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1367 EUCHARISTIE DU XVP AU XX « SIÈCLE— EUCHARISTIQUES (ACCIDENTS) 1368

la quantité de pomme de terre ou de fécule est peu considérable et ne change pas la nature du pain. Les hosties colorées qui servent de pains à cacheter sont à tout le moins interdites, si même elles ne sont pas invalides ou au moins douteuses, dans le cas où la couleur altérerait le pain. Les missionnaires ont souvent de grandes difficuïtés à se procurer de la farine de blé. Le Saint-Ofiice, le 20juin 1852, sur la demande du vicaire apostolique de Coimbatour, a permis aux missionnaires qui ne pouvaient faire venir de la farine de l’Europe, de s’en procurer en broyant des grains de blé et en les faisant macérer dans l’eau, pourvu que la farine ait été passée au crible et séparée du son. CoUeclanea de Propaganda fide, n. VOL Cf. P. Gasparri, Tractatus canonicus de sanctissima eiicharislia, n. 799, 800, Paris, 1897, t. ii, p. p. 117-119.

Les prêtres grecs et latins doivent observer les rites de leurs Églises respectives pour l’usage du pain fermenté ou azyme, et Benoît XIV a interdit aux uns et aux autres de changer de rite sous peine d’une suspense perpétuelle a divinis. Const. Elsi pastoralis, du 26 mai 1742, § 6, n. 10. Cf. P. Gasparri, op. cit., n. 804, t. II, p. 121-122.

Il est de coutume, dans l'Église latine, que l’image de Jésus crucifié soit imprimée par le gaufrier sur l’hostie. Le S. G. des Rites a prescrit d’observer cette coutume, le 23 avril 1834. Décréta aulhenlica, n. 4723.

Le viii, qui est la nature de la consécration du précieux sang, a été l’objet de diverses décisions offlcielles. Il doit être extrait de la vigne. En 1819, la Propagande refusa d’autoriser l’emploi de la liqueur tirée des vignes sauvages du pays de Siam, parce qu’il n'était pas constant qu’elle était du vin véritable, donec aliter fucril judicalum. CoUeclanea, n. 699. Dans son instruction du 19 mars 1861, la même Congrégation a interdit à tous les missionnaires de se servir de vins artificiels, obtenus par des opérations chimiques. CoUeclanea, n. 702. Le Saint-Oflice a autorisé, dès le 22 juillet 1703, le vin de raisins secs pour les missionnaires de l’Ethiopie, et cette première décision a été confirmée, le 7 mai 1879, à la demande de l'évêque de Saint-Albert. CoUeclanea de Propaganda fide, n. 705.

Le vin qui commence à s’aciduler reste matière valide du sacrement, mais il est défendu par les rubriques du missel de s’en servir, sous peine de faute grave. Benoît XIV excuse toutefois de cette faute le prêtre qui doit célébrer et qui n’a pas la faculté de changer de vin de messe, par exemple, un religieux ; la faute retomberait sur les supérieurs ou les employés chargés de fournir le vin de messe. Const. Elsi pastoralis, § 6, n. 2. Le Saint-Office a interdit, le 27 avril 1892, de corriger l’acidité naturelle de certains vins, en y ajoutant du tartrate de potasse, extrait des lies de vin par un procédé chimique, quoique cet alliage ne change ni ne diminue le viii, mais l’améliore. P. Gasparri, op. cit., n. 818, t. II, p. 130-131. Il a été toutefois permis d’y faire une légère addition d’eau-de-vie ou d’alcool plutôt que de le soumettre à une ébullition jusqu'à 65 degrés, pour faciliter sa conservation. Quant à l’alcool à employer, il faut qu’il soit un alcool de viii, que la quantité ajoutée, jointe à celle que le vin a déjà, ne dépasse pas 12 pour cent et que le mélange se fasse lorsque le vin est nouveau. Réponses faites à l'évêque de Marseille, le 4 mars 1887 et le 30 juillet 1890. Denzinger-Bannwart, n. 1937, 1938 ; Collectanea de Propaganda fide, n. 2162, 706. Le 25 avril 1891, le Saint-Office a refusé ce mélange d’alcool demandé par l’archevêque de Tarragone pour les vins doux d’Espagne. CoUeclanea de Propaganda fuie, n. 2163. Tout en préférant ce mélange d’alcool à une nouvelle fermentation des raisins additionnés de sucre, il a toutefois concédé aux missionnaires du

Tche-li, en Chine, d’ajouter au vin du pays des raisins secs pour produire une nouvelle fermentation. Réponse du 25 juin 1891 au vicaire apostolique du Tche-li. Réponse identique pour le Brésil, le 5 août 1896. L’archevêque de Tarragone, ayant fait une nouvelle demande pour les vins doux d’Espagne, obtint gain de cause, le même jour ; la quantité d’alcool fut même élevée pour ces vins à 17 ou 18 degrés. Le SaintOflice autorisa aussi l’emploi de vin de messe fait avec des raisins secs, pourvu qu’il y ait eu fermentation dans la fabrication. P. Gasparri, op. cit., p. 823, t. ii, p. 133-138.

Benoît XIV enfin a approuvé la coutume, qui existe en certains pays froids, de mêler dans le calice de l’eau chaude au vin pour l’empêcher de geler, conformément à la pratique des grecs. Const. Elsi pastoralis, § 6, n. 2.

2. Forme.

Sur l’opinion d’Ambroise Catharin et de Christophe de Cheffontaines, comme sur celle de Renaudot, voir plus haut, col. 273-275.

E. Mangenot.

    1. EUCHARISTIQUES (ACCIDENTS)##


EUCHARISTIQUES (ACCIDENTS).— L Détermination du problème. II. La période patristiqueIII. La période scolastique. IV. Wyclif et le concile de Constance. V. La période moderne. VI. Conclusion générale.

I. Le problème.

La question des accidents eucharistiques se rattache étroitement aux dogmes de la présence réelle et de la transsubstantiation. Elle en dérive immédiatement. Si le corps et le sang du Christ sont, d’après l’expression du concile de Trente, rendus vraiment, réellement et substantiellement présents sur l’autel, s’ils le sont par l’effet de la formule sacramentelle prononcée sur les substances naturelles du pain et du viii, matière obligée du sacrement et converties intégralement au corps et au sang de Jésus-Christ, la question des « espèces » ou des « apparences » eucharistiques, de ce que l’on pourrait appeler le résidu sensible de la conversion sacramentelle, est virtuellement posée. L’antinomie devient flagrante entre ce que l’on voit et ce que l’on croit, entre le témoignage des sens et l’affirmation de la foi ; celle-ci admet, sous l’identité d’une expérience dont les éléments demeurent invariés, un changement énorme des réalités profondes, changement sans analogue dans l’ordre des transformations naturelles. La formule dans laquelle saint Augustin précise sa théorie générale du sacrement deviendra très tôt un lieu commun en matière d’eucharistie : Ista, fralres, idco dicuntur sacramenta quia in eis cdiud videtur, aliud intelligitur. Quod videtur speciem habcl corporalem, quod intelligitur fruclum habet spiritualem. Serm., ccLxxii, P. L., t. xxxviii, col. 1247. Dans l’expérience, le pain et le vin consacrés se comportent absolument comme le pain et le vin ordinaires ; ils gardent leurs propriétés physiques et chimiques, provoquent dans l’organisme vivant les mêmes réactions, le pain consacré nourrit et le vin consacré, pris en quantité, enivre ; ils se montrent capables des mêmes effets dynamiques et mécaniques et passent, dans le laps de temps habituel, par toutes les phases de l'évolution naturelle du pain et du vin. L’hostie consacrée garde sa forme et son poids, continue à déplacer le même volume d’air ; elle se rompt avec un bruit léger de cassure perceptible à l’oreille, se couvre de moisissures dans un lieu humide et finalement se décompose et se corrompt ; le vin consacré conserve pareillement sa couleur, sa saveur, son odeur capiteuse et piquante ; gardé trop longtemps, il présente bientôt les caractères de l’acidité et fournit du vinaigre par l’oxydation lente de son alcool sous l’action de l’air. L’hérésie en a appelé à ces expériences vives et impressionnantes contre la