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EMPÊCHEMENTS DE MARIAGE


Legalio pro christianis, n. 82, 33, ibiil., col. 964, 965, nous donner des exemples frappants de cette législation pratique du mariage, à l’encontre souvent des lois civiles. D’où il appert que, déjà aux premiers siècles, l’Église exerçait son pouvoir touchant les empêchements de mariage et les causes matrimoniales, comme un droit propre et non dérivé d’une concession des princes civils. Enlin, cette pratique de l’Église, nous la voyons s’établir sans conteste du ive au XVIe siècle. Les papes jugent avec une autorité souveraine les causes matrimoniales, qui leur sont dévolues, tel le pape Siricedans sa lettre à Ilimère, c. iv, n. 5 : De conjugali autem velatione requisisli, si desponsatam alii puellam alter in matrimonium possit accipere. Hoc ne fiât modis omnibus inhibemus : quia illa benedictio, quam nuplurse sacerdos imponit, apud fidèles cujusdam sacrilegii instar est, si ulla transgressione violetur. P. L., t. iixi col. 1 136 sq. Tel également, le pape Célestin III dans sa lettre CCXII, P. L., t. ccvi, col. 1095. Voir d’autres lettres de souverains pontifes, éditées par llurter, dans ses Opuscules, t. XVIII, xxv, xxvi. En outre, dans plusieurs de ses conciles, l’Église formule nettement des empêchements de mariage, par exemple, l’empêchement d’affinité, au concile de Néocésarée, 314324 : Mulier, si duobus nupserit fratribus, abjiciatur usque ad ntortem. Verumtamen in cxilu prupler miser i cor diam, si promiserit, quod facta incolumis hujus conjunclionis vincula dïssolvat, fructum psenitentiae consequatur, can. 2. llefele. Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. i, p. 328. Or, ainsi que l’observe Tanquerey, Synopsis theologias dogmalicee, t. ii De niatrimonio, n. 31, le concile de Néocésarée n’a pu emprunter cet empêchement d’affinité à la loi civile, puisque celle-ci ne l’a adopté que par la suite, en l’année 355. Code théodosien, I. III, tit. xii, Etsi licitum. Plus tard, le IIe concile de Màcon décréta, en l’an 585, la nullité des secondes noces contractées par les veuves des clercs : uxor sitbdiaconi, exorcistse rel acolyt/ii, mortuo illo, secundo se non audeat sociare matrimonio, n. 16. llefele, op. cit., t. iii, p. 211, détail de législation qui n’avait certes rien de similaire dans le droit civil à cette époque. Nous pourrions encore citer d’autres exemples, qu’on peut d’ailleurs voir dans Perrone, loc. cit., et Palmieri, De sacramento matrimonii, thés. xxix. Qu’il nous suffise d’observer que le concile de Trente lui-même a confirmé pratiquement ce droit propre et indépendant de l’Église touchant la législation des empèchemenls de mariage, lorsque, en réponse à la supplique des envoyés du roi de France qui réclamait une déclaration de nullité pour le mariage clandestin, et aussi pour le mariage contracté contre le consentement des parents, il accéda seulement à la première partie du vœu, et rejeta nettement la seconde. L’ensemble de cet argument tiré de la tradition pratique de l’Église a été admirablement résumé par Léon XIII, dans son encyclique Arcanum du 10 février 1880.’Quas (Ecclesia) potestatem in cnnjugia christianorum, omni cum tempore tum loco, exercuit alque ita exercuil, ul illam propriam ejus esse apparerel, nec hominum concessu quæsilam, sed auctoris sui voluntate divinitus adeptam. Nemo ignorai quam milita de impedimentis ligaminis, voti, disparitatis cultus, consanguinitattx, criminis, publicse honeslatis in conciliis llliberitano, Arelalensi, Cltalcedonensi, Milevitano 11 aliisque, fuerint ab Ecclesise prœsulibus conslilula, quæ a decretis jure imperatorio sancitis longe ssepe distarent, quin tantum abfuil, ut viri principes sibi adsciscerent in malrimonia christianapotestatem, ut polius eam, quan ta est, pênes Ecclesiam esse agnoscerent et declararent. Rêvera Honorius, Theodosius junior, Justinianus (Novel. 131) fateri non ditbitarunt, in iis rébus, quæ nuptias attingunt, non amplius quam custodibus et defensoribus sacrorum

canonum sibi licere. Et de conniibiorum impedimentis, si quid per edicla sanxernnt, cansam docuerunt non inviti, nimirum id sibi sumpsisse ex Ecclesise permissu alque auctoritate.

2. Il est certain que ce droit de l’Église touchant la législation du mariage chrétien est un droit exclusif, et que la puissance civile ne saurait constituer des empêchements proprement dits, soit dirimants, soit prohibants, pour le mariage des fidèles baptisés.

Cette doctrine n’est pas de foi, à proprement parler, et elle n’a jamais été formellement définie. Aussi bien, avant que l’Eglise ne se fût plus clairement expliquée, quelques auteurs catholiques purent-ils tenir une opinion opposée, et admettre la compétence de l’État, en matière d’empêchements de mariage, même vis-à-visdes fidèles baptisés. Tels furent, parmi les anciens, Sanchez, op. cit.. 1. VII, disp. III, n. 2 ; les théologiens de Salamanque, Cursus théologiens moralis, t. ii c. xi, n. 14 ; Pirhing, op. cit., 1. IV, tit. I, n. 150 ; et, à une époque assez rapprochée, Carrière, De matrimonio, Paris, 1837, qui d’ailleurs s’honora plus tard en se rétractant, et en répudiant une thèse, qu’il reconnut « non conforme à la tradition du Siège apostolique. « En effet, cette opinion ne saurait être défendue, sans témérité, aujourd’hui que les souverains pontifes ont nettement proclamé l’incompétence du pouvoir civil. Déjà le pape Urbain VIII, consulte par les délégués du roi Louis XIII, au sujet du mariage du frère du roi, qui avait été contracté sans le consentement du roi lui-même, se refusa à souscrire à l’annulation qu’en avaient faite le roi et le cierge de France, et déclara que cette législation, touchant un sacrement, n’avait aucune valeur en conscience : Gallise spéciales leges nulla vi pollere in sacramentum quod a Cliristo institutore et Ecclesiæ canonibus unice pendebat. Qualescumque essent civiles harum legum effectus, persistere immotumque esse connubii vinculum. A rapprocher de cette déclaration celle que fit plus tard l’ie VII dans une lettre écrite, le 27 juin 1805, à l’empereur Napoléon qui cherchait à faire annuler le mariage de son frère Jérôme. A son tour, Benoit XIV, faisant allusion dans une lettre au cardinal d’Vork, 9 février 1749, à la loi de l’empereur Théodose, qui avait défendu les mariages entre juifs et chrétiens, avait observé que cette loi n’avait aucune valeur, parce qu’elle émanait d’un prince laïque : Hsec lex, utpole a laico principe condila, initiant haberevim in matrimoniis débet. Mais ce fut surtout Pie VI qui, dans un bref adressé le 16 septembre 1788 à l’évêque de Mottola, formula nettement le droit exclusif de Tiiglise touchant toutes les causes matrimoniales, conformément aux canons du concile de Trente ; or, on ne peut nier que la constitution des empêchements de mariage ne rentre parmi les causes matrimoniales : Dogma est fidei ut matrimonium quod anle adventum Christi nihil aliud eral nisi indissolubilis quidam conlraclus, illud, post Christi adventum, evaserit unum ex sejUem legis evangelîae sacramentis… Hinc fit ut ad solam Ecclesiam, eui Iota de sacramentis est cura concredita, jus omne ac potesta* perlineal suam adsignandi formant huic eontractui ad sublimiorem sacramenti diguilatem evecto, ac proinde de matrimuuiorum validilale aut invaliditale sententiam ferre… Verba canonis (conc. Trid.) ita generalia suntomnes ut causas comprehendant et compleclantvr ; spirilus vero sive ratio legis adeo laie palet, ul nullum exceptioni aut limitationi locum relinquat. Il faut également mentionner les actes de Pie VII : outre la lettre déjà citée à l’empereur Napoléon, l’instruction au nonce apostolique de Pologne, en 1808 ; de Pie VIII, encyclique Traditi humililati, 24 mai 1829 ; de Grégoire XVI, encyclique Mirari vos, 15 août 1832 ; de Pie IX, lettres au roi de Sardaigne, 19 septembre 1852 ; de Léon XIII, ency