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EXTRÊME ONCTION DU I" AU IX » SIÈCLE

1942

le droit de ieniell.ro les péchés : « Le Christ a tout accordé à ses disciples, disant à leur sujet : En mon nom, ils chasseront les démons, ils useront de nouvelles langues, ils détruiront les serpents et s’ils ont bu « luelque breuvage mortel, il sera pour eux inofîensif ; ils imposeront les mains aux malades et ceux-ci se porteront bien. Ainsi il a tout accordé. Mais il n’y a aucun pouvoir de l’homme là où agit la grâce du don divin. Pourquoi donc imposez-vous les mains cl considérez-vous comme un effet de la bénédiction le retour du malade à la santé? Pourquoi présumez-vous que certains ont été par vous purifiés de la fange du diable ? Pourquoi baptisez-vous, s’il n’est pas permis de remettre les péchés par l’intermédiaire d’un homme ? Dans le baptême, certes, tous les péchés sont remis. Quelle différence y a-t-il si les prêtres soutiennent que ce droit leur a été accorde par le bain spirituel ou par la pénitence ? Le mystère est le même dans les deux cas… Mais vous dites : Dans le bain, c’est la grâce des sacrements qui opère. Et qu’est-ce qui opère dans la pénitence ? N’est-ce pas le nom de Dieu ? Que faites-vous donc ? quand vous le voulez, vous acceptez la grâce de Dieu ; quand vous le voulez, vous la rejetez. » De pœnitentia, 1. I, c. viii, P. L., t. XVI, col. 477. L’argumentation de l'évêque de Milan est donc celle-ci : Vous pensez, novatiens, que les prêtres peuvent accomplir des rites auxquels la vertu divine confère leur efficacité. Car vous imposez les mains aux malades et s’ils guérissent, vous croyez à la valeur de la bénédiction donnée. Vous baptisez et vous estimez que la grâce du sacrement a purifié l'âme. Croyez donc aussi que dans la pénitence le nom de Dieu efface aussi les péchés. Kern, op. cit., p. 43, conclut justement : Rite des malades, baptême, pénitence sont mis au même rang, considérés comme des opérations posées par l’homme, mais rendues efficaces par Dieu, comme des sacrements. L’imposition des mains ici mentionnée ne peut donc pas être un simple charisme, rare, accordé aussi bien aux laïques qu’au clergé, très différent du baptême et de la pénitence. L’existence d’un don miraculeux de guérir ne prouverait pas que la hiérarchie ecclésiastique possède le pouvoir de remettre les péchés. Quelle est donc cette imposition des mains ? C’est l’acte des presbytres priant sur le malade et l’oignant d’huile au nom du Seigneur. De nombreux documents ont appelé l’e.xtréme onction imposition des mains. Ainsi on peut sans témérité croire que saint Ambroise fait ici allusion au rite recommandé par l'Épître de saint Jacques.

Telles sont les principales affirmations des quatre premiers siècles. On relève un assçz grand nombre d’indices de l’existence de l’extrême onction, d’allusions les unes probables, les autres certaines à ce rite sacramentel. Deux fois le texte de l'Épître de saint .Jacques a été cité intégralement et par des écrivains de haut rang, Origènc et saint Jean Chrysostome. Tous deux s’en servent comme d’une parole bien connue, d’une recommandation mise en pratique l)ar les fidèles de leur époque. Ils mentionnent donc l’onction et rien ne permet de penser qu’ils l’entendent au sens figuré. Puisqu’ils rapportent les promesses de saint Jacques, ils attribuent à ce rite les effets que l'Épître lui reconnaissait. Ils insistent, il est vrai, sur l’un d’eux, parce que leur thèse l’exigeait. Il se trouve que c’est justement celui que la plupart des adversaires de l’enseignement catholique affirment n’avoir été attribué à l’e.xtréme onction qu’au moyen âge, la rémission des péchés.

Les faits.

Certains protestants se plaisent à

répéter que, dans les premiers siècles, l’huile, bénite ou non, était employée soit par des laïques, soit par des membres de la hiérarchie, mais seulement afin

d’obtenir des guérisons miraculeuses. Et ils concluent que l’extrême onction au sens catholique, c’est-à-dire un rite capable de remettre les péchés et de produire la grâce, en d’autres termes, le sacrement n’existait pas. Personne n’a plus fortement et, il faut l’avouer plus habilement essayé de prouver cette thèse que Puller, op. cit., p. 148-198. Il consacre un chapitre entier à établir sa démonstration.

Du II" et du iiie siècle il avoue ne pouvoir citer aucun fait, si ce n’est celui auquel fait allusion Tertullien Ad Scapulam, c. iv, P. L., t. i, col. 703. L’apologiste rappelle que le chrétien Proculus avait guéri Sévère cm moyen d’huile. Mais d’assez nombreux faits postérieurs peuvent être cités. Parthénius, évêque de Lampsaque de 335 à 355, dont la vie fut écrite au ive siècle, Acta sanctorum, t.ii februarii, p. 41, trouva un jour, dans une église d’Héraclée, un malade, demanda de l’huile, pria pour lui, l’oignit et lui rendit ainsi la santé. Rufin raconte une cure semblable dont il fut témoin vers 375 en Egypte. On apporta un homme paralysé devant cinq moines disciples de saint Antoine, les deux Macaire, Isidore, Héraclide, Pambon (les quatre premiers étaient certainement prêtres, le dernier l'était peut-être). « Quand le pauvre perclus fut oint par eux au nom du Seigneur, aussitôt la plante de ses pieds s’affermit…, » il revint dans sa maison, tressaillant de joie et bénissant le Seigneur. H. E., I. II, c. iv, P. L., t. xxi, col. 511-512. Le désert vit d’autres miracles. Palladius, qui vécut avec les moines égyptiens des Cellules, de 390 à 399, raconte. Histoire lausiaque, édit. Lucot, Paris, 1912, p. 126, que, lui étant là, on apporta de Thessalonique à Macaire d’Alexandrie « une jeune fille noble, ayant plusieurs années de paralysie. En la frottant de ses mains avec de l’huile sainte pendant vingt jours et en y ajoutant des prières il la renvoya en santé dans sa propre ville. » De même un saint moine de Nitric, Benjamin, donnait de l’huile bénite par lui et ceux qui la recevaient « étaient débarrassés de toute infirmité. » Op. cit., p. 86. Saint Martin de Tours jouissait d’un pareil pouvoir. Son ami Sulpice Sévère nous apprend, dans la biographie composée du vivant du thaumaturge et publiée en 397, qu’un vieillard vint un jour le supplier à Trêves de guérir sa fille paralytique incurable et presque morte. Par humilité le saint refusa. Enfin il consentit à aller la voir, demandade l’lmile, lA bénit, l’introduisitdans la bouche de la malade et rendit cette personne à la santé. De vita beati Martini, c. xvi, P. L., t. xx, col. 169. C'était sans doute en 383. Douze ans plus tard, le même saint à Chartres déliait la langue d’une muette en lui faisant avaler un peu d’huile qu’il avait bénite après l’avoir soumise à l’exorcisme. Sulpice Sévère, Dialogus, III, n. 2, P. L., t. XX, col. 213. Aussi, la femme du comte Avitien >< avait-elle envoyé à Martin l’huile nécessaire contre les diverses maladies afin qu’il la bénit selon la coutume. » Op. cit., n. 3, col. 213.

Les laïques ne paraissent pas avoir été moins puissants que ces évêques et ces prêtres. Le biographe de saint Pachôme (mort en 345 ou en 346) et qui était un de ses contemporains, a conservé le souvenir du trait suivant : Le pieux moine avait été supplié en faveur d’une possédée du démon. « Il envoya au père un peu d’huile consacrée par sa bénédiction. L’homme ne doutant pas oignit sa fille et mérita de la voir guérir en peu de temps. » Acta sanctorum, t. m maii, p. 308. Un autre laïque, Hilarion, dont saint Jérôme a écrit la vie, vers 391, se trouvait à Aphroditou quand pullulèrent en ce lieu des serpents dont la morsure était mortelle. « Il bénit de l’huile : tous les cultivateurs et les pasteurs qui en usèrent pour leur blessures furent infailliblement guéris. » Vita S. Hilarionis, n. 32, P. L., t. xxiii, col. 46. Le saint