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EUCHARISTIE D’APRÈS LE CONCILE DE TRENTE


Christi, sed tantum in iisu, dum sumitur, non autem ante vel post, et in hostiis seu particulis consecratis, qu£E post communionem reservantur vel supersunt, non renianere verum corpus Domini, anatliema sit. Den21nger-Bannwart, n.886.

mirabJe sacrement de l’eucharistie, qu’ils n’y sont que pendant l’usage, lorsqu’on le reçoit, mais ni avant, ni après ; et que le vrai corps du Seigneur ne demeure pas dans les hosties ou parcelles consacrées que l’on garde ou qui restent après la communion, qu’il soit anathème.

Cette doctrine est la suite logique du dogme que nous avons exposé. Si la consécration rend le Christ présent dans l’eucharistie, en le localisant sous les espèces sacramentelles, il en résulte que la durée de la présence réelle dépend de la durée des espèces ellesmêmes. Sans doute, cette présence est ordonnée à l’usage ; c’est pour se donner dans la communion que Jésus-Christ a institué l’eucharistie, et c’est pourquoi il dit à tous ce qu’il disait aux apôtres : « Prenez et mangez, ceci est mon corps ; » mais, dès que les paroles divines sont prononcées, ce qu’elles signifient est réalisé, le changement est opéré ; ce n’est plus du pain, c’est le corps du Seigneur ; et ce sera le corps du Seigneur tant que les espèces resteront extérieurement celles du pain et du viii, tant qu’elles ne seront pas substantiellement altérées.

2. Conséquences.

a) Culte dû à la sainte eucharistie. — La permanence de la présence réelle sous les espèces eucharistiques est d’une extrême importance au point de vue pratique, car elle domine tout le culte de l'Église dans ce qu’il a d’essentiel.

Le culte solennel de l’eucharistie, les protestants ne le voulaient pas, ou ne l’acceptaient qu’avec regret. La Confession d’Augsbourg, part. II, 2, rejette la procession du saint sacrement, parce qu’on n’y vénère qu’une seule espèce : et quia divisio sacramenti non convenu cum instilutione Christi, solct apud nos omilti processio quæ hactenus fieri solita est. C’est par horreur de la messe et du culte catholique que Mélanchthon réduisait la présence réelle à l’instant de la communion. Quant à Luther, ses opinions ont varié ; à la fin de sa vie, dans les Thèses qu’il publia en 1545 contre les docteurs de Louvain, t. xvi, il appelle l’eucharistie un sacrement adorable, et ce fut un scandale dans une partie de l'Église protestante ; Calvin lui reprocha d’avoir « élevé l’idole dans le temple de Dieu, » Bossuet, Histoire des variations, 1. VI, 34 ; mais d’autres parole :  ; de Luther, rapportées par les articles proposés en 1547 et en 1551 au concile, Theiner, t. i, p. 406, 489 ; Elises, t. v, p. 870, rejettent absolument le culte de l’eucharistie ; il y dit aux vaudois : « On ne doit ni condamner, ni accuser d’hérésie ceux qui n’adorent pas le sacrement ; ce n’est pas ordonné, et le Christ n’y est pas pour cela… il est peut-être plus sûr de faire comme les apôtres qui n’adorèrent pas ; » il y disait encore : " Il n’y a pas de fête que je déteste plus que la fête du Corpus Cliristi. » Le luthéranisme après Luther garda cette défiance pour le culte eucharistique, puisque la Formule de concorde rejette et condamne l’article suivant : t 19. Que les éléments extérieurs et visibles du pain et du vin doivent être adorés dans le sacrement. » Tittniann, Libri symbol., p. 404.

L'Église, après avoir affirmé sa foi, ne pouvait qu’affirmer Sun adoration ; c’est l’objet du c. v et du canon 6 ainsi conçu :

Si quis dixerit, in sancto eucharisti ; e sacramento, Christum unigenitum Dei Filium non esse cultu latri se etiam extcrno adorandum, atque ideo nec f estiva peculiari celebritate vene Si quelqu’un dit que, dans le.saint sacrement de l’eucharistie, on ne doit pas adorer le Christ, Fils unique de Dieu, d’un culte de latrie, même extérieur, et par suite qu’on ne doit pas

randum, neque Inprocessionibus secundum laudabilem et universalem Ecclesiae sancta ; ritum et consuetudinem solemniter circumgestandum, vel non publiée, ut adoretur, populo proponendum, et ejus adoratores esse idololatras, anathema sit. Denzinger-Bannwart.n. 888.

l’honorer par une solennité particulière, le porter en processions selon le rit et la coutume louable et universelle de la sainte Église, l’exposer publiquement aux adorations du peuple ; et que ceux qui l’adorent sont des idolâtres, qu’il soit anathème.

Le concile définit d’abord que le Christ, dans l’eucharistie, a droit au culte de latrie, et il en donne la raison : le Christ est le Fils unique de Dieu et Dieu lui-même. C’est donc l’eucharistie elle-même qui peut recevoir nos adorations, puisque la seule réalité qui soit en elle est la personne de Jésus-Christ ; et, en effet, dit le c. v, l'Église catholique a toujours rendu à ce très saint sacrement » le culte de latrie qui est dû au vrai Dieu. » Peu importe, ajoute-t-il, que le but principal de la présence réelle soit la communion : on peut et on doit adorer le Christ partout où il est présent.

Le concile énumère ensuite quelques-unes des formes les plus solennelles du culte eucharistique et il en définit la légitimité ; ce sont la fête du saint sacrement, les processions du saint sacrement et l’exposition du saint sacrement. Elles ne sont pas seulement légitimes ; le chapitre ajoute qu’elles sont des manifestations louables de la piété, pie et religiose admodum, et, de plus, qu’elles sont opportunes. Elles le sont en tout temps. Il car il est très juste qu’il y ait certains jours de fête où tous les chrétiens manifestent d’une façon plus solennelle leur souvenir reconnaissant envers leur Seigneur et rédempteur commun, pour un bienfait si ineffable et tout divin. » Elles le sont spécialement en face des négations de l’hérésie : « Il faut que la vérité, victorieuse du mensonge et de l’hérésie, affirme son triomphe, afin que ses adversaires, témoins d’un tel éclat et d’une telle joie dans toute l'Église, ou bien avouent leur faiblesse et leur défaite et soient confondus, ou bien saisis de honte reviennent à de meilleurs sentiments. »

b) Réserve de la sainte eucharistie. — C’est une autre conséquence de la présence permanente de JésusChrist sous les espèces. Si cette présence n’est pas limitée au moment de la communion, il n’y a pas de raison pour que l’eucharistie soit immédiatement consommée ou distribuée aux assistants. Sans doute, le but premier de l’institution eucharistique est la communion ; mais le fait de garder dans les églises la sainte réserve permettra d’atteindre certains buts qui, pour être secondaires, n’ont pas un moindre intérêt. C’est avant tout le culte, non seulement le culte solennel et public dont il vient d'être parlé, mais ce culte privé et tout intime qui, en même temps qu’il rend au Christ les hommages qui lui sont dus, satisfait la piété en lui fournissant libre accès auprès du Sauveur réellement présent. Bien plus, la sainte réserve facilite et assure en certains cas la communion même. Un des Pères du concile, l'évêque Foscarari de Modène, fit remarquer que, grâce à elle, tout fidèle peut communier quand il en a besoin, Tlieiner, t. i, p. 515 ; et c’est elle aussi qui permet de ne pas priver les mourants de la communion. Aussi le c. vi et le canon 7 affirment-ils la légitimité de la sainte réserve et du port de l’eucharistie aux malades. L'énoncé du canon est le suivant :

Si quis "dixerit non licere sacram eucharistiam in sacrario rcservari, sed statim post consecrationem adstantibus necessario distribuendam ; aut non licere

Si quelqu’un dit qu’il n’est pas permis de garder la sainte eucharistie dans le tabernacle, mais qu’on doit nécessairement la distribuer aux assistimts aus-