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DIEU (SON EXISTENCE


c. vi, n. 7. Cf. Valentia, In [<" » , disp. I, q.ii, p.ii, a. 2 sq. Vasquez attaqua non pas, comme on l’a prétendu, la démonstrabilité de Dieu, mais la rigueur des censures

que l’on donnait ordinairement à l’opinion de Pierre d’Ailly. In l iiii, disp. XX, c. III, n. 8. Il opinait que les textes scripturaires et patristiques n’exigeaient pas la possibilité d’une démonstration qui donnât la certitude ; car, disait-il, on prétend que la certitude est nécessaire pour expliquer comment ceux qui nient Dieu sont inexcusables ; mais ad hoc ut non possentexcusari, satis est si probabilissimam quamdam et prudente » ! nol’Uiam habere po unissent. Quelques scotistes se rangèrent du côté de Vasquez ; tels Smising, tr. I. disp. I, n. 00 ; Ilerincx, Sum. theol., part. I, disp. I, q. il, a. 3, Anvers, 1680, t. I, p. 22. Sylvius, In i ai ", q. il, a. 2, concède à Vasque/, que l'Écriture ne décide pas la question, mais se retranche derrière les Pères. Suarez montra la « frivolité » des raisons de Vasquez, parce que l’Ecriture et les Pères insistent sur l'évidence de la connaissance discursive de Dieu obtenue par le moyen des créatures, et aussi parce qu’il fallait bien pour l'état de nature pure en venir à une certitude rationnelle absolue et par conséquent à la possibilité d’une preuve évidente au moins pour quelques individus ; et donc aussi pour notre état. Op. cit., c. i, n. 1522. Cf. S. Thomas, Sum. theol., Il" D>, q. i, a. 5, ad 3um. Le sorboniste Cxamache se rallia à Suarez et soutint la démonstrabilité évidente jusqu'à la certitude comme une donnée de la tradition. In I am, q. il, c. il. Le grave Ysambert enchérit même sur Suarez contre Vasquez. Comme Valentia et Molina, de ce que ni l'Écriture ni les Pères ne parlent d’une très grande probabilité, mais bien d’une certitude de l’existence de Dieu produite en nous par le moyen des créatures, Ysambert conclut que la démonstrabilité de l’existence de Dieu par les œuvres divines paraît être une doctrine révélée, videatur de fide. Dispululiones in I*"', q. ii, disp. I, a. 3, Paris, 1643, p. 34.

Nous nous trouvons donc en présence d’un accord moralement unanime de l'École durant plusieurs siècles en faveur de la thèse de la démonstrabilité de l’existence de Dieu. Si les scolastiques, comme nous l’avons dit, n’ont pas censuré ceux qui soutenaient la proposition Deum esse est per se notum, ils ont considéré comme hérétiques, ou comme errants, ou comme téméraires, ceux qui excluaient toute preuve de l’existence de Dieu par le moyen des créatures. Vasquez et quelques autres ont mis en question la solidité de cette censure ; mais leur opinion n’a pas ébranlé l’ensemble des maîtres, et il est inutile de la discuter, puisque le concile du Vatican a défini que nous pouvons connaître Dieu avec certitude et enseigné que la raison « démontre les fondements de la foi, » dont l’existence de Dieu est le principal. Denzinger, n. 1656. Cf. Heinrich, Dogmatische Théologie, Mayence, 1881. t. i, p. 134 sq. Et cet enseignement officiel exclut le moyen terme imaginé par Vasquez pour laver de toute censure Pierre d’Ailly, dont il ne partageait d’ailleurs pas l’opinion. D’ailleurs, cet accord des théologiens ne s’explique pas par des préjugés philosophiques, puisque des auteurs qui, par exemple, n’admettent aucun des arguments de saint Thomas en faveur de l’existence de Dieu, comme Aurioli ou Lherminier, affirment la démonstrabilité aussi bien que l’ensemble des nominalistes et les autres écoles. Enfin tous en appelaient à l'Écriture et aux Pères sur ce point. Hujusmodi autem sententise falsitas ostenditur… tuni etiam apostolica veritate asscrente, Hom., i, 20, Invisibilia, etc., disait déjà saint Thomas. Cont. gent., 1. I, c. xii. Or, on sait que dans ces conditions l’accord des Écoles constitue un argument théologique valable. Cf. Franzelin, Tractatus de divina traditione et Scriptura, th. xvii, Rome, 187"), p. 2U0. D’où l’on conclut qu’il est au moins témé de nier la démonslrabilité de l’existence de Dieu. Telle est la conclusion minimiste de Bannez, de Suarez el à leur suite du P. Pesch, Prselecliones degma ticæ, t. il, n. 29. Kleutgen propose la conclusion i n ces termes : Si quelqu’un reconnaît que Dieu peut être connu avec certitude par le moven des créatures, comme l’a défini le concile du Vatican, et nie qu’on puisse démontrer strictement, c’est-à-dire jusqu'à l'évidence, l’existence de Dieu, son assertion, bien que non hérétique, est néanmoins peu sure dans la foi. De ipso Ben, Ralisbonne, 1881, n. 156.

Si, laissant de côté- l’argument tiré de l’autorité de l’Ecole, on étudie la question en elle-même, on se trouve en face des faits suivants. D’après l’ensemble de l’Ecriture et de la tradition, entre Dieu, les créatures et la position par notre esprit d’un jugement existentiel certain sur Dieu, il y a une relation telle que la position de ce jugement découle de la connaissance des créatures. Voir col. 842. Tel est sans conteste le contenu de la révélation. C’est équivalemment dire que Dieu est démontrable a posteriori, dira-t-on ; et ainsi en jugent de fait les théologiens qui, avec Molina, Valentia, Ysambert, disent que la thèse que nous étudions est de foi divine. Non, disent les autres, il y a une nuance. Car l'Écriture ne dit pas explicitement tout ce que signifie la thèse que Dieu est démontrable. Cette thèse, en effet, dit que la relation entre les créatures et l’affirmation certaine de l’existence de Dieu est celle des prémisses à la conclusion ; elle dit aussi qu’il intervient dans le procédé suivi par l’esprit la connexion entre un terme plus connu et un terme moins connu, que cette connexion non seulement est perçue par l’acte direct de l’esprit, mais que l’esprit a la conscience réfléchie du procédé qu’il emploie pour conclure. Or, toutes ces précisions ne sont pas dans les textes scripturaires explicitement. Mais, ajoutent-ils avec Suarez, elles s’y trouvent à l'état implicite, loc. ci t., n. 13. L'Écriture, en elfet, nous propose de vrais arguments en faveur de l’existence de Dieu et nous invite par là à faire intellectuellement les actes que fait tout homme qui suit une démonstration : si ergo demonstratur, denwnslrabile est ; et si ratione naturali scitur Deum esse, etiam scimus nos hoc scire et demonstrare. Ces conséquences sont si naturelles, et les réflexions de l’esprit qu’importe le terme démonstrabilité sont dans l’espèce si faciles, qu’on en conclut à la note de témérité dans la foi contre l’opinion deXicolas d’AutreCourt et de Pierre d’Ailly. On ne voit pas, en effet, comment le contenu de la révélation reste intact, sj l’on nie la démonstrabilité de Dieu au sens où ce terme est pris dans l’Ecole. Voir col. 853 sq.

La même conclusion se déduit de la formule définie parle concile du Vatican. Denzinger, n. 1653. Quelquesuns font cette déduction par le raisonnement suivant. Le concile définit que l’homme peut connaître l’existence de Dieu avec certitude par le moyen des créatures. Or, il n’y a pas de certitude si l’assentissenient n’est pas fourni en vertu d’un motif qui exclut la possibilité' du contraire, el si l’esprit ne connaît pas clairement que toute possibilité d’erreur est exclue. Mais seule une démonstration proprement dite peut déterminer un assentiment de ce genre. Donc. Cf. Stentrup, De Deo uno, Inspruck, 1879, th. iv. p. 76 ; Hontheim, Institutions theodicex, n. 79 ; Frick, Logica, n. 210. 131. p. 133, 291. Ce raisonnement est fallacieux ; d’abord, parce qu’il s’ensuivrait que jamais la connaissance spontanée de Dieu ne pourrait donner la certitude ; ensuite, parce que dans la mineure on prend pour accordé que le concile en employant le mot certo a nécessairement fait sienne celle des diverses théories classiques sur la certitude et sur le critérium de la vérité que l’on adopte soi-même. Voir Ci'.uvanci :. t. m. col. 2389 sq. Il faut donc, si l’on veut déduire avec cer-