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ÉLIPAND DE TOLÈDE

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saint abbé Beatus de Liebana ctdujeuno évêque d’Osma Etherius, qu’il traita avec hauteur dans sa lettre â Fidelis, Beatus et Etherius ripostèrent par une longue lettre ; ils y reproduisirent une partie de la lettre à Fidelis, P. L., I. XCVI, col. 918-91 ! ), et, pour plus de clarté, résumèrent le reste, sous forme de symbole. C’est ce qu’on appelle le symbolum fidei clipandianse. Cf. P. L., t. xevi, col. 916-917. Le pape Adrien I"> ne tarda pas à être mis au courant de la situation ; probablement dés cette même année 785 ou en 786, il écrivit aux évéques espagnols une lettre dans laquelle il condamnait les erreurs de Migetius et l’adoptianisme ; le pape nomme Eliphandus et Ascaricus cum aliis eorum consentaneis, P. L., t. xcviii, col. 376 ; cf. DenzingerBannwart, Enchiridion, 10e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1908, n. 299 ; il ne mentionne pas Félix d’Urgel. Si nous ignorons l’époque où Félix s’aftirma adoptianiste, nous savons qu’il répandit l’adoptianisme non seulement dans l’Espagne, mais encore dans la Septimanie, et qu’il essaya, mais en vain, de l’acclimater en Gaule et en Germanie, pendant qu’Élipand le disséminait dans les Asturies et la Galice. Cf. Jonas d’Orléans, De cul tu imaginum, 1. I, P. L., t. CVI, col. 308, 309.11s recrutèrent un bon nombre de partisans. Cf., toutefois, la lettre d’Alcuin à Élipand, P. L., t. ci, col. 239, et la réponse d’Elipand à Alcuin, P. L., t. xevi, col. 871. Félix, dont le siège épiscopal relevait alors de Narbonne, fut condamné, en 792, au concile de Ratisbonne, convoqué par Charlemagne ; il y abjura son erreur, et renouvela son abjuration, à Rome, entre les mains du pape. A peine de retour en Espagne, il oublia ses engagements et dogmatisa avec une vigueur nouvelle. La lettre d’Élipand ad Felicem nuper conversum, P. L., t. xevi, col. 880882, pourrait bien se rapporter à cette « conversion ». Alcuin, sur le désir de Charlemagne, venait d’entreprendre sa grande campagne théologique contre l’adoptianisme. Dans une lettre insinuante et pleine d’alfection, écrite en 793, il invitait Félix à se réconcilier avec l’Église romaine, et lui demandait d’exhorter son vénérable frère Élipand, « que je nomme avec amour », disait-il, quem in amore nomino, à faire de même. P. L., t. ci, col. 119-125. Volontiers nous placerions à la même date ou à une date voisine la lettre d’Alcuin à Élipand, P. L., t. CI, col. 235-244, que Froben, P. L., t. ci, col. 328-334, met en 799, ainsi que la lettre ad Felicem nuper conversum. Après le concile de Francfort, il semble que le ton d’Alcuin aurait été différent et son argumentation plus pressante (cf. P. L., t. c, col. 329, le langage d’Alcuin après le concile de Francfort), sans compter que la réponse d’Élipand à Alcuin, P. L., t. xevi, col. 870-880, cadre à merveille avec deux lettres du même Élipand et de l’épiscopat espagnol adressées, en 793 ou au commencement de 794, l’une à Charlemagne, l’autre aux évoques de Gaule, de l’Aquitaine et de l’Austrasie, P. L., t. xevi, col. 867-869 ; t. ci, col. 13211331 ; ce sont les mêmes préoccupations, c’est le même langage et, en quelque sorte, la même atmosphère, mêmes attaques violentes contre Beatus et même défense de Félix et de l’adoptianisme. Du reste, Félix, loin de répondre aux avances d’Alcuin, répliqua par un opuscule. Pour en finir, Charlemagne convoqua le concile de Francfort, où se trouvèrent les légats du pape Adrien, en 794. Le concile condamna solennellement l’adoptianisme. Cf. Denzinger-Bannwart, n. 314. Saint Paulin d’Aquilée, au nom des évéques d’Italie, rédigea le Libellus sacrosyllabus contra Elipandum, approuvé parle concile. P. L., t. xcix, col. 151-166. Les autres évéques adressèrent aux évéques d’Espagne une epistola synodica, également approuvée par le concile. P. L., t. ci, col. 1331-1316 ; Denzinger-Bannwart, n.3ll313. Arrivèrent, sur ces entrefaites, à Francfort les enseignements du pape demandés par Charlemagne, sous forme d’exhortation doctrinale aux évoques espa gnols. Cf. Labbe et Cossart, Sacrosancta concilia, l’aris, 1671, t. iiv col. 1011-1021. Charlemagne envoya en Espagne ces trois documents insignes, en y ajoutant une lettre personnelle à Élipand et à l’épiscopat de l’Espagne. P. L., t. xcviii, col. 899-906. Nous n’avons pas à raconter la suite de l’histoire de Félix d’Urgel, les condamnations successives qui le frappèrent, sa polémique avec Alcuin, les deux légations de Leidrad, archevêque de Lyon, en Espagne, pour le retour à la foi catholique des partisans de l’adoptianisme. Cf., sur ce dernier point, II. Favier, Essai historique sur Leidrad archevêque de Lyon, Ljon, 1898, p. 37-55. Disons seulement que, dans sa deuxième légation (800), Leidrad et ses compagnons, Nefridius, archevêque de Narbonne et métropolitain d’Urgel, et saint Benoit d’Aniane, emportaient avec eux un traité en quatre livres d’Alcuin contre Élipand, P. L., t. ci, col. 243-304 ; deux lettres d’Alcuin, P. L., t. CI, col. 231-235, leur exposaient le but de l’auteur et l’emploi de cet écrit. Nommons encore, parmi les adversaires d’Élipand, un évêque (de Séville, cf. P. L., t. CI, col. 1150), Tbeudula, et un Basiliscus, qui écrivirent contre lui. Cf. Paul Alvare Episl., iv, n. 27, 28, P. L., t. cxxi, col. 443.

Une lettre d’Alcuin nous apprend que Leidrad eut de grands succès ; des personnes dignes de foi venant d’Espagne parlaient de vingt mille conversions parmi les évéques, les prêtres, les moines, et les gens du peuple, hommes et femmes. Episl., cviii, P. L. t. c col. 329. Élipand fut-il du nombre des convertis ? On le croirait, à s’en rapporter à quatre écrits convergents et très nets, à savoir le Chronicon dit de Liutprand de Crémone, an. 782, 795, 810, P. L., t. cxxxvi, col. 1087, 1091, 1093, et lettre préliminaire, , col. 972 ; le Chronicon attribué à Julien Perez (Pétri), archiprètre de SainteJuste de Tolède en 1 160, publié par Laurent Bamirez de Prado, Paris, 1628 ; n. 395, 401-114 ; la lettre attribuée à Ascaricus, dit évêque de Braga, l’Ascaricus que nous avons vu marcher d’accord avec Élipand, lettre publiée par.1. Tamayo de Salazar, Anamnesis sive commemoratio omnium sanctorum hispanorum… ad ordinem et methodum martyrologii romani, Lyon, 1651, t. i, p. 187 ; la Vila de saint Beatus de Liebana, publiée par le même Salazar (19 février) et reproduite par les bollandistes, Acla sanctorum, t. ni februarii, 3e édit., Paris, 1865, p. 150-151, et dans P. L., t. xevi, col. 890891. Nous y lisons qu’Elipand revint ad mentent et verum sensum Ecclesiæ, réunit un concile à Tolède pour y proclamer son adhésion aux décrets de l’Église, et mourut saintement en 810. Plusieurs historiens et théologiens, surtout espagnols, par exemple Vasque/, In IIP™, q. xx, disp. LXXX, c. xii ; Dispulationcs duæ contra errores Felicis et Elipand i de servitule et adoptione Christiin concilio Francofordiensi damnatos, Alcala, 1594, se sont laissé prendre à ces textes. Aujourd’hui, et depuis longtemps déjà, on sait que ce sont des faux, sortis de la grande oflicine d’apocryphes dont le jésuite Jérôme de la Higuera fut le principal ouvrier ; Elipand a même servi de pivot à cette supercherie énorme, car on fit dire au pseudo-Liutprand et au pseudo-Julien que ces apocryphes que l’on mettait au jour étaient des œuvres d’anciens auteurs qui avaient été envoyées par Élipand à Charlemagne. Cf. Nie. Antonio, Bibliolheca historica velus, Madrid, 1788, t. i, p. 339, 440-417 ; t. ii, p. 36-43 (reproduit dans P. L., t.’xevi, col. 847-858 ; t. cxxxvi, col. 937966) ; Aug. et Al. de Hacker et C. Sommervogel, llibliothcijite des écrivains de la C" de Jésus, Liège, 1872, t. ii col. 155-156 ; .1. Godoy Alcàntara, Uistoria crilica de los falsos cronistas espanoles, Madrid, 1868, p. 16 sq., 32-31, 181-185, 232-234. Bien de ce que nous connaissons d’Elipand n’invite à admettre qu’il se soit soumis à l’Eglise. D’une conduite irréprochable, mais orgueilleux (cf. P. L., t. xevi, col. 918, son langage à