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EXODE


et elles sont résolues dans tous les commentaires de l’Exode. Moïse, qui était bègue, avait demandé à Dieu d'être déchargé de la mission qui lui avait été confiée, mais Dieu lui avait donné en la personne d’Aaron, son frère, un porte-parole éloquent, qui remplit ordinairement ce rôle. Voir t. i, col. 1. Mais Dieu parlait à Moïse, qui mettait lui-même ses paroles sur les lèvres d’Aaron. L’ordre de parler au Pharaon, donné directement à Moïse, vii, 14-18, devait, comme les précédents et selon la parole dite, vii, 1, 2, être reproduit par Aaron, qui, du reste, eut son rôle propre à remplir au sujet de la première plaie, 19, 20. Les rôles sont de même partagés entre les deux frères pour toutes les autres plaies, mais Aaron n’intervient jamais que par l’ordre de Dieu. Toutes les plaies, infligées par Dieu, sont des punitions de l’endurcissement du Pharaon, mais on prétend que ce caractère est au second rang dans celles que les magiciens d’Egypte ne peuvent pas imiter et qui ont pour but de montrer le doigt de Dieu et de légitimer son droit de commander au roi d’Egypte. Bæntsch, op. cit., p. 5455. Les plaies sont simplement de plus en plus graves. Les mages avaient pu reproduire les deux premières, mais ils ne purent faire disparaître les moustiques et ils reconnurent le doigt de Dieu dans cette troisième plaie. Ils n’apparaissent plus à partir de la quatrième et ils sont atteints eux-mêmes par la sixième, IX, 11. Tout en étant plus merveilleuses que les trois premières, les sept autres sont des punitions de plus en plus fortes, qui frappent les Égyptiens autant qu’elles montrent la puissance de Jahvé et son droit de commander au Pharaon. Nulle part, il n’est dit expressément que les Israélites habitent au milieu des Égyptiens. Leur séjour en la terre de Gessen, au contraire, est affirmé explicitement dans le récit de la quatrième plaie pour dire que les mouches ne pénétrèrent pas dans la région occupée par les Israélites, VIII, 22. Jahvé manifeste sa puissance au milieu de la terre d’Egypte, parce qu’il est le Dieu de la terre entière. Leꝟ. 4 du c. ix signifie seulement que la peste des troupeaux ne s'étendit pas au pays de Gessen, où paissaient les troupeaux des Israélites. Cꝟ. 6, 7. De même, à la septième plaie, la grêle ne tomba pas au pays de Gessen, où étaient les Israélites, 26. Si les ténèbres couTirent l’Egypte entière, la lumière continua de luire partout où habitaient les fils d’Israël, x, 23. Siceux-ci ont l’ordre d’emprunter des vases d’or et d’argent aux Égyptiens, XI, 2 ; XII, 35, 36, il ne s’agit que de ceux de la contrée de Gessen, où les ténèbres n’avaient pas pénétré ; les Israélites ne firent pas le tour de l’Egypte pour ramasser des vases d’or et d’argent ; ils n’en auraient pas eu le temps, tellement leur exode fut précipité ; ils firent ces emprunts à leurs voisins de la contrée de Gessen. Il n’y a rien, dans tout ce récit, qui trahisse la main de plusieurs auteurs, (^f. F. de Hummelauer, op. cit., p. 87-88. La nature de la manne est décrite sommairement, xvi, 14, 15, à sa date avec les détails qui la suivirent, 16-30. Le ꝟ. 31 revient sur son nom pour ajouter de nouveaux détails sur sa forme, sa couleur et son goût, comme début et transition au récit suivant : ordre divin de déposer dans le tabernacle un gomor de manne, 32-36. Quant à ce tabernacle, beaucoup de commentateurs ont pensé, après saint Augustin, qu’il était mentionné ici par anticipation ou prolepse, comme il est parlé de l’arche à propos des tables de la loi, xxv, 16. Le P. de Hummelauer, op. cit., p. 178, y a reconnu un premier tabernacle, dont il serait aussi, selon lui, question, XXXIII, 7-11. Voir ibid., p. 323. Sur les rapports du Décalogue jéhoviste avec le Décalogue élohiste, voir t. IV, col. 162-164 ; F. de Hummelauer, op. cit., p. 330331. Le code de l’alliance n’a pas nécessairement été promulgué le même jour (lue le Décalogue, et il

peut y avoir un intervalle de temps entre leꝟ. 21 et le ꝟ. 22 du c. XX. Moïse n'était plus dans la nuée quand il le promulgua au peuple ; il a donc dû être rappelé auprès de Dieu avec les 70 vieillards, qui n'étaient pas dans la nuée lors de la promulgation du Décalogue, pour recevoir une nouvelle révélation, XXIV, 1. Les faits racontés, xxiv, 9 et 12, sont aussi des ascensions différentes. Moïse, qui était redescendu du Sinaï avec les 70 vieillards, y remonte seul. Le c. xviii est à sa place chronologique. L’institution des juges du peuple, provoquée par une observation de Jéthro, est l'œuvre personnelle de Moïse ; elle a pu précéder la législation que le Seigneur a révélée à Moïse plus tard pour son peuple.

Aucun de ces arguments ne prouve donc la diversité des auteurs dans le livre de l’Exode et ne va contre l’authenticité mosaïque de cet écrit. Sur la diversité des lois de l’Exode, du Lévitique et des Nombres, voir Lévitique et Nombres.

V. Doctrine.

1° Dogmatique. — Le dogme capital du livre de l’Exode, c’est la révélation, faite à Moïse, du nom propre, Jahvé, du Dieu des pères ou des patriarches et l'établissement du monothéisme dans la foi légitime d’Israël. Sur la révélation de Jahvé à Moïse, voir t. iv, col. 954-962. Sur la nature de Dieu d’après l’Exode, voir ibid., col. 963-965. Cf. J. Touzard, La religion d’Israël, dans J. Bricout, Où en est l’histoire des religions ? Paris, 1911, t. ii, p. 25-30. Au Sinaï, Jahvé, qui révèle sa nature intime comme l'être par excellence et la cause de tous les êtres, conclut avec son peuple une alliance très étroite. Cette alliance entre Jahvé et Israël ne pouvait être un contrat de même nature que ceux qui interviennent entre les hommes égaux en droits. Jahvé devait faire la première démarche ; aussi le premier trait de son alliance avec Israël est-il qu’elle vient de son libre choix. Par ailleurs, Israël ne pouvait discuter avec Dieu les clauses ou conditions de l’alliance ; Jahvé devait imposer à son peuple ses propres volontés, ses commandements, qu’Israël devait accepter et pratiquer.

Morale.

La principale clause de l’alliance de

Jahvé avec Israël était l’observation fidèle du Décalogue. Sur sa nature, voir t. iv, col. 164-176. Dès le début, Jahvé s’y présente comme un Dieu jaloux : il est le Dieu unique ; aucun autre dieu ne peut se poser en rival et s’arroger sur Israël des droits qu’il n’a pas conquis. Jahvé y apparaît en même temps comme un Dieu moral. Il n’avait pas besoin d’Israël ; c’est par pitié qu’il l’a tiré d’Egypte, pour faire cesser une dure servitude qui n'était pas méritée. C’est pourquoi il réclame de son peuple, avec la reconnaissance pour la libération accordée, la pratique de l'équité, de la bonté et des autres vertus morales. Ces clauses principales de l’alliance mettaient Jahvé bien audessus des dieux des nations, qui devaient s'éclipser devant lui. Lui seul devait être honoré et il devait l'être par un culte moral, correspondant à sa nature propre.

Rituelle et liturgique.

 Le caractère le plus frappant du culte divin dans l’Exode, c’est l’absence totale de figure ou d’image de la divinité. Le Décalogue

interdit de faire aucune image taillée représentant Jahvé. L'épisode du veau d’or, qui, aux yeux du peuple, était un emblème du Dieu d’Israël, montre que la foule avait du mal à se représenter Dieu, abstraction faite de toute forme sensible. La législation sinaïtique donne une plus haute idée de la spiritualité de Jahvé, qu’aucune figure extérieure ne pouvait représenter. L’arche cependant était un signe de la présence de Dieu au milieu de son peuple. La tente de réunion, qui l’abritait, était le lieu où on cherchait Jahvé et où on l’honorait. Dieu y rendait sa