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contraire, n’était pas close ; la science n’avait pas dit son dernier mot. Les trouvailles patristiques récentes, celles en particulier de la Didascalie et de la Didaché, ont infirmé les conclusions de Drey quant à la date et à l’origine des Constitutioyts apostoliques. Le mérite de lires n’en est pas amoindri ; et son livre fait ressortir l’étendue de ses connaissances historiques en même temps que son ingénieuse sagacité. — 4° Die Apologelik als wissenschaflliche Nachweisung dmGôttlichkeit <les Chris tenlhums, Mayence, lS : 18, 1847, est une œuvre de plus longue haleine ; c’est aussi le chef-d’œuvre de l’auteur ; on n’y retrouve plus la trace de l’inlluencc de Schleiermacher. Des trois volumes de l’ouvrage, le I er expose la philosophie de la révélation ; le w retrace l’histoire de la révélation et de la religion ; le in e, sous ce nom deSynibolikque Mcehler avait rendu fameux, met en relief le caractère divin de l’Eglise catholique, à laquelle aboutit et en laquelle se réalise la révélation tout entière. La solidité de la science, la pureté de l’orthodoxie, la nouveauté de la méthode psychologique méritent et ont obtenu à l’ouvrage un succès considérable.

III. Rôle.

Comme écrivain et comme professeur, Drey a exercé, en Allemagne, sur la pensée des théologiens du XIXe siècle une action puissante et salutaire. Elevé dans l’atmosphère des dernières années du siècle précédent, il s’est dégagé peu à peu, dans une ascension continue, des influences rationalistes et kantiennes qui avaient pesé sur son éducation et sur ses débuts littéraires. Il a été le chef et le premier guide de l’école catholique de Tubingue, qu’il avait concouru à fonder ; il lui a tracé son programme et ouvert la voie dans laquelle d’autres après lui marcheront d’un pas plus sûr et iront plus loin que lui ; il a préparé avec une assiduité obstinée le règne éclatant, sinon définitif, de la théologie allemande moderne, 18301860. Le réveil et le renouvellement de la science sacrée au delà du Rhin, voilà le point fixe autour duquel toute sa vie intellectuelle évoluera, l’idée directrice à laquelle se ramèneront ses leeons et ses livres ; de là relèveront en somme toutes ses initiatives. Ainsi, en face d’esprits déshabitués de la méthode scolastique et las de spéculations abstraites, Drey, jaloux de rendre à la science sacrée sa vitalité et son prestige, préconisera et appliquera, dans le ressort de la théologie, non sans un succès durable, la méthode historique. Ce serait s’abuser que de tenir Newman et Mcehler pour les deux premiers théologiens catholiques qui aient reconnu et mis en œuvre le principe ! du développement des dogmes. L’honneur d’avoir endigué l’intellectualisme, au risque d’en trop resserrer le lit, et d’avoir introduit l’idée de l’évolution dans l’étude du dogme, pour y faire mieux circuler la vie, appartient à Drey. Le premier en Allemagne, dès 1821, cinq ans avant que Dœllinger ne s’en avisât, il donnait un cours sur l’histoire du dogme et préludait aux travaux des Staudenmaier et des Kulin. En projetant les lumières de l’histoire du dogme sur les problèmes de la théologie, en en faisant par là toucher du doigt la haute importance et en la popularisant, Drey a donc été un novateur et un initiateur. Il l’a été pareillement dans le domaine de l’apologétique ; on peut presque dire qu’il a créé l’apologétique moderne, tant il a perfectionné l’œuvre de ses devanciers. La vieille apologétique, contemporaine du christianisme, s’est transformée en Allemagne, sous la main de Drey, en une science à part, distincte à la fois de la théologie proprement dite et de la polémique confessionnelle, et assise aux contins de la philosophie et de la théologie. Science nouvelle, que Drey, dès 1819, avait délimitée avec soin, dans un article de la 7 ïib. theol. Quartahchrift, et qui, pour faire ressortir la divinité’de la religion chrétienne, en appelle aux facultés et aux lumières

natives que l’âme possède en elle-même, aussi bien qu’à la révélation d’en haut. L’apologétique moderne implique donc et présuppose l’étude des rapports intimes de la foi et de la science, de la révélation et de la raison. Cette étude, Drey l’a laissée en héritage, pour ainsi parler, à l’école catholique de Tubingue ; et depuis, selon qu’il l’avait fait lui-même dans sa maturité, après les tâtonnements du début, l’école catholique de Tubingue a toujours gardé le juste milieu entre le traditionalisme et le rationalisme. C’était, en effet, la pensée fondamentale de Drey qu’il faut, sans s’inféoder à l’une ou à l’autre de ces écoles, emprunter à la fois des deux : reconnaître, d’une part, le caractère historique de la révélation avec sa transmission d’âge en âge, mais, de l’autre, maintenir fermement les droits de la raison humaine et de la philosophie.

Professeur, Drey a soutenu et répandu les mêmes doctrines par la parole comme parla plume. Renseignera pendant 40 ans avec un immense éclat. Des milliers d’étudiants accourront chaque année de toutes les parties de l’Allemagne et de la Suisse allemande au pied de sa chaire, et s’imprégneront de son esprit. Dre inspirait à ceux qui l’entendaient, une admiration presque passionnée, que le temps et la distance n’altéraient plus. La puissante parole du maître entraînait la persuasion intime des disciples, convaincus que ce qu’ils apprenaient de lui, ne pouvait pas être autrement qu’il ne le disait. Tous le vénéraient et l’aimaient.

Ilefele, dans la Tùb. tlteol. Quartalschrift, 18Ô3, t. xxxiii, p. 341-319 ; Id., Beitràge tur Kirchengeschichte, 1804, t. ii p. 135-149 ; K. Werner, Geschichle der kalli. Théologie, 2e édit., Munich et Leipzig, 1889, voir Index, p. 6.">0 ; Huiler, Nomenelator, 2° édit., Inspruck, 1895, t. iii, col. 945-946 ; art. Drey, dans Allgemeine deutsche Biographie ; (ieorgesGoyau, L’Allemagne religieuse, 1. II, c. IV.

1’. Godet. DRIEDO Jean naquit au hameau de Darisdonck, près de Turnhout, en Campine, vers 1480. On ne sait rien de sa famille, qui était sans doute de condition modeste. Son nom patronymique était non pas Driedo, mais Neys, selon la plupart de ses biographes. Suivant l’oppens, Bibliotheca belgica, t. ii, p. 630, il se serait appelé Driedoens ; mais ce dernier mot semble bien n’avoir été’lui-même qu’un surnom populaire se rattachant au lieu d’origine ci-dessus désigné. Le jeune Driedo fit, croit-on, ses humanités sous la direction de religieux du voisinage, les augustins du prieuré de Corsendonck. Il vint ensuite étudier la philosophie à Louvain, dans la pédagogie du Eaucon.Son application et ses succès furent tels qu’en 1499 il obtint la première place au concours général de la faculté des arts. Peu de temps après, nous le retrouvons, dans le même établissement, chargé d’y transmettre à d’autres les connaissances philosophiques qu’il y avait puisées. Il eut aussi à diriger, en qualité de précepteur, l’éducation du jeune prince de Croy, plus tard évoque de Tournai, et frère du célèbre Guillaume de Croy, cardinal archevêque de Tolède. C’est de cette époque que datent vraisemblablement ses relations particulières avec Adrien-Elorent Doyens, d’Utrecht. Celui qui devait devenir dans la suite pape sous le nom d’Adrien VI était alors professeur de théologie à Louvain et gouverneur des études de Charles-Quint, avec qui il habitait, aux portes de la cité universitaire, le château du Mont-César, ancienne résidence des comtes de Louvain et des ducs de Brabant. Driedo avait embrassé l’état ecclésiastique. C’est sur le conseil d’Adrien Doyens, ainsi qu’il le raconte lui-même dans la préface de son trait » — De captivilate et redemptione gener’is humani, qu’il délaissa en partie les spéculations philosophiques et scientiliques, pour se tourner davantage vers les études théologiques. Ici encore ses progrès furent rapides et remarquables, et le 17 août 15P2