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DIEU (SA NATURE D’APRÈS LA BIBLE


modifications rendues nécessaires par la différence des consonnes, pour suggérer la lecture Adonaï, « le Seigneur ", qui devait être substituée au nom ineffable de Dieu. C’est un qeri, « ce qui est à lire », perpétuel, remplaçant le kctib, « ce qui est écrit ». Par respect pour sa transcendance, les Juifs ont restreint de plus en plus l’usage du nom divin par excellence et ont fini par le supprimer entièrement, préférant prononcer Adonaï ou se servir de nu, « le nom », qui le remplaçait. Déjà les Septante ont traduit le tétragramme par K-Jptoç, qui est devenu en latin Bominus et en français « le Seigneur ». Josèphe aussi, dans son récit de la révélation divine à l’Horeb, ne transcrit pas le nom divin révélé, parce que cette transcription est interdite. Ant. jud., II, xii, 4. Voir Drusius, Telragrammatan, 8-10, dans Critici sacri, Francfort-sur-le-Main, 1686, t. vi, col. 2153-2155 ; Drach, op. cit., t. i, p. 350365, 512-516.

La véritable prononciation du nom ineffable n’est pas connue avec certitude. Les anciens écrivains profanes et ecclésiastiques en ont signalé différentes, qui peuvent se ramener à trois principales : la&ï (à prononcer Javé), Taà> ou Jao et 'là ou Ma. — a. 'Lzoï se trouve dans Clément d’Alexandrie, Strom., v, 6, P. G., t. ix, col. 60 ; Clemens Alexandrinus, Leipzig, 1906, t. il, p. 348, sous les formes Taoùat ou 'Ixovz ; dans saint Épiphane, Hier., XL, n. 5, P. G., t. xii, col. 685 ; dans Théodoret, In Exod., q. xv, P. G., t. lxxx, col. 244, qui le cite comme usité chez les Samaritains ; et dans un manuscrit éthiopien de la Bodléienne, à la lin d’une énumération des noms divins. Cf. Driver, Récent théories on the Tetragrammaton, dans Studia biblica, Oxford, 1885, t. i, p. 20. — b. 'Iaw est représenté par Diodore de Sicile, I, 94, et par Lydus, qui l’attribue à Varron et à Herennius (Philon de Byblos). Demensibus, édit. Wuensch, p. 111. Saint Irénée, Cont. User., l. I, c. iv, n. 1, P. G., t. vii, col. 481, nomme l'éon Taù> des valentiniens, que ïertullien déclare avoir été emprunté à l'Écriture. Adversus valentinianos, c. xiv, P. L., t. ii, col. 565. Origène connaît ce vocable divin, puisqu’il interprète le nom de Jérémie [j.£Tsa>pi<7(jl& ; 'Iaw. In Joa., tom. i, n., P. G., t. xiv, col. 105 ; Urigenes, Leipzig, 1903, t. iv, p. 53. Les Grœca fragmenta libri nominum hebraicorum, attribués à Origène et soidisant traduits en latin par saint Jérôme, contiennent ce nom, à qui ils donnent le sens d' « invisible », P. L., t. xxiii, col. 1189-1190, ainsi que VOrigenianum texicon nominum hebraicorum. Ibid., col. 1225-1226. Théodoret l’a emprunté à une interprétation des noms hébraïques, qui lui donnait le sens d' « être ». Qusest. in 1 Par., præi., P. G., t. lxxx, col. 605. Cf. Grsec. affect. curalio, serm. ii, De principio, P. G., t. lxxxiii, col. 840. Saint Jérôme le cite comme un des dix noms divins. Traclatus de ps. cxlyi, dans Morin, Anecdota Maredsolana, Maredsous, 1897, t. m b, p. 293. A son avis, le nom ineffable, qui est le nom propre de Dieu, legi potest Jaho. Commentarioli in psalmos, Ps. viii, ibid., 1895, t. ma, p. 20-21. Le Breviarium in psalmos, faussement attribué à ce saint docteur, lui a emprunté cette affirmation. Ps. viii, P. L., t. xxvi, col. 838. La forme 'Iaù se rencontre enfin très souvent sur les pierres gravées, dites Abraxas. Voir Baudissin, Stiidien ztir semilischen Religionsgeschichte, Leipzig, 1876, 1. 1, p. 185 sq. ; Driver, toc. cit., p. 8. Cette forme est probablement la transcription du nom in>, qui entre en

T

composition dans des noms théophores de la Bible et qui a été récemment lue sur les nouveaux papyrus d'Éléphantine. Voir Revue biblique, juillet 1908, p. 326328. — c. Ta est attesté par Origène, qui reproche aux ophites d’avoir emprunté leur 'Iaù au 'là des Hébreux. Cimt. Celsum, l. VI, c. xxxii, P. G., t. xi, col. 1345 (voir la note) ; Urigenes, Leipzig, 1899, t. il, p. 102 (où

on lit Tsuws). Cet écrivain y fait encore une allusion dente, lorsque, au début du ps. ii, à propos de gXXqXovfa, il dit que partout où on lit Ta/, (transcription pour là) dans le texte hébreu de l’Ancien Testament, les Grecs ont traduit Kûpioç. Selecla in psalmos, l’s. ii, /'. G., t. xii, col. 1104. Saint Jérôme a noté que la cinquième version des Hexaples d’Origène avait traduit alléluia, laudate la, id est Bominum. lu unum est de décent nominibus Bei. Commentarioli in psalmos, Ps. CXLVI, dans Morin. op. cit., t. ma, p. 99. Dans son Traclatus sur le même psaume, ibid., t. iwb, p. 293, il signale, parmi les dix noms divins, celui de la, qu’il interprète invisibilis. Il le retrouve dans alléluia, allelu la, et il rapporte que Théodotion, volens interpretalionit edicere veritatem, ait aivstTô tôv Ta. Voir aussi Epist., xxvi, ad Marcellam, n. 3, P. L., t. xxii, col. 130. Saint Épiphane, User., XL, n. 5, P. G., t. xi.i, col. 685, met 'là au nombre des noms divins et il le traduit K-Jpioç. Théodoret dit que les Juifs nomment Dieu 'Aïà ou ! Ta. In Exod., q. xv, P. G., t. lxxx. col. 244. Sur les différentes formes du nom divin dans les papyrus magiques de l’Egypte, voir A. Deissmann, Griechische Transskriplionen des Tetragrammaton, dans Bibelstudien, Marbourg, 1895, p. 3-20.

Les critiques modernes ont généralement reconnu que la leçon mn » de l’Ancien Testament et de la stèle de Mésa, lig. 18, devait se prononcer --->, que l’on a

transcrit en français Vahvé, ou Yahvéhyou Jahweh, ou lahveh, ou Iahvé. Quelques-uns ont conclu que telle était l’unique et authentique prononciation du nom ineffable et que les autres formes Iao ou Iaou et la avaient été extraites des noms théophores de la Bible. Mais la forme Ti se trouvant employée régulièrement

par la colonie juive établie à Éléphantine avant la domination des Perses, elle apparaît désormais comme une forme nouvelle du nom divin, et c’est d’elle que dérive la forme abrégée Iah. Elle a coexisté avec mn>, sans qu’on puisse déterminer laquelle des deux a été primitive. Grammaticalement, elles peuvent être dérivées l’une de l’autre ; elles pourraient cependant être distinctes, si mn> est la forme indicative (imparfait kalj du verbe hébreu ~^~ ou araméen -"- « être et si T T T T

est la forme jussive du même verbe.

b) Elymologie et sens. — Cette origine est généralement admise aujourd’hui et on rejette communément la dérivation d’une racine arabe, signifiant souffler ou « tomber », imaginée pour faire de Jahvé un dieu de l’orage, qui verse la pluie ou lance la foudre. Dès lors, on ne discute plus que pour savoir si mn> est à la

voix hiphil ou à la voix l ; al. Dans le premier cas, ce nom aurait le sens de « celui qui donne l'être », le créateur, ou celui qui fait « arriver > les événements ou ses promesses, le Dieu provident et fidèle à sa parole. Mais la forme hiphil de ce verbe n’existe pas en hébreu, et il est hasardeux d’y recourir pour expliquer le nom divin. Il vaut mieux donc lui donner la forme indicative avec le sens d' « être », que lui a toujours reconnu la tradition hébraïque. Cette étymologie admise, il reste à déterminer si ce nom désigne l'être historique ou l'être métaphysique, ce que Dieu est pour les autres ou ce qu’il est en lui-même. Les protestants sont en néral du premier sentiment. Les uns prennent le sens du futur : « Je serai ce que je serai. > ce que je dois être, votre protecteur. Exod., m. 12, ou ce que je veux être, étant le maître absolu de ma propre conduite. Arnold, The divine name tu Exodus, m. li. dans Journal of biblicul literature, 1907. t. xxiv. p. 107165. Les autres traduisent par le présent. Selon eu. le verbe mn exprime l'être en mouvement, l'être qui devient, et l’imparfait indique une action commencée, mais encore incomplète. Pour.Œlher, Théologie de*