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ÉCRITURE SAINTE

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pour désigner les « Écritures », n’a pas tardé à être expliquée. En recommandant aux Corinlhiens de lire « les saintes Écritures », saint Clément les qualifie ta ; kXt)8eïç, : i ; 81à toû Tiv£'jfj.aToç toû ây.ov. ^ Cor., Xl.v, 2, Funk, t. i, p. 156. Il les identifie aussi aux paroles de Dieu, lbid., 1.111, 1, p. 166. Saint Théophile d’Antioche explique ce qualificatif, en rapprochant les saintes Écritures de leurs auteurs inspirés, K’ivjy.a.xàyoçiw. Ad Aiitol., II, 22, P. G., t. vi, col. 1088. Cette épithète de « sainte » continue à être appliquée ;  ! l’Ecriture entière ou à ses parties par les Pères de l’Eglise de la fin du IIe siècle et^du commencement du nr. Cf. Th. Zahn, Gesc/ncltte des Neutestamentlichen Kanons, t. i, p. 89-90.

Une autre épithète, accolée au nom d’Ecriture, est celle de « divine ». Saint Théophile d’Antioche dit : r, 8eî « Ypaç^li Ad Autol., II, 10, 18, 22, P. G., t. vi, col. 1065, 1081, 1088 ; saint Irénée : aï ôeïat ypocpac, Cont. hær., II, xxvii, 1 ; xxxv, 4, P. G., t. iiv col. 802, 842 ; Tertullien : divinse Scripluræ, De teslimonio animæ, c. v, P. L., t. 1, col. 617 ; et très souvent ; Clément d’Alexandrie et saint Hippolyte emploient constamment ce qualificatif. Conservé dans la littérature ecclésiastique, il désigne l’origine divine de l’Ecriture. Cf. Th. Zahn, op. cit., p. 90. La nature de cette origine divine sera exposée à l’article Inspiration.

Le qualificatif x-jpiaLat ou dominicx, attrihué aux Ecritures, concerne leur contenu plutôt que leur origine, etil détermine leur rapportavec leSeigneur.Iésus. Il ne distingue pas les écrits du Nouveau Testament de ceux de l’Ancien, car il est appliqué directement à ceuxci ou à la liihle entière. Saint Irénéedésigneainsi toutes les Écritures, Cont. hær., II, xxx, 6 ; xxxv, 4 ; V, xx, 2, P. G., t. iiv col. 842, 117b ; de même, Clément d’Alexandrie, Strom., VI, c. x » ; VII, c. xv, P. G., t. ix, col. 348, 529, tandis que ce dernierdonne spécialement ce nom aux écrits prophétiques, qui rendent témoignage au Seigneur. Strom., VII, c. I, col. 404. Tertullien entend les Scripluræ dominicœde la liible entière. De palienlia, c. VII, P. L., t. I, col. 1260. La Bible a huit fois le même nom dans les Actes de Saturnin et de Dativus. Huinart, Acta sincera, p. 409, 410, 415, 416. Ce nom signifie que Jésus prédit et venu est visé dans l’Ecriture entière et constitue le lien qui unit étroitement les deux Testaments. Cf. Th. Zahn, op. cit., p. 96-98.

II. L'Écriture, source de la révélation. — 1° Existence. — A l’encontre des protestants, qui trouvaient dans l'Écriture la seule règle de la foi, le concile de Trente, dans sa IVe session, a déclaré que toute vérité qui concerne le salut et le bon règlement des mœurs est contenue à la fois dans les livres écrits et dans les traditions non écrites, que pour cette raison il recevait et vénérait avec un égal sentiment de piété et un égal respect. Voir t. H, col. 1593, 1594. Le concile du Vatican, dans sa IIIe session, a confirmé le décret de Trente sur les deux sources de la révélation, en rappelant que la révélation surnaturelle est contenue dans les Écritures et dans les traditions non écrites. Ibid., col. 1604. Les Ecritures, source de la révélation divine, sont les Ecritures inspirées, voir Inspiration, reconnues et acceptées par l'Église, voir Canon des Livres saints, et non les écritures apocryphes. Voir Apocryphes. Léon XIII a rappelé cette doctrine au début de l’encyclique Providentiasimus Deus du 18 novembre 1903.

Caractires de cette source.

1. Elle n’est pas la seule source de la révélation, puisque l’Eglise en reconnaît, à roté d’elle, une seconde, les traditions divines et apostoliques. Voir Traditions. Ce point de doctrine a été défini par le concile de Trente par opposition aux réformateurs du jivie siècle, qui, à la suite des disciples d’Ockam et des nominalistes, tenaient l’Ecriture comme la source unique de a révélation et posaient le principe

de la sola Scriptura, à l’exclusion de toute autre règle de la foi et de toute autorité dogmatique. Pour Ockam, en effet, l’Ecriture doit décider en toute question discutée ; elle est seule infaillible, elle est la seule autorité indiscutable. Elle renferme tout ce qu’il est nécessaire de croire pour être sauvé. Non seulement elle est le répertoire des preuves de la doctrine chrétienne et la source des croyances de l'Église, elle est encore une loi qu’on ne peut [violer et contre laquelle les institutions existantes ne peuvent prescrire. Il ne faut pas chercher ailleurs les articles de la loi divine. Cf. F. Kropatschek, Das Schriftprinzip der lulherischen Kirche, Leipzig, 1904, t. i, p. 309 sq. Ockam cependant joignait à l'Écriture la doctrine de l'Église universelle, que les fidèles devaient recevoir et à laquelle ils étaient simplement tenus d’obéir intellectuellement et pratiquement. Les protestants rejetaient la doctrine de l'Église, si elle ne leur paraissait pas conforme à l’Ecriture, et ils faisaient celle-ci la seule et unique règle de la foi. Cf. C. Pesch, De insjiiratione sacræ Scriptursp, Fribourgen-Brisgau, 1906, p. 211-212. Le concile de Trente, sans nier que l'Écriture fût une source de la révélation, lui adjoignit une autre source, les trad.tions divines et apostoliques.

2. L’Ecriture n’est pas la première source de la révélation. Elle ne l’est ni dans l’ordre cbronolo.uique ni dans l’ordre logique. — o) La révélation divine a précédé l’Ecriture. Celle-ci n’a pas toujours existé. La connaissance de l'Écriture n’a pas été nécessaire pour connaître la révélation divine. Dieu avait parlé aux hommes et leur avait communiqué ses volontés, avant que la révélation ne fût consignée dans les Ecritures. Tertullien place même avant l'Écriture, dans l’ordre des temps, la connaissance naturelle de Dieu, à laquelle Dieu a ajouté l’Ecriture. Adversus Hermogenem, 25, P. L., t. ii col. 220, 221. Dans l'économie chrétienne, la prédication des apôtres a précédé les Écritures du Nouveau Testament, selon la remarque déjà faite par saint Irénée. Cont. hier., III, i, 1, P. G. t. iiv col. 844. Cette prédication a même précédé la présentation des Ecritures de l’Ancien Testament. Grâce à celles-ci, la catéchisation des Juifs a sans doute été plus facile, cum exScripluris habuerunt ostensiones ; mais la prédication de l’Evangile a été faite aux gentils sans les Écritures, et la foi chrétienne a existé pendant plusieurs générations, sine instruclione Scripturarum. lb’ut., IV, xxiv, 1, 2, col. 1049, 1050. On peut en conclure que la lecture de l’Ecriture n’est pas nécessaire aux fidèles, qui apprennent suffisamment par la prédication la révélation surnaturelle, contenue dans les Livres saints. — b) Dans l’ordre logique, il est nécessaire que l’autorité de l’Eglise détermine quels sont les livres qui rentrent dans le corps de l’Ecriture et qui par suite ont une pleine autorité pour établir le dogme et la morale, révélés par Dieu. Voir t. ii, col. 1595. L’unique critère décisif de l’origine et de l’autorité divine de l'Écriture es » la déclaration explicite de l’Eglise, lbid., col. 15591569. Cf. Franzelin, Tractalus de divina trad.lione et Scriptura, 3e édit., Rome, 1882, p. 256-261 ; C. Pesch, De inspiratione sacrée Scripturx, p. 579.

3. L'Écriture, comme source de la révélation, n’est pas supérieure aux traditions divinesetaposloliques, puisque les vérités, contenues dans les traditions, ne sont pas moins révélées que celles qui sont énoncées dans 1 » sainte Écriture. C’est pourquoi le concile de Trente reçoit les deux sources de la révélation, avec le même sentiment de piété et les vénère avec le même respect. Toutes deux contiennent matériellement la parole de Dieu, mais l'Écriture, en vertu de son inspiration, est formellement la parole divine, ce que ne sont pas les traditions révélées.

V. L'Écriture n’est pas non plus la source totale et complète de la révélation, puisqu’il y a, à côté d’elle,