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DUNS SCOT


une entité positive et une négation de perfection ultérieure. L’infinité de Dieu Le préserve de cette sorte de composition. In IV Sent., . I, loc. cil., q. n. De même il n’y a point en Dieu de composition d’essence et d’existence. Loc. cit. Cf. Report., 1. I, dist. VIII, q. n ; De primo principio, c. iii, iv. Enfin on n’y saurait trouver de composition de genre et de différence spécifique.

Ce dernier point a été, mais à tort, contesté. Duns Scot pense, comme saint Thomas, que Dieu ne saurait appartenir à un genre. Il l’enseigne expressément, lu IV Sent., 1. 1, dist. VIII, q. m ; Report., 1. I, dist. VIII, q— v, mais en maintenant l’univocité du concept d’être ! Ces deux aspects de la doctrine ne sont pas contradictoires, In IV Sent., 1. I, loc. cit., n. 16, pourvu qu’on entende l’univocité, comme l’auteur lui-même l’entend. Or, il écrit : l’unité d’être, prise dans une acception large, comme contenant le créateur et la créature, n’est pas unité de genre, mais unité d’analogie. De rerum principio, q. i, a. ci. Il se montre sans doute plus affirmatif en faveur de l’univocité en plusieurs passages de ses écrits, In IV Sent.. 1. I, dist. III, q. ji, mais il le fait par réaction contre II. de Gand qui semblait refuser tout caractère commun de représentation objective aux idées que nous avons de Dieu et de la créature. Pour sauvegarder l’identité formelle de ces idées communes et plus spécialement de l’idée d’être, il met en lumière leur communauté de signification première que l’analogie d’attribution ne respecte pas assez. Ce faisant, il n’oublie point que l’être se présente avec des modes intrinsèques différents en Dieu et dans la créature. Il affirme que cette univocité s’allie avec une certaine analogie, bref que le fini et l’infini ne sont point deux espèces du même genre, être. Malgré l’univocité de l’être, il n’y a donc en Dieu aucune composition logique. In IV Sent., I. I, dist VIII n. 16-20.

b) Immutabilité. — L’infinité, qui rend compte de la simplicité, est encore la raison première de l’immutabilité. Duns Scot, après avoir rappelé ce principe, ne demande immédiatement ses preuves qu’à la simplicité, car elles paraissent ainsi dans unjourmeilleur Cf. In IV Sent., 1.1, dist. VIII, q. v ; Quodl., q. v De rerum principio, q. m. L’immutabilité divine est absolue. Considéré en lui-même, comme ensperfætum comme causa habitualis ou comme causa aclu créaitL Dieu est soustrait à toute vicissitude de changement : non mutatur loco, forma ellempore.De rerum principio, loc. cit. Aucune créature ne peut se glorifier d’un semblable privilège. Aristote et Avicenne semblent avoir pensé le contraire, sous prétexte qu’il pouvait y avoir en dehors de Dieu des êtres nécessaires ou nécessairement créés par la première cause. Pour affermir sa thèse, Duns Scot réfute longuement ces théories lu IV Sent., 1. I, dist. VIII, q. v, n. 3-26.

c) Eternité. — De l’immutabilité parfaite, découle l’éternité. Dieu est donc éternel. Le docteur subtil ne traite pas ex professo dans les commentaires la question de l’éternité divine. On trouve les traits épars de sa doctrine sur ce sujet, Quodl., q. vi, n. 13-15 ; explication de la définition de Boèce, De rerum principio, q. xxii, n. 5, preuve de l’éternité divine.

d) Immensité. — Relativement à l’immensité, Duns Scot admet ce que la foi enseigne : Dieu est en tout Dieu est partout. In IV Sent., 1. I, et Report., 1. I, dist. XXXVII, q. i. Il y est par sa puissance, sa présence, son essence et de plus dans les âmes justes par sa grâce. In IV Sent., 1. I, dist. XIII, n. 21 ; 1. IV, dist.X, q.n, n.5. De ces modes divers, ildonne les explications reçues. II ne croit pas possible cependant que l’on puisse prouver rigoureusement, comme saint Thomas prétend le faire, Sum. iheol., I », q. V iii, a. 1 l’ubiquité de la divinité par le fait de l’action de’Dieu

dans les créatures. Rien ne démontre que l’action divine, acte de la volonté toute-puissante, exige sa présence substantielle. Ce mode de présence, considéré seul, est donc quid lantum creditum et non probatum. La présence par essence est encore une conséquence de l’infinité : quia omni rei illabitur ratione sum illimitationis, sic est in omnibus per essenliam. Report., 1. I, dist. XXXVII, q. i, n. 16.

c) Invisibilité.— Quoique en tout lieu, Dieu demeure invisible à nos yeux de chair, naturellement et surnaturellement, InlV Sent., . IV, dist. XLIX, q. xi, n. 11 ; q. xiv, n. 8 ; invisible aussi à toute intelligence laissée à ses forces naturelles. Ibid. ; Quodl., q. xiv, n. 10, 21. Sur ces points, Duns Scot pense comme les docteurs de son temps ; il n’admet pas cependant toutes leurs preuves, notamment une raison de saint Thomas. Sum. theol., I a, q. xii, a. 4. L’impuissance de la créature à la vision divine ne vient pas absolument, selon le docteur subtil, de ce que le mode d’être de Dieu dépasse infiniment le mode d’être de la nature créée. Si cela était, la vision serait impossible même avec la lumière de gloire ou toute autre habitude infuse créée, qui ne saurait faire disparaître l’irréductible distance du fini à l’infini. In IV Seul., loc. cil. Il faut donc expliquer celle impuissance parle faitque l’intelligence créée ne peut entrer en relation avec son objet, que par l’action de l’objet sur la faculté de connaissance. Or, Dieu seul, et librement, peut produire cette détermination dans la vision ; donc de soi la créature est réellement impuissante. Quodl., q. xiv, n. 10-11. En quoi consiste cette action divine ? Comporte-t elle l’infusion d’une habitude surnaturelle’ :’Duns Scot est un peu hésitant sur ces questions, mais ses hésitations sont d’ordre rationnel, d’exigences logiques, plutôt que d’ordre de croyance. Le problème reparaîtra plus loin, à propos de la béatitude col. 1934-1935.

/) Ine/fabilité. — La perfection de la nature divine la rend incompréhensible même aux esprits bienheureux : il est dune naturel qu’elle soit inefjable. Duns Scot ne s’écarte guère du sentiment commun sur ces deux poinls. Au sujet de l’ineffabilité, il attribue cependant à l’intellect créé le pouvoir d’exprimer par un nom de son invention, quoique d’une manière imparfaite, l’essence divine. In IV Sent., 1. I ; Report., 1. I, dist. XXII, q. i, n. Cette affirmation est en harmonie avec la doctrine qu’il soutient, In IV Sent., 1. 1, dist. III, q. i, ii et d’après laquelle nous avons île Dieu, non seulement une notion complexe d’attributs, mais une vraie notion quidditative, encore qu’elle soit confuse. Saint Thomas pense le contraire. Sum. theol., I a, q. XIII, a. 1. Mais avec les restrictions apportées par Duns Scot, il n’y a que peu de divergence entre les deux docteurs sur le fond même de la doctrine.

2. Attributs.

— a) Intelligence. — La première manifestation de la vie divine ad intra s’accomplit par un acte d’intelligence. Dieu possède le pouvoir de penser ; il est la pensée en acte : intellectum et intelligere. Cette double vérité, Duns Scot la prouve a posteriori, par les mêmes arguments qui démontrent l’existence de l’infini : ex primitale efficientix, emxnentise et finalitatis. Report., 1. 1, dist. XXXV, q. i. Formellement distincte de l’essence divine, comme toute propriété, l’intelligence l’est aussi de son acte. Loc. cit. Quel objet assigner à cet acte parfait d’intelligence ? Duns Scot répond : Dieu connaît d’abord son essence : elle est de sa connaissance l’objet premier et adéquat. Loc. cit., q. il. Il connaît aussi toutes les autres choses, sans exception, mais aucune créature n’est cependant par elle-même la cause, le molivuin de l’intelleclion de Dieu, ni l’objet premier de sa pensée. L’intelligence divine voit donc toute essence finie, mediante essentia in/inita, de sorte que les créatures ne sont que ternnnative objet de la connaissance du créateur. Report.,