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DIEU (CONNAISSANCE NATURELLE DE ;

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c. v, Réconciliation de la science et de la religion par la croyance, c’est-à-dire par l’Inconnaissable.

Hobbes concède en paroles que « la foi », qui correspond à la révélation, nous renseigne sur la nature intrinsèque de Dieu — comment, l’ernpiriste matérialiste ne le dit pas ; et on explique ordinairement cette concession par le besoin d’être en règle avec les pouvoirs établis. La croyance, au contraire, qui résulte soit de l’exercice naturel de nos facultés sur Dieu, soit de la commune opinion, du consentement commun à la volonté du prince, ne nous apprend rien de la nature de Dieu. « Elle nous enseigne seulement à lui donner des noms honorifiques, soit négatifs, soit d’excellence, comme infini, très-haut ; mais par ces termes nous ne disons pas ce qu’est Dieu en soi, mais seulement combien nous l’honorons et restituons. Car, quand nous disons qu’une chose est infinie, nous voulons seulement dire que nous ne pouvons concevoir les bornes et limites de cette chose, et que nous ne concevons que notre propre impuissance. » Levial /tan, c. iii, n. 26. Dans le De cive, c. v, S 14, après avoir repété que l’on ne peut se former l’idée de Dieu, « parce que, concevant toutes choses par la voie de la sensation, l’homme ne peut rien imaginer que ce qui frappe ses sens, » il enseigne que, lorsque nous désignons Dieu par les attributs positifs €l lui attribuons, par exemple, la science ou l’entendement. " l’on n’a point d’autre vue que de réveiller l’esprit plongé dans les choses sensibles. » Dans le passage du nominalisme empirique à l’interprétation pragmatique des formules religieuses, sauf à faire appel à l’incoiiipréhensibilité divine, Hobbes devait avoir de nos jours plus d’un imitateur.

Hobbes, dans le De corpore, avait rejeté tous concepts qui prétendraient au titre de premiers ou d’innés ; ce qui était se séparer à la fois et de Descartes et de l’École. Locke, place’entre l’empirisme absolu de Hobbes et I innéismede Descartes, rejeta nettement et combattit non sans finesse les idées et les principes innés cartésiens, Essai, 1. I ; mais, tout en prenant pour base l’empirisme, il reconnut la valeur de la réflexion, rejeta la commune opinion comme origine de la croyance, et soutint la possibilité de prouver l’existence de Dieu. Essai, 1. IV. c. xv, xvi ; l. II, c. xxiii, S 12 ; I. IV, c. x. où Rom., i, 20, est allégué. Inutile de dire que l’auteur du fameux chapitre De l’enthou$iasme, l. IV, c. i. ne s’accommode pas de la prérogative e par Hobbes à la foi de nous instruire sur la nature divine : pour Locke, la révélation et par suite la foi sont impossibles.

Locke essaie donc de prouver l’existence de Dieu el <l i tpliquer comment, par la raison naturelle, nous en avons l.i connaissance. Mais il échoue sur le premier point : et, quanl au second, il aboutit aux mêmes conclu-ions subjectivisles, relalivistes, et par conséquent stiques, que le sensualiste son devancier. Il - I inslrucl il de le voir à l’œuvre Comme Occam, Locke attribue les relations à l’activité du sujet, D’où cette th< se, sur laquelle Locke ne de revenir que « toute notre connaissance condans la vue de nos propres idées, el que c’est Ile que roule toute notre connaissance, n Essai, I. IV, c. i. n. Venu apn Descartes, Locke ne lue pas pins que Malebranche de confirmer la erreui di sens, p ir la non-obji vile des qualité - sensibles, par le besoin d ii clain par la confusion entre la simple nce d’une cho et la connaissance adéquate, i ompréhenslon, do bjel Hobbi i appliqué la conception nominaliste de la Dti il. clui H’kl idie de cause : pour lui me pour Nicolas d tutrecourt et pour l< - positivistes I< rnea, la n lation d< que celle d’un antécédent à un conséquent. Hobbes définit la causalité : aggregalitm omnium accidentium, tiim agentium quotquot sunt, tum patientis, quibus omnibus supposilis intelligi non potest quxii effectus sit una productus, et supposito quod unum eorum desit, intelligi non potest quin effectus non sit productus. Prima philosoph., c. ix. Locke, sans même remarquer qu’une telle définition supprime non seulement la liberté d’indifférence, mais tout libre arbitre, y souscrit volontiers. « Tout ce que nous considérons comme contribuant à la production de quelque idée simple, excite par là dans notre esprit la relation d’une cause et nous lui en donnons le nom. » Essai, l. II, c. xxvi, § 1.

Aussi Locke voit-il, après Hobbes et comme Stuart Mill devait le remarquer plus tard, que dans un tel système les arguments du premier moteur et de la première cause ne concluent pas à Dieu ; que, logiquement et en rigueur, ils ne concluent qu’à l’impossibilité pour nous de penser qu’à un instant donné rien n’était ; que, tout au plus, grâce à l’action latente du vrai principe de causalité qui est présent à l’esprit des nominalistes comme du reste des hommes, ils ne concluent qu’à la matière éternelle. Pour exclure cette dernière conclusion, Locke raisonne ainsi : parmi les choses dont l’existence est certaine se trouve l’âme, qui est immatérielle. Or la matière ne peut pas être la cause d’un être immatériel ; donc Dieu, la première cause, est immatériel. L’argument est excellent, s’il est possible d’en prouver la majeure. Mais Locke en est incapable, toujours à cause de son nominalisme. En effet, l’âme est une substance ; or Locke en vingt endroits répète que les « substances nous sont inconnues. » « Le mot de substance n’emporte autre chose à notre égard qu’un certain sujet indéterminé que nous ne connaissons point, c’est-à-dire quelque chose dont nous n’avons aucune idée particulière, distincte et positive, mais que nous regardons comme le subslralum des idées que nous connaissons, > l. I, c. III, £ 18 ; l. II, C. xxiii, S 2, 45. Il en est de même pour les essences des choses. Locke trouve « beaucoup plus raisonnable » que celle qui soutient que nous pouvons les connaître, l’opinion de 6 ceux qui reconnaissent que toutes les choses naturelles ont une constitution réelle, mais inconnue, de leurs parties insensibles, » l. III, c. iii, S 17. Avec un nominalisme aussi rigoureux, comment Locke peut-il savoir que notre âme est immatérielle ? Et s’il l’ignore, que vaut son argument en faveur de l’existence de Dieu ? Or, il l’ignore, et il avoue cette « ignorance où nous sommes, concernant la nature de cette chose pensante qui est nous-mêmes, » l. II, c. XXVI I, § 27. En ajoutant à la sensation la réllexion comme source de nos idées. Locke s’est donné l’âme ; mais son nominalisme le prive du bénéfice de sa trouvaille. Car il connaît si peu l’âme et si peu la matière, quoiqu’il ait des idées de la matière et de la pensée, qu’il écrit : < Peut-être ne serons-nous jamais capables de connaître si un être purement matériel pense ou non. par la raison que sans révélation il nous est impossible de découvrir si Dieu n’a point donné à quelques amas di matière disposés comme H le trouve ; i propos, la puisi de penser, » I. III. c. iv, § (">. Mais s’il en est ainsi, Locke n’a pas prouvé l’existence de Dieu.

Mais, homme, il avail ci tû idée naturelle de Dieu et de sou existence que, philosophe, il mettait en péril, sinon en doute. Il n’a pas réussi à l’expliquer mieux qu’il n’avait fait à la légil r. Lee. xxiii du 1. H de I I insacré i cette explication, fin y lit : o Les idées simples que nous avons de Dieu sont c posées des impies que nous recevons de la réflea u constitue, nous l’avons dit. un propres sur Hobl hujusmodi autem simili potest in potentiii il </ m virtutibus operativit humanis,’dil saint Thomas, t’.nnt. gvul., 1. I. e. xxl. (I. UUngWI