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tionem personae. In IV Sent., loc. cit., n. 9. La nature humaine peut donc être singulière sans avoir de per- sonnalité propre. La singularité seule tient à une qua- lité’ positive, est haec per aliqitod positivum. L’état na- turel d’indépendance, fond( ; sur L’incommunication actuelle et l’incommunicabilité de droit, peut être em- pêché, sans aucune répugnance, par une intervention divine : Natura Ma est in perfecta obedientia ad de- pendendum per aclionem agentis supemaluralis et quando datur talis dependentia, personatur persona- litale Ula ad quant dépende t. Quando autem non da- tur, personatur in se, ista negalione formali, et non aliquopositivo addito ullraillam enlitatem positivant quse est haec natura. Loc. cit., n. 9. C’est ce qui s’est produit dans l’incarnation du Verbe.

c) Mode d’union. — A la description sommaire de l’union liypostatique donnée plus haut, il faut ajouter quelques traits. Duns Scot insiste sur le rôle que, joue le Verbe divin dans cette union. Il n’est ni cause effi- ciente, ni cause formelle. In l V Sent., I. III, dist. I, q. i, n. 17-20. Il termine la relation extrinsèque grâce à laquelle la nature humaine subsiste par une person- nalité divine, q. II, n. 4. La personne du Père et celle de l’Esprit-Saint auraient pu terminer la nature hu- maine tout aussi bien que celle du Verbe, non point toutefois simultanément, car il semble y avoir répu- gnance à ce que trois personnes s’approprient et fassent subsister immédiatement par leurs propres subsistances personnelles une même nature. Loc. cit. Il faut noter par contre que rien ne parait s’opposer à ce que le Verbe ou toute autre personne divine s’unisse person- nellement à plusieurs natures distinctes, q. m.

Le fondement de la relation, qui formellement cons- titue l’union hypostatique, n’est autre que la nature assumée. Impossible de le placer en quelque entité absolue, accidenlelle ou substantielle, distincte de la nature elle-même, q. i, n. 12. Lntre la nature humaine et la personne du Verbe, d’ailleurs, Duns Scot rejette tout intermédiaire.

Point de médium intrinseciim ; la nature humaine entière a été prise immédiatement par le Verbe : tota natura fuit sic immédiate assumpta. In IV Sent., 1. III, dist. II, q. n, n. 5. Aucun médium quod, c’est- à-dire de partie qui, prise immédiatement, soit la rai- son de l’union de l’autre partie. Toutefois, il ne s’op- pose point à ce qu’on appelle l’âme médium quo, quia est formalis ratio hujus rtalurœ, qua hœc natura est unibilis. Loc. cit., n. 5. Quoique composée du corps et de l’âme et logiquement postérieure à ses parties, la nature humaine n’entre point dans l’union suivant cet ordre logique. La raison en est que, dans les êtres doués de l’unité per se, le tout possède une certaine réalité distincte de la réalité de chacune de ses parties ; réalité minime sans doute, dont il ne faut point faire aliquam formant quasi uerficientem tant maleriam quam formant, réalité suffisante cependant pour rendre le composé natura tota et quidditas : c’est cette nature qui entre directement dans l’union hypostatique. In IV Sent., 1. III, loc. cit., n. 7-11.

Point de médium extrinsecum. Aucune grâce pour réunir les deux extrêmes, ut médium congruitatis. La nature humaine est d’elle-même susceptible d’être unie au Verbe et l’infusion surnaturelle de la grâce suppose l’existence de l’âme qui est unie au Verbe dans l’acte même de sa création et de son infusion au corps. Loc. cit., n. 12-16. Le corps lui même a été immédiatement uni au Verbe au moment précis où il a été animé. In IV Sent., 1. III, dist. II, q. m,n. 3.

L’union hypostatique est très intime : elle appartient, d’évidence, à la catégorie des unions substantielles. Son caractère très spécial rend assez diflicile l’application régulière des théories reçues sur la logique des pré- dieu blés. Duns Scot, tout en essayant de faire au

LIICT. DE THÉOL. CATIIOL.

dogme et à la philosophie leur juste part, conclut sa- gement : Hœc praedicatto — Christus est honio —non est omnino peraccidens, quia subjectum incluait prœ- dicatum, nec est omnino per se, quia subjectum non habet per se unum conceptum per se unum. In IV Sent., 1. III, dist. VII, q. i. Si intime qu’elle soit, cette union ne paraît pas mériter le qualificatif de mu. rima omnium unionunt. Duns Scot le pense et le dit, mais sa réserve est fort modeste. Il n’envisage pas, comme on le fait ordinairement, ce sujet au point de vue de la puissance requise pour unir le fini et l’infini dans l’unité de personne. En principe, l’union lui semble devoir être d’autant plus intime que les élé- ments unis sont plus rapprochés de nature et moins distincts : l’union des trois personnes divines dans l’unité de nature en est la preuve. Parmi les unions créées, malgré quelque hésitation, à propos de l’union béatifique in actu secundo, In IV Sent., 1. III, dist. II. q. n, n. 10, c’est l’union hypostatique qu’il met au premier rang. Potest concedi niaxima imitas post unitatem Trinitatis, quia ipsa unita sunt perfectis- sima, quia unum est in/initum et alterum perfecta, subslantia in se, et ex unione ejus ad reliquum est perfectissimum per cpmniunicalionem idiomatum. lu I V Sent., 1. III, dist. VI, q. il, n. 9.

Dans l’union hypostatique, les deux natures, hu- maine et divine, ne sont point confondues. Le Christ a deux êtres essentiels, quoiqu’il ne possède qu’un être de subsistance personnelle. In l V Sent., 1. III, dist. VI, q. I, n. 2. Duns Scotajoute encore à cette doctrine com- mune de la distinction des natures. Il admet deux êtres existentiels : une existence incréée, privilège de la na- ture divine, et une existence créée, propre à la nature humaine, n. 5. Des preuves nombreuses sont apportées en faveur de ce sentiment ; elles reposent sur un même principe fondamental : la non-distinction réelle de l’essence et de l’existence. Ce principe, le docteur subtil l’admet, en elfet, de la manière la plus explicite : na- tura ex quo non est tantum in intellectu, neque in causa, sed extra causant suam, necessario habet suant propriant exi*tentiamactualem,sicul suum proprium esse quiddiiativum , In IV Sent., 1. III, dist. VI, q. i, n. 5 ; Non differt existentia a re extra suant causant nisi sala ratione. Report., 1. III, dist. VI, n. 7. Il est même permis de dire, peut-être même nécessaire, que le Christ, fruit de l’union, proprie est existais ensten- tia hujus nalurœ [assumptas]. In IV Sent., 1. III, loc. cit., n. 6-9.

La distinction des natures ne brise pas l’unité du Christ. Duns Scot, plus que d’autres, s’il est possible, l’enseigne en disant qu’en aucune manière Christus sitaliqua duo. Il ne l’est ni masculine, quia nonduae personae..., neque neutraliler, quia Christus, etsi liabeat duas naturas, non tauten est duo, quia non est verunt dicere quod Christus est natura assumpta. In IV Sent., 1. III, et Report., 1. III, dist. VI, q. n.

i/l Cause finale de l’union hypostatique. — - Pourquoi cette union mystérieuse ? Duns Scot résout ce problème, In IV Sent., 1. III, dist. VII, q. m, et Report., I. III. dist. VII, q. iv-vi. Dans les deux ouvrages la question est ainsi posée : Utrum Christus sit prœdestinatus esse filius Deil II faut noter ce détail, car il n’est pas sans importance. La cause finale de l’incarnation ne saurait être que la gloire de Dieu-Trinité, et cette gloire est le résultat de l’amour des créatures libres. Dans la variété infinie des possibles — êtres individuels, agen- cements systématisés des lois naturelles et des décrets surnaturels, avec les déterminations que devaient prendre les êtres libres, dans les diverses conbinaisons de ces lois et de ces décrets — Dieu fait choix, de toute éternité, d’un système déterminé, où Jésus-Christ a une primauté d’élection. Notre pensée se représente ainsi, non des décrets successifs de Dieu, mais les

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