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ÉLECTION DES TAPES

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de l’Italie. L’iconoclaste Léon l’Isaurien, ayant envoyé une armée pour déposer saint Grégoire II (715-731), qui avait refusé de proscrire les saintes images, l’Italie entière se leva pour proléger le pontife légitime et repousser l’intrus. Léon l’Isaurien dul renoncer à son projet impie : sa défaite marquait la fin du placet impérial. Le successeur de saint Grégoire II, saint Grégoire III (731-741), fut le dernier aie demander. Encore ne le lit-il que pour la forme, car il eut pu facilement s’en dispenser, après l’insuccès des tentatives de l’empereur iconoclaste contre l’Italie ; niais il ne voulut pas, pour s’en affranchir, paraître profiler des malheurs de ce prince. Après lui, cependant, cessa cette sujétion odieuse, qui, imposée par les rois golhs, au commencement du VIe siècle, avait duré près de deux cent cinquante ans. Cf. Moroni, op. cit., t. xxi, p. 202-205.

VI. Les élections populaires des papes, sous les Carlovingiens (741-900). — Avec la constitution de la dynastie carlovingienne, s’ouvrit une ère de liberté pour l’Église et d’indépendance pour la papaulé, en particulier. Pendant plus d’un siècle (741-844), à partir de saint Zacharie (741-752), le clergé et le peuple de Rome purent élire librement les nouveaux pontifes, et l’on vit s’asseoir sur la chaire de saint Pierre une série de grands papes. Sur l’élection de Constantin H en 767 et du pape Etienne III en 709, voirL. Duchesne, Les premiers temps de l’État pontifical, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, 1896, t. i, p. 246258. Le concile de Latran en 769 décida que les cardinaux diacres ou prêtres seraient seuls éligibles.

A la mort de saint Grégoire III, la vacance du saintsiège ne fut que de quatre jours. Déjà les papes avaient commencé à devenir les arbitres de l’Italie. La politique byzantine n’était plus que faiblement représentée par les exarques de Ravenne ; en outre, la royauté naissante des Lombards était menacée par des divisions intestines, causées surtout par une féodalité militaire, dans laquelle le vassal cherchait constamment à s’insurger contre son maître, et à se rendre plus ou moins indépendant. Au milieu et au-dessus de tous ces éléments de désordre, les vicaires de Jésus-Christ, grâce à leurs bienfaits et à l’autorité morale de leur caractère, se voyaient de plus en plus investis, dans l’ordre politique, d’une prépondérance qui leur permit d’être réellement les défenseurs des peuples dont ils étaient les pasteurs et les pères. Dès ce moment, bien avant l’intervention de Pépin et île Charlemagne, les papes exerçaient donc à Rome et dans les territoires avoisinants, des droits presque souverains. De cette époque datent les premières monnaies pontificales. Cf. Mozzoni, Tavole cronologichee critiche délia storia délia Chiesa universelle, 8 in-fol., Venise, 1860, secolo ottavo, t. iivi p. 95.

Le dernier lien avec l’Orient venait d’être brisé par la suppression définitive de l’exarchat de Ravenne, dont le roi des Lombard ; , Astolphe, s’était emparé en 752, el qui, trois ans après, passa aux mains de Pépin le Bref. Celui-ci, presque aussitôt, en lit don au saintsiège. Cf. Codex carolinus, Epist. Slepliani papie, n.6, P. L., t. iixcvi col. 103-106 ; Veleres annal. Francorum, P. L., t. iixcvi col. 1416 ; Eginhard, Annal, cum Laurissensibus collati, an. 756, P. L., t. civ, col. 377 ; Eauriel, Histoire de la Gaule méridionale sous 1rs conquérants germains, 4 in-8°, Paris, 1836, t. iii, p. 241-243.

Quand Charlemagne, renouvelant cette donation et en ajoutant d’autres, se fut constitué le défenseur du saint-siège, il ne demanda pas, en retour de sa munilicence et de sa protection, le privilège de confirmer les élections papales. Son vaste génie voyait trop combien l’Église et son chefavaient besoin d’indépendance. A son exemple, Louis le Débonnaire, son fils, se contenta d’être le défenseur de l’Église, et de garantir la liberté

des élections. C’est ce qu’il promit solennellement à la demande de saint Pascal I er (817-824), par le célèbre diplôme de 817, signé par lui et par ses trois fils. Ce document important fut inséré dans le Codex carolinus. CLPrivileg. Ludovici imperatoris, P. L., t. xcvin. col. 579-588.

Vers la fin du pontificat de saint Pascal, des troubles, ayant éclaté à Rome, rendirent un peu tumultueuse l’élection de son successeur, Eugène II (824-827). Un schisme même se produisit. L’empereur envoya alors à Rome son fils Lothaire I", déjà associé à l’empire, et le chargea de prendre, de concert avec le nouveau pape, toutes les mesures propres a rétablir l’ordre et à assurer la tranquillité dans l’avenir. Il fut réglé que le fils de l’empereur, en son nom et en celui de son père, ferait serment de fidélité au pape, mais que le pape, de son côté, imposerait le même serment de fidélité au peuple romain à l’égard de l’empereur, en tout ce qui ne serait pas contraire à la fidélité déjà promise ausouverain pontife, ce qui était clairement spécifié par cette clause introduite dans la formule du serment : saint fuie quam repromisi dom.no aposlolico. Eugène II prêta lui-même ce serment, en sauvegardant les droits inaliénables du saint-siège. Sous le bénéfice de cette fidélité réciproque qui liait les contractants l’un à l’autre, il statua, par une sorte de concordai, que dorénavant, par mesure d’ordre et pour couper court aux agitations qui naissent des passions populaires, le pontife élu ne serait pas consacré avant d’avoir luimême prêté le serment, suivant cette même formule, en présence des ambassadeurs impériaux. Cf. Continuât. Paidi Diaconi, t. i, p. 617 ; Sigonio, De regno rtaliæ, 1. XX, in-fol., Milan, 1732, 1. IV, an. 825, p. 179. Cette constitution d’Eugène II, rapportée en partie par Baronius, Annal, eccles., an. 824, n. 4, t. ix, p. 720, et en entier par Le Cointe, Annales ecclesiaslici Francorum, 8 in-fol., Paris, 1605-1683, an. 824, n. 12-22, t. iiv p. 698-701, ne mettait pas la papauté sous la dépendance de l’empire, mais cimentait plus fortement l’union des deux pouvoirs, de façon que l’autorité impériale servit toujours de protection officielle au saint-siège, en vue de la prospérité commune de l’Église et de l’Etat. Cf. Pagi, Critica historico-theologica, an. 825, n. 29, t. iii, p. 524 sq.

Interprété bénignement, ce document devait puissamment servir au maintien de l’ordre ; mais, détourné de son sens primitif par l’esprit de parti ou par l’ambition des grands, il pouvait devenir une source de dil’ficutés et de graves conllits.

Lesprincescarlovingiens ne songèrent pas toutd’abord à abuser d’une charte si sage ; mais ensuite le désir leur en vint. Trente ans après la mort de Charlemagne, Lothaire I er, fils de Louis le Débonnaire, et, comme lui, empereur et roi d’Italie (795-855), essaya, en 844, de réclamer le droit abusif de confirmation des élections papales, lors de l’élection de Sergius II ; mais il y renonça vite. Cf. P. L., I. cxxviii, col. 1300. Cf. John Miley, Histoire des Liais du pape, trad. Ouin-Lacroix, p. 160. Louis II, le Jeune, lils de Lothaire I er, et, lui aussi, empereur et roi d’Italie (822-S75), renouvela cette tentative avec plus de violence. Il soutint l’antipape Anastase, précédemment excommunié par saint Léon IV, et lit emprisonner lienoit III, qui venait d’être légitimement élu (855). Cependant, il revint ensuite de son erreur, et ne s’opposa plus au sacre de celui sur lequel s’étaient portés les suffrages unanimes du clergé et du peuple romain. Cf. P. L., t. cxxviii, col. 1315-1356 ; Ciaconius, Vitse et res gestse summorum pontificum romanorum ri s. H. E. cardinalium, 2 in-fol., Rome, 1601-1602, t. i, col. 640 ; cardinal Garampi, De nummo argenleo Benedicti Jlf, P. M-, in-4°, Rome, 1749, p. 22 sq. Louis II laissa élire librement le pape saint Xicolas le Grand (858) ; mais, comme les délégués