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FILS DE DIEU


Le principe de lumière se trouve dans la distinction entre la forma Dci et la forma servi. Le 1. II, après avoir averti que d’autres textes doivent s’expliquer par un second principe fondamental, celui des origines, qui fait que tout dans le Fils vient du Père, c. i-iii, col. 845-846, étudie les missions divines et d’abord les théophanies, du c. v à la fin du 1. II et tout le 1. III, col. 848-886. La doctrine augustinienne, sur ce point historiquement important, a été exposée déjà, col. 2357. Pour Augustin, toute la Trinité est invisible au même titre et visible aussi également ; l’opinion que le Père est spécialement invisible, illi pepercrunt qui non potuerunt in unitale Trinitatis inleUigcre quod dictum est : Régi autem sœculonim immorlali, inuisibili soli Deo. I Tim., i, 17, n. 32, col. 866. Visible, la Trinité se fait voir en fait en réalisant, par une commune opération, quelque apparence sensible phénoménale, ange sous forme humaine, etc., qui la représente ; cependant s/(77 ! (7 ! ca/iye, symboliquement, une seule des trois personnes peut être ainsi représentée et de fait, à ce qu’on peut conjecturer, le fut probablement quelquefois dans les théophanies antiques. Le 1. IV étudie les bienfaits de la mission du Christ dans la chair et enfin explique cette mission même pour en écarter toute idée d’infériorité, c. xix-xxi, col. 905-912 ; cf. 1. II, c. v-vi ; les missions en Dieu, en elïet, ne marquent pas autre chose que l’origine, siciit crgo Pater genuit et Filius genitus est, iia Pater misit et Filius missus est, col. 908 ; l’analyse augustinienne n’est cependant pas encore parfaite, car elle n’est pas assez explicitement complète ; cf. saint Thomas : ineipere esse nova modo alicubi cum relalionc originis. Sum. theol., I', q. xLiii, a. 1. Voulant ensuite écarter les objections rationnelles des ariens, le docteur catholique, dans ses 1. V-VIII, va au fond du dogme, en en faisant la théologie, du moins à un point de vue général. Tout est substantiel en Dieu, disaient les ariens ; or ïingenitus et le genitus sont réellement distincts ; donc leurs substances mêmes sont distinctes. Augustin recourt ici à la métaphysique aristotélicienne, celle du bon sens, et distingue : tout est substantiel en Dieu dans l’ordre de l’absolu ; mais ingenitus ou plutôt genitor et genitus indiquent des relations, et ce sont ces relations immanentes qui seules distinguent le Père et le Fils, 1. V tout entier, col. 911924. Vient alors la très délicate et très difficile question : comment donc le Fils est-il appelé Dei Virtus et Dei Sapienlia ? I Cor., i, 24. Saint Augustin sait la réponse des Pères grecs aux ariens et comment ils ont prouvé par là l'éternité et la consubstantialité du Fils ; mais pour lui, au nom de la simplicité divine, il rejette absolument cette « personnalisation » des attributs absolus en Dieu, » très fausse absurdité, » dira-t-il plus loin, . 1. XV, n. 31, col. 1066 ; il n’y a là que des personnifications, des appropriations, comme on dira plus tard, 1. VI et VII, col. 923-946. Le 1. VIII contemple cette vérité d’un regard 'plus intérieur, de toute l'âme. La théologie trinitaire générale est fondée et n’a plus que quelques imperfections secondaires à corriger (notion de la personne, etc.).

2. Mais il reste la théologie trinitaire spéciale : Qu’est-ce que le Fils ? Pourquoi est-il Fils ? Pourquoi sa procession est-elle une génération, et l’est-elle seule ? Notre subtil docteur essaie, après Victorin et Tertullien, mais bien plus profondément qu’eux, de demander là-dessus des explications à la philosophie, c’est-àdire à la psychologie, 1. IXXV. Il y a, en elïet, dans l’homme des analogies diverses, des vestiges et enfin une image de l’auguste Trinité ; une image dans l'âme qui par une seule réalité substantielle se connaît et s’aime, 1. IX ; ou plus clairement dans l'âme qui a mémoire, intelligence, volonté, 1. X ; des vestiges encore in visionc cxteriori, in cogitatione visionis, in

memoria cogitemte de visione, 1. XI ; in scientia rerum extcrnarum, I. XII ; in fide de doclrina Cliristi, 1. XIII. Mais la véritable image de la Trinité, ou représentation analogique directe, ne se trouve finalement que dans l'âme qui a, de soi, mémoire, intelligence, volonté, et mieux encore quee meminit, intelligit et diligit Deum (sur terre et puis dans la béatitude. Cf. là-dessus 'Bo^%xt, Élévulions sur les mystères, ii"=semaine, ix « élevât.). On remarquera que, dans tous ces subtils développements, les idées de saint Augustin, sur le point précis de l’analogie étudiée, sont confuses, faute d’une idée claire des processions divines ; il la cherche tantôt dans les modes d'être, tantôt dans les opérations, tantôt dans les termes des opérations de l'âme. En tout cas, il insiste sur le fait qu’il faut concevoir le Fils comme Verbe intellectuel ou Pensée et Sagesse en tant que procédant du Père qa se connaît, tout en mêlant ici une subtile influence d’amour et de volonté, Verbum cum aniorc nolilia ; de plus, cette procession du Verbe intellectuel, image de la chose connue, s’appelle justement une génération, production d’un semblable en nature, 1. IX, c. vii-xi, col. 966-970. Sur les rapports de ce Verbe avec le monde et avec le Logos néo-platonicien, voir Verbe, et C. Van Crombrugghe, La doctrine cliristologique de S. Augustin, dans la Revue d’Instoire ecclésiastique, 1904, p. 237-243. Il ne fait donc pas que reproduire ce qui a été dit avant lui sur ce sujet. Cependant, pourquoi la procession du Verbe est-elle une génération et non celle de l’Esprit d’amour ? Augustin l’a ignoré ; il voit qu’on désire (aime) d’abord connaître et qu’alors on cherche, puis qu’on enfante en soi la connaissance en la trouvant. quæ reperiuntur quasi pariuntur, col. 971, et finalement qu’on aime cette connaissance et c’est tout, 1. IX, c. XII, col. 970-972. Cf. Contra Maximin., 1. II, c. xiv, 1, t. XLii, col. 770 sq. L’application directe de l’analogie humaine au Verbe divin est faite au dernier 1. XV, c. x-xvi ; l’image du Verbe divin, ce n’est pas proprement notre verbum, parole extérieure, mais notre verbe mental ; la comparaison avec notre parole extérieure est d’ailleurs toujours possible, voir De fide et symbole, c. iii, t. xl, col., 183 ; le P. de Régnon a confondu ces deux choses, op. cit., t. iii, p. 441-443, par amour pour les grecs. Augustin insiste, de plus, fortement et longuement sur l’imperfection de notre image et ses dissemblances avec la réalité divine. Après avoir en dernier lieu, c. xx, repoussé l’hérésie d’Eunomius, faisant du Verbe un fruit (fibre) de la volonté du Père et encore l’opinion de « quelquesuns » l’identifiant avec cette Volonté même substantielle et éternelle (Victorin), toujours pour ne pas tomber dans l’absurdité repoussée plus haut, le grand docteur conclut qu’il faut attendre la vision céleste pour mieux voir en particulier la raison de la génération du Verbe et sa différence d’avec la procession du Saint-Esprit, c. xxv-xxvii, col. 1092, 1059-1097. Sur ce point, sans attendre le ciel, le dogme catholique a progressé depuis saint Augustin.

2° Théologie orientale jusqu’au /A'e siècle. — 1. Depuis les luttes ariennes jusqu'à saint Jean de Damas, aucun progrès trinitaire, du moins pour le dogme du Fils de Dieu. Bientôt, en effet, les inteUigences sont occupées aux controverses christologiques (nestorianisme, eutychianisme) ; sur la Trinité on répète les formules d’Athanase, de Didyme et des Cappadociens, comme saint Cyrille d’Alexandrie, dans son Thésaurus ou son De consubslanliali Trinilale, voir Cyrille d’Alexandrie (Saint), t. iii, col. 2488-2489, 2503-2505, lequel essaie un travail de mise au point un peu parallèle à celui qu’achevait Augustin en Occident, mais bien inférieur. Saint Cyrille en resta à des rudiments d’explication psychologique sur le concept image engendré en nous par la science. Tlicsaurus, 6, P. G., t. lxxv.