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DISPARITE DE CULTE


pour ce motif, appelée « religion mixte », ne constitue qu’un empêchement prohibant.

L’une et l’autre de ces disparités de culte peuvent être antérieures au mariage, ou ne se produire qu’après sa célébration. Cf. Bellarmin, De sacramento matrimonii, . I, c. xxiii, Decultus disparitate, Opéra omnia, 8 in-4°, Naples, 1872, t. iii, p. 834 ; De Angelis, Prselecliones juris canonici ad metltodum Decretalium, 1. IV, tit. i, De sponsalibus et matrimonio, n. 21, 4 in-S", Rome, 1887-1891, t. iii, p. 65 sq. ; D’Annibale, Summula theologise moralis, part. III, 1. III, tr. VI, De matrimonio, c. ii, a. 1, n. 437, 3 in-8°, Rome, 1889-1892, t. iii, p. 344.

II. MOTIFS QUI ONT DÉTERMINÉ L’ÉGLISE À ÉTABLIR CET

empêchement de mariage. — 1° L’Église qui a institué plusieurs empêchements de mariage à cause des liens étroits existant entre les personnes unies par la parenté ou l’affinité, en a institué également à cause des différences, ou dissemblances, existant entre certaines personnes, quand ces différences, ou dissemblances, sont telles, qu’elles peuvent devenir un péril pour ces personnes ; soit en ce monde, en compromettant gravement la paix du foyer domestique ; soit en l’autre, en compromettant leur salut éternel. Or, de toutes les différences susceptibles d’intervenir entre créatures humaines, aucune, comme le montrent manifestement la raison et l’expérience quotidienne, ne crée des dissentiments aussi profonds et aussi irréductibles, ni de danger de perversion aussi grand que la différence de religion. On conçoit donc aisément que l’Église, pour écarter de ses enfants un si pressant danger, ait institué un empêchement spécial de mariage.

2° Il faut remarquer, en outre, que le baptême étant la condition sine qua non pour la réception des sacrements, et, selon l’expression, étant janua sacramentorxiii, un infidèle est radicalement incapable de recevoir le sacrement du mariage. De plus, le fidèle qui contracte mariage avec une personne non baptisée, ne reçoit pas lui-même le sacrement, du moins, d’après l’opinion la plus probable. Cf. Sanchez, Disputationes de sancto matrimonii sacramento, I. II, disp. VIII, n. 2, 3 in-fol., Lyon, 1037, t. i, p. 122 ; Pirhing, Jus canonicum in quinque libr. Decretalium dislributum, 1. IV, tit. i, n. 71, 5 in-fol., Dillingen, 1674-1677, t. iv, p. 30 ; Schmalzgrueber, Jus ecclesiasticum universum, 1. IV, tit. i, De sponsalibus et matrimonio, ^ 2, n. 306-309, 6 in-4 «, Rome, 1843-1845, t. iv, p. 139 sq. ; Hurter, Compendium theologiæ dogmaticæ, tr. IX, De sacramentis, sect. viii, thés, cci.xii, n. 598, 3 in-8°, Inspruck, 1893, t. iii, p. 526 ; "Wernz, Jus Decretalium, 1. IV, tit. i, n. 44 sq., 5 in-4°, Rome, 1898-1907, t. iv, p. 63 sq. ; Billot, De Ecclesise sacramentis. De matrimonio, thés, xxxvni, S 3. 2 in-8°, Rome, 1908, t. ii, p. 378-380. Voir Mariage. C’est un motif de plus qui a porté l’Église à établir l’empêchement dirimant de disparité de culte, afin que la partie baptisée, contractant mariage, ne soit pas privée du bienfait et des grâces du sacrement.

III. Historique.

1° Loi mosaïque. —Il était sévèrement défendu aux Israélites de contracter mariage avec des personnes ne professant pas leur religion, et spécialement avec celles qui appartenaient aux sept nations fixées dans la terre de Chanaan. Exod., xxxiv, 16 ; Deut., iiv 1 ; III Reg., xi, 1 sq. ; I Esd., x, 3 ; II Esd., ix, 2 ; x, 30.

Ces mariages cependant n’étaient pas invalides. Cf. S. Augustin, De adulterinis conjugiis, 1. I, c.xvni, P. L., t. xl, col. 462 ; S. Thomas, In IV Sent., 1. IV, d ist. XXXIX, q.i, a. 1 ; Benoit XIV, const. Si ngulari nobis, du 9 février 1749, § 3-6 ; Opéra omnia, 18 in-4°, Prato, 1839-1847, t. xvii, p. 10 sq. ; Santi, Prælectiones juris canonici juxta ordinem Decretalium Gregorii IX, . IV, tit. i, De sponsalibus et matrimonio, S 4, n. 171 sq.,

5 in-8°, Ratisbonne et New-Vork, 1886, t. IV, p. 51 sq. ; Palmieri, Opus t/ieologicum morale in Busenbaum medullam, tr. X, sect. viii, De matrimonio, c. iii, dub. ii n. 1069, 7 in-8°, Prato, 1889-1893, t. vi, p. 529 sq. ; Wernz, Jus Decretalium, 1. IV, tit. XXII, n. 504, t. iv, p. 759.

Loi romaine.

En 339, l’empereur Constantin défendit, sous peine de mort, le mariage entre chrétiens et juifs. Leg. 6, code théod., De Judœis, XVI, viii. Un demi-siècle plus tard, en 388, l’empereur Valentinien réitéra cette défense et la munit de nouvelles sanctions, en assimilant ces mariages à de véritables adultères, et décrétant contre eux les mêmes peines. Ne quis christianam mulierem in malrimonium Judseus accipiat : neque Judsese c/iristianus conjugium sortiatur. Si quis aliquid hujusmodi admiserit, adullerii vice commissi hujusmodi crimen obtinebit, libertate in accusandum publicis quoque vocïbus relaxata. Leg. 1, De Judœis, VI, vin. Cf. Décret de Gratien, part. II, caus. XXVIII, q. i, c. 15.

Loi ecclésiastique.

1. Saint Paul avait recommandé en termes formels et même sévères aux premiers chrétiens d’éviter les mariages avec les infidèles. I Cor., iiv 39 ; II Cor., vi, 14. Les expressions dont il s’était servi ne pouvaient s’entendre de simples conseils, mais renfermaient évidemment une véritable défense. Cf. Bellarmin, De sacramento matrimonii, 1. 1, c. xxiii, De cultus disparitate, t. iii, p. 835.

2. S’appuyant sur ces paroles de saint Paul, les Pères de l’Église s’efforcèrent, autant qu’il était en eux, de détourner les fidèles de contracter mariage avec les païens. Cf. Tertullien, Ad uxorem, 1. II, c. I sq., P. L., t. i, col. 1287 sq. ; S. Cyprien, Ad Quirinum, 1. II, c. lxii, P. L., t. iv, col. 767 sq. ; S. Ambroise, De Abraham, 1. I, c. îx, P. L., [. xiv, col. 451 ; Raban Maur, Pœnitentiale, c. xvii, xxvii, P. L., t. ex, col. 490.

Dans les premiers siècles cependant, vu la multitude d’inlidèles au milieu desquels les chrétiens vivaient, il ne fut pas toujours possible d’observer rigoureusement cette défense. En pratique, de nombreuses exceptions durent être tolérées. Nous ne citerons ici que l’exemple si connu de la mère de saint Augustin, sainte Monique, mariée à un païen. Cf. S. Cyprien, De lapsis, c. vi, P. L., t. iv, col. 483 ; S. Augustin, De fideet operibus. c. xix, P. L.. t. xl, col. 221 ; Bellarmin, loc. cit., t. iii, p. 834, 836.

A cette époque reculée de l’antiquité chrétienne, et succédant immédiatement aux temps apostoliques, on ne trouve aucun vestige d’une loi ecclésiastique déclarant nuls les mariages de cette sorte. Cf. Sanchez, Disputationes de sancto matrimonii sacramento. 1. VII, disp. LXXI, n. 6-10, t. ii, p. 236 sq.

3. Les conciles provinciaux s’occupèrent de bonne heure de cette grave question. Ils y revinrent bien des fois, toujours pour renouveler la défense de saint Paul et des Pères de l’Église, au sujet des mariages entre chrétiens et infidèles. Cf. concile d’Elne (306), can. 1517 ; concile d’Arles (314), can. 11 ; d’Hippone (393), can. 12 ; IP d’Orléans (533), can. 19 ; P’d’Aquitaine (535), can. 6 ; IIP d’Orléans (538), can. 13 ; IV « d’Orléans (541), can. 31 ; IIP de Tolède (589), can. 14 ; IV" de Tolède (633), can. 63 ; de Rome (743), cm. 10, etc., Mansi, Concil., t. ii col. 8sq., 472 ; t. iii, col. 850 ; t. viii, col. 838, 861 ; t. ix, col. 15, 118 ; t. x, col. 634.

De ces antiques prohibitions formulées si souvent en Gaule, en Espagne, en Italie, en Afrique, il ne conste pas, quelque nombreuses qu’elles soient, que les mariages entre chrétiens et infidèles fussent alors considérés comme invalides. En supposant même qu’ils le fussent en Gaule, en Espagne, en Italie, etc., où étaient promulguées ces défenses, on ne saurait en conclure qu’ils le fussent ailleurs, car ces lois, émanées de conciles provinciaux, n’avaient évidemment aucune autorité