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EUCHARISTIQUES (ACCIDENTS)


de lieu commun eucharistique, alors que depuis longtemps on sera en possession d’une théorie de la conversion et des apparences sacramentelles. Alger de Liège, qui, d’après Pierre de Marca, Traité du saint sacrement de l’eucharistie. Opéra, Bamberg, 1789, t. V, p. 141, enseigna le premier la théorie des accidents sans sujet, répétera la phrase empruntée aux Sententias Prosperi et tant répétée déjà par les adversaires orthodoxes de Bérenger : Si quæris modum quo id fieri possit, breviter ad pressens rcspondeo : mystcrium fidei est ; credi salubriter potest, investigari utiliter non potest. De sacramentis corporis et sanguinisDominici, 1. I, c. ix, édit. Malou, Louvain, 1847. Alliora te ne quæsieris, dira Pierre le Vénérable, sed esta Dec tuo, quod est jumentum tuum tibi. Non nititur illud perscrutari sécréta tua : non coneris temerare arcana Dei tui. De sacriflcio missæ et transsubstantialionc, édit. Vlimmerius, Louvain, 1561, p. 207, 214. Pour Théophylacte, l’effort spéculatif, c’est l’incrédulité même : Judœi, cum audissent de esu carnis illius, discedunt. Ideo et verbum incredulilatis dicunt : quomodo (xb tï, ? ài : i<7Tta ; f’viu.a. tô tzmc). Nam quando cogitationes incredulitatis ingrediuntur animam, ingreditur simul quomodo. Opéra omnia, Venise, 1754, t. I, p. 594. Pour être bref, contentons-nous de signaler des développements analogues, chez Lanlranc, Decorpore et sanguine Domini, c. xvii, édit. d’Achery, p. 242 ; Durand de Troarn, P. L., t. cxlix, col. 1395 ; Guitmond d’Aversa, ibid., col. 1141 ; Paschase Radbert, De corpore et sanguine Domini. iv, 3, P. L., t. cxx, col. 1279 ; Amalaire de Metz, Epist. ad Guntrad., d’Achery, Spicilegium, Paris, 1666, t. vii, p. 172 ; S. Jean Damascène, De fide orthodoxa, 1. IV, c. xiii, édit. Le Quicn, t. i, p. 270 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Joa., édit. Pusey, Oxford, 1872, t. i, p. 526 ; S. Jean Chrysostomc, In Mattli., homil. lxxxii, 4, P. G., t. Lviii, col. 743 ; S. Hilaire, De Trinitate, 1. VIII, n. 14, Opéra, Vérone, 1730, t. ii, p. 223. L’application de la dialectique au dogme, caractéristique de la méthode scolastique dès ses débuts, provoqua presque aussitôt des défiances. Lanfranc reproche à Bérenger de déserter la méthode d’autorité pour le raisonnement : Relictis sacris aucloritatibus ad dialecticam confugium facis. Op. cit., c. vu. S’il consent à user de cette arme suspecte, c’est sur l’exemple d’Augustin qui fit l'éloge de cet art et s’en servit victorieusement contre l’hérésiarque Félicien. Etienne de Baugé, devenu èvêque d’Autun en 1112, De sacramento atlaris, que les éditeurs de la Maxima bibliotheca veterum Patrum, t. xx, p. 1872, ont, sur le témoignage de Possevin, de Bellarmin et d’Aubert le Mire, placé à tort au xe siècle, montre la même aversion à l’endroit des dialecticiens. Parlant du miracle eucharistique, il s'écrie : Quis intellectus non deficiat ? Omnis sensus hebetescit, omnis ratio evanescit, omnis prorsus dialecticorum inquisitio absit, hoc sola ftdes probat et agnoscit, quia cibus iiominum fit panis angelorum, cela dans un traité où paraît, l’une des premières fois, le terme : transsubstantiare, qui trahit assez sa provenance scolaire. Un sermon, inséré par Beaugendre dans son édition des œuvres d’Hildebert de Lavardin, Serm., lxxix, in festo S. M. Magdalense, mais qui appartient à Pierre le Mangeur, comme l’a prouvé Hauréau, Notices et extraits de quelques manuscrits, t. i, p. 155, exprime un blâme énergique contre les discussions subtiles en matière de foi : quibusdam minutiis vcrborum in caviltalione respondentes utuntur, quibus in dispututione uti, ossa Christi est incinerare. Au xi"e siècle, il y a tout un parti de tendance antidialecticienne représenté par Manégolde de Lutenbach, le maître de Guillaume de Champeaux, Opusculum contra Wolfelmum Cotoniensem, P. L., t. CLV, et Othlon de Saint-Emmcran, û/a/og’us

de tribus quæstionilms, c. lx ; De doctrina spirituali, c. XIII, P. L., t. cxLvi, col. 276, en Allemagne, et Pierre Damien, Opusc. de div. omnipotentia. Opéra omnia, édit. Cajetan, Paris, 1743, t. iii, p. 312, en Italie. De telles tendances, on l’avouera, ne sont guère favorables à l'éclosion d’une théorie métaphysique de ce que le langage du sens commun, celui des Pères, appelle les espèces eucharistiques. Nous croyons que, sur ce point spécial, la pensée des Pères est demeurée inachevée. Même ceux qui sont manifestement en possession d’un concept de la conversion eucharistique, équivalent à celui d’une véritable transsubstantiation, semblent s'être fort peu inquiétés de scruter les conditions spéciales d’existence, résultant pour les éléments sensibles du sacrement, de la conversion substantielle du pain et du vin. Les Pères sont réalistes ; ils croient à l’objectivité des qualités sensibles, après comme avant la « sanctification » , la « consécration » des matières sacramentelles ; leur attitude reste celle du sens commun devant l’expérience sensible : réalisme instinctif ; ainsi s’explique la facilité avec laquelle leur pensée se laissera couler par les péripatéticiens scolastiques dans les formules de la physique aristotélicienne, qui est précisément la physique du sens commun. Ici encore la rencontre entre le dogme et l’aristotélisme ne pouvait manquer de se produire ; celui-ci, à cause précisément de son réalisme, devait, de préférence à toute autre philosophie, fournir à celui-là et ses formules et ses moyens d’expression. Seulement, le problème philosophique qui, dans le réalisme, est la conséquence nécessaire du dogme de la transsubstantiation, ne s’est pas posé devant la conscience des Pères. Il est donc vain de chercher chez eux une réponse à ce problème. Quand saint Cyrille d’Alexandrie nous dit que, dans l’eucharistie, nous possédons la chair divine et le sang précieux du Verbe, lo ; èv apTw ts -/.at oi’vto. In Luc, xxii, 19, P. G., t. lxxii, col. 911, est-on en droit de traduire ce (li ; par l’expression « en apparence » comme le fait Rauschen, L’eucharistie et la pénitence durant les six premiers siècles de l' Église, Faris, 1910, p. 145, et dans ce pain et ce vin « en apparence » faut-il reconnaître la théorie des qualités subsistant miraculeusement ? Il nous paraît que ce serait beaucoup presser le texte^ peut-être même donner à la pensée de saint Cyrille plus de précision et de consistance systématique qu’elle n’en avait, surtout si l’on tient compte des mots suivants : « Dieu communique aux dons offerts (le pain et le vin) le pouvoir de la vie(ojva(j.iv C")^?) et les transforme en l'énergie de sa propre chair ([XcÔiTtrjaiv aJTà upôs ÉvÉpyîtav TTis èa-jiroO CTap/.ô ;). Ces mots affirment un changement, mais Rauschen a fort bien observé que ce changement ne semble impliquer qu’une présence dynamique ; du moins une telle présence n’estelle pas clairement exclue par le texte qui, dès lors, n’affirme rien et ne peut rien affirmer au sujet des apparences. Un pain doué d’un pouvoir vivifiant surnaturel serait « apparent » dans la mesure où il paraîtrait doué de propriétés purement naturelles. Mgr BatilTol hésite et n’ose se prononcer. Commentant le (I) ; Èv apTw xai oîvm, il écrit : « Est-ce donc que pour Cyrille le pain et le vin est une pure apparence ? Est-ce donc que la substance du pain et du vin cesse d'être ? C’est la conséquence qu’il convient logiquement de tirer des expressions de Cyrille et nous aurions ici une ébauche de la transsubstantiation. Mais Cyrille a-t-il poussé lui-même son analyse jusquelà? » Éludes d’histoire et de théologie positioe, 2<^ édit., p. 282. Nous tenons avec le P. Mahé, L’eucharistie et Cyrille d’Alexandrie, dans la Renuc d’hisl. ecclés., Louvain, t. viii, p. 695, que le texte, replacé dans son cadre naturel et lu surtout à la lumière des autres textes cyrilliens touchant l’eucharistie, exige plus qu’une