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FILIOOUE


hiam potins, et a neminc vclle judicari, sclnsmatis fuisse cansam ? Advcrsus græcos, 1. IV, P. G., t. clii, col. 208. Cf. Ratramne de Corbie, Contra græcorum opposila, 1. II, c. II, P. L., t. cxxi, col. 246.

Les attaques de Photius contre le Filioque ne paraissent pas avoir été prises au sérieux par ses premiers successeurs. Il y a bien, un siècle après sa mort, une lettre encyclique du patriarche Sisinnius II (996-S98), où l’on reproche aux latins l’addition du Filioque, Déniétracopoulos, 'OpOdooço ; 'E>, ), à.-, Leipzig, 1872 » p. 5. ÎMais cette lettre est identique à celle de Photius. Sisinnius l’a signée de son nom, ou même un copiste ignorant la lui a attribuée. AUatius, De Ecclesiæ occidenlulis et oricnlalis perpétua consensionc, 1. II, c. VIII, Cologne, IC 18, col. 606. Au xie siècle, Michel Cérulaire déclare de nouveau la guerre contre l'Église romaine, mais il s’en prend d’abord à ses coutumes liturgiques et disciplinaires. Il passe sous silence, au moins dans ses premières escarmouches, ce que Photius considère comme le crime le plus audacieux de l’Occident latin. Pendant le xi'e siècle, la question de l’addition au symbole n’a tenu qu’une place tout à fait secondaire. Bréhier, Le schisme oriental du Xle siècle, Paris, 1899, p. 131, 132.

Il est utile aussi de remarquer qu’entre le patriarcat de Photius et celui de Cérulaire, le schisme oriental n’est pas un fait accompli. Et cependant le symbole avec l’addition du Filioque se répand de plus en plus en Occident, sans que les grecs y voient un attentat contre les décrets dogmatiques des anciens conciles. Mammas, Apologia contra Ephesii confessionem, P. G., t. clx, col. 1.57 ; Michel, L’Orient et Rome, Saint-Amand, 1894, p. 253-254 ; de Régnon, op. cit., t. III, p. 237. Et le Filioque serait resté sans doute un objet de discussion entre les théologiens grecs et latins, si les croisades d’abord, et ensuite la prise de Constantinople par les Francs (1204), n’eussent creusé un abîme entre l’Orient et l’Occidtnt, n’eussent excité au plus haut point la haine des grecs contre l'Église romaine.

Plus qu’au Filioque, les auteurs du schisme grec en voulaient à la primauté des papes. Deux historiens récents de la séparation des Églises, Krémos et Mgr Nectaire Képhalas, l’avouent sans détour. « Il est hors de doute, écrit le théologien grec Nicolas Amvrazis, que l’orgueil et l’ambition do Nicolas I"' poussèrent Pliotius à rejeter comme des hérésies les quelques divergences dogmatiques entre grecs et latins. La procession même du Saint-Esprit du Fils était professée par plusieurs Églises occidentales, et toutefois les évêques orientaux, pendant longtemps, ne s’avisèrent pas de la proscrire, de la condamner comme une doctrine hérétique. Ils ne mirent en avant ces diver-ences, le Filioque en particulier, que lorsqu’ils s’aperçurent que la papauté était un danger pour l’indépendance et la liberté de l'Église. Si les papes donc ne s'étaient pas laissé fourvoyer par l’orgueil, l’ambition, la soif de régner, il est bien probable que l’on n’aurait pas fait attention à ces divergences, que celles-ci n’auraient pas tardé à s’eftacer et que le monde chrétien n’aurait pas eu à déplorer la déchirure du schisme. » 'II ofGdoo^o ; 'Exz).v-|(Tca àv 'T)(ïa£c Ttpoç ovaç rà ; aXXaç /piirtiavixàç IxxXr^aix ; È^£Ta !  ; o|j.£VYi, Athènes, 1902, p. 52, 53.

2° Le décret du concile d'Éphesc et V autorité de l'Église sur le symbole. — L’objection principale de la théologie orthodoxe contre l’insertion du Filioque au symbole est puisée dans une décision du concile d'Éphése (III" œcuménique) qui frappe de réprobation les falsificateurs du symbole de Nicée. A la VI session du concile, Charisius, prêtre de Philadelphie, présenta aux Pères un symbole composé par Théodore de Mopsueste. Il contenait à mots couverts

l’hérésie nestoricnnc. Charisius le lut devant l’assemblée et ajouta qu’il avait été accepté et signé par un certain nombre de quartodécimans et de novatiens. Frappés du danger qui menaçait la pureté de la foi orthodoxe, les Pères d'Éphèse promulguèrent le décret suivant : « Le saint concile a décrété qu’il n’est permis à personne de proposer, d'écrire ou de composer une formule de foi différente de celle qui a été fixée par les saints Pères réunis à Nicée avec le Saint-Esprit. Au sujet de ceux qui oseront composer une autre foi ou la proposer ou la présenter à ceux qui désirent se soumettre à la connaissance de la vérité ou qui viennent à la religion chrétienne du paganisme, du judaïsme ou de toute autre hérésie, le concile décide que, s’ils sont évêques ou clercs, ils perdront leurs charges et dignités, et, s’ils sont laïques, qu’ils seront excommuniés. » Mansi, Concil., t. IV, col. 1301, 1364 ; Hefele, op. cit., trad. Leclercq, t. II, p. 331.

Depuis Photius, Mi/staqogia, 80, P. G., t. cii, col. 364, 365, les polémistes grecs déclarent que cette décision du concile d'Éphèse condamne implicitement V interpolation latine du symbole. Tout d’abord, ils affirment qu’après le concile d'Éphèse le symbole de Constantinople est une formule littérairement inviolable, même pour la suprême autorité de l'Église. Les conciles œcuméniques n’ont plus le droit de rien ajouter au sjnnbole, déclare Marc d'Éphèse au concile de Florence. Mansi, Concil., t. xxxi, col. 533. La défense du concile d'Éphèse est une défense que l'Église s’est portée à elle-même, la renonciation volontaire à un droit qui a été exercé par les Pères des deux premiers conciles œcuméniques. Ibid., col. 519, 584, 604, 608. Et la sentence de Marc d'Éphèse était si commune et si enracinée dans la théologie grecque, que Bessarion lui-même la partageait avant de se rendre à l'évidence des arguments de la théologie latine sur ce point controversé. Mansi, Concil., t. XXXI, col. 524 ; Vast, Le cardinal Bessarion, Paris, 1878, p. 71.

Il n’est pas difficile de prouver que cette interprétation du décret du concile d'Éphèse est étrange, contraire à la constitution divine de l'Église et à sa vitalité, et enfin nuisible aux intérêts les plus graves du monde chrétien.

Tout d’abord, elle est étrange. On ne saurait concevoir, en effet, qu’un concile qui exerce le droit d’expliquer la révélation chrétienne, de condamner les doctrines hérétiques, de promulguer des définitions dogmatiques, s’arroge l’autorité de dépouiller de ce même droit les conciles qui le suivront. Si les conciles œcuméniques ont tous le même droit dans le domaine dogmatique, il s’ensuit clairement que, sur ce même domaine, un concile œcuménique ne peut pas limiter les attributions des autres conciles. S’il y a des limites, elles concernent le devoir pour un concile de ne pas promulguer des décrets dogmatiques contraires aux définitions dogmatiques des conciles précédents ; mais il va sans dire qu’ils ne peuvent pas se rapporter à l’exercice d’un droit, qui appartient à titre égal et avec la même étendue à tous les conciles œcuméniques. Au point de vue juridique, il serait donc étrange de soutenir que le concile d'Éphèse a ôté à l'Église un droit dont l'Église n’a jamais entendu se dessaisir.

Cette interprétation est contraire à la conslilution divine de l'Église. L'Église, en effet, est une société vivante. Cette vie, elle doit la conserver, la développer jusqu'à la fin des siècles. Il est donc évident qu’elle ne saurait renoncer à ses fonctions vitales, ni cesser d’exercer la mission qu’elle a reçue de son divin fondateur. Comme société vivante, elle est tenue de conserver intact le trésor de la révélation divine, de ré-