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DROIT CANONIQUE

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traduction des canons grecs aurait eu moins d’autorité. Denys le Petit faisait précéder sa collection des cinquanle premiers canons apostoliques qu’il présente au lecteur avec prudence et la faisait suivre de la collection africaine des canons promulgués au concile de Carthage de 419. Denys donnait aussi des décrétales, mais rangées à part dans une seconde partie de son œuvre. Voir col. 448-449.

Le travail de Denys nous est parvenu dans ce qu’on appelle le Codex Hadriamis du nom du pape qui l’envoya en France en 774. C’est ce qu’on appelle aussi chez nous le Codex canon uni. La promulgation qu’en lit Cliarlemagne en 802 lui a donné dans notre pays une autorité qui n’a jamais été contestée par le pouvoir civil. Les articles organiques, art. 6, faisaient encore allusion à propos de l’appel comme d’abus aux canons reins en France et c’était à ce Codex Hadriamis réimprimé au Louvre officiellement sous Louis XIV que ce texte renvoyait, suivant le langage des juristes gallicans.

Chaque pays avait aussi ses collections particulières. Nous avons fait allusion, à propos de la collection de Denys, au concile de Carlhage de 419. Le midi de la Gaule avait aussi ses Statvla Ecclesise an tiqua, trop connus sous le nom de canons du IVe concile de Cartilage qui sont d’Arles, au temps de saint Césaire, et probablement de sa main. Voir t. ii, col. 1£051807. L’Espagne admettait, à côté des canons grecs de Vhidoriana, des canons des Gaules, des conciles espagnols et africains. Ce sont les collections espagnoles qui ont attribué lesSlahila Ecclesiseantit/ua à un concile deCarthage. Au vii l siècle, les collections espagnoles sont toutes ramenées à un type unique, la seconde Isidoriana qui suit l’ordre chronologique et qui vers la fin du VIIe siècle devient un recueil méthodique par ordre de matières. C’est jusqu’aux Décrétales le Corpus jnris de l’Église espagnole. L’autorité dont jouissait ce recueil même dans les autres pays a inspiré à Isidore Mercator l’idée de son indélicate entreprise et en a assuré le succès. En France, les collections antérieures furent éclipsées par Y lladriana, et n’eurent qu’une influence très réduite. Mentionnons enfin le Synodus Patricii qui résuma au viiie siècle la discipline irlandaise.

Une autre source documentaire du droit canonique est constituée par les Décrétales des papes et nous avons signalé, au passage, en parlant des collections de conciles, l’insertion de documents pontificaux dans les recueils dont nous venons de parler.

Signalons comme collections de décrétales le Codex carolinus, où Cliarlemagne assembla quatre-vingt-dix-neuf lettres, écrites par les papes à Charles Martel, à Pépin le Bref et à lui-même.

La collection pseudo-isidorienne, voir DÉCRÉTALES (Fausses), contient l’Isidoriana, donc des canons et des décrétales, mais mélangés de pièces apocryphes.

Viennent ensuite par ordre chronologique trente-sept collections au moins, depuis les Fausses Décrétales jusqu’au décret de Gratien.

Citons seulement les principales : Colleclio Auselmo dicala, fin du IXe siècle, l’œuvre de Béginon, libri duo de synodalibus, ele, (commencement du x c), les Capitula d’Abbon, et le décret de liurchard de Worms (commencement du xie), la collection d’Anselme de Lucques et celle du cardinal Deusdedit (de la fin du XI"). Le Décret ( ?) et la Panormie d’Yves de Chartres du commencement du xii e.

Voir pour la suite les articles GRATIEN (DÉCRET DE) et DÉCRÉTALES. Les canons du concile de Trente et du concile du Vatican, les constitutions pontificales, recueillies surtout par les bullaires, les régula cancellaria, es décrets des Congrégations romaines constituent enfin la plus abondante des sources documentaires.

IV. Interprétation.

Il n’est pas dans notre plan

de donner une liste même très incomplète des décrétistes, décrétalistes et commentateurs qui se sont consacrés à l’interprétation des textes canoniques. Nous renvoyons à Schulte, Geschichte der Quellen undLitteratur des kanon. Redits. Nous n’entendons pas non plus donner en raccourci les règles d’interprétation qui sont d’ailleurs à peu de chose près celles du droit civil. Nous renvoyons pour cela aux décrétalistes qui traitent de cette question ex professo en commentant le dernier titre du dernier livre des Décrétales, De regulis /uri*, surtout au Sexte.

Arrêtons-nous plutôt aux documents qui servent de base à cette interprétation. Les trois principaux sont la glose, les décisions des dicastères romains et le droit civil. C’est là qu’on trouve le plus souvent les explications et les compléments nécessaires aux textes législatifs proprement dits.

La glose.

Le Corpus juris civilis avait la sienne le jour où parurent les Décrétales de Grégoire IX. La grande glose qui s’élaborait alors depuis cent ans venait de prendre sa forme définitive. Elle était, en effet, fixée par Accurce dans le premier tiers du XIIIe sièclr, et le travail de saint Raymond de Pennafort paraissait en 1234. Le Décret, texte ordinaire jusque-là des études canoniques, avait éié dès le premier jour l’objet de commentaires, la première glose suivie était rédigée moins de quinze ans après l’apparition de l’ouvrage, et on date de 1236 la glose définitive qui nous est parvenue. Les Décrétales furent glosées immédiatement. Pour les nombreux textes qui provenaient des quinque coni/>ilaliones antiquæ (voir Décrétales), le travail était déjà commencé. Quand Bernard de Parme mourut en 1266, il venait de mettre la dernière main à la glossa ordinaria. La glose du Sexte suivit de si près la publication du recueil qu’un des compilateurs collabora à la glose. Jean André donnait en 1326 la glose des Clémentines parues en 1313. Sans doute ces gloses n’ont aucune valeur législative proprement dite, mais presque contemporaines des collections, elles reflètent très fidèlement la pensée des compilateurs et des pontifes qui ont donné aux recueils force de loi et autorité exclusive dans les discussions des écoles et des tribunaux. On y trouve donc mieux que partout ailleurs la pensée du législateur et leur autorité a fini par donner force de loi, par l’intermédiaire de la coutume, à des points discutables.

2° Les dicastères de la curie romaine ont concouru aussi et concourent encore à l’interprétation, et cela de deux fæons. Ils fixent la jurisprudence et ils commentent officiellement.

La Bote surtout a rempli la première fonction et vient de reprendre son travail après un demi-siècle de silence à peu près complet. Voir Bote. Les Congrégations romaines, qui avaient remplacé la Bote dans son œuvre judiciaire, ont apporté aussi une vaste contribution à la jurisprudence. Mais elles viennent d’être ramenées par la constitution Sajiienti consilio à leur rôle primitif qui est de veiller au gouvernement de l’Église et à la bonne interprétation des lois. La Congrégation du Concile en particulier avait le droit exclusif de commenter les décrets du concile de Trente, tout commentaire de ce concile étant interdit à quiconque par la bulle Benediclus Deus de Pie IV. Toutes les Congrégations romaines dans leurs réponses à des particuliers ou dans leurs décrets de portée générale interprètent authentiquement la loi canonique. Files ne font qu’un avec le souverain pontife et ne décident rien d’important sans lui avoir soumis leur décision.

3° Enfin le droit civil prête son concours au droit canonique en de multiples circonstances pour l’interpréter ou le compléter. Nous estimons qu’il est extrêmement utile de déterminer très nettement ce que le canoniste peut demander à la législation séculière pour