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EZECHIEL (LIVRE D"


Ce qui indique le mieux l’unité d’auteur, c’est la constante uniformité du style d’un bout à l’autre du livre et l’iiomogénéilé manifeste de son contenu : < Que cet auteur unique fut elTectivement le contemporain de Jérémie. c’est ce que prouve le ton général du livre, différent de celui des prophètes postexiliens… : Israël lutte contre l’idolâtrie ; il doit être châtié et purifie ; il se trouve en relation bien défmie avec certaines nations. La situation rehgieuse et politique est la même dans Ézéchiel que dans Jérémie. » Toy, loc. cit., col. 1460. « Que cet auteur fut un prêtre, c’est ce que rend évident le fait que tant de place est consacrée dans les c. xl-xi.viii au temple et aux services ciu’il comporte, à ses ministres, etc. Et que ce prêtre écrivit ces chapitres avant le retour de l’exil, c’est ce qu’on peut inférer de l’influence considérable exercée par -son œuvre tout entière sur la réorganisation du culte divin immédiatement après l’exil. VoirW. Rob. Smith, The OUI restament in the jewisli Chiirch, Londres, 1907, 11. 442-449. » Gigot, Spécial introduction, New York, Cincinnati, Cliicago, 1906, t. ii, p. 326, 330-332.

Si l’on ne peut admettre avec Winckler, Allorienlalische Forschtmgen, 3° série, Leipzig, 1902, t. i, p. 1 : 55, que le livre d'Ézéchiel est « le produit d’une combinaison d'éléments hétérogènes, comme Isaïe et Jérémie, et que d’un bout à l’autre la distinction des sources s’y laisse opérer souvent avec plus de facilité que dans ces deux livres, » peut-être le jusement est-il exagéré qui prononce qu' « aucun autre livre biblique ne montre une unité de plan si fermement appliquée et si clairement développée, et de la première à la dernière lettre ne trahit la même main, le même esprit, et, fortement empreinte, la même individualité. » Cornill, Einkitimr/ in das A. T., Leipzig, 1896, p. 176. Cf. aussi Smend, Das Prophet Ezcchiel, Leipzig, 1880, p. xxi ; Bertholet, Das Biich liezekicl, Leipzig, 1897, p. xrx sq. ; avec quelque restriction, Orelli. Ezcchiel, Leipzig, 1896, p. 8 sq., et Kratzschmar, Das Biicli Ezéchiel, Gœttingue, 1900, p. xi sq. ; Lajciak, Èzéehiel, sa personne et son enseignement, Paris et Cahors, 1905, p. 160. Selon J. Herrmann ! Ezechielsliidien, Leipzig, 1908, p. 61-62, le livre d'Ézéchiel se présente à nous comme un recueil de morceaux formé peu à peu par le prophète, avec des retouches rédactionnelles et quelques insertions subséquentes, effectuées, soit par l’auteur luimême, soit, entrés petit nombre, par des mains étrangères. Développement de la thèse, p. 8-63. Cf. aussi Rothstein, Das Buch Ezcchiel, dans Kautzsch, Die heUir/e Scliri/t des A. T., Tubingue, 1909, t. i, p. 813 sq. Toutefois les conclusions de détail sont loin d'être identiques chez ces deux auteurs.

II. STYLE.

Le style d'Ézéchiel est un mélange de monotonie et de variété, de mouvement et de lourtleur. La monotonie naît de la constante répétition d’un certain nombre de formules stéréotypées (on en signale une trentaine environ, cf. Driver, Introduction, p. 297 sq. ; Gigot, op. cit., p. 323 sq.) dont plusieurs reviennent fort souvent. Des éléments de variété sont fournis cepenthuit par les nombreuses visions, i, viiiXI, xxvii, XL ; similitudes ou symboles, iii-v, xii^ xv, XXXI, XXXIV, paraboles, xvii, et allégories, xvi, xxiiiXXIV, au moyen desquelles le prophète écrivain interrompt agréablement la série des oracles directs, et qui font honneur à sa jmissante imagination et à son génie. Toutefois, par la manière dont il développe longuement, les surchargeant de détails, ces morceaux artificiels (cf..spécialement xvi, xxiii, xxxi), Ézéchiel n'évite pas une certaine lourdeur dans la composition, (lue ne contrebalance pas toujours le « large mouvement rythmique de la pensée précipité comme une lioule à travers quelques-uns de ses plus longs discours. » Skinner, loc. cil. La poésie, chez lui, affecte l)rmcipalement la forme de la lamentation, xix, 2-14 ; xxvi, 17 ; xxvii, 2-10, 26-.36 ; xxviii, 12-17 ; xxxii, 2-7.

Bien qu’on ait dit la prose d'Ézéchiel « simple et sans recherche, » S. Black, Encyclopivdia britannica, 1878. t. Mil, p. 830, elle est cependant très obscure,

ainsi que l’avaient déjà remarqué les anciens commentateurs. Cf. S. Grégoire de Nazianze, Orcd., ii, n. 64 ; XXV, n. 14, P. G., t. xxxv, col. 473, 1217 ; Théodoret, Cornni. in Ezech., prol., P. G., t. lxxxi, col. 812 ; S..Jérôme, Episl., lui, ad Pcnilin., 7 ; Comm. in Ezech., l)assim, P. L., t. xxii, col. 547 ; t. xxv, col. 17, 392, 468. On attribue généralement cette obscurité à la minutie et à l’abondance des descriptions, ainsi qu'à la hardiesse des images. Cornely, op. cit., p. 453 sq. Peut-être aussi, parmi les causes de ce phénomène, faut-il faire une large part à la corruption du texte hébreu.

IV. Contenu prophétique.

Après avoir raconté comment, dans une vision, i-ii, 2 ; iii, 12-15, 22, il reçut de Jahvé mission d’annoncer à la collectivité Israélite quels châtiments lui étaient réservés, ii, 3-iii,

11, et comment, n sept jours après, » le même Jahvé lui manda d’avertir la « maison d’Israël » des sanctions divines portées en cas soit d’endurcissement, soit de repentir, à l’endroit des individus, et en cas de nonaccomplissement de son mandat, à l’endroit du prophète lui-même, iii, 16-21 (rappel, xxxiii, 1-9), Ézéchiel prophétise relativement aux « jugements » , V, 8, 15 qui atteindront les coupables, puis au salut et au rétablissement du « reste qui échappera, » xiv, 22, au châtiment.

I. pnoruiCTiE DES JUGEMENTS.

Ces jugements atteignent non seulement Israël, mais aussi les nations étrangères. — 1° Prophéties contre Israël. — 1. Elles sont adressées aux déportés de l’an 597 parmi lesquels se trouve le prophète, iii, 11 ; xi, 15 a ; mais elles atteignent directement le royaume de Juda, spécialement les « habitants de Jérusalem, » xi, 15 b. — 2. Les personnes qu’elles intéressent sont le peuple même de Juda, toute la maison d’Israël, » iii, 7 : enfants du peuple, iii, 11 ; prophètes et prophétesses, xiii ; xxii, 25, 28 ; prêtres, xxii, 26 ; chefs, princes ou pasteurs, xix, 1 ; XXII, 6, 27 ; xxxiv, 2 sq. ; le roi, xii, 2 ; xvii,

12, 20. — 3. Les chàtimenls qu’elles annoncent sont : a) le siège de Jérusalem et ses suites funestes : la famine et la soif, la peste, l’extermination par l'épée ou par les bêtes, l’incendie, la destruction, le pillage, qui s'étendront, du reste, à « tout le pays, » châtiments figurés soit par des actions symboliques, iv, 1-13 ; V, 1-4 ; xii, 17-18 ; xxi, 23-25 ; xxiv, 2-5, 10-12, 15-17, soit en paraboles ou allégories, xiii, 11-16 ; xv, 1-5 ; xYi, 35-43 ; xix, 10-14 ; xxii, 18-22 ; xxiii, 22-35, 43-47, ou décrits dans des visions ou table ux prophéticjues, iv, 16-17 ; v, 10-17 ; vi, 2-7, 11-14 ; vii, 15-22, 24-27 ; ix, 1-7, 11 ; x, 2, 6-7 ; xi, 8-11 ; xii, 1920 ; XIV, 13-23 ; XV, 6-8 ; xxi, 1-22, 26-27, 31-32 ; xxiv, 18-23 ; b) la captivité et la dispersion, figurées ou décrites, v, 2, 12 ; vi, 8 ; xii, 3-7, 11-15 ; xvii, 1-21 ; XIX, 1-9. — 4. L’imminence et la certitude de ces châtiments sont atrn-mées contre les incrédules, xii, 21-28, et les faux prophètes, xiii, 6-7, 8-10. — 5. Les motifs de ces châtiments sont les péchés et crimes de tout Israël, raijpelés d’une manière générale à l’occasion de la prophétie des châtiments ; spécialement énumérés dans xviii, 5-18 ; xxii, 1-16 : a) l’idolâtrie, dans le temple même, xviii, 6 b, 12 d, 15b ; cî. viii, 3, 5, idole de la jalousie (Aschéra ? II (IV) Reg., xxi, 7 ; xxiii, 6 ; H Chron. (Par.), xxxiii, 7, 15) ; viii 10 sq., images peintes sur la muraille ; viii, 15, Tammuz ; viii, 16, adoration du soleil ; ou sur les hauts-lieux, xviit, 6 a, Il a, 15 a ; xxii, 8 a, 9 b ; par suite des alliances étrangères, allégories, xvi, 15-34 ; x.xiii, 5-42 ; avec l’aggravation des sacrifices humains, xvi, 20-21 ; xx, 26, 31 ; xxiii, 37, 39 ; l>) l’impudicité, xviii, 6 c-d, 11 c, 15 c ; XXII, 10-11 ; c) l’oppression et le meurtre à l'égard du pauvre, du malheureux, du débiteur à gage, de l’orphelin, de la veuve, de l'étranger, xviii, 7 a-b, 12 a, c, 16 a-b ; xxii, 6-7, 9 « ; rf) la rapine et l’usure, xvin.