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FILS DE DIEU


nus par les apologistes d’Origène et, à la fin du iv’siècle, les trois fougueux antiorigénistes, Épiphanc, Jérôme, Théophile d’Alexandrie, dont les accusations portent à faux plusieurs fois, personne ne lui reproche rien au point de vue trinitaire. Auparavant, sabelliens, ariens, apollinaristes l’avaient attaqué parfois avec fureur ; lorsque quelques ariens essayèrent de le tirer à eux, saint Athanase et saint Basile entre autres, après saint Pamphile et Didyme, défendirent son orthodoxie, en concédant quelques façons de parler difficiles, dues à sa méthode, S. Athanase, De decrelis nie. syn., 27, ou à l’ardeur de sa polémique. S. Basile, De Spiritii Saiicto, 73. Photius s'était rangé h cet avis, Bibliolh., cod. 117, t. ciii, col. 395. Cf. F. Prat, op. cit., appendice iii, Origène et la tradition, p. 188213. C’est aussi la conclusion de cette pénétrante étude de F. Prat : « Qu’on examine sa terminologie avec la bienveillante équité d’un saint Athanase, on ne la trouvera pas en défaut. Si l’on se donne la peine d'étudier consciencieusement ses œuvres, au lieu d’en détacher quelques lambeaux de phrase dont le sens est obscur et l’expression malvenue, on lui rendra pour le fond le même témoignage, » p. xxii-xxiii. Voir Esprit-Saint, col. 704-711.

Plusieurs accusations, en eiïet, lancées par les ariens antiorigénistes et répétées après eux, sont d’abord des méprises, poussées quelquefois jusqu’au contresens. Ainsi Origène aurait refusé au Fils la vision du Père et au Saint-Esprit celle du Fils, S. Épiphane, Hær., Lxiv, 4, t. xli, col. 1076 ; S. Jérôme, Zip/*/., cxxiv, ad Avii., 2, P. L., t. xxii, col. 1060 ; mais les textes qui disent quelque chose de semblable, Pcriarch., I, I, 8 ; II, IV, 3, parlent évidemment de vision corporelle refusée à Dieu parce qu’il est spirituel, opposée ù la connaissance intellectuelle qui fait connaître le Père par le Fils comme le Fils par le Père. Une phrase du De oralione, 15, met ensuite une différence /at' oùrsioii entre le Père et le Fils ; nous avons dit ce qu’il faut penser de cette terminologie. D’après saint Épiphane, Hser., Lxiv, 4, loc. eit., Origène aurait dit que le Fils est de la substance du Père et pourtant créé, Fils par grâce et non par nature. Le premier point est incompréhensible. Origène répète que le Fils est de la substance du Père ; une fois il emploie, y.-iTaç, In Joa., 1, 22, t. XIV, col. 56 ; mais c’est une allusion adoucie à Prov., VIII, 22 ; nulle part, dans les textes parvenus jusqu'à nous, il ne le dit créature, xr^crij.a ; il affirmc le contraire. Voir plus haut. Des textes formels répètent de même que le Fils est tel par nature, çjirsi, y.arà çj(7tv. Sans doute, l'évêque de Salamine aura pensé ici simplement au v^v^ro ; qu’il a interprété créé et dont il conclut que le Fils était fils adoptif. Voir plus loin. Voici un dernier spécimen d’imputation grossie à plaisir. Origène avait dit que le Père est la Vérité, le Fils non la Vérité (inengendrée), mais l’image de la vérité (en soi et pour nous) ; cette parole devint chez le fougueux Théophile d’Alexandrie, Epist. synod., de 400, traduite par saint Jérôme, P. L., t. xxii, col. 762 (voir en note des références à saint Jérôme et à saint Augustin) : le Fils est vérité pour nous, mensonge par rapport au Père. Dans le même ordre d’idées, c’est le Fils qui révèle le Père invisible ; mais, à la différence des apologistes, Origène restreint cette airnination au simple fait ; car, selon sa nature, le Fils est aussi invisible que le Père, précisément parce qu’il est l’image (parfaite) du Père. Periarch., II, vi, 3, t. xi, col. 211 ; S. Athanase, De decr. nie. syn., 27. Aussi, si les théophanies sont surtout attribuées au Fils, c’est qu’il est l’envoyé (le Saint-Esprit n’est envoyé que sous la nouvelle loi), mais les autres personnes pourraient apparaître. In Luc, homil. iii, t. xiii, col. 1808 ; c’est déjà esquissée la théorie de saint Augustin, ce qui suppose un concept assez parfait de la Trinité.

Il n’y a pas non plus à s’arrêter à ces expressions qui peuvent accuser simplement l’ordre des origines : Dieu le Père est le Premier absolu, le principe ; le Verbe est après lui, même au-dessous de lui, Cont. Cels., II, 9, VI, 60, et même second Dieu, SsJispoç 6eô :, mais par conciliation pour le langage de Celse et en un certain sens seulement, ibid., v, 39, t. xi, col. 1244, ce qui corrige suffisamment cette expression tant incriminée. Le Père est encore 6 (-)cô ;, a-jtoûîoç, a-JToayaOïi :, tandis que le Fils est fnô :, non aJToQEo ;, d’après Justinien, cf. Periarch., I, ii, 13, oOy w ; x-n’hwz àyàOfJç : le Père est seul la Bonté simplieiter, absolule. Ces distinctions sont plutôt malheureuses ; mais on doit convenir que leur expression ne répugne pas absolument à une doctrine reconnue par ailleurs orthodoxe. Voir plus haut ce qui a été dit de la divinité stricte du Fils de Dieu. Le Fils est appelé encore aÙToa/rifteia (bien qu’image de la Vérité à un autre point de vue), aJToayi IX 111.6 ;, aùïooi/.aioaJvci, In Jer., homil. xvii, 4, édit. Klostermann, p. 147 ; aÙToSuvajj.i'ç, In Joa., i, 38 ; et très souvent ot’JToirotpc’a aùrôXoyoç. Il faut expliquer de même le mot fiyi)16 ;, produit, voir In Joa., ii, 6, t. XIV, col. 125-129, que saint Épiphane interpréta créé, Hær., lxiv, 5-8, t. xli, col. 1080-1084 ; ce mot n’a pas ce sens et Épiphane convient que, chez un autre auteur, il serait orthodoxe ; pourquoi ne l’est-il pas chez Origène ? Justinien, il est vrai, Epist. ad Menam, t. lxxxv, col. 982, attribue à Origène le mot zT ; a|j.a ; mais la phrase ne paraît pas authentique, et comment Épiphane, pour accuser Origène de faire du Fils de Dieu une créature, n’aurait-il trouvé que

i-n-, -6
, en Soi orthodoxe ? Et puis nous avons les

textes formels qui font du Fils un engendré, non un créé ; car si le Verbe est y£VïiTÔ ; (produit avec sens vague) par rapport au Père, seul improduit, imprincipié, £v To àyévriffjv, comparé aux créatures, il est àyévTiio ;. Cont. Cels., vi, 17. Enfin, les mêmes remarques sont à faire au sujet de la fausse exégèse, continuée longtemps encore après Nicée, de Prov., viii 22 (xTi’stv peut d’ailleurs, lui aussi, avoir un sens vague de produire), et de Joa., xiv, 28 : Pater major me est, appliqué à la divinité du Fils ; ou encore sur celle qui insiste trop pour attribuer au Fils des particules et des textes de médiateur ; le Père fait tout par le Verbe dans le Saint-Esprit, procession du Saint-Esprit, In Joa., II, 6 ; création. Cont. Cels., iii, 34 ; viii, 13. Le Père aussi reçoit tout, prières, culte, par le Verbe dans le Saint-Esprit, comme dit la liturgie ; à ce propos, sur la foi du peu consciencieux patriarche Théophile, cf. S. Jérôme, Epist., xcvi, 14, P. L., t. xxii, col. 784, on fait défendre par Origène de prier le Fils ; c’est un contre-sens, car en vingt endroits, Origène prie le Fils et le fait prier par les autres. Cont. Cels., V, 11 ; In Luc, homil. xv, t. xiii, col. 1839 ; In Ezecli., homil. xii, 5, ibid., col. 757, etc. Dans trois ou quatre textes, il dit qu’il faut prier (il s’agit spécialement de la Kpo(se-jyj„ prière liturgique) le Père par le Fils et non autrement. De oral., 15-16, t. xi, col. 464-468 ; Cont. Cels., v, 4 ; viii, 13, 26 ; mais il appuie cette pensée sur la seule raison de l’usage et du bon ordre des assemblées liturgiques ; rien là de suspect. Il dit ailleurs que l’adoration doit aller à la Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, et à nul autre. In Rom., 1, 16, t. XIV, col. 863. Voir, plus haut, ce qui est dit de la consubstantialité de la Trinité.

Il reste enfin quelques passa 38 dont l’expression est plus clairement subordinatienne et qui sont plus difficiles à expliquer dans un sens pleinement orthodoxe. Le Verbe est ministre, obéit aux ordres du Père dans la création. Cont. Cels., vi, 60 ; Periarch., prœf., 4 ; In Joa., i, 22, t. xiv, col. 57 ; xx, 7, col. 588 ; In Col., dans VApol. Pamphili, v, t. xvii, col. 589. Cont. Cels., v, 37, Origène dit que le Fils, bien qu’il ait