de la volonté divine et qui est du ressort strict de la révélation. Cependant, les savants ont cherché plusieurs fois à confirmer les données scripturaires sur la fin du monde. Ils ont reconnu la possibilité de la destruction du monde actuel par le feu, sans pouvoir aflirmer le fait futur. Si le phénomène se produit, ce sera par suite d’une catastrophe extraordinaire et par l’effet d’une cause accidentelle. Quelques-uns avaient pensé que le choc d’une comète suffirait à embraser la terre instantanément. Toutefois les conditions de cet accident pourraient se réaliser très difficilement, et il y a peu de chance qu’elles se réalisent jamais. Mais en vertu des lois de la conservation de l’énergie et de la transformation du travail en chaleur, la répartition de la chaleur tendrait de plus en plus à un état d’équilibre final de température qui désagrégerait les molécules des corps et amènerait l’univers entier à n’être plus qu’un amas de matière nébuleuse et dissociée, d’où disparaîtraient tout mouvement et toute beauté. F. FoUe, Du commencement et de la fin du monde d’après la théorie mécanique de la

chaleur (mémoire lu à l’Académie royale de Belgique le 15 décembre 1873) ; R. Clausius, dans la Revue des questions scientifiques, Bruxelles, avril 1890, p. 485486. Cf. Moigno, Les splendeurs de la foi, t. iii, p. 1286 ; Les Livres saints et la.science, Paris, 1884, p. 353-358.

Cependant, plusieurs savants modernes, fidèles aux méthodes scientifiques, ont recherché quel serait le sort de notre globe ou de l’univers si seules les causes naturelles entrent en jeu et abstraction faite d’une intervention spéciale de Dieu, dont ils ne tenaient pas compte, sans la nier. Mais par fm du monde ils entendent d’ordinaire la disparition de la vie, et les plus récents l’ont attribuée à trois causes différentes : ou bien au manque d’eau, ou bien à l’invasion des mers sur les continents, A. de Lapparent, La destinée de la terre ferme et lu durée des temps géologiques, dans le Compte rendu du Congrès scientifique international des catholiques, yu" section. Sciences mathématiques et naturelles, Paris, 1891, p. 275-293, ou enfin au froid, résultant de l’extinction et de la solidification du soleil. A. de Lapparent, Traité de géologie, Paris, 1883, p. 1259 ; H. Faye, Sur l’origine du monde, 2e édit., Paris, 1885, p. 306-308. Quoi qu’il en soit du cours naturel des choses, la conflagration univei-selle du monde, que Dieu peut produire par un acte de sa toute-puissance, ne paraît pas impossible au point de vue de la science humaine.

III. Époque.

Si la fin du monde devait être produite par les causes naturelles que lui assignent les savants modernes, elle n’arriverait qu’à une échéance très éloignée de nous. L’Écriture, qui la présente plutôt comme l’effet d’une catastrophe accidentelle et soudaine, l’a rattachée à la date du second avènement du Messie pour juger les hommes. Or, cette date nous est inconnue ; donc aussi l’époque de la fin du monde.

1° Toute une école de critiques rationalistes contemporains prétend, il est vrai, que Jésus lui-même aurait cru à l’imminence de son retour ou de sa venue messianique dans la gloire et par conséquent à l’imminence de la fin du monde. Les apôtres et les premiers chrétiens auraient attendu comme prochaine la parousie du Sauveur, terme que l’on peut répéter sans être moderniste, puisqu’il se rencontre sur les lèvres de Jésus lui-même pour désigner son dernier avènement, Matth., xxiv, 3, 27, 37, 39, et sous la plume des apôtres. I Cor., xv, 23 ; I Thess., ii, 19 ; m, 13 ; IV, 15 ; v, 23 ; II Thess., ii, 1, 8 ; Jac, v, 7, 8 ; II Pet., I, 16. Mais comme Jésus et les apôtres parlent apparemment plutôt de la proximité du jour du Seigneur que de la fin du monde, dont il est directement question seulement, Matth., xxiv, 14 ; I Pet., IV, 7, nous préférons renvoyer la discussion de cette grave question à l’art. Jugement dernier, où elle sera traitée tout au long. Voir, en attendant, les articles Fin du monde, dans le Dictionnaire de la Bible, t. ii, col. 2267-2278, et le Dictionnaire apologétique de la foi catholique, édit. d’Alès, t. i, col. 1911-1928. On y verra que Jésus n’a rien enseigné sur la date de sa seconde venue et que les apôtres, s’ils ont attendu comme prochain le retour du Maître, n’ont pas affirmé leur sentiment, qui n’est pas entré dans le domaine de la révélation divine. Jésus et les apôtres ont ignoré le jour et l’heure de la parousie, et ainsi l’époque de la fin du monde n’est pas fixée par l’Écriture.

2° S’il y avait eu une tradition apostolique sur la proximité de la fin du monde, elle n’aurait pas persisté longtemps dans l’Église, puisque l’Épître du pseudo-Barnabe, qui est de la fin du i"’siècle ou du commencement du II", reporte la consommation des choses à six mille ans après la création du monde. Dieu ayant