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ELVIRE (CONCILE D')

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cette expression rappelle la prima sedes des provinces d’Afrique ; et ceci porterait à croire que la situation de l'Église espagnole avait quelque chose d’analogue a celle d<' l'Église africaine, où l'évêque de Carthage, quelle que fût la date de sa consécration, avait toujours le premier rang non seulement dans sa propre province, mais encore sur tous les évêques des provinces dépendantes, tandis que, dans celles-ci, la préséance d’honneur et de juridiction revenait à l'évêque le plus anciennement consacré, dont le siège était par là même qualifié momentanément de prima sedes. Si donc il en était de même en Espagne — et rien ne paraît plus vraisemblable — c’est le premier inscrit dans la liste des signatures, Félix d’Acci (Guadix), de la province Carthaginoise, qui aurait occupé un rang correspondant à celui de l'évêque de Carthage en Afrique, puisqu’il présida un concile de tout l'épiscopat espagnol dans une ville et une province qui ne sont pas les siennes, à Elvire dans la Bétique. Osius de Cordoue occuperait alors la prima cathedra de la Bétique, et Libère de Mérida celle de la Lusitanie. On n’en saurait dire autant de Valère de Saragosseet de Décentius de Léon, puisqu’ils sont les seuls représentants de leurs provinces respectives et que nous ignorons s’ils en étaient alors les plus anciens évêques ; si leur nom n'était pas mêlé à celui des autres évêques dans un ordre qui ne doit être, selon toute vraisemblance, que celui de la consécration, on pourrait croire que, venant après ceux d’Osius et de Libère, ils sont inscrits selon l’ordre des provinces elles-mêmes, le premier rang appartenant à la Carthaginoise, le second à la Bétique, le troisième à la Lusitanie, le quatrième à la Tarraconaise et le dernier à la Galice, au point de vue ecclésiastique. Mais tout ceci n’est qu’une conjecture, dont il n’est fait mention qu'à cause de sa vraisemblance.

Intérêt canonique.

1. Relativement à la tenue des synodes. — Jusqu'à la fin du iiie siècle, bien des synodes s'étaient tenus, au gré des circonstances et selon les besoins des Eglises, pour traiter les questions de foi, de morale, de discipline ou de liturgie à l’ordre du jour, pendant le IIe siècle, contre les hérétiques gnostiques et à propos de la question pascale ; pendant le IIIe, au sujet de la réitération du baptême, du traitement des lapsi, du schisme de Novatien, de l’hérésie de Paul de Samosate. Ils furent provinciaux ou régionaux ; mais aucun n’avait eu le caractère de celui d’Elvire qui, réunissant les évêques de toutes les proinces espagnoles, ouvre la série des conciles nationaux d’Espagne et précède de quelques années la tenue du premier concile œcuménique.

On ignore sans doute les motifs précis de sa convocation, mais on voit bien, par la teneur des canons, qu’ils ne furent pas d’ordre dogmatique ; nulle question de foi n’est, en effet, en jeu ; il ne s’agit que de discipline, en vue de faire face aux besoins religieux de l'Église espagnole, après plusieurs années d’une paix précaire et à la veille de quelque persécution possible, car rien ne permettait de prévoir une sécurité complète et définitive. Les mœurs avaient dû se relâcher quelque peu, certaines défaillances se produire, et surtout des compromis dangereux pour la foi ou la morale se glisser dans les relations inévitables avec les juifs et les païens. Il importait donc de remédier au présent, de parer à l’avenir ; et c’est ce que firent les Pères d’Elvire, en travaillant, comme on le verra plus bas en détail, à la restauration et à l’affermissement de la discipline dans les rangs du clergé et des fidèles, à la délimitation et à l’extension de l’autorité épiscopale. D’une part, ils recourent, selon les usages contemporains, à un système de pénalités uniquement envisagé' au point de vue de la participation aux sacrements ; et, d’autre part, ils précisent les droits et les pouvoirs de l'évêque, restreignant les uns, étendant les autres,

inaugurant ainsi dans la législation ecclésiastique l’application d’un des principes les plus heureux. Ils conrignent enfin le résultat de leurs délibérations, dont malheureusement on ignore les détails, dans des formules brèves, parfois obscures, qui en rendent l’intelligence et l’interprétation malaisées. Quelquesuns de leurs canons seront reproduits plus tard aux conciles d’Arles, de Xicée et de Sardique.

Arles,

can. 4 =

Elvire,

can. 62

Nicée

can. 3 = Elvire.

can. 27

_

— 5 =

- 62

— 5 = —

- 53


— 6 =

— 39

— 10 = —

- 76

— 7 =

— 56

- 13 = - 32

_

— =

— 25

— 17 = —

- 20

- 11 =

15

- 12 =

— 20

Sardii

jue, c. 14 = Elvire, c. 21

- 14 =

— 75

c. 16 ---= —

c, :  :

— 16 =

- 53

— 22 =

- 46

2. Relativement ù la discipline.

C’est ici le point épineux des canons du concile d’Elvire ; d’une manière générale, ils sont très sévères. Il n’y a pourtant pas plus d’innovation dans la nature des pénalités édictées que dans le principe qui les justifie. Une société, en effet, a le droit, sous peine de sombrer dans l’anarchie et de se dissoudre, de punir celui de ses membres qui n’observe pas ses règlements et qui, par là même, donne le mauvais exemple et devient une pierre d’achoppement, en lui infligeant certaines peines, en le privant de certains droits, en l’excluant même de son sein, à litre soit provisoire soit définitif. Tel est le cas de l'Église, société essentiellement une et visant à la sainteté. Pour maintenir son unité, pour assurer sa perfection dans la mesure du possible, elle aussi use de rigueurs, mais avec cette différence que sa pénalité est plutôt morale qu’afflictive, qu’elle a pour but moins le châtiment de la faute que l’amendement du coupable et la préservation de la communauté. Les Pères d’Elvire n’ont pas d’autre principe directeur. Leurs sanctions ne dilfèrent pas, quant à l’espèce, de celles qui avaient cours ailleurs : c’est, pour le clerc, la suspense de ses fonctions, la dégradation, la réduction à la communion laïque ou même la privation définitive et irrévocable de la communion, mais jamais, pour l'évêque et le prêtre, la pénitence canonique ; celle-ci, d’ordinaire, n'était imposée qu’aux laïques, mais les Pères d’Elvire retendent exceptionnellement, dans certains cas, au diacre, can. 76 ; et c’est, pour les fidèles, l’exclusion passagère ou prolongée de la communion, sans pénitence canonique à subir dans l’intervalle, ou bien la pénitence canonique, qui entraîne de soi, tant qu’elle dure et jusqu'à la réconciliation officielle, la privation de la communion, l’assujettissement, en présence des fidèles au commencement du service divin ou dans sa vie privée, à des pratiques d’humilité et de mortification, la privation d’assister à la messe des fidèles, puis, la pénitence terminée parla réconciliation solennelle, plaçant l’ancien pénitent dans une situation délicate et précaire qui l’expose, s’il y a rechute, à une excommunication définitive cette fois et irrévocable.

3. Sévérité des pénalités du co71cile d’Elvire. — De façon générale, la privation de communion étant une sanction plus légère que la pénitence canonique, n’est imposée à Elvire que pour des fautes moindres. Elle resta cependant assez onéreuse ; elle est d’un an, can. 14, 79 ; de deux ans, can. 5.">, 71 ; de trois ans, can. 54, 57 ; de cinq ans, can. 16, 40, 61, 73, 71 ; et va même jusqu'à dix ans, can. 16, 70, proportionnellement à la gravité de la faute. Quant à la pénitence canonique, qui frappe des fautes plus graves, elle a aussi son échelle ascendante. Parfois fort courte, elle dure tantôt trois ans, can. 76, tantôt cinq ans, can. 5, I i, (il), 72, 76, 78, sept, can. 5, et même dix ans, can. 22, 59, 61, 70, 72. Mais l’une et l’autre, excommunication