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EXTRKME ONCTION DU I" AU IX" SIÈCLE


rent vivement (concile de Pavie). Tous les documents la recommandent, les prières liturgiques l’exaltent magnifiquement. Certains écrivains la déclarent nécessaire (Tliéodulfe, pseudo-Egbert, Eigil, etc.), commandée par l’apôtre (Bède, Raban Maur, Amalaire, Agobard, Rodulphe, pseudovugustin, etc.). Cependant il ne faudrait pas toujours prendre à la lettre les formules impératives : ainsi, dans la même phrase, Bède parle du conseil et du précepte d’oindre les malades.

Il y avait des négligents. Des évêques ne consacraient pas chaque année l’huile sainte (concile d’Aixla-Chapelle). Des prêtres oubliaient certainement leurs devoirs de ministres de l’onction : un trop grand nombre d’ordonnances le leur rappelle. Au remède apostolique, des chrétiens préféraient des sortilèges (Jonas). Des fidèles ignoraient la vertu du rite (concile de Pavie, Jonas). Les malades se faisaient illusion sur leur état. La violence de la douleur empêchait des moribonds de réclamer l’onction (concile de Pavie). Le soin et l’insistance avec lesquels Théodulfe énumère les diverses personnes qui peuvent recevoir l’huile sainte laisse soupçonner qu’on se demandait si on devait l’accorder à certaines catégories de chrétiens. Parce qu’elle remettait les péchés, on hésita parfois à oindre les justes (Vie de saint Adalhard). iVIais l’Église ne cessa de protester et de réagir.

2. A qui l’onction, peut-elle être donnée ? — Les malades, tels sont les bénéficiaires de l’huile sainte. Il n’est pas nécessaire que le fidèle soit arrivé à la dernière extrémité. Le concile d’Aix-la-Chapelle distingue de l’onction les rites conférés quand la fin est imminente. Certains rituels prévoient le cas où le malade peut se mettre à genoux, pendant qu’on l’oint (Théodulfe, Ordo III, etc.). Les cérémonies d’ailleurs 1res longues ne peuvent s’exécuter que si le ministre n’est pas pressé par le temps. ThéoduUe et Agobard parlent des malades qui se font oindre à l’église même.

D’autre part, de très nombreux textes donnent à entendre que toute légère indisposition ne donne pas droit à recevoir l’onction. Le chrétien oint est atteint à tel point qu’il est permis de lui accorder le rite (Théodulfe ) ; il est en danger de mort (concile de Mayence), la fin suit souvent (saint Adalhard, sainte Maure, saint Théodore Studite). Les prières liturgiques demandent la délivrance d’un mal sérieux, d’un péril grave. On trouve même une formule abrégée, et qui doit servir lorsque le rite est conféré à un moribond expirant (sacramentaire de Saint-Remi).

Tous les malades peuvent être oints, non seulement les clercs, mais les laïques ; non seulement les hommes, mais les femmes et les enfants, même les patients qui ne peuvent plus parler, s’ils donnent des signes apparents de vie et si des amis témoignent de leur foi (Théodulfe). Les saints seraient à tort privés de l’onction : ils la réclament et l’obtiennent (saint Adalliard, sainte Maure, saint Théodore Studite, saint Rambert). Avant de demander l’huile sainte, il faut se réconcilier avec Dieu. La déclaration d’Innocent I<=r sur le refus du rite aux pénitents est plus d’une fois rappelée. Hincmar n’autorise des pécheurs publics excommuniés à recevoir l’onction que s’ils se repentent, regrettent publiquement leur conduite, prennent les engagements nécessaires, se réconcilient avec Dieu. Le concile de Pavie exige que les fidèles soumis à la pénitence aient reçu l’absolution et mérité la communion. Toujours l’extrême onction doit être précédée de la confession : les textes liturgiques l’affirment, les écrivains chrétiens le déclarent. Il peut y avoir après l’application d’huile et après le viatique une dernière absolution (réconciliât io ad morlem), et c’est sans doute à elle que pensent Eigil et le pseudo-Augustin quand, énumérant les dernières cérémonies.

ils nomment l’onction avant la réconciliation. Mais une confession précède toujours les applications d’huile. Bède (et son témoignage est souvent reproduit ) insiste sur ce processus et en donne une raison qui semble même étrange, à moins que les auteurs ne pensent seulement aux fautes graves : sans confession, pas de rémission des péchés.

La communion n’est pas requise avant l’onction. Au contraire, d’après tous les témoins (à deux ou trois exceptions près), le viatique n’est accordé qu’en dernier lieu (Théodulfe, saint Boniface, capitulaires, Gerbaud, Paschase Radbert, livres liturgiques, etc.). Isaac de Langres, Prudence (sur l’authenticité du texte, voir plus haut) et le pontifical que Martène lui attribue, YOrdo II proposent l’ordre contraire. Partout les trois rites se suivent.

Les documents liturgiques nous apprennent qu’en certaines églises, les applications d’huile étaient faites pendant sept jours consécutifs, si c’était nécessaire (peut-être Théodulfe, sacramentaire de Saint-Remi, Ordincs III, IV, Y III). La vie de saint Rambert nous apprend que la règle était observée. Le fait est indéniable. Martène, op. cit., p. 108 ; Ménard, op. cit., P. L., t. Lxxviii, col. 523 ; Mabillon, Observatio de extrema unctione, l’ans Migne, Theologiæ cursus completus, t. xxiv, col. 133 ; Kern, op. cit., p. 339 sq. Croire que le rite était un sacrement le premier jour seulement et que les onctions faites le lendemain et dans la suite étaient simplement des prières de l’Église, des sacramentaux (Martène, Ménard et Kern réfutent cette opinion), c’est avancer une assertion gratuite, c’est même heurter le texte de la rubrique : dans les manuscrits liturgiques cités plus haut, ce qui est recommandé, c’est de faire pendant sept jours ce qui a été fait la veille : et sic faciant. Ordo III, Martène, op. cit., p. 128. Supposer que le sacrement se composait des onctions accomplies pendant les sept jours, de même qu’aujourd’hui, il comprend les diverses applications d’huile faites sur les sens, Gutberlet, Dogmatische Théologie, t. x a, p. 231 ; Schmid, Zeitsclu-ift fiir katholische Théologie, Inspruck, 1901, t. xxv, p. 261, c’est émettre une hypothèse qu’il est difficile de soutenir : car si les onctions de chaque jour étaient parties essentielles du sacrement, c’est seulement à la fin de la semaine que le rite aurait été accompli. Or, le malade pouvait ne pas attendre ce moment-là pour mourir. Et il serait étrange que l’Église, si préoccupée alors de ne pas laisser un moribond quitter la vie sans l’huile sainte, eût imaginé un mode de collation qui eût exposé les fidèles à ne pas recevoir la grâce du sacrement. De plus, les rubriques portent : On fera ainsi pendant sept jours, si nécessitas fuerit, si c’est nécessaire. Les hommes de l’époque croyaient donc que l’onction pouvait dès l’origine produire son effet. Répondre que, le premier jour, la huitième partie des fruits était assurée, le second, un autre huitième, ce n’est pas résoudre la difficulté. Ou il y avait sacrement dès les premières onctions et dès ce moment le sujet avait droit à toutes les grâces, ou un huitième seulement du rite était accompli : c’est donc à la fin de la semaine et non auparavant que le sacrement était complet, apte à donner son fruit.

Kern, op. cit., p. 338, propose une autre explication. Si le rite était ainsi réitéré, c’est que l’extrême onction peut en effet être administrée plusieurs fois, non seulement dans la même maladie, mais pour parer au même péril de mort. Pesch rapporte cette hypothèse, sans la combattre. Op. cit., p. 279. Mac Donald l’a critiquée. Si le sacrement a été réitéré, c’est parce qu’on estimait, la santé ne revenant pas et la mort n’arrivant pas, que le rite avait été accompli lorsque le sujet n’était pas assez malade pour le