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ELOI

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d’autres références, Vacandard, Vie de saint Ouen, p. 78, note 1. Cette double règle fut rigoureusement observée. Sur tout ceci, voir Vacandard, Vie de saint Ouen, p. 78 sq. ; Les élections épiscopales sons les Mérovingiens, dans Eludes de critique et d’histoire, V (’dit., p. 167 sq.

On a cru, sur une indication fausse, Chron. Vedasti- num, dans Monum. Germanise, t. XIII, p. 693, qu’Éloi avait été sacré à Noyon dés 635. Mabillon, Annales Ord. S. Bencdicti, t. i, p. 377. Mais en 635 Acbaire, son prédécesseur, vivait encore, car il signe en 636 une ebarte de saint Faron en faveur de Rebais. P. L., t. i.xxxvii, col. 1136. D’autres auteurs, avec plus de vraisemblance, assignent au sacre d’Eloi la même date et le même lieu qu’à celui de Dadon : tous deux au- raient reçu à Rouen, Vita Eligii, ri, 2, la consécration épiscopale. A vrai dire, le sacre d’un évêque de Noyon dans une église de Rouen ne peut être qu’une déroga- tion à la coutume de l’époque. Il était de règle, sous les Mérovingiens, que les évêques fussent sacrés dans leur propre église catbédrale. C’est par exception que la cérémonie avait lieu ailleurs, par exemple dans la chapelle d’une villa royale. Cf. concile d’Orléans, 544, can. 5, dans Maassen, Concilia Meroving., p. 88 ; Vacandard, Vie de saint Ouen, p. 83, note 2. Mais, vu l’amitié qui unissait de longue date les deux élus des sièges de Noyon et de Rouen, il est possible que l’épis- copat, la cour, les Noyonnais même, aient trouvé bon qu’Éloi fût sacré en même lemps que son illustre ami. Selon toute probabilité, la cérémonie eut lieu la troi- sième année du règne de Clovis 11, et le dimanche des Rogations, c’est-à-dire le 13 (et non le 14) mai 641. Sur cette date, voir Vacandard, Vie de saint Ouen, Appen- dice A, p. 349-353.

Le diocèse qu’Eloi allait gouverner était l’un des plus étendus de la Gaule franque. Il comprenait non seulement le territoire de l’église de Noyon, mais en- core ceux de Vermand et de Tournai, et le siège de Tournai, de son côté, embrassait la Flandre, Gand, Courtrai et toute la partie septentrionale de la Belgique habitée par. les Frisons, les Suèves, les Anversois et quel- ques autres peuplades à demi barbares. Cf. B.Krusch, ïlcrum meroving. Scriplores, t. iv, p. 639. C’est dire que l’apostolat d’Éloi dut être extrêmement laborieux. Le saint homme devait être assez mal accueilli par ces païens du nord. Vita Eligii, n, 3, 8. Voir une scène caractéristique, ibid., II, 19. Ce ne fut pas trop d’une vingtaine d’années d’épiscopat pour détruire leurs idoles et les convertir au catholicisme.

Éloi ne négligea pas pour cela la partie chrétienne de son diocèse. Porté, comme il l’était, vers l’ascétisme, il ne manqua pas de favoriser le développement de la vie monastique. Il fonda plusieurs abbayes, notamment un monastère de vierges dans la ville même de Noyon. Vita Eligii, n, 5.

Sa basilique dédiée à saint Quentin, non loin de la ville de Vermand, était desservie par des disciples de saint Colomban. Éloi y fit faire des fouilles et eut le bonheur de découvrir le corps du martyr. Ce fut pour lui l’occasion de satisfaire son goût du beau et du grand. Il reconstruisit l’église dans des proportions plus vastes et érigea au saint un tombeau qu’il enrichit d’or et de pierreries. Vita Eligii, II, 6. liien d’autres corps saints eurent les mômes honneurs, nous dit son biographe. Ibid., Il, 7.

Le soin de son diocèse ne l’absorbait pas au point de l’empêcher de s’occuper dos intérêts généraux de l’Église. Sans parler des visites qn’il fit aux monastères de Solignac et de Paris, qui étaient son œuvre, ibid., ii, 18, on le voit traverser toute la Gaule et s’aboucher avec ses amis de Provence et avec les évêques de la ré- gion, notamment avec Aurélien, évêque d’Uzès. Ibid., II, 11-13. Il assiste au concib’ de Chalon sur-Saône,

avec son ami Dadon, évêque de Rouen. Quelques-unes des décisions qui y furent prises sentent l’esprit co- lombanien et il n’y a peut-être pas de témérité à sup- poser qu’elles furent inspirées par l’évêque de Noyon ; le canon 8 sur la confession, Maassen, Concilia, p. 210, est de ce nombre : « Nous pensons que la pénitence qui est le remède de l’âme est utile à tous, et les prêtres doivent l’imposer aux pénitents après avoir entendu leur confession. » Ce n’est pas que cette pra- tique n’ait été connue dans l’Église des Gaules. Mais saint Colomban et ses disciples avaient à cœur de pro- pager, plus que personne ne l’avait fait jusque-là, l’usage de la confession et le recours au sacrement de pénitence.

En 654, Eloi souscrivit avec Dadon, évêque de Rouen, la charte d’exemption que Landri, évêque de Paris, accorda au monastère de Saint-Denis ; sa signa- ture est reproduite par Letronne dans ses Diplômes et chartes de l’époque mérovingienne, tab. ix ; Œuvres de Julien Havel, Paris, 1896, t. i, p. 239. On trouve pareillement son nom au bas du privilège d’Emmon, évêque de Sens, en faveur du monastère de Sainte- Colombe, 26 août 660. Pardessus, Diplomata, t. H, p. 111 ; Krusch, Vita Eligii, p. 6i0. Ce fut probable- ment l’un de ses derniers actes ofliciels. Il mourut le 1 er décembre de cette même année. Sur cette date, voir Vacandard, dans la Revue des questions historiques, t. lxv (1904), p. 59i.

Comme cela arrivait souvent en ces temps de foi, ses amis et ses admirateurs se disputèrent son corps. La reine Bathilde, accourue précipitamment à Noyon, voulut le faire transporter au monastère de Chelles, qu’elle affectionnait particulièrement, Vita Eligii, il, 37 ; d’autres le réclamèrent pour Paris ; mais les Noyon- nais refusèrent de s’en dessaisir. Il fut inhumé à Noyon et plus lard déposé dans un monastère qui porta son nom jusqu’en 1446. Cf. de Nussac, Saint Eloi, sa légende el son culte, dans le Bulletin de la so- ciété scientifique, historique et archéologique de la Corrrze, Brives, 1895, t. XVII, p. 55i.

Eloi est inscrit au martyrologe hiéronymien dans le Codex de Wissembourg, Acla sanctorum, t. n novem- bris, 1, p. 150. L’église de Noyon, la Flandre et Limoges se sont placées tout spécialement sous son patronage. Mais son culte s’est répandu dans toute la Gaule et en a même dépassé les frontières. Pour l’office composé en son honneur, Ulysse Chevalier signale six hymnes qui lui sont propres. Repertorium hymnologicum , t. I, p. 319 sq.

On sait qu’Éloi est devenu le patron des orfèvres et de tous ceux qui travaillent les métaux ; il est même le patron des maréchaux-ferrants. Ce culte remonte peut-être au lendemain de sa mort. Voici quelle en serait l’origine. Eloi avait monté, de son vivant, un cheval dont l’abbé du monastère de Noyon hérita. Ce cheval plut au successeur d’Eloi, Mommolenus, qui s’en empara indûment. Mais à peine élait-il dans l’écurie de l’évêque qu’il se mit à boiter. Un vétérinaire chargé de lui panser le pied ne put venir à bout de le guérir. Cependant l’abbé vint au tombeau d’Éloi se plaindre du dommage que lui avait causé Mommolenus et de- mander que l’injustice commise fût réparée. L’évêque. voyant que le cheval, en dépit de tous les soins, demeu- rait infirme, prit le parti de le restituer au légitime propriétaire. L’abbé le reprit et aussitôt l’animal fut guéri. Vila Eligii, II, 47. Naturellement Éloi eut tout l’honneur de cette guérison. C’est pourquoi sans doute le peuple contracta l’habitude d’invoquer saint Eloi pour les chevaux malades. Les confréries de maréchaux prirent son enseigne. On a découvert récemment au fond de la Seine des écus ou sceaux en plomb, du xiii* et du xiv e siècle, qui portaient cette inscription : Signum (ou sigilhem) scucii Eligii Xoviontensis e]>i*-