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DUNS SCOT


qualité soit au Verbe incréé, n. 13, soit au Verbe incarné, n. 14. C’est encore sub ralione entis in/lniti que Dieu semble être l’objet formel quod des connaissances théologiques. Des principes donnés par Duns Scot, il n’est pas douteux que la révélation en soit l’objet formel quo : mais il n’est pas explicite sur ce point.

Dans la théologie, le docteur subtil ne voit que des vérités d’ordre pratique ; il ne reconnaît de caractère exclusivement spéculatif ni aux vérités nécessaires, In IV Sent., prol., q. iv, n. 31, 32, ni aux vérités contingentes, n. 37, 38. D’elles-mêmes ces connaissances tendent à faire aimer Dieu comme il doit être aimé, et cela suffit pour constituer un Itabitum practicum, ordonné à la pratique dont il définit l’acte propre : actus alterius potentiie quant intclleclus, naturaliter poslerior intellectione, natus elici conformité)’ralioni rectæ, loc. cit., n. 3, 31, 32.

La révélation.

Les vérités Ibéologiques sont puisées à la source de la révélation. La direction morale de l’homme, au moins dans l’état présent, ne saurait se passer, pour être efficace, d’une révélation surnaturelle. Duns Scot en donne cette raison : omni agenti per cognilioncm necessaria est distincta cognilio sui finis… et ontni cognoscenli, agenti propter finent, necessaria est triplex cogttitio : quomodo et qttaliter finis acquiratur ; quæ sttnl necessaria ad finent ; quod ontnia ista sufficiunt ad talent finem…, sed Itsec tria non potest viator ralione naturali cognoscere. In 1 Y Sent., prol., q. I, n. 6-8. La doctrine révélée peut être surnaturelle seulement quant à son origine, elle peut l’être aussi quant à son objet, loc. cit., n. 22. On la trouve dans l’Écriture et la tradition.

Que l’Écriture contienne la parole de Dieu, c’est un fait évident. Octo sunt vise rationabiliter convincendi, quæ surit : prsenuncialio propheltca, In IV Sent., prol., q. ii n. 3 ; Scripturarum concordia, n. 4 ; auctoritas scribentitim, n. 5 ; diligentia recipienliunt, n. 6 ; rationabilitas contentorum, n. 7 ; irralionabililas singulorttnt errorum, n. 8 ; Ecclesise stabilitas, n. 9 ; miraculorum claritas, n. 1012. A ces raisons fondamentales, Duns Scot en ajoute encore deux autres secondaires, le témoignage des auteurs païens et les miracles de conversion opérés par Dieu dans les âmes, n. 11. La sainte Écriture contient d’ailleurs tout ce qu’il est nécessaire à l’homme de connaître et quantum ad credenda et quantum ad speranda et quantum ad operanda, loc. cit., n. 11.

Toutes les vérités révélées ne sont pas cependant renfermées dans nos Livres saints. Duns Scot maintient avec beaucoup de vigueur les droits de la tradition : mulla… non sunt expressa in Evangelio et lamen Ecclesia tenet illa esse tradita certitudinaliter ab apostolis et pcriculosum esset crrare circa illa, quæ non tantuni ab apostolis descendant per scrifita, sed etiam quæ. per consueludinem universalis Ecclesise tenenda sunt. In 1 V Sent., 1. I, dist. XI, q. I, n. û.

L’interprétation de l’Écriture et le dépôt de la tradition sont confiés à l’Église.

L’Eglise.

On ne trouve dans les écrits du docteur subtil, que des traits épars et de médiocre importance sur la nature et la constitution de l’Église. 11 suffit de relever sa pensée sur l’autorité doctrinale. Cette autorité infaillible appartient, on n’en saurait douter, à la société fondée par le Christ : Ecclesia calholica est communitas maxime vera, … igitur ejus lestimonio certissime credi potest… præcipue de his quæ sunt ftdei et nwrum. Quodl., q. xiv. Elle réside en général dans le corps enseignant : circa illa quæ prsedicantur in Ecclesia contmuniler, non sunt opiniones, et si simplex potest illud apprehendere, tenetnr explicite illud credere, Report., 1. III, dist. XXV, n.6 ; elle réside d’une manière toute particulière dans

le pape, tête de l’Église, cause principale de la stabilité de ce corps répandu par toute la terre, suivant la parole du Christ : Ego rogavi pro te. Luc, xxii, 32. In IV Sent., prol., q. ii n. 9. Cette autorité s’impose aux fidèles : ex quo Ecclesia catholica declaravit hoc esse tenendum, sicut de substattlia ftdei tenendum est. In IV Sent., 1. I, dist. XI, q. i, n. 2. A noter cependant que l’autorité doctrinale se borne à déclarer explicitement et à définir des doctrines révélées qui appartenaient déjà au domaine de la foi. In IV Sent.. 1. I, dist. XI, q. i, n. 5. Diversa symbola diversis lentporibus sunt édita…, quia quando insurgebat nova hæresis, necessarium erat declarare veritatem… quæ verilas, etsi prius erat de fide, non lamen erat prias tantuni declarala, sicut tune contra errorent illorum qui eam negabant. Loc. cil.

il. DIEU. — Avec les docteurs scolastiques, Duns Scot n’admet pas que Dieu soit pour nous objet de vision. Miscel., q. v, n. 22 ; De cognitione Dei, q. i. Il faut en demander la connaissance à la foi et à la raison discursive.

Existence de Dieu.

A la raison de répondre à la question fondamentale : Dieu existe-t-il ? Duns Scot la pose d’une manière originale : Utrurn in entibus s’il aliquid aclu existens infînitum ? In 1 V Sent., . I. dist. II, q. i. Dès le premier pas sur le terrain de la théodicée, le docteur subtil met ainsi en relief la notion d’infini qui domine sa métaphysique. On ne saurait résoudre le problème posé, a priori : l’existence de Dieu n’est point, en effet, per se mita, car l’esprit de l’homme n’a en ce monde aucun concept quiilditalif direct de la divinité, n. 3-9, et l’argument de saint Anselme n’a aucune valeur. Il faut donc se contenter d’une démonstration quia, ex creatitris, n. 10. Duns Scot ne dit mot de la preuve du premier moteur, à laquelle saint Thomas donne ses préférences : ce silence s’explique par la rigueur avec laquelle il traite le principe général : tout ce qui se meut a en dehors de soi la cause de son mouvement. Cf. In IV Sent..]. I, dist. III, q.vi. Voici la marche essentielle de son argumentation : elle se développe en deux moments : il existe un prttintni ens : ce primum ens est infini. Dans la série des causes efficientes et des causes finales, ainsi que dans l’ordre de la perfection, il y a un premier terme, au de la duquel la pensée n’en peut concevoir un autre. A ces preuves que l’on rencontre d’ailleurs chez saint Thomas, Sum. t/teol., I a, q. ii, a. 3, Duns Scot imprime un cachet personnel. Saint Thomas prend matériellement les faits, invenimus in sensibilibus esse ordinent causarum, loc. cit., Duns Scot les envisage davantage sous l’angle spécial de leurs propriétés métaphysiques : quia aliqua natura est contingens, aliqua mutabilis…, aliqua est effectibilis…, ergo aliqua est effecliva. De primo principio, c. ni, n. 1. Cf. In IV Sent., 1. I, dist. II, q. n ; Report., 1. I, dist. II, q. I. Ainsi l’argument de causalité s’appuie sur la contingence, caractère essentiel des natures finies et produites, et pour se présenter sous des formes abstraites, il ne perd rien de sa valeur. Si M. Pluzanski l’avait remarqué, il n’aurait pas écrit : « La démonstration prétendue a posteriori de Duns Scot se transforme en démonstration a priori. » Essai sur la philosophie de D. Scot, p. 139. De cet argument de la causalité efficiente et des deux autres, finalité et ordre des perfections, une seule conclusion se dégage : existil primum ens. A la même nature, à la même réalité toutefois appartient cette triple primauté, De prinio principio, concl. xv ; In IV Sent., 1. I, dist. II, n. 18, 19 ; et cette nature est infinie.

L’infinitude du primum ens est démontrée par des arguments semblables à ceux qui en prouvent l’existence : causalité efficiente et finale, primauté de perfection, auxquels Duns Scot en ajoute un nouveau, tiré de la