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FILS DE DIjEU


définir, si ce verbe n'était accidentel. Parce qu’il n’est qu’un accident, ce n’est pas un vivant subsistant, mais une qualité vitale ; il n’est pas de la substance même du connaissant, mais de sa faculté, il n’est pas image parfaite dans sa nature, mais dans sa capacité de représentation. Supposez, au contraire, un Verbe substantiel, toutes ces imperfections disparaissent et nous avons une véritable génération.

c) Nous avons rencontré déjà l’objection arienne sur ràyÉv/TitQi ; et le yz-rrr, -6 ;. h’cngendré (Y£vvi, Td ;, de yEvvàw) n’est pas nécessairement un devenu (yîvrjTÔr, de ; r('ioi.-x'.), postérieur et inférieur à sa cause ; il peut donc être àY£>r, To ;, non devenu, incréé ; bien qu’il ne soit pas comme le Père àyi-nr^-o ;, inengendré, inascible. Voir S. Jean Damascène, De fide orUiodoxa, I, 8, P. 0., t. xciv, col. 82ci. Au point de vue historique, c’est un fait curieux qu’il faille venir jusqu’au Damascène, pour trouver cette distinction nette des deux mots yevr.To ; et Yevvf|Tâç ; chez les anciens Pères grecs, les deux mots ont un sens vague à peu près identique, s’ils sont employés tous deux ; mais le second seul peut-être était en usage avec ce sens vague d’engendré, c’est-à-dire de devenu, appliqué aux éons des gnostiques, au monde de Platon, au Logos de Philon, à l’Israël des Juifs, et expressément au Logos d’Arius. Athanase, Épiphane, Basile, les deux Grégoire écartèrent simplement les mots équivoques ou peu à peu les ramenèrent à>un sens orthodoxe, pour défendre la vraie doctrine. Voir de Régnon, op. cit., t. iii, p. 185263. Cette doctrine est très claire. Engendré dit cette relation d’origine, qui a été expliquée plus haut, et rien de plus ; l’engendré est un nouvel individu ou suppôt distinct dans la même nature, nouveau et distinct comme individu, mais non pas nécessairement comme être absolu, comme nature, etc. Chez nous, la génération ne peut produire un nouvel individu dans l’espèce, qu’en constituant un nouvel être absolu ; l’existence dans les créatures est limitée à la puissance qu’elle actue et le fils ne pouvant dès lors avoir la même existence que son père, il faut détacher une partie (matérielle, donc essence composée de matière et de forme) de la substance de celui-ci et la développer en nature et en individu absolument distinct. Mais ce n’est pas l’essence de la génération. Quand il y a communication de nature identique, vi originis, à un individu distinct, il y a génération, même si l’identité de nature communiquée est numérique, même si l’existence des individus distincts est identique. Dans ce dernier cas évidemment, il n’y a ni infériorité, ni postériorité, mais un même être, très simple, infini et éternel.

(/) Une dernière objection est relative à la difficulté essentielle des explications de Durand et de ses prédécesseurs : la génération est formellement une opération de nature et de rien autre (sinon matériellement), puisqu’elle tend à communiquer la nature et que le terme correspond évidemment au principe ; le Fils procède donc, non pas ratione operationis intellectuulis, mais ratione naturæ, bien qu'à la façon du Verbe. C’est bien vrai en un sens et ainsi s’expliquent les hésitations « prétliomistes » sur cette question ; la nature est principe, principium quo, dans la génération, comme on l’explique en traitant des actes notionnels, S. Thomas, Sum. tlieol., I q. xli, a. 4, 5, et comme le prouve l’argument de l’objection. Et cependant la raison formelle et nécessaire du Verbe, c’est l’action intellectuelle de Dieu. Ces deux vérités s’accordent, si l’on dit que le Fils procède formellement comme Verbe et donc ratione operationis intetleclualis ; mais l’action intellectuelle de Dieu, en tant que parfaitement intellectuelle et que divine, exige absolu- | ment qu’au Verbe soit communiquée la substance divine elle-même tout entière ; et ainsi le principe de la génération du Fils, c’est la nature divine, mais

formellement en tant qu’elle est dans le Père dicens Verbum sibi consubstantiale. C’est dans l’intime de l'être divin en Acte de Vie intellectuelle que se trouve la raison, mystérieuse pour nous, de cette procession de Verbe intellectuel, distinct et consubstantiel, dit et donc engendré par le Père.

Pour la filiation divine du Verbe incarné, voir Jésus-Christ.

Le Fils image de son Père.

Outre les noms de

Fils et de Verbe, la deuxième personne de l’auguste Trinité, en a reçu bien d’autres : sagesse, vérité, lumière, vie, image, etc. Cf. Th. Pègues, op. c ; 7., p. 341348. Beaucoup de ces noms ne peuvent être que des appropriations, voir Appropriation ; Fils et Verbe, au contraire, sont des noms personnels, parce qu’ils incluent la relation subsistante distinctive de la deuxième personne. Il en est de même du nom Image.

1. Ce nom est personnel, parce que l’image, au sens strict, est une représentation ressemblante ; une représentation procédant en quelque sorte de l’objet dont il est l’image, au moins comme de son exemplaire ; enfin une représentation semblable en raison de son mode même de production ou d’origine. Il est évident que ces notions ne conviennent en Dieu qu’au Fils ; c’est donc bien un nom personnel qu’on trouve dans le texte de saint Paul, Col., i, 15 : qui est imago Dei invisibilis, et Heb., i, 3 : qui cum sil splendor gloriae et figura subslantix ejus {-f^i JTioiTâTEw ;, non pas l’hypostase évidemment, mais la réalité essentielle, substantielle). Tous les Pères ont merveilleusement tiré parti de ce nom : contre les sabelliens, il prouve la distinction réelle ; contre les ariens, il prouve l’identité de nature, car le Fils est évidemment image parfaite du Père. Plusieurs, il est vrai, parmi les grecs, ont aussi appelé le Saint-Esprit image du Fils, voir Petau, op. cit., 1. VII, c. vu ; de Régnon, op. cit., t. iv, p. 137-139 ; mais ils prenaient alors image dans un sens large de procédant semblable, d’où que lui vînt sa similitude ; voir S.Thomas, Sum. theol., P, q. xxxv, a. 2, ad 1°"> ; nous savons d’ailleurs que les grecs n’ont jamais si bien compris que les latins les vrais rapports du Fils et de l’Esprit.

2. Comment le Fils est-il l’image du Père ? Saint Thomas nous apprend qu’il y a eu des discussions dans les écoles de son temps sur ce sujet. Ibid., a. 2. En effet, Richard de SaintVictor, croyant que la ressemblance en nature n’expliquait pas la propriété d’image, puisqu’elle est en Dieu une identité plutôt qu’une ressemblance et qu’elle est d’ailleurs dans le Saint-Esprit qu’on ne peut dire image du Père, avait cherché dans la spiration active la raison pour laquelle le Fils est image du Père. De Trinitate, 1. VI, c. xi, xx. Après Alexandre de Halès, Summa, P, q. lxi, m. iii, a. 2, saint Bonaventure suivit le docteur de Saint-Victor. In IV Sent., 1. I, dist. XXXI, p. ii, a. 1, q. ii, m. D’autres avaient dit, par exemple, Rupert, De Trinitate, 1. II, c. ii, que le Fils seul est image du Père, parce qu’il n’y a pas image d’image, mais image immédiate d’un modèle et d’un seul et que le Saint-Esprit ne vient du Père que par le Fils ou des deux à à la fois. Saint Thomas écarte facilement cette dernière façon de parler qui est tout arbitraire, d’autant que le Père et le Fils ne sont qu’un principe de l’EspritSiiint. Contre la première opinion, et pour expliquer pourquoi la troisième personne n’est pas image en Dieu, il recourt à la nature de l’image qui doit avoir, non une ressemblance quelconque, mais une ressemblance in specie vi originis ; or nous savons que seul le Verbe procède en Dieu semblable en nature vi originis. Et qu’on ne dise pas que c’est là une notion de l’image forgée à plaisir : c’est la notion vulgaire et traditionnelle. Voir Suarez, op. cit., 1. XI, c. vi, n. 7 ;