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ÉVÈQUES. ORIGINE DE L’EPISCOPAT


Églises et en opposant une fin de non-recevoir aux témoignages les plus décisifs qui prouvent le contraire. Ces procédés, en contradiction avec les règles les plus élémentaires de la méthode historique, ne se rencontrent que dans l'étude du Nouveau Testament. — 3. Système de Solim, Kircheniecht, Leipzig, 1892. — Sohm est encore plus radical. La première et la dernière proposition de son livre est celle-ci : « L’essence du droit ecclésiastique est en contradiction avec l’essence de l'Église, » p. 1, 700. Pourquoi'? Parce que « l'Éghse n’est pas susceptible d’une organisation juridique, » p. 22. Pourquoi encore ? Parce que l'Église est spirituelle et le droit d’ordre temporel ; parce que l'Église est le royaume de Dieu et le corps du Christ et qu’il est impossible d’admettre que le royaume de Dieu, le corps du Christ, soit régi par un gouvernement humain, visible, terrestre. Durant 700 pages, Sohm ne sort pas de ce paralogisme : l'Église est un être spirituel, donc elle ne peut avoir aucun rapport avec les choses de ce monde. Autant vaudrait dire que le sacrement n’a pas de réalité surnaturelle parce qu’il est un signe sensible, ou que l’homme n’est pas un corps parce qu’il est un esprit. D’après Sohm, l'Église ne peut avoir qu’une organisation toute spirituelle, celle des charismes. Les possesseurs de charismes (apôtres, prophètes, docteurs) parlent et enseignent au nom de Dieu, mais ils n’ont pas le droit de légiférer. Le fidèle les reconnaît librement et, librement, leur obéit. Les désordres c]ui se produisirent çà et là changèrent peu à peu cet état de choses. Ce fut la lettre de saint Clément aux Corinthiens qui introduisit à Rome l'épiscopat unitaire, p. 167 ; de Rome, l'épiscopat se propagea partout à la ronde, p. 179-190. Avec l'épiscopat, naquit la communauté (die Gemeinde), p. 195, et périt l'Église du Christ qui en est le contrepied. Ces théories étranges exposées récemment dans un nouvel ouvrage, Wcsen und Ursprung des Katholizismiis, Leipzig, 1909, dans Abhandl. der philos.-histor. Klasse der sàchsischen Gesellsch. der Wissensch., t. xxvii, n. 10, n’ont eu aucun succès, même dans le camp rationaliste. Elles ont été réfutées en particulier par Bendix, Kirche und Kirchenrecht, 1895. Elles montrent — et c’est ce qu’elles ont de plus instructif — jusqu’oii l’imagination peut conduire un virtuose capable de développer si copieusement un paradoxe.

VIII. Conclusions générales.

1° Point de traces d'Églises amorphes. — Les dignitaires placés à la tête des communautés chrétiennes forment le clergé de l'Éghse, I Pet., v, 3, par opposition à la masse des simples fidèles. Ils portent divers titres jusqu’au jour où l’usage différencie les noms et leur attache un sens technique. Ils peuvent s’appeler présidents (TtpoïTTiixevoi, I Thés., v, 12 ; Rom., xii, 8), ou directeurs (r^yo-jp-eycA, Heb., xiii, 7, 14, 24 ; cf. Act., XV, 22), plus souvent anciens, selon la terminologie en usage parmi les.Juifs (TiferrSJTcpoi, Act., XI, 30 ; XV, 2, 4, 6, 22, 23 ; xvi, 4 ; xxi, 8 [à Jérusalem] ; Act., XIV, 23 [dans la Galatie méridionale] ; Act., XX, 17 ; I Tim., iv, 14 ; v, 17, 10 [à Éphèse] ; Tit., I, 5 [en Crète] ; I Pet., i, 5 ; Jac, v, 14 [dans les Églises de la Diaspora]), quelquefois surveillants ou inspecteurs (iTzî<7y.onoi, Act., XX, 28 ; I Tim., iii, 2 [à Éphèse] ; Phil., i, 1 [à Philippes] ; Tit, i, 7 [en Crète) ; I Pet., v, 2 [en Asie Mineure, suivant la variante ïr'.Ty.o-oTLoOvTE ; ]), saint Jean les désigne sous la métaphore d’anges (Apoc, i, 20, etc.) et la notion de pasteur d'âmes est imphquée dans plusieurs textes (Act., XX, 28 ; I Pet., v, 2 ; cf. Eph., iv, 11). Nulle part, aussi haut qu’on remonte, on ne trouve une Église privée de gouvernement ou douée d’une organisation purement démocratique.

2° Point d’uniformité absolue dans l’organisation

primitive des Églises. — On peut distinguer avec plus ou moins d'évidence plusieurs types caractéristiques : l'Église de Jérusalem, l'Église d’Alexandrie, les Églises fondées par saint Paul, les ÉgUses gouvernées par saint Jean. Deux causes contribuèrent à atténuer les différences pour aboutir enfin à l’uniformité presque complète : la mort des apôtres et la prompte disparition des dons charismatiques. Ce travail d’assimilation fut relativement très rapide ; il est très avancé vers la fin du i'^'e siècle ; il se poursuit au ii<^ ; il s’achève, ou peu s’en faut, au iii « .

'S" L'épiscopat est d’origine apostolique. — Nous avons pesé les témoignages formels de saint Clément de Rome, de saint Irénée, de Clément d’Alexandrie, de Tertullien, pour ne pas citer les auteurs plus récents. Ces témoins, par leur lieu de naissance et leur champ d’apostolat, représentent l'Église entière. La plupart ont beaucoup voyagé et tous se distinguent par leur connaissance des antiquités chrétiennes ; saint Irénée a vécu avec les disciples des apôtres ; saint Clément a connu les apôtres eux-mêmes : la qualité des témoins ne laisse donc rien à désirer. A leur défaut, nous aurions les listes épiscopales remontant jusqu’aux apôtres et recueillies par Eusèbe. A supposer — - ce qui n’est pas prouvé — qu’Eusèbe ait emprunté ces listes à Jules Africain, elles conservent tous les caractères de crédibilité ; car lorsqu’il rédigeait sa Clironologie, en 222, Jules Africain avait à sa disposition des sources plus anciennes. Saint Hégésippe, saint Irénée, Théophile d’Antioche aussi très probablement, avaient dressé des listes semblables dont Eusèbe a pu faire usage pour contrôler les siennes et celles de son garant. Quelques différences de chiffres n’infirment en rien la valeur de ces documents qui sont parfaitement d’accord sur les points essentiels : le nom, le nombre et l’ordre de succession des évoques dans les principales Églises apostoliques. Enfin l’information puisée dans le Nouveau Testament, malgré ses lacunes, confirme ces données de la tradition. En effet, la situation de Jacques le Mineur à Jérusalem est, au nom près, celle d’un évêque ; les anges des sept Églises de l’Apocalypse ressemblent fort aux évêques signalés quelques années plus tard par saint Ignace dans ces mêmes Églises d’Asie Mineure ; et les fonctions exercées par Tite et Timothée en Crète et à Éphèse sont des fonctions épiscopales, moins la stabilité et l’autonomie du titulaire.

Nous indiquerons d’une façon générale, comme sources d’information, tes liistoires de l'Église primitive, les ouvrages sur les origines et les antiquités clirctiennes, les commentaires du Nouveau Testament et des pfus anciens monuments de la littérature ecclésiastique, les traités de théologie sur l'Église et sur le sacrement de l’ordre, les encyclopédies bibiiques et théologiques. Nous nous bornons à énumérer ici tes monograpliies refatives à notre sujet, sans tenir compte des études sur des points trop spéciaux citéesau cours de cet article. Le nom des auteurs hétérodoxes est précédé d’un astérisque.

Batitïol, L'Église naissante et te catliolicisme, Paris, 1909 ;

  • Baur, Ueber den Ursprung des Episcopais in der ctirisll.

Kirclie, Tubingue, 1838 ; Das Cliristentlium und die christl. Kirche der drei ersien Jahrhitnderte, Tubingue, 1853 ; *Beyschlag. Die clirisll. Gemeindeverfassung im Zeitalier des A’euen Testam., Harlem, 1874 ; * Bingham, Origines sive antifiuilales ecclesiasticæ, trad. latine de Grischovius, Halle, 1724 ; * Blondel, Apologia pro sententia Ilieronijmi de episcopis et presbijleris, Amsterdam, 1646 ; Bruders, Die Verfassung der Kirclie von den ersien Jalvzehnten der aposl. Wirlisaintteit l>is zuni Jatne 175 nacli Cltristus, Mayence, 1904 ; Briill, Der Episkopat und die Ignatian. Briefe, dans Tlieot. Quartalsclxrift, Tubingue, 1879, t. LXi, p. 248 sq. ;

  • Cunningliam, Tlie growlh o/ Ihe Cliurcli in ils organisation

and institutions (Croall Lectures), Londres, 1886 ; Davenport (l’ranciscus a Sancta Clara), Apologia episcoporum seu sacri magistraius propiignaiio, Cologne, 1640 ; de Smedt,