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DIVORCE


tirer, si elle est en deuil de ses père et mère depuis moins de trois ans, si elle a enrichi son mari qu’elle avait épousé pauvre. Ibid., p. IlOsq. — En tgypte, où la femme demeurant l’égale de son mari conserve l’administration de ses biens, le mari paraît cependant avoir seul le droit de répudiation ; mais ce droit fut très restreint par la pratique : en répudiant, le mari devait restituer la dot, souvent fictive, que sa femme était censée lui avoir apportée ; de plus, certaines conventions d’usage courant décidaient que le mari usant du divorce serait dépossédé de ses biens dont l’administration passait au fils aine ; enfin les femmes finirent par se réserver presque le monopole de la répudiation. « La femme dotée, dit M. Maspero, s’émancipait donc ou à peu près de par la vertu de son argent. Comme son départ appauvrissait la maison d’autant, et parfois de plus que son arrivée ne l’avait mise à l’aise, on se gardait bien de rien faire qui la décidât à se retirer, ou qui fournit à son père ou à sa mère un prétexte pour la rappeler près d’eux. » Hisl. anc. des peuples de l’Orient, c. x, La civilisation chaldéenne, p. 738. Cf. J. Cauvière, loc. cit. ; Paturet, La condition juridique de la femme dans l’ancienne Egypte ; Eug. Révillout, La question du divorce citez les Égyptiens, dans la Revue égyplologique, 1880, n. 2 et 3. — Les Grecs demeurèrent plus longtemps fidèles à l’indissolubilité du lien conjugal, le divorce paraît à peu près inconnu chez eux à l’origine et même au temps d’Homère. Il devient au contraire très fréquent à l’époque classique. Il y avait, en particulier, un cas universellement reconnu : celui de la femme, unique héritière légitime de son père décédé qui, pour ce motif, était attribuée à l’agnat le plus proche. D’autre part, le père pouvait toujours reprendre sa fille, même pour la donner à un autre mari. Enfin, à Athènes, quand la femme avait commis l’adultère, le mari était contraint de lui imposer le divorce, et une peine déterminée sanctionnait cette obligation. En dehors de ces espèces, on en connaissait une foule d’autres, non seulement le divorce par consentement mutuel et, dans ce cas, en certaines régions, le mari n’avait de compte à rendre à personne, mais le divorce par la volonté d’un seul, surtout du mari, à condition, généralement, qu’il le fit par devant témoins. On vit des maris donner leur femme à leurs amis, ou même à des personnes de rang inférieur, tel, Périclès, tel, Socrate, le banquier, qui la donne à Satyre, un de ses esclaves libéré. La femme elle-même peut répudier son mari, quand elle croit que sa vie, sa santé ou ses mœurs sont en péril ; dans ce cas, elle va trouver l’archonte, qui prononce le divorce après qu’elle a justifié dans une requête écrite qu’elle avait de bonnes raisons pour divorcer. Cependant quelques limites sont mises par des circonstances extérieures à cette liberté extrême : c’était, d’une part, l’obligation de restituer la dot quand on répudiait sa femme sans motif suffisant, d’autre part, celui qui se refusait au divorce avait contre l’autre une action civile ; l’opinion publique se montrait sévère pour les femmes qui répudiaient leur mari, et des peines frappaient le mari qui renvoyait sa femme sans motif ou qui lui donnait motif de le répudier. J. Cauvière, loc. cit. ; E. Caillemer, art. Divortium, dans le Diclionn. des antiquités grecq. et rom., de Daremberg et Saglio. Chez les Romains, le divorce paraît dès la plus haute’antiquité. La loi attribuée à Romulus réservait au mari le droit de répudiation, droit qu’on lui abandonnait sans réserve quand la femme se rendait coupable des fautes suivantes : empoisonnement, adultère, supposition d’enfant, usage de fausses clefs pour pénétrer dans la cave. En dehors de ces cas, la répudiation est valable, mais elle expose à des pénalités comme la perte des biens. De plus, une loi particulière montre clairement en quelle estime on tient l’indissolubilité du

mariage : l’union conjugale des Uamines de Jupiter consacrée par la cérémonie de la confarreatio est indissoluble. La loi des XII Tables admet aussi le divorce, tout en réservant au mari le droit de répudiation. Encore la répudiation était-elle soumise à quelques formalités, en particulier celle de soumettre l’affaire au tribunal domestique, et, d’après Valère Maxime, l. ii, c. i, n. 4, ce fut pour avoir répudié sa femme sans soumettre préalablement la cause au tribunal du paterfamilias que Sp. Carvilius fut exclu du Sénat par les censeurs. Malheureusement les mœurs, puis la législation elle-même viendront briser les fragiles barrières qui s’opposent encore au divorce. Il y avait déjà obligation pour le mari de répudier sa femme, en cas d’adultère, sous peine d’être inculpé lui-même de lenocinium. Ce fut ensuite le mariage sine manu, qui laissant la femme même mariée sous la patria potestas de sa famille d’origine, permet à son paterfamilias de retirer cette femme à son gendre quand bon lui semble ; c’est la femme demeurée sut juris qui a le droit de répudiation et qui peut contraindre son mari à dissoudre la manus, c’est-à-dire à renoncer au pouvoir qu’il avait sur elle ; c’est le débordement d’immoralité qui nous montre Caton d’Utique cédant sa femme Martia à Hortensias, Paul-Émile répudiant sa femme Papyria, Scylla, Pompée, César, etc., changeant de femme au gré de leur caprice ; c’est l’exemple des plus grands devenant si contagieux que la cession mutuelle des femmes passe pour chose courante, au témoignage de Strabon. Plus encore, est déclaré immoral le pacte par lequel les époux conviennent de ne pas divorcer, Loi 2, Cod. 8, 31) ; et le divorce par consentement mutuel n’est limité par aucune réglementation. On en est venu au degré de licence que flagellera Juvénal : e Tu te mouches trop souvent, dit le maria sa femme ; prends tes bardes, et va-t-en. Une plus jeune la remplacera ! » Satir., vi, 146-148. Tout ce qu’Auguste osa exiger comme réforme, ce fut que la volonté de divorcer devrait être manifestée désormais devant sept témoins. On comprend que devant ces mœurs honteuses Tacite ait vanté spécialement la fidélité conjugale des Germains, bien que nous puissions craindre qu’il n’en ait fait un si brillant tableau que pour mieux faire honte aux Romains. De ces « barbares » et de leurs mœurs matrimoniales à cette époque nous ne dirons pas plus ; nous en savons si peu de choses précises !

C’est là, en vérité, que devait aboutir peu à peu la pratique du divorce : au mariage à l’essai, c’est-à-dire, souvent, à l’abolition du mariage. C’est ce que nous constatons chez certaines peuplades de l’Amérique du Nord par exemple, ainsi qu’en témoignent plusieurs consultations adressées par les missionnaires à la S. C. de la Propagande. Les sauvages de nos régions, écrivait l’évêque de Saint-Albert au Canada, se marient pour ainsi dire à l’essai, un essai en quelque manière perpétuel, car aucun des deux conjoints ne se croit lié a l’autre. L’homme achète sa femme sans lui demander à elle-même un consentement quelconque. Si elle est paresseuse, infirme, l’union dure tant que le mari n’a pas trouvé mieux. Si elle se montre laborieuse et d’aimable caractère, l’essai se continue, mais si elle demeure deux ou trois ans stérile, le mari la renvoie ou en prend une autre avec elle. La perpétuité de la Cohabitation ne s’acquiert qu’au bout de sept ou huit ans, après la naissance de plusieurs enfants. Pourtant, même à cette date, ce n’est pas encore un vrai mariage, le seigneur et maitre garde le droit de renvoyer safemmeet d’en changer comme on change de domestique. Collectanea de la Propagande, 2e édit., n. 1427. Cf. l’instruction du Saint-Office, 24 janvier 1877, à l’évêque de Nesqually, ibid., n. 1465.

Le divorce chez les Juifs.

Il s’en fallut de peu que chez les Juifs eux-mêmes on en vint à ce point deErreur de référence : Balise <ref> incorrecte : les références sans nom doivent avoir un contenu.