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EMPÊCHEMENTS DE MARIAGE

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danger particulier tiré des conditions personnelles des suppliants, car si c'était seulement un danger commun, résultant, par exemple, de ce que les non-catholiques seraient en majorité dans telle ou telle région, cela constituerait seulement une cause impulsive. Or, si ce danger particulier provenait seulement des dispositions perverses d’un des suppliants, et qu’il y eût lieu néanmoins de demander la dispense, celle-ci ne saurait être qu’un témoignage de bénignité toute spéciale de la part du souverain pontife. Mais si les deux parties intéressées cherchaient à faire une violente pression pour obtenir la dispense, par leurs menaces de mariage mixte ou même de défection de la foi, on devrait, d’après Feije, loc. cit., n. 667, se refuser à solliciter la dispense en leur faveur ; et Kutschker, t. v, p. 222, cité par cet auteur, affirme que le pape Grégoire XVI déniait constamment la dispense à ceux qui menaçaient de renier leur foi si on ne les déliait pas d’un empêchement. Toutefois il faut en juger autrement, lorsque le danger de perversion ne provient pas de la mauvaise volonté des suppliants, mais simplement de la débilité de leur foi et de la faiblesse de leur piété, et il convient alors de les garantir contre une défection probable, en leur octroyant la dispense. Ainsi en a décidé cette même S. C. de la Propagande, dans son Instruction, du 17 avril 1820, à l’archevêque de Québec. En outre, comme le vicaire apostolique de Bosnie avait demandé s’il était permis d’accorder la dispense à ces catholiques qui, n’invoquant pas d’autre motif que leurs amours profanes, pouvaient selon de justes prévisions se laisser aller à comparailre devant un juge infidèle pour contracter mariage dans le cas où la dispense leur serait refusée, le Saint-Office répondit, à la date du 14 août 1822, qu’il y avait lieu d’user, en leur faveur, des facultés de dispenses : respondendum nratori quoil in exposito casu iitatiir facullatibus sibi in formula u commissis, proitt in Domino judicaverit. Or, la même jurisprudence, observe l’Instruction de la S. C. de la Propagande, doit être suivie lorsqu’il s’agit du danger de voir la partie catholique oser contracter mariage avec un non-catholique.

I) Le danger d’un concubinage incestueux. Selon qu’il appert de l’Instruction de 1822, citée plus haut, le remède de la dispense a lieu d'être accordé de peur que les suppliants ne croupissent dans le concubinage, au grand scandale public, et au préjudice certain de leur salut éternel. D’ailleurs, en général, la crainte d’un concubinage, même non incestueux, comme aussi d’une familiarité excessive entre les suppliants peut toujours être une cause suffisante de dispense. Cf. Gaspard, op. cit., n. 307, not. 2.

ni) Le danger du mariage purement civil. En effet, de ce qui a été dit précédemment il ressort que la crainte probable de voir les suppliants, dans le cas où ils n’obtiendraient pas la dispense sollicitée, contracter un mariage purement civil, est une cause légitime pour dispenser. Il faut ajouter que le mariage civil déjà contracté constituerait une cause très urgente.

n) L'éloignement de graves scandales.

o) La cessation d’un concubinage public.

p) L’excellence des mérites, lorsque quelqu’un, ou par ses luttes contre les ennemis de la foi, ou par ses libéralités envers l'Église, ou par sa doctrine, par sa vertu, ou de quelque autre manière, a véritablement bien mérité de la religion. Celui-là est, en effet, digne d’une faveur spéciale qui a bien mérité du bien public de l'Église ; et même il arrive parfois que le Saint-Siège dispense, au bénéfice d’autres personnes, sur les seules instances de celui qui possède ainsi de grands mérites « nvers l'Église. Toutefois il faut que ces mérites, qui d’ailleurs peuvent être de diverses sortes, revêtent une réelle importance, et il convient d’expliquer leur nature spéciale dans le libellé de la supplique ; plus

les mérites en question sont considérables, plus favorable aussi devient la cause de dispense ; mais il est nécessaire qu’ils soient fondés, et leur vérification s’impose, non seulement en tenant compte de l’opinion commune, mais encore parfois en faisant appel au concours de témoins qualifiés. Cf. Feije, op. cit., n. 673.

Telles sont, conclut l’Instruction de la S. C. de-la Propagande, les causes les plus communes et les plus efficaces qui ont coutume d'èlre invoquées pour obtenir les dispenses matrimoniales et, parmi les théologiens et les canonistes qui traitent de cette matière, ladite Congrégation en recommande deux avec raison, savoir Pyrrhus Corradus, Praxis < lis pensai ionum apostolicarum, 1. VII et VIII, et V. de Justis, De dispensatioiiibus, I. III.

Cependant, en dehors des causes canoniques que nous venons d’expliquer, il existe d’autres causes justes et raisonnables, qui ne sont pas exprimées formellement dans le style de la Curie, et par conséquent ne sont pas proprement canoniques, mais qui sont admises, aujourd’hui surtout, dans les Congrégations romaines pour obtenir dispense d’empêchements de moindre importance ou de degrés de parenté plus éloignés. Ces causes sont, par exemple, la pauvreté de la suppliante, sa condition d’infirmé, d’orpheline, etc., ou encore la conservation d’une race illustre, la conservation des biens dans la même famille, etc. Il arrive, en outre, parfois que les suppliants obtiennent dispense, sans présenter une cause particulière, canonique ou autre, mais seulement en alléguant leur qualité, et en disant, d’une manière générale, que, eu égard à des causes certaines et raisonnables, décisives pour leur conscience, ils désirent contracter mariage. Dans ce cas, la dispense, qui est octroyée, est dite sans cause, c’esl-à-dire concédée sans cause canonique ou sans cause expressément alléguée ; mais alors la cause de dispense se trouve, à titre de substitution ou encore de compensation, dans le bien public de l'Église, qui en effet est promu grâce à la componende ou aumône plus importante exigée des suppliants, dans le but d'être consacrée à des œuvres pies. Cependant, d’après les règles spéciales de la S. C. des Sacrements, n. 21, les dispenses des empêchements moins considérables doivent toutes être accordées ex rationabilibus causis a s. sede probatis. Ainsi accordées, elles valent comme si elles l’avaient été ex motu proprio et ex cerla scientia, et par suite elles ne peuvent être entachées d’aucun vice d’obreption ou de subreption. Toutefois la manière de solliciter les dispenses sans cause ne pouvait être admise, autrefois, auprès de la S. Pénitencerie, pour le for externe, pas plus qu’elle ne saurait être utilisée aujourd’hui auprès de l'évëque, lors même qu’il serait muni d’une délégation légitime pour dispenser. Cf. Giovine, op. cit., t. ii S 31 ; Feije, op. cit., n. 668.

2. Supplique.

Pour obtenir les dispenses une supplique présentée de vive voix pourrait rigoureusement suffire ; mais, pratiquemment, seule, la supplique présentée par écrit est admise dans la Curie romaine.

a) Quelles choses doivent être exprimées dans la supplique ? — Outre les causes de dispenses qu’il faut toujours exposer avec soin, d’autres choses doivent être exprimées, non seulement eu égard au droit commun, mais encore conformément à la pratique de la Curie romaine, d’après la teneur de l’Instruction déjà citée de la S. C. de la Propagande du 9 mai 1877, à savoir : a. Les noms et prénoms des suppliants, d’une manière distincte et nette, sans aucune abréviation de lettres. Cependant, lorsque la dispense est demandée au for interne, pour un empêchement occulte, on use de noms fictifs, par exemple, Titius et Bertha, ou bien encore de la lettre N. — b. Le diocèse des suppliants, à moins qu’il ne s’agisse d’une dispense au for de la