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FEU DU PURGATOIRE


que lui a donnée Gabriel Scvcros, une divergence doctrinale avec les conceptions catholiques ; saint Thomas d’Aquin, on le sait, n’admet, dans les âmes du purgatoire, la possibilité d’aucun péché véniel, voir Péciik ; le châtiment est donc tout d’expiation et de satisfaction, et ne « puritie » l'âme que du rcatiis pœnæ. Bien qu’il n’admette pas d’autre lieu de souffrance que l’enfer et qu’il rejette le purgatoire, ou plutôt parce qu’il admet, dans l’enfer, un lieu d’expiation pour les justes, Gabriel Sevcros acceptera la peine du feu : 'Apia-Asi (xot 3[j.o) ; -/.ai rj y^j^ii-r^ tivwv SiSaiy.âXàiv -?, ; Suriy.r, ; 'Ev.xX-f|(j[aî o l’ivs ; '/.lyoïjaiy, oTi -h TT-jp TÔ a’tdjvcciv s'.vat exstvo et ; tô ôuoïov Ti/iyfvoudiv a ! {/u/_ai xa T ; |xci)poOvTai Trpôç xa : f.ôv" tô ôtcoïov o<rov eîç Tï)v aùtoO ç-j(7tv Eivat aïo’jviov, o’jtiù -JTtô toO OîoC xTiaôév, TcXrjv Xiys-ac y.al TrpÔTzaipov, où zarà ty, '/ ç-j<jiv to’j, àWy. oix Taç 'l^ux^î sxêivaç, a', ôuoîat X’jtpiovovTOCt àir' dzeiOôV Sià o'î Ta ; 4-'"/.^'= "'^"^ aitovi’i, ') ; sx^ï xo), a’o|J.£v(iJv /.s’yeiat aiùVnov, xx uavtoTcvôv. Loch, o/j. c17., p. 122 ; trad. lat. d’Allatius dans Migne, op. cit., col. 426. Cf. Le Quien, diss. V, P. G., t. xciv, col. 360. Il est évident que l’auteur a en vue la doctrine de saint Thomas, In IV Sent., 1. IV, dist. XXI, q. i, a. 1, q. ii : locns piirgatorii est locus inferior inferno cnnjundiis, ila qiiod idem ir/iiis sil qui damnatos crucial in inferno. et qui j’uslos in purijalorio purgal…, et ad 1°"> : ir/nis purgalorius est celernu.t quantum ad suam subsUmtiam, sed Icmporalis qunntum ad efjectum purrjalionis.

Nous avons tenu à exposer assez longuement l’opinion du métropolite de Philadelphie, parce qu’elle nous fait faire un progrés dans l’intelligence de la doctrine grecque, relative à l'état des âmes, après la mort et avant le jugement dernier. Les âmes ne sont pas dans un lieu distinct de l’enfer ; donc il n’y a pas de purgatoire et de feu purilicateur ; mais elles vont en enfer, et là, certaines d’entre elles du moins peuvent subir temporairement les atteintes du feu éternel. De telle sorte qu’en réalité, tout en niant le feu, on l’accepte, tout comme en s’insurgeant contre le mot de purgatoire, on admet la chose. On examinera à l’art. Purgatoire le détail de cette doctrine, qu’on retrouve nettement alTnniée dans Joseph Bryennios (xiv<'-xve siècle). Oral., ii, de fiiluro judicio el hcaliludinc, Opéra, Leipzig, 1768-1784, lequel représente les âmes coupables, que le jugement doit épargner, en compagnie des démons dont les yeux lancent du feu, et dont l’haleine est de feu, TïOp nvéovTs :, TT-jp pXÉTTovteç. Le séjour des âmes en enfer, en compagnie des démons qui les tourmentent, est encore admis par Siméon de Thessalonique, Responsa ad Gabrielem Pcnlepoliianum, loc. cit., P. G., t. clv, col. 844, et, moins la compagnie des démons, par Zacarias Gerganos, dans sa Xpianavr/ri y.aTTJxvjui ;, Wittenberg, 1622, par le synode de Jérusalem de 1672, c. XVIII, Hardouin, Collectio concil., t. xi, col. 255, et par Dosithée, dans sa profession de foi. Kimmel, op. cit., p. 463-464. Cf. Perpétuité de la foi, Migne, t. iii, col. 1133-1134 ; Dyovouniotis, op. cit., p. 71. Or, on sait, par Macaire, Théologie orthodoxe, traduite par un Russe, t. ii, p. 697 sq., que le feu de l’enfer est admis par tous les orthodoxes qui se contentent d’accepter, sans les discuter, les affirmations des textes évangéliques relatifs à ce genre de peine. Mais il ne faut pas nier cependant que tous les auteurs contemporains, comme Macaire, op. cit., t. ii, p. 727, tout en admettant la réalité d’une peine ultra-terrestre, refusent à cette peine un caractère satisfactoire ; d’autres, comme Androutsos, Aoyfja-i/.ri rriç opOoSofo-j àvaTOÀty-ï) ; Èyy), ïl"*î> Athènes, 1907, p. 408 sq., nient l’existence de toute peine ultra-terrestre.

D’autre part, la liturgie grecque, voir Allatius, op. cit., col. 42.5, 441, emploie à l'égard des défunts des formules analogues à celles de la liturgie latine :

Eripe ab ignc horrendo…, libéra ab igné gehennœ…, ab ignc selcrno ; cf. les prières latines : Libéra me. Domine, de morte œlerna ; Domine Jesu Christc…, libéra animas… de pœnis inferni et de profundo lacu. Or, ni l'Église latine ni l'Église grecque n’entendent prier pour les véritables damnés condamnés à l’enfer éternel. P’aut-il en conclure que ce feu de la géhenne, ce feu éternel n’est autre que le feu du purgatoire, auquel, par une vue rétrospective, on applique des qualifications qui ne lui appartiennent pas ? Voir Allatius, loc. cit. C’est ce qu’explique le théologien grec catholique Mathieu Caryophylles, dans sa réfutation des blasphèmes de Zacarias Gerganos, "E)syyoi TT, î 'i£'jSoxp"Tf’av'.y.r, ; v.oLX-riyjffcwz Za^aptov to’j Tspyavoj inh xt, v "ApTr, v, Rome, 1631, blasph. 47. Voir aussi Perpétuité de la foi, Migne, t. iii, col. 1135. Nous laisserons présentement de côté l’argument tiré de la liturgie, car les textes concernent surtout l’efficacité de la prière pour les morts et auront leur place normale à l’art. Purgatoire. Ce que nous avons dit est suffisant pour démontrer que la croyance au feu du purgatoire n’est nullement contredite, en réalité, par les doctrines de l'Église grecque : il semble, au contraire, qu’elle trouve dans bon nombre d’expressions tirées des auteurs ecclesiasticiues grecs, même schismatiques, un solide point d’appui ; et ceux cjui refusent de souscrire au feu des latins n’opposent ce refus que par crainte de tomber dans l’erreur d’Origène ; c’est ce que déclare péremptoirement Manuel le Rhéteur, disciple de Marc d'Éphèse ; il affirme que xaOapTriptov ttùo o’jS' c !).o) ; iin/xç/i'. [j.sTà ôivarov, y.ai T’i^v k^lii-/Zi ccTiaXÀayTiv /.al àTroSt’ioiT'.v : To’jto yàp Tr, ç To-j Optyivou ; aipjuîo) ; IttV/ à7toy.uv-|U.a. Refulalio dceem capitum, bibliothèque Vaticane, Cod. griec, 1447, p. 277. Il y a donc, de leur part, erreur d’appréciation touchant notre feu du purgatoire, mais non opposition doctrinale absolue.

La tradition latine.

La doctrine du feu du

purgatoire se trouve implicitement affirmée par les Pères qui ont admis la réalité du feu du jugement, voir col. 2242 ; Tertullien parle en général des peines du purgatoire, mais n’en précise pas la nature, voir A. d'.lès, La théologie de Tertullien, Paris, 1905, p. 133-134 ; saint Cyprien, au contraire, connaît déjà le feu purificateur : Aliud est ad veniam slare, aliud ad gloriam pcrvenire, aliud missum in carcerem non exire inde donec solvat novissinuim quadranlem… pro peccatis longo dolore cruciutum emundari et pvnoARl Diu IGNE. Epist., X, ad Antonianuni. P. L., t. iii, col. 786. Mais, à part saint Cyprien et peut-être saint Jérôme, In Is., 1. XVIII, c. lxvi, P. L., t. xxiv, col. 677-678, les Pères latins, jusqu'à saint Augustin, identifient encore le feu du purgatoire et le feu du jugement. On sait qu’ils admettent d’ailleurs le dogme du purgatoire, puisqu’ils prêchent la nécessité de prier et de satisfaire pour les morts. Voir Purgatoire. C’est saint Augustin qui le premier a formulé nettement l’hypothèse du feu purificateur distinct du feu du jugement dernier, et qui de cette manière a explicité une doctrine jusqu’alors implicitement admise. Tant qu’il avait partagé l’illusion du millénarisme, saint Augustin expliquait I Cor., iii, 13-15, du feu du jugement. In ps. vi, n. 3 ; xxix, n. 9 ; .YA-.YV7/, n. 3, P. L., t. xxxvi, col. 92, 222, 397 ; cf. In ps. ciii, serm. iii, n. 5, P. L., t. xxxvii, col. 1363 ; cette explication, incluant l’hypothèse de la purification par le feu, reste donc encore une première afiirmation implicite du feu du purgatoire. Mais plus tard, saint Augustin affirme très nettement la purification des âmes, après cette vie, par le feu, quoiqu’il ne présente pas cette doctrine comme absolument certaine :.Si hoc temporis intervallo spiritus defunclorum e/usmodi ignis dicuntur perpeli…, non redarguo quia