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DEMOCRATIE


Ici le milieu chrétien, où se développe la pensée scolastique, réagit sur les doctrines que celle-ci emprunte au milieu hellénique ; sans nier qu'à certains égards, le citoyen ne doive se subordonner au bien de la cité comme au bien de son tout et à une véritable fin, saint Thomas aperçoit de plus hautes fins auxquelles la cité même doit se subordonner pour le bien de l’homme et du chrétien.

2° Dans le milieu politique du xiiie siècle, ce ne sont pas des modèles adéquats qu’on peut retrouver, comme donnant corps aux vues de saint Thomas sur les éléments démocratiques de la constitution parfaite. Cependant, à côté des dynasties royales et des familles aristocratiques installées dans toute l’Europe, une démocratie véritable se réalise dans le mouvement communal, précisément au xiiie siècle. Les premiers citoyens des villes sont des artisans et des marchands, à qui la communauté des intérêts, du voisinage et des dangers lit conclure des alliances. « Partout au Xe et XIe siècle, on les trouve unis dans les Ghildes, et partout ces Ghildes bourgeoises sont confondues avec la commune ; l’autorité de la Ghilde est celle de la cité : à Londres, la Ghilda mercatoria, à Cologne, la Richerzeclieit, à l’aris, les mercatores aquæ, en Flandre, les Geschlechten. Ce sont les génies, les lignages, les patriciens de naissance. Investis du monopole du pouvoir, ils deviennent arrogants et s'érigent en aristocratie fermée. Mais ils ne sont plus seuls. Ils ne constituent plus toute la cité politique ; des parvenus se sont établis à cùté d’eux, se sont enrichis et ont formé de nouvelles G/tildes qui égalent les anciennes en richesse et en considération qui revendiquent leur part d’autorité et d’honneurs, En Angleterre, en Allemagne, en Flandre, les rivalités éclatent. En général, la lutte finit par une transaction : les nouvelles Ghildes obtiennent leur place au conseil de la cité. Le patriciat bourgeois, qu’on peut en quelque sorte considérer comme la fusion de la propriété » et du capital dégagés des liens féodaux, est constitué sous sa forme définitive. Mais cette classe dirigeante abuse de sa puissance, se complaît dans l’oisiveté, fait des règlements pour exclure de la vie corporative ceux qui a ont les mains sales et les ongles noirs ou qui crient leurs marchandises dans la rue ». A moque la richesse publique s’accroit, l’antagonisme lasses et des intérêts s’accuse davantage. Partout, an mu siècle. ni, le travail, entre

en 8< dresse contre les Ghildes patriciennes.

Prenez Paris ou Londres, Gand ou Bruges, Bruxelles mi Cologne, Francfort ou Augsbourg, les travailleurs i méprisés par la bourgeoisie ont pour bouclier le droit corporatif et, imitant l’organisation qu’ils avaient sons I ment des unions pour la pro tection du travail. Ces plébéiens ni' demandaient pas le partage des biens, ils ne déclaraient pas la pierre au capital dont ilse servaient eux-mêmes. Ils combattaient pour i'égo lique, poui la /" <"<.

affaire » publiques, el il » voulaient intervenir dam le ernement, c'éta garantir leur gagne-pain

ri leui indépenda ii, h //es haulei

Ce qui domine dans cette lutte séculaire et dans l’accession graduelle d< -eu-.m droit

corporatif, c’est, au milieu de la violence des pa et malgré le choc furieux des partis, la modération des ntioni populairei Prins, Lu démocratie et le i, Bi uxelles, 1888, p, H, 57, De ce

mouvement résultait nue large part de la démocratie rnement des communes libreou souverain élection det conseil bourgmestres, s

parfois même, i me |< m bourg mestres, l’un patricien et l’autre plébéien, représentaient la I n entre le peuple et les nobles de 1 1 cité'. Prin Cette inle action de la i nement des iiie^ attire

manifestement l’attention de saint Thomas dans le passage du De regimine principum, où il invoque l’expérience des municipes, régis par des magistrats annuels, l. I, c. ni. C’est là que se réalisait l’application de tous aux intérêts communs et ce support allègre des charges publiques, même lourdes, par où, selon saint Thomas, le gouvernement populaire l’emporte sur le gouvernement royal. Il n’est donc pas téméraire de conclure à une réelle inlluence du mouvement communal et de sa poussée démocratique au xiiie siècle, sur le vœu de saint Thomas que tout le monde participe au pouvoir. Cf. Perrens, Histoire des tendances démocratiques dans les populations urbaines au xive siècle, Paris, 1873.

3° Des observations, des expériences plus intimes s’aperçoivent encore à l’origine de ces idées. Dans les couvents dominicains où vivait saint Thomas, l’institution monarchique du prieur conventuel, du provincial, du maître général de tout l’ordre ; l’institution aristocratique des conseils de couvent ou de province, des chapitres provinciaux ou généraux se tempéraient d'éléments démocratiques : élection des prieurs conventuels par les religieux prêtres et profès ; adjonction de ces derniers assemblés en chapitres conventuels, pour sanctionner certains votes importants des conseils ; élection de députés des couvents aux chapitres provinciaux, par les religieux de chaque maison. Lacordaire, Vie de saint Dominique, c. vin ; R. P. Mortier, O. P., Histoire des mailres généraux de l’ordre de saint Dnminique, t. i, p. 77, 82. Les frères prêcheurs appliquaient là une tendance générale de la vie religieuse en Occident, à l’organisation particulière de leur régime. Des principes analogues se retrouvent aussi bien dans cette sorte de domaine complet et de cité autonome qu’est l’abbaye bénédictine. Dom Cabrol, Bénédictins, dans le Dictionnaire d’archéologie chrétienne, t. ii, col. 666. « Le régime qui est supposé par la règle [de saint Benoit] ne répond pleinement à aucun des qualificatifs que nous donnons à un gouvernement absolu, ou représentatif, monarchique ou démocratique. Par le pouvoir très étendu donné à l’abbé, il est fortement monarchique ; par le droit donné à tous d'élire leur chef, d’avoir une voix au conseil, d'être éligible à toutes les fonctions, ce régime apparaît démocratique. Les res et les decani ont cependant une autorité spéciale et représentent, si l’on veut, un élément de gouvernement oligarchique. La règle, à laquelle tous doivent obéissance, in omnibus omnes magistram sequuntur régulant, peut être considérée comme la charte d’un régime constitutionnel. » D. Cabrol, lue. cit., col. 669. Monastiques donc ou canoniales. I. habitudes et les maximes de la discipline religieuse favorisaient positivement l’idée de ce gouvernement tempéré, ou saint Thomas l’ait sa place à la démocratie par le suffrage et l'éligibilité également universels Sa théorie de la constitution parfaite cadre aussi bien avec souvenirs du Mont-Cassin où il fut élevé el ses habitudes dominicaine-, qu’avec ses observations sur le mouve ni communal. Au lieu de ces g réminiscences I et de ces i piècerapportées ». que Paul.lanel croit retrouver seules dans les doctrines politiqui saint Thomas, nous retrouvons ici des expériences el di observations â l’appui de vues originales et personnelles. Cf. Paul Janei. Histoire de la science politique dans tes rapports avec la morale, Paris, 1872, t. i, p. 135.

l. i LBVR PRATIQUE II Uoiim I lu l, OOCTRIXE

thomiste. La politique d’Aristote unissait des vues el des doctrines de philosophie morale i des observatiom me sociale et politique

on y trouve des i graphies de la constitution

tiate, carlhag ie ou ci côté de théories sur

i tus du citoyen, La Somme de saint Thomas et le