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EGLISE


considérées comme strictement obligatoires pour tous les nouveaux chrétiens, c’est que l’on veille soigneusement à leur fidèle accomplissement. Act., xv, 41 ; xvi, i.

Le pouvoir législatif préceptif ou judiciaire n’est point exercé seulement par les apôtres réunis, il l’est encore par chacun d’eux dans les Églises particulières, comme nous le montre l’exemple de saint Paul, prononçant un jugement de condamnation contre l’incestueux de Corinlhe, I Cor., v, 3 sq., sévissant contre les hérétiques Hyménée et Alexandre, I Tim., I, 20, ou réglant ce que les fidèles en général doivent observer, I Cor., xi, 34, ce que les femmes en particulier doivent observer à l'église, I Tim., ii, 9, 11, 12, ou ce que doivent être les veuves admises au service de l’Eglise. I Tim., v, 9 sq.

Enfin ce même pouvoir est encore exercé par ceux que les apôtres placent à la tête des Églises particulières, comme Tite dans l’Ile de Crète : Hujus rei gratta reliqui te Cretse, ut ea quw dosant corrigas, et constituas per civitates presbyteros sicut et disposai tibi, Tit., I, 5, ou comme Timotbée à Kphèse : Adversus presbyterum accusalioncm uoli recipere, nisi sub duobus aut tribus testibus. 1 Tim., V, 19.

Cette pratique des apôtres, si on la rapproche de l’enseignement précité de Jésus-Christ, suppose manifestement la vérité de cet enseignement ou l’institution divine d’un pouvoir législatif dans l’Eglise.

2. Enseignement traditionnel.

a) Première période depuis les temps apostoliques jusqu’au commencement du ive siècle. — a. Comme preuve de l’enseignement traditionnel des Pères et des auteurs ecclésiastiques sur ce point, il nous suffira de rappeler ici au souvenir du lecteur, les nombreux textes précédemment cités dans notre démonstration apologétique, attestant, d’une manière générale, l’autorité divinement instituée dans l'Église, ou d’une manière particulière, le pouvoir de commander auquel on doit rigoureusement se soumettre sous peine d'être exclu de la communion chrétienne. Ces témoignages sont d’ailleurs corroborés par ce fait également constant, d’après les mêmes textes, que, même en matière de discipline, en dehors de questions comprises ou laissées comme libres, tous ceux qui s’insurgent contre l’autorité légitime des successeurs des apôtres ou contre celle du pontife romain, ou qui s’associent à de semblables rébellions, sont, non moins que les insoumis au magistère doctrinal, considérés comme infidèles à Dieu et â son Christ et réputés déchus de tous leurs droits de chrétiens.

b. Le pouvoir législatif de l'Église, pendant cette période, est attesté, sinon par les lois formelles pour l'Église universelle comme dans les siècles subséquents, du moins par de très nombreuses coutumes assez uniformes, considérées comme pratiquement obligatoires, et en fait toujours dépendantes de l’autorité ecclésiastique, de laquelle elles tiennent toute leur force d’application.

Il nous suffira de mentionner ici quelques-unes de ces coutumes qui sont étudiées aux divers articles spéciaux : coutumes concernant l’administration de chacun des sacrements, notamment celles du baptême, de la pénitence et de l’eucharistie ; pratiques relatives à l’observation de certains jours d’abstinence et de jeûne, ou à l’assistance à la messe et à l’abstention des œuvres serviles aux jours de dimanche.

Ces coutumes sont facilement constatées dans les écrits que nous possédons de cette période, tels que la Didache, les lettres de saint Ignace d’Antioche, la première Apologie de saint Justin, plusieurs écrits de Tertullien et de saint Cyprien, ainsi que dans les divers recueils composés au iiie siècle ou peut-être un peu plus tard, relatant les coutumes suivies jusqu’alors dans les diverses- Églises ou dans quelque région particu lière, comme les Canons des apôtres, la Didascalie des apôtres et les Constitutions apostoliques, les Canons d’Ilippolyte, le Testanentum Jesu C/iristi, qu’il nous suffit de signaler ici, puisque leur autorité est étudiée ailleurs.

Notons aussi que les mêmes documents qui attestent ces coutumes ou pratiques, attestent aussi qu’elles dépendent de l’autorité ecclésiastique dans leur application ou détermination pratique. Ainsi pour la date de la Pâque chrétienne sous le pape saint Victor I", ce fut la décision du pape qui donna la préférence à la coutume presque universelle de célébrer la Pâque le dimanche qui suit la pâque légale des Juifs, ce qui écarta finalement la coutume contraire des Asiatiques. Pour le baptême conféré par les hérétiques, ce fut également la décision du pape saint Etienne, ultérieurement suivie de plusieurs autres décisions, qui réprouva la pratique des Eglises d’Afrique, et imposa la coutume romaine de ne point rebaptiser ceux qui avaient déjà reçu le baptême des hérétiques. De même l’autorité ecclésiastique intervint, de fait, assez fréquemment pour l’application de la discipline pénitentielle et pour la réconciliation des lapsi.

Quanta l’absence de lois formelles pour l’Eglise universelle pendant cette période, elle n’a rien qui doive surprendre, si l’on se rappelle le caractère assez restreint des communautés chrétiennes de cette époque, les obstacles de tout genre empêchant alors leur complète organisation, ainsi que l’exercice, en fait, encore peu développé de l’autorité pontificale par suite de circonstances extrinsèques peu favorables.

b) Deuxième période, depuis le commencement du IVe siècle jusqu’au commencement du m c, caractérisée surtout par l’absence de grave erreur théologique sur ce point et par une législation ecclésiastique très considérable, portée principalement dans les conciles particuliers et tendant progressivement vers l’uniformité. Nous n’avons point à détailler ici cette législation ; ce travail sera fait aux articles spéciaux comme il a été fait à l’art. Dimanche, t. iv, col. 1313 sq.

Notons seulement que cette législation ecclésiastique n’est point restreinte à ce qui est purement spirituel, mais qu’elle s'étend aussi à tout ce qui, par son caractère sacré, relève de l’autorité de l’Eglise, comme c’est le cas pour le mariage, par le fait qu’il est un sacrement, et pour les biens ecclésiastiques à cause de l’usage sacréauquel ils sont exclusivement affectés. Voir Biens

    1. ECCLÉSIASTIQUES##


ECCLÉSIASTIQUES, t. ii, col. 813 S(|.

Observons aussi que cette législation est souvent accompagnée de sanctions ou de pénalités non seulement spirituelles, mais même temporelles, infligées par l’Eglise elle-même ou demandées par elle à l’autorité séculière, comme nous l’avons précédemment noté pour l’abstention des œuvres serviles et pour l’assistance à la messe. C’est aussi ce qui a lieu pour la punition des hérétiques à partir du xiie siècle, Denzinger-Bannvvart, Enchiridlon, n. 101, comme on le montrera en étudiant l’histoire de l’Inquisition.

Il est encore à remarquer que l'Église, en vertu de sa mission divine, s’attribue à cette époque le droit de commander, non seulement aux individus, mais aussi aux sociétés et à leurs chefs temporels, autant que l’exigent les intérêts spirituels dont elle a la garde. C’est particulièrement l’enseignement de saint Grégoire VII dans sa lettre â Hériman, évêque de Metz, Registr., l. VIII, epist. xxi, P. L., t. cxlviii, col. 591, et celui de saint Bernard dans son De consideratione, I. IV, c. iii, n. 7, P. L., t. clxxxii, col. 776, et dans sa lettre cci.vi, n. 1, col. 461.

c) Troisième période, du commencement du XIIF jusqu’au commencement du xvie siècle, caractérisée surtout par une législation universelle plus complète et par plusieurs erreurs sur ce point notamment au xiv e