Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 4.2.djvu/216

Cette page n’a pas encore été corrigée
1690
1700
DONATION


comme la remise d’une délie, la renoncialion à un droit d’usufruit (art. 621, 1282) ; —2. Les libéralités stipulées dans l’intérêt d’un tiers, comme condition d’un contrat onéreux qu’on fait pour soi-même. Ces libéralités ne sont, en effet, soumises qu’aux formalités du contrat auquel elles sont jointes. Il n’est pas nécessaire qu’elles aient été acceptées solennellement et expressément. Il suffit que le tiers ait manifesté l’intention d’en profiter (art. 1121). — 3. Les donations manuelles. — La jurisprudence admet, en effet, la validité des donations faites de la main à la main, lorsqu’elles ont pour objet des choses corporelles mobilières.

Les donations faites pour des œuvres pies ressortissent à la législation de l’Église ; si donc elles venaient à être invalidées par les tribunaux civils, elles n’en conserveraient pas moins toute leur obligation au for de la conscience chrétienne.

V. Révocation.

1° Notions générales. — Les donations entre vifs doivent être irrévocables en ce sens qu’à la différence des donations testamentaires, elles ne peuvent pas être révoquées à la volonté’du donateur. Le donateur ne peut pas se réserver le moyen de reprendre à sa volonté ce qu’il a donné, l’ne donation révocable au gré du donateur serait nulle par application de la règle : donner et retenir ne vaut.

Nonobstant ce principe de l’irrévocabilité, une donation peut être faite sous cette clause, que les biens donnés feront retour au donateur, si le donataire et ses descendants meurent avant lui. Ce droit de retour est, en effet, indépendant de la volonté du donataire (art. 951).

De l’irrévocabilité des donations découlent les conséquences suivantes : 1. On ne peut donner que des biens présents, c’est-à-dire des biens qu’on a déjà dans son patrimoine. Serait nulle la donation qui aurait pour objet des biens à venir, c’est-à-dire des biens qu’on n’a pas encore, mais qu’on aura dans la suite, parce que le donateur en acquérant ou en n’acquérant pas ces biens, suivant son caprice, pourrait à son gré révoquer la donation. Ainsi quand je vous donne, par exemple, non seulement les immeubles que j’ai actuellement, mais encore ceux que j’acquerrai par la suite, la donation, valable quant aux immeubles présents, serait nulle quant aux immeubles à venir (art. 913). —

2. « Est pareillement nulle la donation faite sous la condition d’acquitter d’autres dettes ou charges que celles qui existaient à l’époque de la donation, ou qui seraient exprimées, soit dans l’acte de la donation, soit dans l’acte qui devait y être annexé (art. 945). » — 3. La donation est également nulle en tout ou en partie, lorsque le donateur s’est réservé le droit de disposer, en tout ou en partie, des choses données (art. 944).

Révocation absolue.

Les donations peuvent être révoquées à la demande du donateur pour les trois causes suivantes : 1. inexécution des conditions ou charges de la donation ; 2. l’ingratitude du donataire ;

3. la survenance d’un enfant au donateur, lorsque celui-ci n’en avait pas encore au moment de la donation.

1. lie l’inexécution des conditions ou des charges. — Lorsqu’une charge a été imposée au donataire et que cette charge est évidemment inférieure au bénéfice qu’il a reçu, l’acte ne cesse pas pour cela d’être une donation. Mais comme une donation, par elle-même, n’a d’autre but que d’enrichir le donataire, elle ne peut pas avoir pour effet direct et immédiat d’obliger celui-ci. Néanmoins, on avait fini par admettre, en droit romain, qu’en acceptant une donation faite avec charge, le donataire avait suffisamment manifesté son intention de

s’obliger, que cette intention était suffisam ni réalisée

et que le donataire devait être tenu pour obligé. Le donateur pouvait dès lors à son choix, ou poursuivre directement l’exécution des charges, ou répéter ce qu’il

avait donné, comme s’il n’avait jamais cessé d’être propriétaire. Les art. 954 et 956 semblent avoir reproduit ces principes. La révocation de la donation pour inexécution des charges doit en principe être prononcée par les tribunaux qui peuvent accorder au donataire un délaide grâce (art. 956).

2. De l’ingratitude du donataire.

La révocation des donations pour cause d’ingratitude a été empruntée au droit romain. C’est une peine que la loi prononce contre le donataire pour le punir de son ingratitude et venger en quelque sorte le donateur.

Les faits qui constituent l’ingratitude sont limitativement déterminés par l’art. 955 : La donation entre vifs, dit cet article, ne pourra être révoquée pour cause d’ingratitude que dans les cas suivants : a) si le donataire a attenté à la vie du donateur ; b) s’il s’est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves ; c) s’il lui refuse des aliments.

Les aliments dont il est ici parlé sont calculés, non pas d’après l’entière fortune du donataire, mais eu égard aux choses données. C’est contre la personne même du donataire que s’exerce la révocation pour cause d’ingratitude ; d’où il suit qu’elle laisse subsister les droits réels que les tiers pourraient avoir acquis sur la chose donnée du chef de ce donataire (art. 958).

L’art. 957 détermine le court délai d’un an dans lequel l’action en révocation pour ingratitude doit être exercée et il règle la transmissibilité de cette action aux héritiers tant activement que passivement.

3. De la survenance d’un enfant au donateur. — Celte cause de révocation a aussi ses origines dans les lois romaines. Elle est fondée sur ce motif que si le donateur avait pu connaître véritablement et ressentir au cœur, avant la naissance de son enfant, les sentiments de l’atlection paternelle, il n’aurait pas donné. La révocation pour survenance d’enfant, à la différence des deux autres, a lieu de plein droit, il n’est pas besoin qu’elle soit demandée et obtenue en justice.

Révocation partielle.

La révocation partielle d’une donation entre vifs peut se présenter sous deux formes : la réduction et le rapport.

1. De la réduction.

Celui qui a des enfants ou des descendants, n’a pas la plénitude du droit de disposer de ses biens à titre gratuit. Il peut en disposer à titre onéreux, les vendre et les aliéner avec une pleine et entière liberté ; mais il ne peut ni les donner, ni les léguer, en totalité, à des étrangers au détriment de ses enfants ou de ses ascendants. Il y a, dans son patrimoine, une portion de biens dont il ne peut disposer à titre gratuit et que la loi réserve à ses descendants ou à ses ascendants. Cette portion indisponible, on l’appelle réserve.

La quotité disponible est, au contraire, la portion de notre patrimoine dont nous pouvons librement disposer à titre gratuit. Tous les biens, qui ne sont pas compris dans la réserve, font partie de la quotité disponible. Déterminer la réserve, c’est donc déterminer, par voie de conséquence, la quotité disponible.

La quotité disponible se détermine d’après la fortune qu’aurait laissée le de cujus (relui dont la succession est ouverte) s’il n’avait fait aucune libéralité. Pour calculer cette quotité, il faut donc augmenter le patrimoine que le de cujus laisse à son décès, de la masse des biens dont il s’est dépouillé de son vivant par des donations entre vifs. Si les libéralités faites par le défunt dépassent la quotité disponible ainsi déterminée, les réservataires ont le droit de les ramener aux limites qu’elles n’auraient pas dû franchir et de les faire réduire, en reprenant au besoin aux donataires ce qu’ils ont reçu de trop. C’est ce qu’on appelle exercer l’action en réduction.

La réduction doit laisser intactes les libéralités qui ont été faites dans les limites de la quotité disponible,