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et au xv siècle. On a un exemple de cette législation dans la loi portée par le IVe concile de Latran en 1215, déterminant pour l'Église entière l’obligation de la confession annuelle et celle de la communion pascale. On doit citer aussi beaucoup de lois, insérées dans le Corpus juri s.

Comme àl'épo<|ue précédente, l'Église légifère souverainement sur tout ce qu’elle juge èlre de son ressort, et elle s’attribue le droit d’inlliger des peines temporelles, particulièrement aux hérétiques. Elle continue aussi à exercer quelque pouvoir sur les sociétés ebrétiennes et sur leurs cbefs temporels, selon l’enseignement de saint Thomas, affirmant que le roi, tenu de procurer le bien de la multitude selon les exigences de la fin surnaturelle, en commandant ce qui conduit à cette fin et en interdisant, autant que possible, ce qui lui est contraire, doit apprendre de l’Eglise ce qui conduit vraiment à cette fin et ce qui en éloigne. De regimine principum, l. I, c. xv.

C’est d’ailleurs ce que l’autorité ecclésiastique revendique officiellement, notamment Innocent III dans le décret Novit, Décrétâtes Greg. IX, l. I, tit. i, c. 13, et Roniface VIII dans la bulle Unam sanctam.Xoir DonifaceVIII.

Le pouvoir législatif de l’Eglise fut attlaqué au XIVe siècle par deux erreurs principales, celle des fraticelles et celle de Marcile de Padoue. Les fraticelles faisant dépendre la possession de tout pouvoir dans l'Église de la sainteté personnelle des ministres de l'Église, niaient conséquemment toute autorité au pape et aux prélats ecclésiastiques, violateurs de la pauvreté. Cette erreur fut condamnée, avec plusieurs autres, par Jean XXII, le 1 er janvier 11317. Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 485 sq. Marcile de Padoue attribuait à l’autorité séculière tout pouvoir sur le temporel de l’iiglise, Enchiridion, n. 495, et refusait à celle-ci tout pouvoir coercitif, à moins qu’elle ne l’eût obtenu par quelque concession bénévole de l’autorité séculière, n. 499. Ces erreurs furent également condamnées par Jean XXII, le 23 octobre 1327.

Au xv c siècle, Wiclelf renouvela l’erreur des fraticelles et des vaudois en faisant dépendre tout pouvoir ecclésiastique de la sainteté personnelle, Enchiridion, n. 584 ; en outre, il nia particulièrement le pouvoir qu’a l’r, glise d’excommunier, n. 591 sq. Ses erreurs furent condamnées par Martin V ', le 22 février 1418.

La défense des théologiens catholiques, surtout après le concile de Constance, porta principalement sur l’autorité du pape, dont on prouva la primauté effective sur toute l'Église, notamment le cardinal Turrccremata dans sa Summa de Ecclesia, que nous avons souvent citée.

d) Quatrième période, depuis le commencement du xv ie siècle jusqu'à l'époque actuelle, caractérisée, comme la précédente, par une législation considérable surtout depuis l’institution des Congrégations romaines, et en même temps par plusieurs erreurs manifestes contre le pouvoir de l’Eglise et par un notable développement théologique concernant surtout l’objet et le mode d’exercice de ce pouvoir. Mais pour ne point empiéter sur l’article de la primauté du pape, nous nous bornerons à quelques indications sommaires.

a. Quanta lu législation de cette époque, elle porte, comme précédemment, sur tout ce que l'Église juge être de son ressort, en rejetant comme abusive l’ingérence du pouvoir séculier en ce qui relève véritablement de l’autorité' surnaturelle. Mais on doit remarquer que, depuis plusieurs siècles, à cause du changement profond opéré dans nos sociétés modernes par la réforme protestante du XVIe siècle, l'Église s’abstient d’appliquer les pénalités temporelles précédemment portées contre les hérétiques. Pour la même raison, au moins depuis le concile de Trente, l’Eglise s’abstient

de transmettre des commandements au pouvoir séculier. Elle se borne à rappeler à ses sujets catholiques leurs devoirs impérieux dans la vie sociale. C’est notamment l’attitude prise par Léon XIII dans plusieurs de ses encycliques. C’est aussi l’attitude de Pie X, comme nous aurons bientôt l’occasion de le montrer, en étudiant les devoirs des fidèles envers l'Église.

b. Indication des principales erreurs niantou diminuant ce pouvoir législatif de l’Eglise ainsi que des documents ecclésiastiques qui les condamnent. — Au commencement du xvie siècle, Luther, s’appuyant sur sa fausse théorie de la justification par la foi seule niait, pour l’homme ainsi justifié, toute obligation d’un commandement quelconque. Son erreur fut réprouvée par Léon X condamnant, le 15 juin 1520, cette proposition 27e du chef de la réforme : Certum estinnxanu E -clesiæ aul papae prorsus non esse statuere arliculos fidei, imo nec leges morum scu bonorum operuni, Denzinger-Bannvart, Enchiridion, n. 27, et par le concile de Trente portant anathème contre ceux qui disent que l’homme justifié n’est pas tenu à l’observation des commandements de Dieu et de l'Église, mais seulement à croire. Sess. VI, can. 20. Un peu plus tard, les théologiens gallicans affirmant que le pouvoir de l'Église est restreint aux seules choses spirituelles, et que le domaine des choses temporelles appartient entièrement au pouvoir séculier, cette erreur, avec plusieurs autres, fut formellement condamnée, le 4 août 1690, par Alexandre VIII ; condamnation souvent renouvelée dans la suite par le Saint-Siège. Cette erreur, soutenue par les théologiens régaliens d’autres pays, fut encore réprouvée par Pie VI dans la bulle Auctorem fidei du 28 août 1794, rejetant les propositions i « et 5e du conciliabule janséniste et joséphiste de Pistoie. La proposition 4 e affirmait que c’est un abus d'étendre le pouvoir de l’Eglise au delà des limites du dogme et de la morale et de l'étendre aux choses extérieures, surtout en exigeant, par la force, ce qui doit dépendre de la seule persuasion. Kl le affirmait en outre qu’il appartient encore beaucoup moins à l’Eglise d’exiger par la force extérieure que l’on se soumette à ses décrets. Pie VI déclare que cette proposition est hérétique, autant qu’elle note connue un abus l’usage que l'Église fait de son autorité, à l’exemple des apôtres, in disciplina exteriore conslituenda et sancienda. Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 1504. Quant à la proposition 5°, insinuant que l'Église n’a pas le pouvoir d’exiger la soumission à ses décrets autrement que par les moyens qui dépendenl de la persuasion, Pie VI déclare de même qu’elle conduit à un système d’ailleurs condamné comme hérétique, dans la mesure où elle signifie que l'Église n’a reçu de Dieu aucun pouvoir de commander par des lois, ou de soumettre à un jugement extérieur et de frapper de peines salutaires, les désobéissants et les rebelles, n. 1505.

Au xixe siècle, les mêmes erreurs régaliennes niant au pouvoir ecclésiastique toute autorité sur les choses temporelles, et particulièrement sur le mariage que l’on voulait placer sous la domination exclusive du pouvoir séculier, furent condamnées par plusieurs documents ecclésiastiques, que rappellent les propositions 24e, 68e et 69 » du Syllabus, Enchiridion, n. 1724, 176 ! S sq., par l’encyclique Arcantmi de Léon XIII du 10 février 1880, et par l’encyclique Immorttde Dei du 1 « novembre 1885.

c. L’enseignement donné par les théologiens catholiques, à l’occasion de ces diverses erreurs, soit avant les déclarations officielles du magistère ecclésiastique, comme c’est le cas pour Bellarmin et Suarez, soit après ces déclarations répétées, comme cela se produisit surtout au xixe siècle, dénote un progrès notable, comme on aura l’occasion de le constater en étudiant en détail, à cette époque, le développement