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DÉPOSITION ET DÉGRADATION DES CLERCS

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L’union des deux pouvoirs était si étroite, au moyen âge, que les empiétements de l’État dans le domaine de l’Église étaient presque inévitables. De là cet usage de l’investiture qui troubla si profondément la société au r siècle. Acquérir un évêché par des moyens illégitimes, recevoir l’investiture laïque, ordonner des clercs d’un diocèse étranger, ou des clercs absolument ignorants, lancer l’interdit pour des motifs d’intérêt privé, etc., etc. toutes ces fautes furent punies de la déposition. Concile de Rome de 863, can. 1, Ilardouin, t. V, col. 138, 203, 848 ; concile de Rome de 1075, dans Monumenta Germanix Itisl., t. x, p. 412 ; concile de Latran de 1179, can. 14, Ilardouin, t. vi b, col. 1679, concile de Londres de 1070, Ilardouin, t. vi, col. 1165 ; cf. concile de Tolède de 683, can. 7, Ilardouin, t. ni, col. 1742.

La paganisme et le judaïsme ne formaient plus de danger pour l’Église ou du moins pour le clergé. Si l’on continue de mettre les fidèles en garde contre les intrigues des juifs, concile de Rome de 743, can. 10, Hardouin, t. m, col. 1929 ; concile de —Metz de 888, can. 7, Ilardouin, t. vi, col. 412, on suppose que la foi des clercs n’a rien à redouter de leur contact, d’ailleurs assez rare. Mais un reste du paganisme qui se maintint pourtant, ce fut la superstition sous toutes ses formes, le culte des arbres, des sources, des montagnes, des pierres, la divination, les sorts, l’astrologie, la sorcellerie, les pbiltres, les amulettes. Il fallut menacer de la déposition les clercs qui s’y livraient. Concile de Tolède de 633, can. 29, Hardouin, t. m, col. 586 ; concile d’Aix-la-Chapelle de 813, can. 17, Ilardouin, t. iv, col. 1044 ; concile de Paris de 829, ibid., col. 1352.

L’hérésie fut rare dans le haut moyen âge. Au xi e siècle, elle réapparut sous la forme du néomanichéisme. Les clercs qui en furent reconnus coupables au concile d’Orléans de 1022 furent déposés et même brûlés. Cf. Hardouin, t. vi, col. 821 sq. Ce fut surtout au sujet de l’administration du baptême qu’on vit surgir des théories hétérodoxes. Le pape Zacharie ordonna de déposer un prêtre qui prétendait que le sacrement ne conférait aucune grâce. Episl., x, ad Bonifac. archiep., dans Hardouin, t. m, col. 1912. Même peine devait être infligée à ceux qui baptisaient sans invoquer les trois personnes de la Trinité. Ibid., col. 1910. La triple immersion n’était plus obligatoire. Mais bien qu’une seule immersion fût considérée comme un rite suffisant pour la validité et la licéité du sacrement, on crut devoir attirer l’attention sur les clercs qui attacheraient à l’unité d’immersion un sens hérétique ; et on les menaça de la déposition. Réginon, 1. I, c. 262, P. L. f t. cxxxn, col. 240.

L’administration du sacrement de baptême constituait l’un des principaux devoirs de la charge pastorale. Malheureusement nombre d’enfants mouraient sans baptême. Les pénitentiels notent que, si ce malheur arrive par la faute d’un curé, ce curé doit être déposé. Pénitentiel de Théodore, 1. I, îx, sect. vu ; xiv, sect. xxvm ; Pénitentiel de la Vallicellane, c. xvni, dans Wasserschleben, op. cit., p. 194, 200, 686.

3. Discipline du XII e siècle à nos jours. — Avec le Corpus juris canonici qui comprend le Décret de Gratien, de 1140, les Décrétâtes, le Sexte et les Extravagantes, commence, semble-t-il, une ère nouvelle du droit canon. Nous vivons encore sous le régime de cette législation. Il nous reste donc à examiner quelles fautes le Corpus punit de la déposition.

On peut les ranger sous quatre chefs : les fautes de droit commun, fautes contre le respect dû à la dignité ecclésiastique, fautes contre la religion en général, fautes contre les devoirs d’état.

Parmi les fautes de droit commun, notons le meurtre et la complicité de meurtre, dist. L, c. 6, 7, 39, 40 ; 1. V, tit. xn, De homicid., c. 7 ; 1. V, tit. xxxt, De ex cessib. prselat., c. 10 ; la mutilation ou les coups qui entraînent par exemple la perle d’un a-il, dist. LV, C. 13 ; la mutilation de soi-même, dist. LV, c. i, 9 ; le vol et le parjure. 1. II, tit. i, De judic, c. 10 ; le faux témoignage devant les tribunaux, dist. L, c.7 ; eau-. V. q. VI, c. 3 ; la falsilication de documents, chartes ou bulles, dist. L, c. 7 ; 1. V, tit. xx, De crin}, falsar., c. 3,’■ complicité pour crime, caus. XXXVI, q. il, c. 1, 4 ; I. V, tit. xxxiv, De purgat. can., c. 4 ; participation à la rébellion, caus. XXIII, q. vm, c. 5 ; la fornication, caus. XXVII, q. i, c. 6 ; l’adultère, dist. LXXXI. c. 10 ; l’inceste, 1. V, tit. xxxiv, De purgat. can., c. 15 : la sodomie, 1. V, lit. xxxi, De excess. preelat., c. 4.

Fautes contre la dignité ecclésiastique. Celles-ci n’entraînaient la déposition en général que lorsqu’il y avait récidive ; l’ivrognerie et le jeu, dist. XXXV, C. 1 ; l’exploitation de débits et maisons de commerce, dist. XLIV, c. 3 ; la bouffonnerie et les discours indécents, dist. XLVI, c. 6 ; les outrages à des supérieurs ou à des collègues, dist. XLVI. c. 5 ; fréquentation suspecte de personnes du sexe, dist. LXXXI. c. 20. 29 ; visites répétées et non motivées de religieuses cloîtrées, 1. III, tit. i, De vita et honest., c. 8.

Fautes contre la religion : l’hérésie et l’apostasie, dist. XXX, c. 17 ; dist. L, c. 32 ; caus. I, q. vu, c. 21 : 1. V, tit. vu, De hseret., c.9 ; tradition de chrétiens aux païens, dist. XLVI, c. 3 ; relations trop fréquentes avec les juifs, caus. XXXVIII, q. I, c. 13 ; blasphème, caus. XXII, q. I, c. 10 ; consultation des diseurs de bonne aventure et pratique d’usages superstitieux, caus. XXVI, q. v, c. 5, 13 ; réitération du baptême, dist. IV, c. 118 ; usure, dist. XLVI, c. 1. 2, 5 ; caus. XIV. q. iv, c. 3, 4, 8 ; 1. V, tit. xxxix. De usur., c. 1 ; simonie, caus. VII, q. I, c. 3 ; 1. V, tit. vm, De simon.. c. 11.

Fautes contre les devoirs d’état : elles diffèrent suivant la dignité. Fautes propres aux évéques : le sacre d’un clerc qui n’est pas élu canoniquement ou qui n’a pas les qualités absolument requises ou enfin qui a commis des fautes qui le rendent indigne de l’épiscopat, dist. XLII, c. 3 ; dist. LI, c. 5 ; dist. LXXXI. c. 3 ; exercice irrégulier des fonctions épiscopales dans un diocèse étranger, caus. IX, q. n. c. 6 ; ordination d’un clerc d’un autre diocèse sans l’autorisation de l’ordinaire, caus. XXI, q. il, c. I ; ordination d’un néophyte, d’un idiot, ou de quelque autre frappé d’irrégularité, dist. XLVIII, c. 1 ; dist. XXXVI, c. 2 ; dist. LI, c. 1. Fautes propres aux prêtres : fornication avec une de leurs filles spirituelles, caus. XXX. q. i, c. 8, 10 ; violation du sceau de la confession. De psenit., dist. VI, c. 2 ; 1. V, tit. xxxvm. De psenit. et rémission., c. 12 ; audition d’un pénitent sur lequel on n’a pas de juridiction, dist. VI, c. 3, De psenit. ; absolution et inhumation d’un voleur sacrilège impénitent, I. V. tit. xvn, De rapt., c. 2 ; traitement irrévérencieux delà sainte eucharistie, De consecrat., dist. II, c. 2 ; refus non motivé du baptême, si l’enfant vient â mourir sans être baptisé. De consecrat., dist. IV. c. 22. Les diacres sont punis de la déposition, s’ils usurpent des fonctions d’un ordre supérieur, dist. XCIII, c. 14. Fnfin tous les clercs sans distinction sont passibles de la même peine s’il> commettent l’une des fautes suivantes : réception irrégulière de l’ordination, dist. XLVIII, c. I : dist. LI. c. 1. 5 ; réception de l’investiture laïque, De jure patronal., 1. III, tit. xxxvm, c. 4, 21 ; abandon de sa propre église pour passer dans un autre diocèse sans l’agrément de l’ordinaire, caus. XXI. q. il, c. 1 ; érection d’un autel sans l’agrément de l’évêque, dist. I, c. 25. De consecrat. ; perception des fruits d’un bénéfice après (’•change avec un autre bénéficiaire, caus. XXI. q. n, c. 3 ; négligence scandaleuse des devoirs d’état, dist. LXXXI, c. 8 ; dist. XCI, c. 3. 4 ; dist. XCII. c. 9 ; acceptation de présents pour rendre la justice.