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DUNS SCOT


l’existence : inter omnia naturse intellectualis appetibilia, aliquod essentialiler et simpliciter est supremum, loc.cit., n. 19 ; en précise la nature : supremum appetibile et volibile, est solvm illud quod cuilibel naturse intellectuali simpliciter propter se est volendum, n. 20-21 ; en indique la condition essentielle : milla >iatura intellectuahs ultimate et complète per/icitur nisi Itabendo supremum appetibile et hoc perfecte secundum modum possibilem liabendi illud. Loc. cit., n. 22-24.

Dans l’acte béa ti fi que, les deux facultés de l’âme, l’intelligence et la volonté ont, toutes deux, un rôle actif. Toutes deux atteignent immédiatement leur objet, qui est le bien suprême : immédiate tant intellectus bealificabitvr quam voluntas, quia immediatus terminus operationis utriusquepotentise est ipsum objectum, lu IV Sent., 1. IV, dist. XLIX, q. ni, n. 6, et ceci constitue la béatitude extensive. Il faut la distinguer de la béatitude intensive. Celle-ci, appelée encore béatitude de la nature, ne consiste essentiellement que dans un seul acte, quia tanluni in unica [opcrationé] est sibi simpliciter perfecte bene, ila quod nihil sibi de$it, non tanquam Itoc includal omnia perlinentiaad bene esse naturse, sed dicat complementum omnium in bene essendo. Loc. cit., n. 5. Or, cet acte est un acte de volonté. On ne saurait d’une part refuser à la volonté le pouvoir de posséder par un acte propre le bien suprême, à moins de méconnaître la vraie nature des actes de cette faculté et de prétendre que : circa objectum amahile præsens, non eliciat aliqueni actum, sed tantum habeat deleclationem passionem. Loc. cit., q. iv, n. (5. D’autre part, il est rationnel de penser que cette adbésion amoureuse et active à l’objet béatifique présent est bien l’acte par lequel la nature béatiliable atteint immediatius… et proprie… et primo le bien suprême : est assecutio prima, loquendo de primitate nerfeclionis, licet per actum intellectus sit aliqualis assecutio prior prioritate generationis, n. 5. Cette doctrine est conlirmée par les raisons nombreuses que Duns Scot invoque en faveur de la primauté de la volonté sur l’intelligence et qu’il prouve avec ampleur, In IV Sent., 1. IV, dist. XLIX, q. iv lateralis, dont les principales sont tirées de la prééminence de la charité sur la sagesse, loc. cit., n. 13-15, et de la comparaison des actes des deux facultés : la volonté commande à l’intelligence et agit avec indépendance à son égard, n. 10, 17, et l’intellection est subordonnée à la volition comme à sa fin normale et naturelle, n. 18.

C’est donc bien dans l’acte de volonté qu’il faut placer la béatitude formelle de la nature raisonnable. Cet acte n’est ni le désir qui précède la possession du bien, ni la joie qui en est la conséquence, mais l’acte même d’acquisition. Loc. cit., q. V, n. 2. On doit entendre par là un mouvement de l’âme, distinct de l’amour de concupiscence, n. 3 ; donc un amour de complaisance, par lequel iJieu est aimé propter se. Duns Scot l’appelle fruilio et le décrit ainsi en se mettant en scène : complacet mihi infnita bouitas ejus bei, eux volo acceplando et complacendo inesse omne bonum quod sibi inest. Lue. cit., n. 4. La fruition du ciel est essentiellement distincte de celle de la terre, parce qu’elle est conditionnée par la vision intuitive, essentiellement distincte de la connaissance que nous avons de Dieu en ce monde, n..">, G.

2. Caractères secondaires de lu béatitude.

A n’envisager la béatitude qu’au point de vue intensif, ni la perpétuité de l’état bienheureux, ni la sécurité absolue de l’âme bienheureuse, n’en sont des éléments essentiels, lie fait, l’état bienheureux est et sera perpétuel,

mais cela ne vient point (le la nature des opérations, des puissances OU des habitudes de l’âme bienheureuse. Seule, la volonté de Dieu est la cause de cette perpétuité. In’V Sent., 1. IV, dist. XLIX, q. vi.

De cette volonté provient encore, et par voie de conséquence, l’impeccabilité des bienheureux, qui gardent toujours la puissance du péché, mais seulement intrinsèque et éloignée. Loc. cit., n. 1-12. La perpétuité de l’état béatifique n’est donc qu’un élément de la béatitude extensive, n. 18-20, et elle surpasse tellement la valeur des mérites créés, même avec la promesse rigoureuse de Dieu, qu’il faut en chercher uniquement la raison suprême dans la justice et la bonté divine surabondante : a justilia et bonilale supereffluente, n. 21. A la même sorte de béatitude appartient donc aussi et la sécurité des bienheureux sur la perpétuité de leur bonheur, n. 22-24, et la délectation qui accompagne la fruition. In IV Sent., I. IV, dist. XLIX, q. vu.

Cet état de béatitude est la fin normale de la vie humaine. Tout homme, par un appétit primordial, qui n’est autre que l’inclination naturelle de la volonté vers sa perfection, désire le bonheur et le désire nécessairement : necessario, perpétua et summe appétit bealitudinem, et hoc in parliculari. In I V Sent., I.IV, dist. XLIX, q. x, n. 3. Duns Scot ne reconnaît pas d’autre tendance volontaire nécessitée que cette inclination naturelle. Il ne croit donc pas que la volonté, dans ses actes élicites, poursuive, sous l’empire de la nécessité, sa béatitude présente à l’esprit in universali, ainsi que l’enseigne saint Thomas. Les doctrines générales du docteur subtil sur l’activité volontaire exigent cette conclusion. D’après les principes admis, l’activité volontaire ne peut jamais être nécessitée dans ses actes élicites quoad escercilium. In IV Sent., 1. I, dist. I, q. iv ; Quodl., q. xvi. Elle peut être seulement déterminée d’une certaine manière, quoad speci/ieationem : dico quod voluntas sic delerminatur advolendum bealitudinem et ad nolendum miser iam, quod si eliciat aliqueni actum circa lixc objecta, necessarium et delerminatum clicit actum volendi respectu beatitudinis et nolendi respect u miserise, non lamen determinatur ad unum actum eliciendum vel alium. In IV Sent., 1. IV, dist. XLIX, q. x, n. 9. Et cela, grâce au pouvoir que la philosophie scotiste appelle omissio pura, et que le docteur subtil expose ainsi, après avoir affirmé qu’en règle générale la volonté tend vers la béatitude, non 7>ecessario aliqueni actum habebil], sed potest se suspendere ab o’mni aclu. Loc. cit., n. 10.

Bien que la béatitude soi ! la fin naturelle de l’homme, il est cependant impossible d’atteindre, par les seules forces de la nature, l’objet béatilique, qui n’est en fait saisi que dans la vision béatilique et l’acte d’amour surnaturel de fruition. Duns Scot est ici d’accord avec les théologiens de son temps, quoiqu’il n’admette point la valeur des raisons communément invoquées, lu IV Seul.. 1. IV, dist. XLIX. q. xi, n.. ! . 7. Il trouve que saint Thomas a trop insisté sur la disproportion qui existe entre l’intelligence humaine et l’infinité de Dieu, objet de la vision, disproportion que ne saurait détruire un habitua créé surnaturel. De là, une première thèse : natura humana e.r puris naturalibus est immediatuni susceptivuni beatitudinis, loc. cit., n. 8, dont les apparences un peu larges sont aussitôt corri natura humana non est sufficiens activa e.r j>uris naturalibus ail videndum Deum visione beala. Loc. cit., n. 9-12. Cette thèse repose sur deux raisons : naturellement Dieu n’est présent à l’intelligence créée, iu ratione objecti, nec m se. née m alio in </u<i eminentius conlinetur. Loc. cit., n. 9. La ision béatifique s’accomplit dune par une action directe de Dieu sur l’intelligence. Inutile, impossible même de recourir à une espèce intelligible. Faut-il admettre un lumen gl<>rim avec les docteurs catholiques’.’Duns Scot le pense. lu TV Seul.. I. I, dist. XVII, q. ii in ; 1. III, dist. XIV, ([. ni ; dist. XIII, q. iii, iv ; Quodl., q. XIV. A n’écouter cependant que les exigences de la raison, ce lumen