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1703 ÉVÊQUES. QUESTIONS THÉOLOGIQUES ET CANONIQUES 1704

sujets et ù tel diocèse, elle émane immédiatement du pontife romain, comme vicaire du Christ et pasteur suprême de l’Église universelle, ainsi qu’il appert des can. Quisescit, Décréta, Miiltum, q. vi, et Sacrosancta, dist. XXII. Cf. Pirhing, Jus canonicum, Dilingen, 1722, 1. I, tit. XXXI, n. 39 sq. D’ailleurs, cette discussion n’a pas toute l’importance qu’elle paraît tenir. Car si les uns prétendent que l’autorité des évêques descend immédiatement de Dieu, ils ne nient pas qu’elle soit limitée et dépendante de l’auto : ité du souverain pontife ; et si les autres soutiennent que la juridiction épiscopal ^ dérive immédiatement du souverain pontife, ils accordent pleinement qu’elle s’appuie sur le droit divin et qu’elle reste une juridiction ordinaire que les évêques exercent en leur propre nom.

On doit, en effet, reconnaître que, quoique les évêques dépendent du souverain pontife, dont le primat est universel, ils ne sont point ses simples vicaires ; mais leur pouvoir est ordinaire, en raison de l’office même, rationc muneris, qui leur a été confié, c’est-à-dire en raison de la charge pastorale par laquelle le Saint-Esprit les a constitués évêques, avec mission de gouverner l’Église de Dieu.

En outre, les évêques sont les successeurs des apôtres, comme le proclame encore le concile de Trente, loc. cit., c. IV : in locum aposiolorum successerunt. Toutefois il faut bien saisir la portée de ce titre. Les apôtres jouissaient de certains charismes extraordinaires, don des miracles, des prophéties, etc., qui leur étaient personnels, et, à ce point de vue, on ne saurait dire que les évêques leur aient succédé. De plus, aux apôtres était départi un pouvoir de juridiction universelle, quoique soumise à l’autorité suprême de l’apôtre Pierre, vis-à-vis de toutes les nations et de tous les pays de la terre ; cet apostolat général était également extraordinaire et personnel, de sorte que les évêques ne leur succédèrent pas davantage dans une pareille mission. Mais, nonobstant, les évêques sont, de quelque manière, les véritables successeurs des apôtres, d’abord quant au pouvoir d’ordre, non seulement pour ce qui leur est commun avec les simples prêtres, tel que le pouvoir de célébrer le sacrifice de la messe et le pouvoir de remettre les péchés, voir concile de Trente, sess. XXIII, c. i, mais surtout pour ce qui leur est propre, c’est-à-dire dans le caractère épiscopal et la plénitude du sacerdoce, leur conférant le pouvoir d’ordonner des prêtres et même d’autres évêques, et le pouvoir d’administrer le sacrement de confirmation ; ensuite, quant au pouvoir de juridiction, quoique dans les limites d’une église particulière, ou diocèse, qu’ils ont mission de gouverner d’une manière suprême quoique sous la direction et l’autorité du souverain pontife. Cf. encyclique Salis cognilum, § Neque vcro. Voir Apôtres, t. i, col. 16.58-1659.

Enfin, les évêques sont supérieurs aux prêtres, dont ils se distinguent nettement, et de droit divin : telle est la conclusion de ce qui a été dit plus haut ; et ce dogme, qui est l’écho de toute la tradition catholique, est fermement établi, comme l’ont proclamé le concile de Trente, loc. cit., can. 7, et Benoît XIV, De synodo diœcesana, 1. XIII, c. i, n. 2 : Ecclesiæ firmissimnm dogma est : episcopos esse supcriores presbyteris, non solum ordinis potestate, sed etiam jurisdiclionis.

2 » Difjérentes espèces. — Au point de vue du pouvoir d’ordre, tous les évêques, y compris le souverain pontife, sont égaux. Mais si l’on considère le pouvoir de juridiction, il existe, parmi les évêques, divers degrés. C’est ainsi qu’avec l’évêque diocésain on peut distinguer, mis à part le’ouverain pontife, les patriarches, les primats, les archevêques ou métropolitains, et aussi les évêques titulaires et les évêques coadjutcurs. Nous n’avons pas, en effet, à parler ici des prélats dits nullius, qui sont dépourvus du caractère épis copal, quoiqu’ils jouissent, au for externe, d’une juridiction quasi épiscopale, exercée non à titre vicarial, mais à titre ordinaire et en leur propre nom.

Le terme patriarche signifie « prince des pères » , et, en ce sens, les primats et les archevêques peuvent être dits patriarches, et, en réalité, on les voit plus d’une fois désignés sous ce nom dans les documents anciens. Cf. Sebastianelli, De personis, Rome, 1896, p. 125. Cependant le nom de patriarche a été depuis longtemps réservé aux évêques qui occupent les sièges fondés par l’apôtre Pierre, auxquels sont attachés certains honneurs et certains droits spéciaux vis-à-vis de tous les autres sièges épiscopaux, même primatiaux et métropolitains. Plus tard, la dignité de patriarche fut étendue, avec les mêmes privilèges, à d’autres sièges, en raison de leur importance particulière. Le pape Innocent III a solennellement reconnu, dans le rv «  concile de Latran, c. v (1. I, tit. xxxiii, c. 8), cinq sièges patriarcaux : Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem. Outre ces patriarches, appelés majeurs, il existe encore des patriarches, dits mineurs, tels que ceux d’Aquilée, dont le titre fut transféré à Venise, de Tolède, de Lisbonne, etc. Enfin d’autres patriarches ont été créés en Orient, dans divers rites catholiques, qui en fait sont encore reconnus aujourd’hui et qui restent unis au siège apostolique de Rome : ce sont les patriarches des Maronites, des Syriens, des Coptes, etc. Cf. const. Allatæ de Benoît XIV ; const. Christi Domini, 26 novembre 1895, et Orienlalium, 30 novembre 1894, de Léon XIII. Voir aussi MuneratijÊ/eme/î’a juris ccclesiastiei publici et privait, Turin, 1903, p, 207.

Le nom de primat s’appliquait autrefois indistinctement à tous les métropolitains, comme il ressort d’un décret du II « concile de Carthage, c. 12 : ut inconsulto primate cujuslibet provineiæ nemo pre umat episcopum ordinare.

Mais, dès une époque très reculée, le titre de primat fut dévolu à l’évêque dont le siège est supérieur à tous les sièges métropolitains et diocésains d’une nation, et c’est dans ce sens que Boniface I^ décréta, dans sa lettre aux évêques des Gaules, qu’il faut en appeler de la sentence des métropolitains au tribunal des primats. Cf. Sebastianelli, loc. cit., p. 127. Tels étaient jadis les primats d’Éphèse, d’Héraclée, de Césarée, de Palestine, ceux de Cantorbéry, de Salzbourg, de Lyon, de Bourges, de Vienne, de Pise, de Salerne, etc. Aujourd’hui, si l’on excepte le primat de Hongrie et peut-être celui de Carthage, cf. const. Mcderna Ecclesia, du 28 novembre 1884, de Léon XIII, la dignité de primat est purement honorifique et ne comporte aucune juridiction ; en particulier, pour la France, toute juridiction primatiale a été supprimée par le concordat de 1801, où Pie VII a déclaré éteintes toutes les anciennes Églises des Gaules, avec leurs droits, privilèges et prérogatives de tout genre. Cf. Bouix, op. cit., p. 443.

Le terme d’archevêque servait également, dans les premiers siècles de l’Église, à désigner les évêques des sièges principaux, c’est-à-dire les patriarches et les primats. C’est ainsi que saint Épiphane, Hær., hær. Lxviii, n. 1, appelle archevêques les patriarches d’Alexandrie, et Justinien, Novelle XI, instituant un primat, lui donne le nom d’archevêque : volumus ut non solum metropolilamis, sed etiam archiepiscopus fiât. Plus tard, le titre d’archevêque appartient exclusivement aux évêques qui présidaient à toute une province. Ils étaient appelés diocésains, rf ; (rce>anî, parce que, primitivement, la province était désignée sous le nom de diocèse, et métropolitains, metropolitani, surtout chez les grecs, parce qu’ils étaient constitués le plus souvent dans les villes métropolitaines ; en Afrique, ils portaient le nom d’anciens, senes. Cf. Sebastianelli, loc. cit., p. 127 sq. Cependant, quoique l’ar-