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DUNS SCOT

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quement à cause du mépris que ferait de ce secours surnaturel celui qui, pouvant le recevoir facilement, le négligerai ! . Luc. cit., n. 2. Les effets de la confirmation sont réellement précieux. Outre le caractère sacramentel, per (/lient constituitur honto spiritualité)- in statu militari de familia Christi, ad defendendant grattant Christi, loc. cit., n. i, et l’augmentation de la grâce sanctifiante, la confirmation donne encore des secours particuliers, grâce sacramentelle, pour confesser la foi du Clirist : gratiant roborantent ad con/i tenduni riim constantia /idem Christi. In IV Sent., 1. IV, dist. VII, q. i, n. 1.

XI. L’EUCHARISTIE. — L’eucharistie étant à la fois l’un des sacrements de la loi nouvelle et l’unique sacrifice du christianisme, c’est à ces deux aspects du même mystère que nous rapporterons les enseignements de Duns Scot.

Le sacrement.

On peut distinguer dans le sacrement de l’eucharistie, le sacrantentum, ou signe sensible, et la res sacramenti, ou présence réelle.

1. Le sacramentum.

a) Nature. — Duns Scot le définit : sacramentum corporis Christi et sanguinis, veraciter contenli sub speciebus panis et vini, posl consecralionem factam a sacerdole sub verbis certis, cum débita intentione prolatis, ex inslitatiane divina veraciter signans corpus Christi et sanguinem sub eis realiter contineri. In IV Sent., 1. IV, dist. VIII, q. i, n. 2. Un caractère très particulier distingue l’eucharistie des autres sacrements. Tous ceux-ci consistent in usu et in fteri, le sacrement et la réception du sacrement ne sont pas choses distinctes ; rien ne demeure du sacrement, cessante usu. L’eucharistie, au contraire, sacramentum est etiam ante usum. Loc. cit., n. 5.

Aussi la constitution du sacrement eucharistique diffère-t-elle un peu de celle des autres sacrements. Aucune action transitoire, ni la consécration avec ses éléments, matière et forme, ni la seule réception par le fidèle ne le constitue formellement. In IV Sent., 1. IV, dist. VIII, q. i, n. 6. En conséquence, Duns Scot place l’essence du sacrement dans la relation particulière qu’ont les espèces eucharistiques au corps et au sang du Christ qu’elles contiennent : Ipsse species visibiles sunt materia, id est proximum fundamentum relationis significationis et ipsa signi/Jcatioest ibi formate sicut in aliis sacramentis. Loc. cit., n. 7. Les paroles de la consécration n’appartiennent donc point strictement à la nature essentielle du sacrement. La dualité des espèces, espèce du pain et espèce du iivi est purement matérielle et ne détruit point l’unité spécifique du sacrement. A le prendre en toute rigueur, le corps du Christ est distinct du sang et peut être exprimé par un signe particulier, est sic aliud essentialiter a sanguine et in se potest esse aliitd signatum et per consequens potest esse hujus proprium signum. Mais on ne peut oublier cependant que, de fait, le sang est partie intégrante du corps humain. Il faut donc dire en conséquence que signum proprium corporis et signum proprium sanguinis possunt esse unum signum unilalis integritalis, non autem indivisibilitatis. In 1 V Sent., 1. IV, dist. VIII, q. i, n. 4.

Il était d’ailleurs convenable que le Christ choisit ces deux signes, l’union des deux exprimant à la perfection la fin du sacrement qui est la nourriture de l'âme : non nulril sufficienler cibus sine polu, nece converso. Loc. cit. La raison peut montrer les admirables convenances de ce sacrement, n. 3, mais la foi seule nous en révèle l’existence et les particularités, n. 2.

b) Matière et forme reguises pour la consécration. — Le pain de froment et le vin naturel sont les matières nécessaires de la consécration. In 1 V Sent., I. IV, dist. M, q. vi, vu. De cette nécessité, il n’y a pas d’autre raison que la volonté du Christ : ratio princi paliscst quia Christus talent materiam consecrandam instituit et in signum institutions tali materia consecranda usus est. Loc. cit., n. 1. Avec la plupart des scolastiques, Duns Scot pense que Jésus-Christ employa à la cène du pain azyme, mais que le pain fermenté est aussi matière valide. Loc. cit., q. vi, n. 4-6. Il admet encore que l’eau mêlée au iivi suivant le précepte de l'Église, doit se convertir en cette substance, avant de se changer au corps du Christ. Loc. cit., q. iiv n. 2.

Relativement à la forme, le docteur subtil tient pour essentiels, dans la consécration du pain, ces seuls mots : hoc est corpus nteum, In IV Sent., 1. IV, dist. VIII, q. ii n. 4 ; et, dans la consécration du iivi ces autres : hic est calix sanguinis mei. Loc. cit., q. ii, n. 6-9. Toutefois pour que les pronoms nteum et mei aient une signification exacte, il croit nécessaires les paroles du canon qui précèdent : qui pridie quant pateretur…, loc. cit., n. 4, ou autres semblables. Les paroles consécratrices ne doivent pas être prononcées quasi matérialité)- et dicta a Christo, mais bien tanquam operaliva et activa. Report., 1. IV, loc. cit., n. 8, 15.

c) Ministre. — Ces paroles n’ont de valeur opérative que dans la bouche du prêtre, seul ministre de ce sacrement, agissant comme cause instrumentale morale. In IV Sent., I. IV, dist. XIII, q. i, n. 40. Le pouvoir de consacrer est inamissiblc. Loc. cit., q. ii n. 2. Au prêtre aussi est réservé le pouvoir de dispenser le sacrement, quoique le diacre puisse en être le ministre extraordinaire. Loc. cit., n. 20. Duns Scot expose avec détail les conditions requises ex parte ministriipsius, ex parle loci et lemporis pour la licéité de l’administration de ce sacrement, In IV Sent. ; Report., 1. IV, dist. XIII, q. ii mais aucun de ces points ne mérite d'être spécialement signalé.

(/) Sujet et elfets. — Duns Scot expose de même, sans doctrines originales, les conditions requises dans le sujet qui reçoit la sainte eucharistie : dispositions du corps, dont le jeune est la plus importante, loc. cit., dist. VIII, q. ni ; dispositions de l'âme et particulièrement l'état de grâce, dist. IX. La réception sous une seule espèce ne diminue pas les effets du sacrement. Loc. cit., dist. XIII, q. ii n. 4. Ces effets sont les suivants : per se, l’augmentation de la grâce sanctifiante, loc. cit., dist. VIII, q. i, n. 5 ; per accidens, la grâce sanctifiante première, dist. IX, n. 2.

2. Res sacramenti : la présence réelle. — La présence réelle du corps et du sang de Jésus-Christ, sous les apparences ou espèces eucharistiques, est acceptée simplement par le docteur subtil, qui se contente d'étudier les questions philosophiques auxquelles elle donne naissance.

a) La transsubstantiation. — La présence réelli s’accomplitd’abord parla transsubstantiation. Duns Scot la définit : lotalis transitio substantise insubslantiant. In IV Sent., 1. IV, dist. XI, q. I, n. 2. C’est un phénomène mystérieux, dont le changement substantiel ne donne qu’une faible idée, puisque nihil commune transit ibi a termino in terminum ; … est hic tantmn transitio substantise in substantiam, sicut termini totaliter desinentis esse, in terminum… totaliter incipientem esse. Loc. cit., n. 3, 5-11.

On ne saurait trouver de contradiction dans le concept de ce prodige. Dieu seul cependant peut le réaliser. Loc. cit., n. 4. Ce pouvoir est fondé sur la dépendance absolue de la créature à l'égard de la puissance divine et il est sans limites : quodlibet potest converti in quodlibet… quia ulrumque e.rtremum in creaturis subest potentise divinæ, quantum ad totale esse et quantum ad totale non esse. Loc. cit., q. n. Itans le sacrement de l’eucharistie, toute la substance du pain est donc changée au corps et celle du vin au sang du Christ. Ces deux substances ne sont plus sous leurs