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ECCLÉSIASTIQUE (LIVRE DE L’) — 2048

, et d’Isaïe, XL, 28, à la même occasion. Elle est donc ainsi un bien que l’on ne peut refuser à l’hébraïsme. De plus, le caractère ou la condition d’hypostase qu’elle obtient, Kccli., i ; xxvi, n’est assurée qu’autant qu’on rapproche ces deux passages de celui des Proverbes surtout, iivi 22 sq. Or, il n’est rien moins que certain que la Sagesse des Proverbes, et a fortiori celle de Job. xxviii, 12 sq., soit à tenir pour une personne faisant œuvre créatrice en même temps que.lahvé ; car cette œuvre n’est marquée, Prov., iivi 30a, que par un mot de sens très douteux :’âmôn (étais-je auprès de lui), que les versions grecque, syriaque et latine, ont lu différemment (’ommdn) avec le sens « d’architecte » (àpjj.^Çoyira ; opifex ; cuncta comportons) et que seul Aquila (Aben Ezra, Dav. Kimchi), lisant âmoûn, a bien compris dans le sens de « nourrisson », pour l’achèvement naturel de la pensée de l’auteur, qui nous représente la Sagesse « conçue » d’abord par.lahvé, 22-23 ; « enfantée » ensuite, ou « mise au monde », 24-25 ; puis donc « enfant », ou jeune nourrisson, « jouant en présence du créateur » ; assez grande et forte bientôt pour « trouver son bonheur parmi les fils de l’homme, » 30-31, en les instruisant, convoqués tous dans la maison qu’elle s’est enfin bâtie, 32 sq, ; ix, 1 sq. Cf. Frankenberg, Sprûche, Gœttingue, 1898, m loc ; Sellin, Die Spuren griechischer Philosophie im Allen Testament, Leipzig, 1905, p. 17 sq. Il n’y a donc en cet endroit des Proverbes et de Job, qu’une figure, qu’une personnification d’ordre purement littéraire de la Sagesse, toute pareille à celle de la Folie traitée un peu plus loin, dans Prov., ix, 13 sq. ; et le rapprochement avec les entités métaphysiques de l’Idée et du Démiurge de la philosophie grecque tombe de ce fait.

Ce n’est pas toutefois qu’il faille nier dans l’Ecclésiastique, en dehors du domaine de l’idée dogmatique, toute trace de l’inlluence hellénique. L’auteur vivait à une époque où les mœurs grecques s’étaient déjà implantées en Palestine ; il avait voyagé en Egypte et en Syrie probablement, où elles triomphaient particulièrement ; il avait vécu, soit dans ces contrées étrangères, soit dans sa propre patrie, avec de ces « gens riches », écouté de ces « orateurs savants », lu et admiré ces « poètes parfaits », ces « moralistes écrivains », tous hommes célèbres « des nations », dont il nous parle, xliv, 4 sq. Il est impossible que de ce commerce rien n’ait transpiré dans son œuvre. Aussi a-t-on relevé dans son style et dans sa manière de composer, dans les traits de ses convictions personnelles à l’endroit de la société telle qu’il la voyait et la jugeait, dans sa morale même, bien des rencontres frappantes avec la culture grecque et les œuvres, connues de tous les gens cultivés et avertis, qu’elle avait produites. C’est, dans les procédés littéraires : l’usage des titres de chapitre, xxii, 27 (grec) ; xxx, 1 (grec) ; 14 (grec) ; 25 (héb.) ; 33 (grec) ; xxxi, 12 (héb.) et des transitions, xlii, 25, et xliii, 1 (héb.) ; xliii, 33, et xliv, 1 (héb.) ; xliii, 5 b, et 6a (héb.) ; xi.ix, 156 (transposé), et l, 1 sq., et, en général, l’étroite liaison des pensées dans les morceaux d’une seule venue : soucis de composition étrangers jusqu’alors aux auteurs bibliques. C’est, dans ses jugements sur la société de son époque : sa misogynie, xlii, 6, 9-14 ; xxv, I2(’ulg., 19), concordant jusque dans l’expression avec celle d’Euripide, Andromaque, 943 sq. ; cf. Aristophane, Les fêtes de Cérès, 414sq., 790sq. ; sa misanthropie et son scepticisme à l’endroit de l’amitié, vi, 5sq. ; ix, 10 ; xxxvii, 1-4 (Vulg., 1-6), et de la valeur morale de l’homme, xi, 25-26 (Vulg., 29-30), lieux communs exploités par Théognis, 73sq., 643-646, 697-698, 1 151-1 152 ; Eschyle, Agamemnon, 928 ; Sophocle, Ajax, 618 ; Œdipe roi, 1528 ; Les Trachiniennes, 1 ; Euripide, Oreste, 1155-1156 ; Andromaque, 100-102 ; Les Héraclides, 865-866 ; Les Trôyennes, 509510 ; Récube, 1203, 1206 ; son épicuréisme pratique, xiv. I I sq. (grec, héb.) ; xxxi, 27 (grec, héb.), qui lui fail si naïvement apprécier les délices de la table grecque,

xxxii, 1-13 (Vulg., 1-17), et rechercher le plaisir de ce coté de la tombe, peu confiant qu’il est, avec Escbvle, Les Perses, 8M-842, et Théognis, 973 sq., 1047, 1048, à l’endroit du schéol, ou séjour des morts, xiv, 16. C’est, dans ses préceptes moraux et ses aphorismes divers, nombre de rencontres frappantes avec les mêmes auteurs, moralistes ou autres : III, 11, 13 (Vulg., 13, 15), cf. Sophocle, Antigone, 703-704, et Aristophane, La Nuées, 994 sq. ; iii, 20-26 (Vulg., 22-30), cf. Euripide. Les Bacchantes, 393 sq. ; Médée, 1224 sq. ; iv, 21, 30 (Vulg., 25, 35), cf. le même, Hippolyle, 385-386 ; iiv 11 (Vulg., 12), cf. Théognis, 155-158 ; ix, 7, 8, cf. Aristophane, Les Nuées, 996 sq. ; Hérodote, i, 8 ; xi, 14, cf. Théognis, 165-166 ; xi, 17, cf. le même, 903 sq. ; XII, 3, 7, 10-11, cf. le même, 955-956, 101 sq. ; Brunck, Gnomici poet. gr., p. 230 ; Euripide, Hippoh/te, 428-430 ; xiii, 2, (fable d’Esope) ; xiii, 21 (Vulg., 25) ! cf. Phihhnon, 42 ; xxv, 18 (Vulg., 26), cf. Hésiode, Les travaux et les jours, 701 ; xxx, 17, cf. Eschyle, Les Perses, 750, 751 ; Euripide, Les Trôyennes, 632 ; Hécttbe, 377 ; Ménandre, 296 ; Théognis, 181-182 ; xxxi, 26 (Vulg., 31), cf. Théognis, 499-502 ; xxxii, 8 (Vulg., 11, 12), cf. Aristophane, Les fêtes île Cérès, 117 (parodiant Euripide, Loïc) ; xxxviii, 21 (Vulg., 22), cf. Sophocle, Electre, 137 sq. ; Euripide, Andromaque, 1270 sq. ; Ménandre, 432 ; XL, 11 (héb.), commenté par 12 (grec), 13, cf. Euripide, Chrysippe (fragm. 839), 8 sq. ; Les Suppliantes, 532 ; Oreste, 1086 ; Les Phéniciennes, 809. D’après I. Lévi, L’Ecclésiastique, I" partie, Paris, 1898, p. xxiv sq. ; IIe partie, Paris, 1901, p. LX sq., et tous les passages cités, dans le commentaire.

IV. Enseignements historiques.

Après avoir fait, dans la seconde partie de son livre, l’éloge des œuvres de Dieu, xlii, 15 sq., l’auteur de l’Ecclésiastique passe à l’ « Éloge des pères anciens » ou patriarches, xliv, 1 sq., panégyrique des hommes célèbres d’Israël depuis la plus haute antiquité antédiluvienne (Hénoch), jusqu’au temps du grand-prêtre Simon, fils d’Onias, au commencement du IIe siècle avant notre ère, avec, entre la mention de Néhémie et celle de ce grandprêtre, un retour sur Hénoch et les non-mentionnés d’abord, Joseph, Sem, Seth, Énos, Adam, xlix, 14-16 (Vulg., 16-19). Cette Histoire sainte, rapide, poétique, nous apprend, bien que naturellement fort abrégée, quelque chose de l’histoire du peuple de Dieu pour l’époque immédiatement antérieure à sa composition, et de l’état de la « bibliothèque » sacrée en ces mêmes années.

1° A cette époque, le grand-prêtre sadokite jouait en Israël (sous le contrôle pourtant du roi syrien et moyennant tribut, Josèphe, Anl.juil., XII, iv) le rôle d’un souverain politique et religieux. — 1. A lui incombait le soin de veiller à la sécurité de Jérusalem, en fortifiant la ville et en la mettant ainsi à l’abri d’un coup de main, ou d’un siège, contre des pillards ou l’ennemi égyptien, L, 4 (héb.). Simon II, du moins, s’acquitta de cette obligation et apporta la même sollicitude à la réparation et à la fortification du temple, 1, ainsi qu’au creusement d’un réservoir, 3, dont les eaux étaient peut-être destinées au service du culte. Cf. Lettre dvristée, 8991. Il exécuta aussi d’autres ouvrages de construction dont l’objet nous échappe, 2.

2. Du temps de l’auteur, le culte offrait l’ordonnance générale et les particularités que nous trouvons consiyiiics et ordonnées au nom de Jahvé dans les livres de Moïse. Le c. l, 5 sq., nous retrace la solennité du jour des Expiations telle qu’elle est détaillée dans ces livres et qu’elle fut célébrée sous Ezéchias rétablissant le culte divin dans le temple fermé par Achaz, Il Par., xxviii, 2’t : le grand-prêtre sortant du Saint des Saints, 5 (Vulg., 6), et Lev., xvi, 2 ; offrant le sacrifice avec les vêtements et les rites prescrits, 11-12 (Vulg., 12-13), et Lev., xvi, 1 sq. ; faisant la libation sur le socle de l’autel, 15 (grec), 16 (Vulg.), et Exod., xxix, 12 (40) ;