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DUNS SCOT


apparences naturelles. In IV Sent. ; Report., 1. IV, dist. XI, q. iii, n. 3-6.

Sur cette doctrine fondamentale, Duns Scot se rencontre avec les autres théologiens catholiques, mais il se montre plus difficile que la plupart d’entre eux, pour le choix des preuves qui établissent le dogme révélé. Le texte : hoc est corpus meum, pris seul, indépendamment de la tradition et de l’enseignement de l’Église, ne lui semble pas absolument démonstratif. In IV Sent., 1. IV, dist. XI, q. iii, n. 10 ; Report., 1. IV, loc. cit., n. 6. Aussi écrit-il : Igitur lenendum est quod substantiel panis desinit esse ibi virtute conversions et quod desitio est ejus conversio in corpus Christi. Et lioc principaliter teneo propter auctorilatem Ecclesise quai non errât in his quæ surit jidei. Report., 1. IV, loc. cit., n. 13.

Ce n’est pas seulement au sujet des preuves, c’est encore sur la terminologie qu’il faut employer pour exprimer le mystère, que le docteur subtil éprouve des scrupules. Faut-il appeler annihilation la disparition de la substance du pain et du vin ? Après avoir hésité dans les Commentaires d’Oxford, il se déclare nettement contre l’annihilation dans les Report. Paris. Respondeo quod in ista conversione… non est annihilatio panis. Et Itujus ratio est quia… terminas ad queni annihilationis est omninonihil, vel non ens extra genus innullo existens positivo. Sed quando pani* convertitur in corpus Christi, terminus ad quem talis conversionis est corpus Christi, quem comitatur negalio panis, quae non est simpliciter non ens et niera negalio extra gen us, sed in subjecto ut in corpore Christi, I. IV, dist. XI, q. x, n. 6.

Comment caractériser d’autre part l’action même de la transsubstantiation’.’Est-elle productiva aut adductiva ? Duns Scot embrasse ce dernier sentiment : d’une manière implicite, In IV Sent., 1. IV, dist. X, q. i, et explicitement, dist. XI, q. iii, n. 23. Il semble en faire comme le corollaire de la théorie de l’annihilation, pour laquelle il manifeste quelque préférence en cet écrit. Loc. cit., n. 14. 15. La pensée est plus voilée dans les Report. Paris., où il se prononce d’ailleurs contre l’annihilation. Rien que la Quodl. quxst., x, témoigne aussi d’un retour vers la doctrine de la transsubstantiation productive, l’école du docteur subtil a, dès l’origine, accepté et défendu la thèse de la transsubstantiation adductive.

Quoi qu’il en soit des exigences de la terminologie, la réalité est indubitable ; le terme de la transsubstantiation, c’est évidemment vi verborum, sous les espèces du pain, le corps du Christ, et sous les espèces du iivi son sang précieux. Duns Scot précise, suivant les principes de sa philosophie, le sens précis qu’il convient de donner à ces mots corps et sang. On sait qu’il admet dans l’homme, avec l’âme spirituelle, une forme inférieure, appelée forme de corporéité. In IV Sent., 1. IV, dist. XI, q. iii, n. 25-57. En conséquence, il enseigne que le terme formel, immédiat et direct de la transsubstantiation du pain est le corps du Christ composé de matière et de forme de corporéité : dico igitur quod primus terminus hujus conversionis est aliquod composilum ex maleriæt forma substantiali non intellectiva, sed aliqua forma mixti per quod corpus est in proxima dispositione ut anime tur. Report., 1. IV, dist. XI, q. iii, n. 22 ; In IV Sent., ibid., n. 57. Ce n’est pas seulement parce que l’âme ne donne que l’esse vivum et non l’esse corporeum, mais encore pour expliquer la possibilité de la consécration in triduo mortis Domini, que Duns Scot admet cette doctrine. L’âme spirituelle n’est donc avec le corps sous l’espèce du pain que per concomitantiam. Loc. cit., n. 19. Le sang, qui selon la doctrine scotiste n’est pas animé par l’âme, est simplement informé par une forme qui lui est propre. Op. cit., q. iiv n. 4. Enfin le sang ne se

trouve avec le corps sous les espèces du pain, et le corps avec le sang sous les espèces du iivi que par la même raison de concomitance. Op. cit., dist. X, q. IV, n. 14.

/>) Mode de présence. — Duns Scot fait consister la présence du Christ sous les espèces sacramentelles dans une relation extrinsèque qui appartient à la catégorie ubi. Cette relation implique un certain changement : necesse est ponere aliquam mutationem in corpore Christi acquisitivam illius præsentise novss, In IVSent., 1. IV, dist. X, q.i, n. 10, mais un changement tout extérieur el qui dès lors ne répugne point. Loc. cit., n. 11, En fait, la présence sacramentelle dépend de la présence naturelle de l’humanité du Christ dans un lieu donné. La raison cependant ne saurait, selon le docteur subtil, trouver des arguments qui démontrent rigoureusement l’impossibilité d’une présence sacramentelle antérieu .ment à la présence naturelle : on peut donc concevoir que le sacrement de l’eucharistie eût été antérieur à l’incarnation. In IV Sent., 1. IV, dist. X, q. iv, n. 4.

Sous les espèces sacramentelles, le corps du Christ possède sa quantité interne, quæ dicit ordiuem parlium in loto, mais non l’extension locale… ordinem parlium ad locum, loc. cit., q. I, n. 14-17, et cela par une particulière action de Dieu : donc non seulement parce que la quantité n’est produite que per concomitantiam. Loc. cit., n. 12-15 ; q. iii, n. 2. Ce mode très spécial d’exister sans quantité dimensive, in ordine ail locum, constitue Y ubi sac ru ment aie. Ce mode d’existence ne s’imposait cependant pas au choix de Dieu. Duns Scot admet en effet — et développe longuement à cette occasion, dist. X, q. il — qu’un même corps peut être, virtute divina, localiter seu dimensive, en plusieurs lieux. Sans aucune contradiction et indépendamment du prodige de la transsubstantiation, le corps du Christ pourrait donc être localiter au ciel et, sur terre, en loule hostie consacrée. Loc. cit., q. iii, n. 2, 7. Avec Yubi sacramentale, le corps du Christ est tout entier en chaque hostie et tout entier en chaque partie de l’hostie consacrée, même la plus petite. Quoique Duns Scot ait écrit : corpus Christi non est prxsens speciei alicui ad minus, nisi niinimo sensibili, quia nulli indivisibili est prxsens, ibid., In IV Sent., 1. IV, dist. X, q. ix, n. 3. il ne s’éloigne pas de l’opinion commune, car si petite que soit la quantité de l’espèce, elle ne saurait avoir l’indivisibilité mathématique, à laquelle il est fait évidemment allusion dans ce passage. Loc. cit., n. 2, 3.

Dans l’état sacramentel, le corps du Christ jouit des mêmes propriétés intrinsèques qu’il possède dans le ciel : ces propriétés sont absolues et aucune réalité absolue ne cesse par suite de la production d’une simple relation extrinsèque. In IV Sent., 1. IV, dist, X, q. iv, n. 10-13. C’est de ce principe que Duns Scot déduit particulièrement la présence dans le corps du Christ eucharistique des parties intégrantes, de l’âme et de la divinité, per concomitantiam. Loc. cit., n. 11, 15. De là aussi cette autre conclusion : le Christ, sou> les voiles eucharistiques, a la même activité immanente dont il jouit dans le ciel. Il y accomplit donc les mêmes opérations intellectuelles et volontaires qu’au ciel — et hoc primo inest sibi — et les mêmes actions sensitives, mais seulement concomitanter, propter identitatem sabjecti et formée. En effet, les organes externes de sensation ne sont pas dans les conditions requises pour recevoir, dans ce mystère, l’action des objets, conséquemment, nullus actus immanens partis sensitivse inest primo Christo, ut est sacramentaliler suit eucharistia. In IV Sent., 1. IV, q. v ; Report., 1. IV, q. v. Quant aux actions transitives, Duns Scot résout les différents problèmes qu’elles soulèvent, en trois propositions : a. [In eucharistia] Christus, secundum potentias corporales, non potest aliud transmulare, et cela parce qu’il est privé de ses dimensions externes, Report., 1. IV, dist. X, q. iiv n. 2 ; — b. potest agere