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sans eau, et il dirait seulement les paroles de la consécration du calice. Epist., lxix, n. 2, 3, P. L., t.CLXXXM, col. 181-182. Au témoignage de Césaire d’IIeisterbach, leCoutumier de l’ordre cistercien obligeait d’agirainsi et de croire que le corps du Christ est présent dès que les paroles de la consécration ont été dites sur le pain. Dialogua, dist. IX, c. XXVII. Giraldus Cambrensis, loc. cit., pensait, pour son compte, que, sans la présence des deux éléments, le pain et le iivi sur l’autel, la conversion du pain au corps de Notre-Seigneur ne peut se produire et que le sacrement n’existe pas, parce que l’offrande n’est pas faite selon l’ordre de Melchisédech, qui offrit ensemble le pain et le vin. Aussi, dans le cas où on découvrirait, au Pater, qu’il y a dans le calice de la bière au lieu de iivi l’hostie ne serait pas consacrée, et on devrait, comme l’ordonne Maurice de Sully, évêque de Paris (1160-1196), prendre une autre hostie, verser du vin dans le calice et recommencer sur les deux éléments les formules de la consécration. Quant à la première hostie, elle sera respectueusement consommée après la communion. Giraldus suit ainsi le sentiment de son maître Comestor.

Comme Paris était, à la tin du xiie siècle, le centre de la controverse théologique sur le moment précis de la consécration, c’est à Paris qu’apparaît pour la première fois l’ordre délever l’hostie immédiatement après la prolation de la formule de consécration du pain et avant de prendre en mains le calice et de le consacrer. L'élévation de l’hostie avait pour objet de la montrer aux assistants comme le corps du Seigneur. Cet ordre de l'évéqne de Paris, porté peu d’années après la mort de Pierre Cantor, paraît bien viser son opinion et être une protestation tacite contre son sentiment sur le moment de la consécration. Du reste, cette décision est suivie d’une autre, n. 28, Mansi, Concil., t. xxii, col. 682, relative au même sujet. S’il arrivait que, par suite de négligence, il n’y eût, après la consécration, ni vin ni eau dans le calice, on devrait en verser aussitôt et répéter seulement la consécration du iivi en reprenant aux mots : Simili modo postquam cenatum est. Enfin, Etienne Langton, archevêque de Canlorbéry (1207-1228), qui avait été professeur de théologie à Paris jusqu’en 1207, déclara, vers 1210, à Henri, abbé d’IIeisterbach, qui lui demandait si la transsubstantiation du pain au corps de Notre-Seigneur avait lieu aussitôt après la prolation des paroles : Hoc est corpus meum : « Telle est ma croyance, et cette croyance je la garderai jusqu'à la mort ; c’est pourquoi quand je replace l’hostie (sur l’autel), je l’adore respectueusement. » Césaire d’IIeisterbach, Liber miraiHlorum, p. 16-17. Si l’archevêque de Cantorbéry ne parle pas de l'élévation de l’hostie qui ne se pratiquai ! pas encore en Angleterre, il admettait du moins que le corps du Christ était présent dés que les paroles : Hoc est corpus meum avaient été prononcées. Il était probablement encore professeur à Paris, quand Eudes, l'évêque de cette ville, ordonna l'élévation de l’hostie dans son diocèse.

3. Sa diffusion.

Le chapitre général des cisterciens décida, en 1215, l’adoption, dans l’ordre, de l'élévation de l’hostie après la consécration. Giorgi, De liturgia romani pontifias, t. iii, p. 74. Ce décret fut renouvelé en 1232. Le concile écossais, tenu vers 1227 et déjà mentionné, ordonne aussi cette pratique, décrite explicitement, en 1240, dans les Statuts de Walter de Cantelau, évêque de Worcester. Cet évêque l’impose même aux religieux qui ne l’avaient pas adoptée auparavant ; il rappelle sa raison d'être, pour que l’hostie puisse être vue des assistants, et il ordonne de sonner la cloche pour exciter la dévotion des nonchalants. Wilkins, Concilia Ecclesise anglicans, t. i, p. 667. A Salisbury, l'élévation de l’hostie n’existait pas encore

en 1210 ; on l’y trouve toutefois dès avant 1240. Elle y avait été introduite par l’usage, venu de Paris, avant d'être imposée par décret. Pour l’Allemagne, le plus ancien texte connu est le canon 3e du concile provincial de Trêves, en 1227. On y défend d'élever l’hostie ad populum avant les paroles de la transsubstantiation ; le prêtre qui l'élèverait alors pécherait mortellement, car il ferait adorer au peuple du simple pain, ce qui est de l’idolâtrie. Hartzheim, Concilia Germaniæ, 1760, t. iii, p. 527. Le synode de Munich, de 1279, répète la même défense (renouvelée encore en 1440 au concile de Frisingue, et en 1490 au synode de Salzbourg, Hartzheim, Concilia Germanise, t. v, p. 274, 582), et ordonne qu’on sonne la cloche trois fois, ut fidèles qui audierint, ubicumque fuerint, adorent, a. 8. Ibid., t. iii, p. 647. Les Statuts de Jean, évêque de Liège, en 1287, a. 23, prescrivent, pour la même raison, de sonner la grande cloche. Ibid., t. iii, p. 69. Beaucoup de synodes diocésains d’Allemagne, aux xiii c et xive siècles, s’occupent de l'élévation de l’hostie après la consécration du pain. Elle se répandit donc peu à peu et finit par devenir universelle. Cependant, elle n’est pas mentionnée dans des missels du xvi « siècle à Trêves, à Toul et à Verdun ; elle l’est dans celui de Metz de 1597. L. Cherpin, L’Ordomissse dans les trois diocèses lorrains, Saint-Dié, 1910, p. 74-79. Les Statuts de Toul de 1515 interdisaient l'élévation avant la consécration, pour que le culte ne soit pas porté sur ce qui n’est encore que du pain. Elle manque aussi dans d’autres missels, qu’indique dom de Vert, op. cit., t. iv, p. 204-208. Elle a été établie d’abord par l’usage, puis réglée par les rubriques. Elle n’a été imposée à toute l'Église latine qu’en 1606.

2° L’attitude des assistants pendant la consécration et l'élévation de l’hostie. — 1. Attitude du corps. — Puisque Notre-Seigneur devenait présent à l’autel par les paroles de la consécration, il était légitime que les fidèles témoignassent leur foi par des actes particuliers de respect au moment où s’opérait la transsubstantiation. Dans les ordres religieux, il était d’usage de s’agenouiller ou de se prosterner, dès que le prêtre prenait l’hostie dans ses mains, et de garder cette altitude jusqu’après que le calice ait été replacé sur l’autel. Le 22 novembre 1219, Honorius 111 ordonna aux prêtres de toute la chrétienté d’enseigner fréquemment aux fidèles à s’incliner respectueusement, lorsque l’hostie salutaire est élevée à la messe. Honorii III opéra, dans P. L., 2e série, t. iii, col. 351. Cet ordre fut reproduit par l'évêque de Lincoln, Robert Grosseteste, en 1237. Grosseteste’s Letters, dans Rolls séries, p. 155. Les chanoines et les choristes à la cathédrale de Lincoln jusqu’en 1236 demeuraient assis dans leur stalle pendant le canon de la messe, depuis le Sanclus jusqu’au. Pater, sauf qu'à l'élévation de l’hostie, ils se levaient et s’inclinaient respectueusement vers l’autel. Lincoln Statutes, édit. Bradshaw et Wordsworth, t. ii p. 152. Le synode de Durham en 1220 prescrivait aux laïques de s’agenouiller, lorsque l’hostie sainte était abaissée après l'élévation. Un concile d’Oxford ordonne aussi aux assistants de s’agenouiller et de prier, les mains jointes. Wilkins, Concilia Ecclesiæ anglicanx, t. i. p. 594. Le concile provincial de Mayence, en 1261, a. 6, détermine l’attitude des fidèles en disant « que chacun lléchisse pieusement les genoux, ou au moins s’incline respectueusement. » Hartzheim, Concilia Germaniæ, t. iii, p. 597. Le concile provincial de Trêves de 122T avait déjà fixé que, dans un cas analogue, lorsque l’eucharistie est portée aux malades, les laïques devaient s’agenouiller, frapper leur poitrine et joindre les mains. Ibid., t. iii, p. 527. Les ordonnances ecclésiastiques, au cours du xnie siècle, imposent donc simplement aux fidèles une altitude respeclueuse pendant l'élévation de l’hostie, qu’il s’agisse de l'élévation