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ÉLECTION DES PAPES

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ctionis ruinent ponlificis, Grcgorii papœ XV jussu édition, t. i. p. I : Suarez, Tract, de fide, disp. X, sect. iv. il 15, (. mi, p. 31 1.

Quoi qu’il en soil de la controverse agitée à ce sujet,

si 1rs pape it le pouvoir de désigner leur successeur,

il est certain qu’ils n’en ont, pour ainsi dire, jamais usé, depuis l’origine de l’Église jusqu’à nos jours, malgré la gravité des circonstances, au milieu des- quelles ils se trouvèrent si souvent. Cependant la dé- signation par eux de leur successeur eût été, bien des fois, ce semble, le moyen le plus sûr et le plus facile d’éviter les dissensions et les schismes possibles de ci s époques troublées. Mais ils ne recoururent pas à ce moyen, et liront, au contraire, des actes qui manifes- taient leur répugnance à l’employer. Cf. Philipps, Kir- ehenreeht, t. v, p. 731 ; Archiv fur kalh. Kirchenrecht, 1894, p. 411.

La coutume s’était établie, dan ? diverses églises par- ticulières, que les évéques, avant de mourir, dési- gnassent eux-mêmes leur successeur. Cf. F.usèbe, //. E., I. VI, c. xi, /’. (’■., t. xx, col. 54’2 ; Sozomène, H. E., I. II, c. xx, P. G., t. i.xvii, col. 983 ; S. Augus- tin, Epist., ccxiii, n. 5, /’. E., t. xxxm, col. 967. Si cette manière de procéder avait quelques avantages, on reconnut vite qu’elle présentait de sérieux incon- vénients. Aussi avait-elle été réprouvée de bonne beurc par le concile d’Antiocbe, tenu en 341, et dont le ca- non 23 e annulait toute disposition de ce genre, ajou- tant que, pour le choix du nouvel évêque, il fallait se conformer aux traditions antiques, d’après lesquelles le choix appartient au clergé réuni en synode et au jugement des évéques voisins. Cf. Bail, Summa conci- liorum omnium, t. il, p. 05 ; Vecrctum Graliani, part. II, caus. VIII, q. i, c. 3, E/riscopo non licere, t. i, col. 512 ; Hefele, Conciliengeschichte, t. i, p. 520 ; trad. Leclercq, t. i, p. 721.

Dès le milieu du v siècle, ces prescriptions furent renouvelées par les souverains pontifes. Par une dé- crétale publiée au concile de Rome de 465, can. 5, le pape saint llilaire, successeur immédiat de saint Léon le Grand, défendit aux évéques de choisir eux-mêmes leur successeur. Décret. Graliani, part. I, caus. VIII, q. I, c. 5, Plerigue, t. i, col. 513 ; Labbe, Sacrosancta concilia, t. iv, col. 1060 ; Hefele, Conciliengesch., t. Il, p. 593 ; trad. Leclercq, t. Il, p. 903 ; Tliiel, Epistolse romanorum pontificum, édit. Mommsen, p. 14. Ces défenses furent de nouveau portées, dans la suite, par beaucoup de papes, et on en trouve un certain nombre insérées dans le Corpus juris ; par exemple, Décret. Gral., part. I, caus. VIII, q. i, c. 4, Episcopo non liceat ; c. vi, Moyses ; c. vu, Apostolica aucloritate, etc.

Quoique les souverains pontifes fussent au-dessus de leurs propres lois, ils ne voulurent pas s’y soustraire, et ils ne consentirent pas à faire eux-mêmes ce qu’ils défendaient à leurs frères dans l’épiscopat. Il n’y a pas dans l’histoire d’exception à cette règle. Il est vrai que, pour empêcher les rois goths d’intervenir dans l’élec- tion île son successeur, el de pousser un intrus sur la chaire de saint Pierre, saint Félix IV (526 530) choisit pour coadjuleur un prêtre romain, Boniface, et le dé- signa aux suffrages des électeurs pour sa succession. Mais il ne le nomma pas lui-même définitivement, Du moins, cela n’est pas démontré. Cf. Ducbesne, Liber ponti/icalis, t. i, p. 281 sq. ; Mélanges d’archéologie et d’histoire, Paris, 1883, t. m, p. 245 ; Mommsen, Neucs Archiv, 1885, t. xi, p. 367 ; Êwald, Neucs Archiv der Gesellschaft (m- altère deutsche Geschichtskunde, t. x, p. 112 ; Amelli, Document ! inediti relativi al ponti/i- calo di Felice IV e ili Bonifacio 11, estratti da un codice délia i/ibliotrea capitolare di Novara, dans la Scuola cattolica, Milan, 1882, t. xxi ; Grisar, Histoire île Rome et des papes an moyen âge, 2 in-4», Home, Paris, 1906 ; I. II, Home el les papes pendant tu domi-

nation gothique en Italie, c. v, g 1, t. il, p. 49 sq. Cette précaution n’empêcha pas le schisme d’éclater à sa mort. Dom Leclercq, dans Histoire des conciles, t. Il, p. 1358-1365.

Marchant sur les traces de son prédécesseur, Iioni- face II (5 ;>0-532) prit, lui aussi, comme coadjuteur, le diacre Vigile. Pour lui assurer sa succession, il essaya de faire ratifier ce choix par le clergé romain réuni en synode, lui demandant, sous la foi du serment, de maintenir cette élection après sa mort. Le texte du procès-verbal de celte assemblée n’est malheureuse- ment pas arrivé jusqu’à nous, mais le fait est relaté dans le Liber ponti/icalis. Cf. Ducbesne, Vigile et Pelage, dans la Revue des questions historiques, 1884, p. 370. Cette décision singulière fut inspirée à Boni- face II par le désir de prévenir, après sa mort, les dissensions-, les désordres et les schismes qui s’étaient produits à l’occasion de sa propre exaltation, par l’élection simultanée de l’antipape Dioscore qui s’était emparé de la basilique de Sainl-Jean-de-Latran. Cf. Du- cbesne, Mélanges de l’École de Rome, t. ni, p. 243 sq., 256 ; dom Charnard, Revue des questions historiques, 1885, t. xxxvn, p. 550. Impressionné encore par le souvenir récent de ces désordres, le clergé romain avait senti, lui aussi, la nécessité d’une mesure préven- tive, et, loin de s’opposer à l’acte de Boniface, il y avait d’abord souscrit volontiers. Le document, signé ainsi par tous, avait été solennellement déposé sur l’autel de la Confession de saint Pierre. P. ].., t. i,xv, col. 29-32. Il semblait que cela fût une conséquence naturelle des traditions anciennes auxquelles se référait le décret de saint Symmaque cité’ col. 2282, et d’après lesquelles il était d’usage de consulter le pontife romain, pour apprendre de lui sur le nom de qui il serait heureux que les suffrages des électeurs se réunissent. De celte coutume de solliciter l’avis du pape vivant, à la croyance que le pape pouvait choisir lui-même son successeur, il n’y avait qu’un pas. Le clergé romain ne montra donc, tout d’abord, aucune opposition à l’acte de Boniface II, qui se justifiait en apparence par les circonstances, mais qui avait cependant quel- que chose d’excessif et dépassait le but qu’on se pro- posait d’atteindre. On examina ensuite de plus près la situation. On se demanda si le remède ne serait pas pire que le mal. Pour soustraire aux influences des factions populaires l’élection des papes, ne la livrerait- on pas à d’autres influences autant et même plus né- fastes ? Si les papes prenaient l’habitude de désigner eux-mêmes leurs successeurs, n’était-il pas à craindre que des intrigants, abusant de leur vieillesse, et en- Irant dans leurs bonnes grâces pendant les dernières années de leur vie, s’imposassent à leur choix ? Le suprême ponlificat n’était-il pas oxp.isé à devenir comme le patrimoine héréditaire de quelque famille puissante qui se le transmettrait, d’oncle à neveu, pendant de nombreuses générations, au grand détri- ment des inté’réts supérieurs de l’Église .et des âmes ? Telles furent les réflexions qui portèrent Boniface II à faire une rétractation publique. Il réunit de nouveau le peuple, les sénateurs et le clergé romains. En présence de tous, il s’accusa d’avoir commis un excès, et brûla, devant l’assemblée entière, le décret déposé auparavant sur l’autel de la Confession du prince des apôtres. /’. /.., t. i :xxviii, col. 53’i ; llolder, Pie Désignation der Nachfolger durch die Pâpsle, dans Archiv fur litil/i. Kirchenrecht, 1891, p. 416 ; Ducbesne, Mélanges, t. ni, p. 260 ; Grisar, Histoire de Rome et des papes au moyen âge, 1. II, c. v, § 1. t. n, p. 51. Vigile fut pape, mais cinq ans seulement après la mort de Boniface II. Durant cet intervalle, trois autres pontifes s’assirent avant lui sur la chaire de Pierre : Jean II, saint Aga- pil et saint Silvère.

Ce cas est unique dans l’histoire : on ne le retrouve