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1707

DONATISME

1708

cela empêchât Donat le Grand de communiquer avec lui, de même qu’il communiqua avec les évëques donatistes de la Mauritanie qui ne pratiquaient pas la rebaptisation. Ce n'était là qu’une exception, car Donat lui-même et la plupart de ses collègues rebaptisaient ceux qui venaient à eux.

Les circoncellions.

A la faveur de ces discussions religieuses et devant l’impunité dont jouissaient désormais les donatistes, un mouvement de revendications sociales ne tarda pas à se des31ner dans les bas-fonds de la société, surtout parmi les indigènes. Le donatisme y vit une force et un puissant point d’appui. C’est ainsi qu’il « glissa d’assez bonne heure du terrain de la controverse dans celui de l’opposition politique et de la révolte ouverte. Le léger vernis théologique de la secte était moins que rien ; l’origine, les instincts, les procédés et les tendances des circoncellions le prouvent. Ce ramassis de colons, d’esclaves, de petits propriétaires, pressurés, épuisés par le fisc dont les exigences grandissaient avec les malheurs de l'époque, voyant une occasion propice pour soutenir par la violence ses revendications, n’y manqua pas. L’insurrection n’eut de religieux que l’apparence, elle fut en réalité une révolte sociale. » Leclercq, L’Afrique chrétienne, Paris, 1904, t. i, p. 346-347. Elle s’imposa par la terreur, supprimant les dettes, motestant les créanciers et les propriétaires, pillant, brûlant, assassinant, jetant partout le désordre, au point que certains donatistes eux-mêmes ne purent s’empêcher de blâmer de tels excès et de prier le comte ïaurinus de les réprimer par les armes. S. Optât, De scliism. donat., iii, 4, P. L., t. xi, col. 1008. Taurinus eut la main trop dure, au gré des donatistes, car il massacra sans pilié quelques-uns de ces perturbateurs. Aussi fut-il rangé dans la suite au nombre des persécuteurs dudonatisine. Quant à ses victimes peu intéressantes, etqui du reste n’avaient reçu que le juste châtiment de leurs crimes, elles furent considérées comme des martyrs par la plupart des donatistes qui dressèrent des autels et des édicules sur leurs tombes. S. Optai, ibid., col. 1008. On aurait tort de croire que cette répression sanglante et passagère arrêta l’essor de cette armée du désordre ; celle-ci ne fit que se recruter davantage, toujours prête à entrer en jeu, au moindre signal des donatistes, comme on en eut bientôt après la preuve. Voir Circoncellions, t. ii col. 2513-2518.

Mission de Paul et de Macaire.

En effet, en 348, l’empereur Constant envoya en Afrique Paul et Macaire pour porter des secours en argent et en nature et travailler à l’union religieuse. Mais ces deux délégués impériaux furent mal reçus par Donat de Cartbage, qui manda par écrit à ses partisans de leur fermer les portes. Pour obtempérer aux ordres de leur chef, Donat de Bagaï et Marculus ne trouvèrent rien de mieux que d’appeler les circoncellions à leur aide. Macaire demanda alors des troupes, moins pour attaquer que pour se mettre à l’abri d’un coup de main. Reçu et repoussé' les armes à la main, alors qu’il venait apporter et distribuer des secours matériels, il fut obligé de répondre à la force par la force et finit par se rendre maître de la résistance. Parmi les morts se trouvèrent Donat et Marculus, dont les donatistes firent des martyrs. Naturellement Macaire passa pour le pire des persécutenrs. S. Optât, De schism. donat., iii, 4, fi, P. L., t. xi, col. 1010, 1011. Il est vrai qu’il n’usa plus de ménagements et qu’il appliqua dans toute leur rigueur les peines jadis portées contre les donatistes. Ceux donc qui refusèrent de faire retour à l’unité furent pris et jetés en exil. De ce nombre se trouva Donat de Cartilage. La rage des donatistes, en attendant pire, se traduisit en calomnies et en imprécations contre Macaire. La paix du moins fut assurée jusqu'à l’avènement de Julien l’Apostat. Saint

Optât n’eut pas de peine, dans la suite, à disculper Macaire et à montrer que la responsabilité de sa sévère répression remontait tout entière aux donatistes euxmêmes, c’est-à-dire à leurs excès. De schism. donat., m, 7-9, P. L., t. xi, col. 1015-1020. Cf. Pallu de Lessert, Fastes des provinces africaines, Paris, 1901, t. ii p. 240-246.

4° De 348 à 313. — Cécilien de Carthage, qui avait assisté au concile de Nicée, était mort depuis peu et avait été remplacé par Gratus, qui assista au concile de Sardique et tint lui-même un concile à Carthage en 349. D’autre part, le fameux Donat mourut en exil vers 355. Avec lui disparaissait un chef habile et énergique, dont la perte était de nature, semblait-il, à briser les dernières résistances ; mais il n’en fut rien. Car, bien que maintenu dans le respect des lois et privé de ses principaux soutiens, le parti schismatique maintenait ses positions en attendant le jour de reprendre la marche en avant et de s’assurer l’hégémonie religieuse. Du reste, il remplaça Donat par un autre personnage non moins décidé et non moins batailleur, l'évêque Parménius. Survint la mort de Constance, puis l’avènement de Julien l’Apostat. Les donatistes reprirent espoir et adressèrent leurs doléances au nouvel empereur, comme à celui c< qui seul possédait la justice. » Ils savaient à qui ils parlaient. Ils le supplièrent donc de faire cesser les rigueurs de l’exil, de leur permettre de rentrer dans la possession de leurs basiliques, et de leur rendre, comme jadis sous Constantin, pleine liberté d’action. Julien, par une mesure générale, abrogea les lois d’exil et accorda aux donatistes ce qu’ils lui avaient demandé. S. Optât, De schism. donat., ii 16, /'. L., t. xi, col. 968 ; S. Augustin, Episl., iixci 12 ; cv, 9, P. L., t. xxxui, col. 327. 399 ; Cont. lilt. Petil., ii 184, 205, P. L., t. xliii, col. 315, 320. Il est fait mention de ce rescrit sollicité par les donatistes auprès de Julien dans le Code théodosien, XVI, tit. v, leg. 37. Contemporain et témoin des faits qu’il raconte, saint Optât compare le retour des donatistes au retour du diable. De schism. donat., n. 17, P. L., t. xi, col. 968. Il fut, en eflet, le signal de vengeances sans nom, de représailles sanglantes et de meurtres innombrables au milieu des ruines et du carnage. « La voilà votre Église, disait saint Optât à Parménien, De schism. donat., ii 18, P. L., t. xi, col. 971 ; elle se.désaltère et se nourrit avec le sang que ses évêques lui versent. » Plus tard, saint Augustin écrira de Julien : « Il rétablit le parti de Donat dans une liberté de perdition ; il rendit des églises à ces hérétiques en même temps qu’il rendait les temples au démon, ne croyant pas trouver de meilleur moyen, pour abolir le nom chrétien, que de détruire l’unité de l'Église qu’il avait abandonnée, et de laisser toute liberté à tous les sacrilèges qui voudraient s’en séparer. » Epis t., cv, 9, P. L., t. xxxiii, col. 399.

Parménien et saint Optai.

Parménien, successeur de Donat, crut le moment favorable de défendre son parti par la plume. Il composa donc un écrit où il établissait qu’il n’y a qu’un seul baptême et qu’une seule Église, laissant entendre, car il ne l’affirmait pas explicitement, que baptême et Eglise ne se trouvaient que dans son parti. Il y montrait également l'énormité du crime des traditeurs et des sebismatiques sans désigner toutefois nominativement les catholiques. Il y blâmait enfin les « ouvriers de l’unité », allusion à Paul et à Macaire, et reprochait aux catholiques d’avoir fait appel aux pouvoirs civils contre eux. A défaut d’un débat public ou d’une conférence contradictoire, l’ouvrage de Parménien offrait du moins l’occasion d’entrer en discussion et de s’expliquer par écrit. L'évêquede Mile ve, saint Optât, la saisit aussitôt. Au sujet du baptême, la réponse ('lait aisée par un argument ad hominem : « S’il n’est pas permis aux