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DOMMAGE

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ils les ont employés ; il suffit que les actes dommageables du pivposi se rattachent à l’objet de son mandat, et qu’ils aient lieu à l’occasion de l’exécution de ce mandat. Mais à la différence des père et mère, des instituteurs et des artisans, les maîtres et commettants ne seraient pas admis à dégager leur responsabilité en établissant qu’ils n’ont pas pu empêcher le fait dommageable de leur domestique ou préposé. On a voulu par là les obliger à ne prendre chez eux comme domestiques ou préposés, que des hommes expérimentés, irréprochables et propres aux fonctions qu’ils leur confient (art. 1384). Ainsi mon cocher, en conduisant mal ma voiture, occasionne un accident : un passant est blessé. Je suis civilement responsable, parce que j’ai eu tort de choisir comme cocher un homme qui n’avait pas les qualités requises pour remplir cette fonction. Aussi ne pourrais-je même pas échapper à la responsabilité, que la loi m’impose, en prouvant qu’il m’a été impossible d’empêcher le fait qui a donné lieu à cette responsabilité. La loi, en effet, ne réserve pas ici la preuve contraire, comme elle le fait pour les père et mère, instituteurs et artisans (art. 1384, alinéa final).

2. Responsabilité qui incombe à une personne en raison des choses qu’elle a sous sa garde. — a) Dommage causé par un a.71imal. — Le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, est pendant que cet animal est à son usage, responsable du dommage que celui-ci a causé, soit qu’il fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé (art. 1385). Cette responsabilité est basée sur une présomption légale de faute. La faute consiste à n’avoir pas surveillé l’animal, pour l’empêcher de commettre le dégât, ou même à avoir possédé un animal dangereux, sur lequel la surveillance la plus active devait être inefficace.

La responsabilité ne pèse pas en principe sur le propriétaire d’un animal, lorsqu’il est entre les mains de quelqu’un qui en a l’usage, à titre d’usufruitier par exemple, ou de locataire, ou d’emprunteur ; car alors le soin de surveiller l’animal incombe à celui qui en a l’usage. Voilà pourquoi la loi déclare responsable le propriétaire de l’animal, ou celui qui s’en sert ; mais non pas l’un et l’autre.

b) Dommage causé par la ruine d’un bâtiment. — Aux termes de l’art. 1386 : « Le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction. » Celui qui demande la réparation du dommage que lui a causé la ruine d’un bâtiment doit prouver que cette ruine est arrivée « par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction, » car l’une ou l’autre de ces conditions est nécessaire, pour engager la responsabilité du propriétaire. Le preuve une fois faite, le propriétaire du bâtiment sera nécessairement condamné à réparer le dommage sans pouvoir se disculper en alléguant qu’il ignorait le mauvais état du bâtiment et qu’il n’a pas pu en empêcher la ruine.

Réparation du dommage résultant de l’inexécution d’une obligatioti.

1. Le créancier a le droit de demander l’exécution de l’obligation et en cas d’inexécution, la réparation du préjudice qu’il subit, c’est-àdire des dommages et intérêts.

On ne peut, en principe, exercer aucune violence physique sur la personne du débiteur pour le contraindre à exécuter l’obligation dont il est tenu. Une obligation de faire ou de ne pas faire se résout ainsi, nécessairement, en général, à des dommages et intérêts. Le plus souvent, en effet, la loi ne reconnaît pas au créancier le choix de recourir aux tribunaux et à l’intervention de la force publique, à l’effet d’obtenir le bénéfice réel et effectif de l’obligation (art. 1121).

Il n’y aurait d’exception à ces principes, que si l’obligation pouvait être utilement exécutée par un

autre que le débiteur. Dans ce cas, au lieu de condamner le débiteur récalcitrant à des dommages et intérêts, les tribunaux pourraient ordonner que l’obligation soit exécutée à ses frais.

Enfin, s’il s’agit de l’obligation de livrer un objet individuellement déterminé, ou un corps certain, le créancier pourrait être autorisé à se mettre en possession de cet objet, à l’aide de la force publique et à main armée.

L’inexécution d’une obligation peut faire subir au créancier une perle, damnum : elle peut, en outre, l’empêcher de réaliser un gain, lucrum, double préjudice dont le débiteur doit naturellement la compensation, si l’inexécution de l’obligation lui est imputable. Comment fournira-t-il cette réparation ? En payant au créancier une somme suffisante pour l’indemniser. Le créancier sera ainsi replacé dans une situation équivalente à celle où il se fût trouvé, si l’obligation avait été exécutée. Ces deux éléments de la réparation sont représentés dans l’expression dommages et intérêts (dommage, damnum, intérêts, lucrum) qui constitue ainsi presque une définition de l’indemnité dont il s’agit.

2. Conditions requises pour qu’il y ail lieu aux dommages et intérêts.

Pour qu’il y ait lieu à des dommages et intérêts, trois conditions sont requises. Il faut : a) que l’inexécution ou le retard dans l’exécution ait causé un préjudice au créancier ; b) que cette inexécution ou ce retard soit imputable au débiteur ; c) que le débiteur soit en demeure.

P° condition : il faut que l’inexécution de l’obligation ou le retard dans l’exécution ait causé un préjudice au créancier. — Sans dommage, on ne comprendrait pas une action en dommages et intérêts : le préjudice est l’élément essentiel d’une action qui est destinée à procurer la réparation d’un préjudice. Ainsi Pierre adonné mandat à un notaire, qui s’est chargé de cette commission, de faire inscrire une hypothèque pour son compte. Le notaire néglige de remplir son obligation. Pierre ne pourra de ce chef lui réclamer aucuns dommages et intérêts si l’événement démontre que son hypothèque, au cas où elle aurait été inscrite, ne serait pas venue en ordre utile.

2e condition : il faut que l’inexécution de l’obligation ou le retard dans l’exécution soit imputable au débiteur. —Car c’est seulement en ce cas qu’il peut être considéré comme étant l’auteur du préjudice subi par le créancier et que par suite il peut être tenu d’en fournir la réparation. L’inexécution de l’obligation ou le retard dans l’exécution est imputable au débiteur, lorsqu’elle est le résultat de son dol, de sa faute, ou même de son simple fait. La faute consiste dans une négligence commise sans intention de nuire. Si l’intention de nuire existe, il y a dol. Enfin il y a simple fait, quand le débiteur, sans être coupable de dol, ni même de faute, est cependant la cause du préjudice subi par le créancier.

L’imputabilité cesse, et avec elle la responsabilité civile qu’elle engendre, lorsque l’inexécution de l’obligation est le cas d’une cause étrangère, c’est-à-dire d’un cas fortuit (art. 1147 et 1148).

Le cas de force majeure ou le cas fortuit désignent tout événement qu’on ne saurait prévoir et auquel on ne saurait résister quand même il serait prévu, comme le feu du ciel, un tremblement de terre, la’grêle, la maladie, la mort, la guerre. Ce sont là des faits complètement étrangers au débiteur et dont il ne saurait être responsable. Si l’exécution de l’obligation est devenue impossible, par suite de l’un de ces faits, le débiteur est libéré : parce que à l’impossible nul n’est tenu (art. 1302). Il ne suffirait pas que le cas fortuit ait rendu l’exécution très difficile ; il faut qu’il l’ait rendue impossible.