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DEPOSITION ET DÉGRADATION DES CLERCS

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l’influence que ces canons ont exercée sur la discipline tanl en Orient qu’en Occident.

En Orient, l’appel à Rome provoqua la protestation des semiariens, <|ui déclarèrent celle pratique contraire â l’usage de l’Église : liane novitalem… quant horrei vêtus consuetùdo Kcclesix. Cf. Decrelum synodi orientalium apud Sardicam episcoporum, dans Ilardouin, t. I, col. G75-(179. Les orthodoxes parurent même partager ce sentiment au concile de Constantinople de 381. On y renouvela les prescriptions du concile de Nicée, et on décida que si un évêque frappé par un synode provincial trouvait injuste la sentence portée contre lui, il n’avait qu’à en appeler au concile patriarcal, can. 2 et G, Ilardouin, t. i, col. 809, 812. Cf. Hefele, Histoire des conciles, édit. Leclercq, 1908, t. ii, p. 21 sq., 32 sq. De l’appel à Rome, pas un mot ; pas la moindre allusion aux canons du concile de Sardique ; ils furent traités comme s’ils n’existaient pas.

Cependant, dans la pratique, le recours des évêques orientaux au tribunal du pontife romain devenait presque habituel. Eustathe de Sébaste, déposé par le synode arien tenu à Mélitène en 357, en appelle au pape Libère qui le rétablit sur son siège. Socrate, H. E., 1. 1V, c.xii, P. G., t. i.xviii, col. 485. Cf. Basile, Epist., CCLXin, ad occidentales, n. 3, P. G., t. xxxii, col. 977. A quelque temps de là, le successeur de saint Athanase sur le siège d’Alexandrie, le patriarche Pierre, chassé par les ariens, se met sous la protection du pape Damase, qui le rétablit pareillement. Socrate, H. E., 1. IV, c. xxxvii, P. G., t. iilxv col. 557 ; cf. Sozomène, /L E., 1. VI, c. xxxix, ibid., col. 1413. Saint Jean Chrysostome, condamné à l’exil par le concile ad Qucrcum en 403, se tourna à son tour vers le pape Innocent I er pour demander justice ; et chose remarquable, ses juges euxmêmes envoyaient une ambassade à Rome, afin d’amener le pontife à partager leur sentiment. Innocent prit parti pour l’innocence, cassa le jugement du synode et rendit à Chrysostome injustement déposé tous ses droits. Cf. S. Jean Chrysostome, Epist. ad Innocent., n. 1, 7, P. G., t. xxvii, col. 6 ; Palladius, Dialog. de vita S. Chrysostomi, c. ii P. G., ibid. ; S. Gélase, Epist. ad episcop. Dardaniæ, dans Hardouin, t. ii col. 909. Lorsque plus tard (en 448) Eutychès eut été déposé par le concile de Constantinople, il s’adressa à saint Léon en des termes qui témoignent qu’il attendait du saint-siège, considéré comme juge suprême des conflits ecclésiastiques, une décision qui lui serait favorable : Ad vos confugio… Quse vera fueril vobis super (idem proferre sententiam et nidlani deinceps perniillere a factiosis contra nie calumniam procedere. Epist. ad Leonem, parmi les lettres de saint Léon, epist. xxi, cm, P. L., t. liv, col. 711. Sa requête fut mal accueillie, Mais l’appel de Flavien de Constantinople, frappé par le concile connu sous le nom de Brigandage d’Ephèse, eut plus de succès. Saint Léon cassa la sentence du conciliabule. Sur cette affaire, voir dans les lettres de saint Léon, Epist., xi.v, xlvi, lv, P. L., t. liv, col. 834 sq. Théodoret de Cyr, déposé comme Flavien, imita son exemple ; il écrivit au pape : « J’attends la décision de votre siège apostolique ; j’en appelle à la justice de votre tribunal… Ne" rejetez pas ma prière et ne méprisez pas mes cheveux blancs, qui, après tant de travaux, sont maintenant couverts de honte, » Epist., ui, c. v. ibid., col. 818 ; saint Léon lui rendit pareillement justice et le rétablit sur son siège. Epist., i : xx, ad Théodoret., c. v, col. 1040. Les légats de l’empereur qui assistèrent en 151, au concile de Chalcédoine où fut n’habilité l’évéque de Cyr, nous font voir quelle autorité avaient en Orient les décisions romaines : « Recevez, disentils aux Pères du concile, le très digne évêque Théodoret, alin qu’il prenne part au synode, car le très saint archevêque Léon lui a rendu l’épiscopat. » Concile de Chalcédoine, act. 1, dans Ilardouin, t. ii, col. 72 sq.

Le concile fit écho aux légats impériaux, i Théodoret, proclame-t-il, est digne de son siège ; Léon, après Dieu, a prononcé ce jugement, « h-.-j. roO Qeov A : -./ s8(xa<rev. Act. VIII, dans Ilardouin. loc. cit., p. 500.

Malgré les faits, les principes posés par le concile de Constantinople en 381 étaient maintenus dans les lois, .lustinien les consacre en quelque sorte dans une de ses Suvclles. Il déclare que le métropolitain tranchi ra dans son synode les conllits ecclésiastiques. Et si l’une des parties n’admet pas la décision, elle en appellera an patriarche de sa province, dont la sentence sera déGnitive ; nulla parte ejus sententise conlradicerc valente. Novell., cxxni, c. 22. Ce fut seulement au concile in Trullo de 092 que les canons de Sardique furent formellement approuvés et que les appels au pape qui, dans la pratique, étaient reconnus par l’Église d’Orient, reçurent une consécration légale, can. 2, Hardouin, t. iii, col. 1059.

En Afrique, la hiérarchie n’était pas constituée absolument comme en Orient. Le « primat * de chaque province tenait lieu de métropolitain ; mais cette dignité n’était pas attachée à un siège particulier ; l’évéque le plus ancien par l’ordination en remplissait les charges. Pierre de Marca, Disserlatio de primatibus, n. 3 et 4, appendice au De concordia sacerdidii et imperii. C’était devant ce primat de la province que comparaissaient les évêques accusés de quelque faute grave. Codex canon. Eccles. africaine, can. 19 : .Si quis episcoporum accusatur, ad primaient provincial ipsius causant déférât accusalor. Hardouin, t. i. col. 875. Le primat de l’Afrique proconsulaire était l’évéque de Carthage dont la prérogative était, par exception, attachée au siège même. L’évéque de Cartilage exerçait, en outre, la juridiction sur toute l’Eglise d’Afrique. C’était à son concile qu’étaient déférées les affaires litigieuses que les primats des autres provinces n’avaient pu faire aboutir. Il formait un tribunal de seconde instance, comme celui des patriarches en Orient.

Comme en Orient aussi, l’Église d’Afrique ne voulut pas reconnaître d’abord d’autres tribunaux que ceux de ses primats. Les canons de Sardique avaient pourtant été d’abord admis en Afrique aussi bien qu’en Egypte. Hefele. Hist. des conciles, trad. Leclercq, t. 1. SOS ; Maassen, Geschichte der Quellen und der Literatur des canonischen Redits, p. 50. Cf. Tunnel, op. cit.. p. 203. Mais ils tombèrent bientôt dans un oubli profond, et le « code des canons de l’Église d’Afrique les ignore absolument : Non provocent ad trattsmarina jiidicia, sed ad primates suarum provinctarum aut ad universale concilium (le concile de l’évéque de Carthage) sicut et de episcopis sœpe constilutum est. Ad transmarina aillent qui pulaverit apjtellandum a nullo iittra Africain ad communionent suscipiatur. Codex cation. Eccles. Africanse, can. 28, Hardouin, t. i, col. 878. Cf. can. 12, ibid., col. 871, où le recours à douze évêques choisis est autorisé, mais à condition qu’on se soumette à leur sentence, can. 15. ibid., col. 874 ; can. 90, col. 919 ; can. 122, col. 934.

Saint Augustin n’a qu’une idée fort vague de ce qui a pu se passer à Sardique. Comme les eusébiens, qui en avaient fait partie, avaient ensuite attaqué, à Philippopolis, saint Anastase et le pape Jules, l’évéque d’Hippone estime que le concile de Sardique fut tenu par les ariens : l’nde apud nos constilit arianorum fuisse concilium… Epist., xi.iv, ad Eleusium, c. iii, P. L., t. xxxui, col. 170. L’affaire du prêtre Apiarius de Sicca, déposé par son évêque L’rbain, montre encore mieux l’état d’esprit des Africains. Apiarius en avait appelé à Rome et le pape Zozime axant accueilli son appel, l’avait fait rétablir dans ses fonctions par les légats qu’il avait envoyés sur les lieux. Non content de cri acte d’autorité, Zozime proclama que les prêtres,