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EUCHARISTIQUES (ACCIDENTS ;


caleurs lollards. Rymer, Fœdera et convenliones… inter reges Angliæ et cjuosris alios, La Haye, 1740, t. III, p. 2, 109. L’année suivante, le pape Boniface IX écrivait au roi d’Angleterre pour le décider à prêter assistance aux prélats contre les lollards, ennemis de Dieu et du royaume ; il le suppliait de condamner ceux que les prélats déclareraient hérétiques. Walsingham, Hisl. anglic, A. D. 1395.

Cette lettre contribua sans doute à faire convoquer à Londres un nouveau synode provincial, au cours de l’année 1397. Il se rassembla dans l'église Saint-Paul, sous la présidence de Thomas Arundel, archevêqiie de Cantorbéry. Dix-huit propositions extraites du Trialogiis y furent censurées, dont les trois premières avaient rapport à l’eucharistie. Celle qui affirmait la présence du pain après la consécration était caractérisée : Hæresis est loquendo de pane na’urali ; celle qui affirmait la présence figurative du corps du Christ reçut la note : Hœiesis ; la troisième, qui contenait l’interprétation spéciale que Wyclif donnait de la confession de Bérenger, était déclarée erronée. Mansi, Concil, t. XXVI, col. 817. C’est pour justifier scientifiquement ces censures que le frère mineur William Wodeford écrivit, sur l’ordre même de l’archevêque, son Confra Trialogum Wictevi. Hefele, Conciliengeschichle, t. vi, p. 978. Malgré le zèle des autontés ecclésiastiques et les mesures de rigueur, l’hérésie ne cessait de faire des progrès. Au commencement de l’année 1401, il y eut un nouveau synode à Londres. John Purvey, prêtre du diocèse de Lincoln, jadis vicaire de Wyclif, y révoqua solennellement le symbolisme eucharistique. Après avoir reconnu la réalité de la transsubstantiation, il ajoutait : lia quod sola forma sensibilis et similitudo eonimdem panis et vint remanet ibidem in eorum accidentibus, absque subjecio eorumdem. Fasciculi, p. 401. William Sautry, un autre prêtre, s'étant obstiné à dire quod post consecralionem rite factam remanet idem panis in natura qui fuit ante, Fasciculi, p. 411, dut subir la dégradation et fut brûlé à Smythfeld, sous les yeux d’une foule considérable. Walsingham, Hist. anglic, A. D. 1401. L’histoire démontre ainsi par des faits le lien étroit que l’hérésie wycliflste étabUssait entre la négation de la transsubstantiation et celle des aeeidentia sine subfecto.

L’année même du bîicher de Sautry, un noble bohémien, venu à Oxford, pour suivre les cours de la faculté des arts (Wyclif y avait toujours compté des adhérents), y eut connaissance des ouvrages du réformateur ; il se laissa gagner à l’hérésie. Il transporta à Prague le De universalibus de Wyclif (ouvrage où l’auteur adhère encore à la thèse péripatéticienne des accidents absolus, thèse rejetée déjà dans le De actibus anime), probablement aussi le De dominio divino, le De civili dominio, le De Ecclesia et les œuvres attaquant la hiérarchie et la discipline ecclésiastiques. C’est autour des œuvres de Wyclif, que la lutte se concentra en Bohême entre le pouvoir ecclésiastique et les partisans du novateur anglais. L’action des autorités religieuses se poursuit presque parallèlement à Prague et à Oxford, jusqu’au concile de Constance. Le 28 mai 1403, un consistoire des maîtres de l’université de Prague, sous la présidence du recteur Gautier Harasser, condamna une liste de 45 propositions, tirées des œuvres de Wyclif. Les 24 premières n'étaient autres que celles condamnées au concile de Londres en 1382 ; les vingt et une autres avaient été extraites des œuvres de Wychf par maître Jean Hubner de Silésie, qui les jugea hérétiques. C’est cette même liste qui sera frappée à Constance. DenzingerBannwart, Encliiridion, n. 581 sq. L’acte authentique portant condamnation des dites propositions a été imprimé dans le t. v des Œuvres de Gerson, édition d’Anvers, 1706. Défense était faite d’enseigner, de

prêcher, d’affirmer soit en public, soit en secret, lesdits articles. Gerson, Opéra, t. v, p. 620. Parmi les opposants, appartenant au parti national bohémien, on voit paraître Jean Huss, Nicolas de Litomytzl et Stanislas de Znaym. Ce dernier devait devenir plus tard un des adversaires les plus décidés des hussites. Huss lui-même prétendit qu’on avait tronqué les textes et que, replacés dans leur contexte, ils offraient un sens tout différent. W. W Tomek, Geschichte der Prager Uniuersitàt, 1849, p. 61. Protiwa, curé de Porzicz, près de Prague, en 1414, nous apprend que Huss, vers 1399 déjà, date probablement trop avancée, aurait enseigné qu’un bon prêtre a le pouvoir de consacrer validement, mais que l’indignité morale de l’officiant avait pour effet de laisser le pain dans sa nature. Loserth, introduction, Jo. Wyelif de euch. tract., p. xiv. Huss continue certainement la pensée de Wyclif, il le copie parfois littéralement ; il est certain aussi qu’en Bohême, comme en Angleterre, l’assertion : panis remanet in sua natura, était devenue la formule qui ralliait tous les esprits favorablement disposés à Wyclif et à ses écrits. Il est plus difiicile de dire quelle a été la doctrine précise du réformateur bohémien, concernant les accidents eucharistiques. Pour trancher cette question, il faudrait s’en référer à ses ouvrages, surtout à son commentaire sur le 1. IV'= des Sentences, et à son De corpore Christi. Au concile de Constance, Huss sera accusé d’avoir prêché la remanenlia panis. ; un des témoins, qui déposèrent contre lui, P.^ul de Saint-Castulus, cite une parole du réformateur qui doit nous faire conclure qu’il répétait purement et simplement la théorie eucharistique du docteur anglais. L’hérésiarque aurait dit : « Après la consécration, les accidents persévèrent avec leur sujet, au sacrement ; comme l’homme est dans une tunique, comme l'âme est dans le corps, ainsi Dieu est dans le sacrement. » Cité par Loserth, op. « 7., p. l. D’ailleurs poser, comme Huss le faisait certainement, la remanentia panis, c’est-à-dire nier la transsubstantiation, c’est s’enlever tout motif plausible pour admettre la proposition : Aeeidentia panis manent sine subjecto in eodem sacramento. Il est vrai qu’au concile de Constance, Huss se défendra d’avoir jamais enseigné que le pain demeurât, après la consécration. Quand Michel de Causis avança contre lui cette accusation, Huss, jouant sur le mot, prétendit qu’il avait voulu enseigner qu’il restait le « pain des anges » ou le « pain de vie » et non point le pain matériel. I. Lenfant, Histoire du concile de Constance, 1714, p. 200. Plus personne n’admet aujourd’hui les vues du calviniste Lenfant, lorsqu’il prétend laver Huss du reproche d’hérésie en matière d’eucharistie.

Le savant éditeur du De eucharislia de Wyclif, le D Loserth, reconnaît que les allégations de Huss furent souvent confuses et ambiguës ; il n’hésite pas à admettre la véracité des témoignages portés contre lui, tous sous serment. Op. cit., p. l. Il admet, il est vrai, que Huss aurait renoncé, comme beaucoup d’autres maîtres bohémiens, tels que Stanislas de Znaym et Etienne de Paletz, à la négation de la transsubstantiation, ce qui expliqucrait que l’hérésiarque ait pu paraître orthodoxe, sur ce point spécial, durant le concile, Lenfant, op. cit., p. 201 ; mais il déclare inexcfcte la négation opposée par Huss à ceux qui l’accusaient d’avoir enseigné que le pain matériel demeurait, après la consécration. Il est certain que Huss défendait des propositions telles que celles-ci : Panis est corpus Christi, hoc est, signum sacrnmentale efus. Loserth, op. cit., p. li. Le pain naturel, symbole du corps du Christ présent sacramentaliter, non realiter et identice, c’est la thèse même de Wyclif, contenue dans la première et la troisième des quarante-cinq propositions condamnées. Huss ne pouvait en ignorer