Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.2.djvu/320

Cette page n’a pas encore été corrigée

Iî « 9

EXTRÊME ONCTION DU P'" AU IX^ SIÈCLE

1940

l)énitencc, doivent expliquer pourquoi l’auteur du traité Du sacerdoce parle de l’onction et de retour de la santé, le témoif^nage de l’apôlre étant reproduit dans son intéprité. Rien, d’autre part, ne confnine le sentiment de Puller : nulle part, saint Jean Cluysostome ne laisse entendre que l’onction guérit le corps et que la pénitence seule remet les péchés. Ce dédoublement n’est pas suggéré par le texte.

Les théologiens catholiques, au contraire, ont pu invoquer des arguments pour démontrer que saint Jean Clirysostome fait allusion en cet endroit à l’extrême onction. En plusieurs développements il a décrit la pénitence, il en a décomposé les actes : aveu, larmes, humilité, aumône, prière ; or, en ces endroits, il n’a jamais parlé de l’onction ; il n’a jamais appelé huile au sens métaphorique la prière ou le pardon de l'Église. Ici, il compare les prêtres aux parents. Il a montré que si les uns donnent l’existencematérielle, les autres accordent la vie divine ; il ajoute que, si les uns ne peuvent protéger contre la mort corporelle, les autres peuvent sauver de la mort éternelle. Et voilà pourquoi il est amené à citer un texte qui vise les malades et la fin de l’homme, plutôt que les affirmations très précises, mais très générales : « Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez… » Sans doute, c’est par la prière que, selon saint Jean Chrysostome, les prêtres secourent les malades. Mais il dit clairement que cette oraison n’est pas simplement une bonne œuvre de l’homme ; le prêtre a le pouvoir de remettre les pécliés commis après le baptême. Et de même que les formules du premier sacrement régénèrent, ainsi ce que prononce le prêtre sur l'âme malade et prête à mourir la sauve. Le mot sacrement n’est pas employé, il ne pouvait l'être alors au sens rituel du moins. Mais il y a assimilation entre le | rite de régénération des nouveau-nés et le rite de sanctification des malades. Cf. de Sainte-Beuve, op. cit., p. 39-40 ; Kern, op. cit., p. 34-35 ; Pesch, Prælectiones dogmatic : r, t. vii, p. 256-257.

Si on veut bien admettre d’ailleurs que saint Jacques parle dans l'Épître du rite des malades, c’est-àdire de l’extrême onction et de la pénitence, toute difflculté s'évanouit. Voir Extrême onction d’après l'Écriture. Et on comprend fort bien que saint Jean Chrysostome, comme précédemment Origène, non seulement pouvait, mais devait tout naturellement choisir ici ce texte scripturaire de préférence à tout autre. Aucun ne convenait mieux à son but. La pénitence proprement dite n’est pas exclue et il parle de l’onction qui, selon la parole de l’apôtre, sauve, c’està-dire rend le châtiment plus dou.v et peut empêcher complètement de tomber. Le pouvoir des prêtres est vraiment merveilleux comme le croit saint Jean Chrysostome, puisqu’ils ont le moyen d’ouvrir immédiatement le ciel.

Si la guérison des corps n’est pas expressément mentionnée à cet endroit, elle l’est peut-être dans une autre affirmation du même écrivain. Dans la xxxii homélie sur saint Matthieu, n. 6, P. G., t. lvii, col. 584, il exalte l'église bien supérieure aux maisons profanes. « Car [dans ce lieu saint] qu’est-ce qui n’est l)as grand, qu’est-ce qui n’est pas redoutable ? La table, la lampe qui s’y trouvent sont de beaucoup plus honorables et plus douces que votre table et votre lampe. Ils le savent bien, tou ; ceux qui en temps utile s'élant oints avec foi ont été délivrés de leurs maladies.. Kern, op. cit., p. 28-29 ; Pesch, op. cit., l>. 257, croient que la lampe ici nommée est celle qui contenait l’huile de l’extrême onction. En effet, observent-ils, il y avait plusieurs lampes dans la cathédrale d’Antioche ; en son iv » sermon sur la Genèse, n. 3, P. G., t. nv, col. 597, saint Jean Chrysostome reproche à ses auditeurs d'être inatteiitifs parce qu’ils s’anuisent à regarder les lampes et celui

qui les allume. Or, ici, il ne parle que d’une seule, son contenu est assez saint pour qu’elle puisse être nommée en même temps que l’autel, comme ce qui donne à l'église sa majesté et sa valeur. Ce n’est pas le sanctuaire qui assure à la lampe et à l’autel leur dignité, c’est l’autel et la lampe qui font la grandeur du sanctuaire. D’autre part, des textes liturgiques orientaux prouvent que l’huile des infirmes était en certains milieux conservée dans une lampe de l'église. Kern observe même que saint Jean Chrysostome, dans le texte cité de l’homélie sur saint Matthieu, n’emploie pas le mot laij.r.y.i ou l-jy :, mais qu’il se sert du terme l-jyylx par lequel on désigne précisément au sens propre le support de la lampe. Or, ce vase est grand, redoutable, précieux, dou.v, il est un trésor du chrétien. Ces expressions ne se comjjrennent pas si saint Jean Chrysostome parle du luminaire de l'église, elles s’expliquent s’il pense à l’huile sacramentelle capable, selon la promesse de saint Jacques, de guérir et de sauver, à cette lampe que ses auditeurs connaissent fort bien, car maintes fois il y ont puisé un remède efficace. Et c’est grâce à leur foi : ainsi l’apôtre avait écrit : « La prière de la foi sauvera le malade. » Saint Jean Chrysostome rappelle le texte de saint Jacques.

Cette argumentation fort Ijien conduite mérite une certaine considération. Il semble incontestable que saint Jean Chrysostome fait allusion à la lampe qui cont enait une huile considérée comme un remède. Kattenbusch, op. cit., t. xiv, p. 306, le reconnaît. Mais s’agit-il de la matière de l’extrême onction ? Ou est-il fait allusion à un emploi par les laïques, emploi non sacramentel d’huile bénite par la hiérarchie ? L’assimilation de la lampe à l’autel, les éloges extraordinaires accordés à l’huile se justifient davantage si on accepte la première hypothèse. Il faut se souvenir pourtant que, dans la suite du développement, saint Jean Chrysostome, pour démontrer la sainteté de l'église, ne parle pas des sacrements, mais des Écritures, bien plus, de la caisse des aumônes. D’autre part, le seul effet de l’huile mentionné ici est la guérison des corps ; l’intervention des prêtres exigée par saint Jacques n’est pas positivement exclue, mais elle n’est pas positivement rappelée. Il semble donc plus prudent de ne pas présenter ce second témoignage de saint Jean Chrysostome comme une preuve indiscutable.

F"aut-il voir une allusion à l’extrême onction dans un poème de saint Grégoire de Nazianze, Karà toO tto/r, soJ et ; t/jv vô<îov ? On serait tenté de le croire. « Je suis ton serviteur moi qui mets les m fins sur tes dons et sur la tête de ceux qui s’inclinent devant moi et qui m’appellent le guérisseur de leurs maladies. » P. G., t. xxxvii, col. 1392. Le saint ne fait sans doute pas allusion à un pouvoir miraculeux dont il serait investi : sa modestie ne lui permettrait guère un tel éloge de sa propre personne. L’exercice d’un tel charisme serait rare, quelques privilégiés, un ou deux, en bénéficieraient. Grégoire de Nazianze semble parler de nombreux fidèles reconnaissants. Au reste, il l’afiirnie, c’est en qualité de serviteur du Christ, en raison donc de son ministère, c’est à la manière dont il met la main sur les dons divins, exerçant ses droits de prêtre, c’est en raison de son ministère qu’il guérit les maladies ; et il opère l’acte par l’imposition des mains : les têtes s’inclinent devant lui. Or, on sait que l’onction implique ce rite, et le sacrement des malades a été souvent désigné par ce seul mot. Il est donc permis de penser qu’il est fait allusion ici à l’acte recommandé par saint Jacques.

Saint Ambroise parle, lui aussi, d’une imposition des mains qui pourrait bien être l’extrême onction. Il veut prouver contre les novatiens que l'Église a